On les faifoit auffi quelquefois de buis, de fureau, d'un fimple rofeau. Dans l'origine de la Poëfie dramatique les flutes étoient fort douces, ayant un fon grêle, tenuis. Il n'y en avoit qu'une, fimplex: elle n'avoit que peu de trous, foramine pauco. Mais enfuite on l'allongea en la terminant en vafe comme une trompette, tube amula: au lieu d'une, on en mit deux : l'une à droite, dont les fons étoient plus aigus; l'autre à gauche, dont les fons étoient plus graves: ainfi les flutes étant doublées, les trous furent doublez auffi, Pourquoi ces changemens? pas Autrefois le théâtre étoit petit, le peuple peu nombreux, fobre, par conféquent modefte & tranquille. Ainfi il n'étoit néceffaire que les flutes qui accompagnoient, euffent un fon fi perçant, Tenuis, fimplex, foramine pauco, afpirare choris erat utilis. Mais enfuite le théâtre étant devenu plus grand, les fpectateurs plus nombreux, moins fages & fouvent ivres, il fallut que les fons fuffent plus élevez & la mefure plus marquée : Acceffit numerifque modifque licentia major. Le nombre, ou ce qui eft la même chofe, le mouvement, fut plus marqué, plus brillant, c'eft numerorum licentia. Le chant fut plus hardi, plus vif, les intervalles plus éloignez, c'eft modorum licentia. C'eft ce qu'il appelle plus bas motum & luxuriam. Le luxe ajoûté à la mufique fe communiqua aux décorations théâtrales. Les perfonnages du choeur eurent des robes traînantes. Le style même du chœur tragique oublia fa premiere fimplicité. Les poëtes fe perdirent dans leur enthousiafme, & parlerent le langage des oracles. En effet rien n'eft fi difficile que les chœurs des anciens tragiques ou comiques. Ils font fi fublimes, qu'il faut prefque être devins pour les comprendre. XVII. » On allà plus loin encore. Le poëte qui jadis avoit combattu pour un » bouc (a), montra des Satyres nuds, & effaya de faire rire en confervant la دو Carmine qui tragico vilem certavit ob hircum, Mox etiam agreftes fatyros nudavit : & afper Incolumi gravitate jocum tentavit. Eo quòd (a) Celui qui avoit dif- fit bientôt paroître des Satyputé le prix du bouc, en res demi boucs. vers à l'honneur de Bacchus, gravité tragique, parce qu'il falloit retenir le charme de quelque noupar »veauté un fpectateur revenant des fa» crifices, plein de vin & incapable de se tenir dans les bornes. رو رو Cependant, quand on voudra intro» duire (a) des Satyres badins & mordans » & allier la gravité avec la plaifanterie, » il faudra prendre garde que l'acteur tragique, foit dieu, foit héros, qui fi> gure avec le Satyre, & qui un moment » auparavant étaloit l'or & la pourpre des دو وو » rois, n'entre pas tout à coup dans les boutiques (6) par un ftyle bas & igno»ble; ou que, voulant éviter la baffeffe, Illecebris erat, & grata novitate morandus (a) Commendare, ne pour roit-il pas fignifier faire figurer avec quelque chofe: mandare cum, de même qu'adhibere le fignifie? En ce fens, commendare reviendroit àpeu-près à committere. (b) Tabernas, les piéces tavernieres ou des boutiques; c'étoit du plus bas comique, il ne fe perde dans les nues. La Tragédie » ne doit jamais s'avilir. Quand elle fe » trouve avec les Satyres, elle doit être » dans le même embarras qu'une dame » de qualité qui eft obligée de danfer » dans les fêtes des dieux. » Pour moi, fi je faifois des Satyres (a), » je ne me contenterois pas de faire tenir » à ces acteurs fauvages des difcours bruf33 ques & groffiers (b). Je m'éloignerois » tellement du ton tragique, qu'il y eût » pourtant quelque différence entre le " ton de Dave, ou de l'effrontée Pithias qui excroque à Simon un talent, & Effutire leves indigna tragœdia versus. Ut feftis matrona moveri juffa diebus, Ut nihil interfit Davufne loquatur, an audax (a) Dominantia verba, c'est ce qu'on appelle nommer chaque chofe par fon nom. Les Satyres étoient groffiers, ils vomiffoient des ordures, ce qu'Horace défigne plus bas par les mots immunda ignominiofaque dicta. (b) Satyrorum fcriptor, ces Satyres dramatiques fe nommoient en latin, Satyrus, Sa yi, au lieu que les Satires telles que celles d'Horace & de Juvenal fe nommoieur Satura. رو » celui d'un Siléne ferviteur & nourri »cier de Bacchus. Je formerois mes dialogues fur le modéle du familier. Cha» cun croiroit pouvoir faire la même chofe; & s'il ofoit l'entreprendre, il fueroit long-tems & peut-être fans fuccès: tant la fuite & la liaison ont de » force pour relever ce qu'il y a de plus وو » commun. Enfin, felon moi, les Satyres, qui » fortent des forêts, ne doivent point dire » des vers trop fins, trop délicats, com» me s'ils étoient nez au milieu d'une ville, ou prefque dans le barreau. Ils » ne doivent point non plus vomir des "ordures, ni des groffieretez. Et fi la » canaille, qui fe nourrit de poix chiches » & de noix, les approuve; le fénateur, An cuftos, famulufque dei Silenus alumni. Sylvis deducti caveant, me judice, Fauni |