Obrazy na stronie
PDF
ePub

eft difficile de fe foutenir ; & s'il eft fa→ cile de s'y foutenir, il eft d'un fot encore d'y entrer avec appareil. C'étoit done un fot que cet écrivain cyclique, qui ouvroit une grande bouche en commençant fon poëme, & qui difoit : Je chante les fortunes de Priam & cette guerre fameufe. Il vaut mieux promettre moins & donner plus, que de promettre beaucoup & donner peu. Ainfi la modeftie doit regner dans tout début: modeftie dans les chofes, modeftie dans les tours, dans les chûenfin modeftie dans la maniere de

[ocr errors]

dire.

Il ne remontera pas jufqu'à la mort de Méléagre. Il a donné plus haut la maniere de commencer : Dites en commençant ce qui eft de l'inftant où la fcene s'ouvre ici il marque le lieu où il faut commencer. On peut remonter jusqu'au premier germe de l'événement, & aller jufqu'aux deux œufs que Léda eut de Jupiter métamorphofé en cigne, & d'un defquels fortit la belle Héléne, dont l'enlévement caufa la guerre de Troie. L'hiftoire peut aller jufques-là. Mais la poëfie a une autre marche. Elle fe jette tout d'un coup au milieu des chofes, elle

dit en commençant: Trois & deux font cinq, & cinq font dix.... A peine nous quittions les côtes de Sicile, lorfqu'une tempête. Le poëte emporté par le dieu qui l'infpire, fe trouve où il le met. Il oublie que fes lecteurs ne favent point ce qui précéde. S'il fe préfente quelqu'occafion où ils puiffent être inftruits, (elle ne manque pas de fe préfenter) ils croiront n'en être redevables qu'au hazard.

Il abandonne tout ce que l'art ne peut préSenter heureufement. Il n'y a point d'objet que l'art ne puiffe rendre avec fuccès. Mais il y en a beaucoup, que tel ou tel artifte ne fauroit rendre, parce que fon talent n'eft pas auffi étendu que l'art. Quand le talent fe refuse, il faut abandonner l'objet.

Dans fes menfonges il mêle tellement le vrai avec le faux, &c. Il l'a déja dit plus haut: bâtiffez, renversez, faites à votre gré; mais que les parties foient si bien d'accord qu'elles paroiffent faire un tout naturel. Quand Moliere faifoit fes piéces, il y avoit nombre de gens officieux qui lui portoient des traits réels & arrivez dans le monde. Le poëte les met

que tout paroiffoit dans le même degré de vérité. L'histoire peut entrer dans un poëme. Elle peut même en fournir toutes les chofes; comme dans l'Efther de Racine. Mais s'il y a a des irrégularitez, des endroits fecs qui ne produifent rien; il eft permis de les remplacer par des fictions qui faffent un plus bel effet. L'effentiel eft que la partie créée foit de même nature & de même couleur que le

refte.

X I I.

[ocr errors]

» Voici ce que je veux de vous, auffi» bien que le peuple : écoutez: Si vous » voulez que le fpectateur charmé attende » tous les renouvellemens de fcene (a) » & qu'il demeure affis jufqu'à ce que le » chœur dife, Battez des mains, il faut » que vous ayez foin de bien marquer » les mœurs de chaque âge. Elles chan

دو

Tu quid ego, & populus mecum defideret, audi.
Si plauforis eges aulæă manentis, & ufque
Seffuri, donec cantor, vos plaudite, dicat:
Ætatis cujufque notandi funt tibi mores:

(a) Aulaa manere, fignifie
atteindre toutes les rénova- ces à machines.
tions de fcene qui fe fai-

foient, fur-tout dans les pié

gent

gent avec les années. Il faut leur don» ner leur nuance juste.

"L'Enfant qui commence à rendre les » mots & à former des pas affurez, aime » à jouer avec fes pareils : il fe fâche » pour rien, & s'appaife de même : il » varie à chaque inftant.

» Le Jeune homme qui fe voit enfin » délivré de fon gouverneur, veut avoir » des chevaux, des chiens: il va s'exer» cer dans le champ de Mars : il prend » comme une cire les impreffions du » vice: il fe cabre contre les avis: il ne prévoit point les befoins: il prodigue » l'argent: il eft vain : il défire tout, & » un moment après il ne veut plus de ce qu'il a défiré.

رو

دو

دو

[ocr errors]

L'Age viril a d'autres mœurs. Un

Mobilibufque decor naturis dandus, & annis.
Reddere qui voces jam fcit puer, & pede certo
Signat humum, geftit paribus colludere : & iram
Colligit, ac ponit temerè : & mutatur in horas.
Imberbis juvenis, tandem cuftode remoto,
Gaudet equis, canibusque, & aprici gramine campi,
Cereus in vitium flecti, monitoribus afper,
Utilium tardus provifor, prodigus æris,

Sublimis, cupidufque & amata relinquere pernix.

Converfis ftudiis, ætas, animufque virilis

"

» homme fait songe à amaffer, à se faire des amis, à s'élever aux honneurs ; il prend garde de ne rien faire dont il "faille bientôt se repentir.

دو

» Le Vieillard eft affiégé d'une infi» nité de maux. N'y eût-il que l'avarice? » Il entaffe des biens, & le malheureux » n'ofe en jouir. Toujours timide, glacé dans tout ce qu'il entreprend, temporifeur éternel, efpérant fans fin, incapable d'entreprendre, tremblant pour » l'avenir, quinteux, plaintif; il vante le »tems paffé, lorfqu'il étoit jeune ; il prê» che, & réprimande fans ceffe ceux qui "font moins âgez que lui.

رو

"

[ocr errors]

» Les années croiffant jufqu'à un certain point apportent à l'homme plufieurs » avantages, qu'il perd enfuite à mefure

دو

Quærit opes,

& amicitias: infervit honori:

Commififfe cavet, quod mox mutare laboret.

Multa fenem circumveniunt incommoda : vel quod Quærit & inventis mifer abftinet, ac timet uti: Vel quod res omnes timidè, gelidéque miniftrat, Dilator, fpe longus, iners, pavidufque futuri, Difficilis, querulus, laudator temporis acti Se puero, cenfor, caftigatorque minorum.

Multa ferunt anni venientes commoda fecum s Multa recedentes adimunt. Ne fortè feniles

« PoprzedniaDalej »