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objet. On ne le voit point au milieu d'un raifonnement s'égarer dans des defcriptions inutiles à fon but. Il en a quelquesunes dont la matiere pourroit fe passer; mais il les place tellement, foit devant, foit après fes argumens, qu'elles fervent, ou à préparer l'efprit à ce qu'il va dire, ou à le délaffer après lui avoir fait faire des

efforts.

Quant aux poëmes qui contiennent des préceptes, Horace en a donné la regle en un mot: Quidquid præcipies, efto brevis. C'eft la brièveté qui plaît fur-tout, & qui frappe dans ce genre. Cette briéveté, quand elle eft jointe à la clarté, comme Horace le fuppofe, a plufieurs avantages: on en faifit mieux le précepte; on l'apprend plus aifément, & on le retient exactement, & pour toujours: Ut citò dicta percipiant animi dociles tene intque fideles. Cependant, comme les préceptes font fecs & triftes par eux-mêmes; le poëte qui fait l'art, y joint quelquefois la preuve, afin d'exercer l'efprit. Quelquefois il les accompagne d'un exemple qu'il place tantôt avant, tantôt après. Quelquefois il fe contente de les montrer dans l'exemple même fans les exprimer. Il les

appuie d'un trait historique, il les égaie par une allufion, les prépare par des images: enfin, quand il craint le dégoût, il quitte tout-à-fait fon genre pour quelques inftants; & il devient épique, ou dramatique, dans un degré plus ou moins élevé, felon le ton général de fon ouvrage, lequel le fuit jufques dans les excurfions qu'il fait au-dehors.

ARTICLE SE CON D.

DE LA SATIRE.

I.

Hiftoire de la Satire,

LA Satire n'a pas toujours eû le même fonds, ni la même forme dans tous les tems. Elle a été différente chez les Grecs & chez les Romains: & chez ces derniers elle a été fujete à des changemens fi finguliers, qu'il n'eft prefque pas poffible de la fuivre dans toutes fes variations.

Chez les Grecs, c'étoit un fpectacle qui tenoit une forte de milieu entre la tragédie & la comédie. Elle étoit caractérisée

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fes acteurs. Ce n'étoient ni des héros, ni des hommes, ni des dieux; mais des perfonnages tels qu'un Polypheme, un Autolycus, un Sifyphe, &c. Si on y voyoit des hommes ou des héros, ils n'y faifoient ordinairement que les feconds rôles. Il y avoit des chœurs, toujours compofez de Satyres jeunes & vieux. Ces der niers, qu'on appelloit Silènes, parloient toujours avec fageffe & gravité. C'étoit parmi eux qu'on avoit choifi le maître, le gouverneur, le nourricier de Bacchus, qui étoit le dieu du fpectacle. Les jeunes étoient faits pour égayer la fcene par des plaifanteries, des traits piquans, quelquefois par des bouffonneries & des groffieretez. Ces poëmes avoient un ton de poëfie qui leur étoit propre : & les acteurs avoient auffi leurs geftes, leur déclamation, leurs danfes, leurs parures, qui n'étoient ni celles de la tragédie, ni celles de la comédie (a). Il ne nous refte de ce

genre de drame que le Cyclope d'Euripide.

Chez les Romains, la premiere poëfie, fi elle méritoit ce nom, fut ce qu'ils ap

(a) Voyez l'Art poëtique d'Horace ci-après, vers 218. jufqu'à 248.

pellerent Satire, Satura: car nous ne parlons point des metres faturniens, qui n'étoient que de la profe terminée, ni des fefcennins, qui n'étoient que des dialogues faits avec quelque fymmétrie.

Ce furent les Tofcans qui apporterent la Satire à Rome : & elle n'étoit autre chofe alors qu'une forte de chanfon en dialogue, dont tout le mérite consistoit dans la force & la vivacité des reparties. On les nomma Satires, parce que, diton, le mot latin Satura, fignifiant un baffin dans lequel on offroit aux dieux toutes fortes de fruits à la fois, & fans les diftinguer, il parut qu'il pourroit convenir, dans le fens figuré, à des ouvrages où tout étoit mêlé, entaffé, fans ordre, fans régularité, foit pour le fonds, foit pour la forme.

Livius Andronicus, qui étoit Grec d'origine, ayant donné à Rome des spectacles en regle, la Satire changea de forme & de nom. Elle prit quelque chofe du dramatique, & paroiffant fur le théâtre, foit avant, foit après la grande piéce, quelquefois même au milieu, on l'appella ifode, piéce d'entrée, do; ou exode, piéce de fortie, židov; ou piéce

d'entr'acte, bonov. Voilà quelles furent les deux premieres formes de la Satire chez les Romains.

Elle reprit fon premier nom fous Ennius & Pacuvius, qui parurent quelque tems après Andronicus. Mais elle le reprit à caufe du mêlange des formes, qui fut très- fenfible dans Ennius; puifqu'il employoit toutes fortes de vers, fans diftinction, & fans s'embarraffer de les faire fymmétrifer entr'eux, comme on voit qu'ils fymmétrifent dans les odes d'Ho

race.

Terentius Varron, fut encore plus hardi qu'Ennius, dans la fatire qu'il intitula Menippée, à caufe de fa reffemblance avec celle de Menippe Cynique grec. Il fit un mélange de vers & de profe: & par conféquent il eut droit, plus que perfonne de nommer fon ouvrage Satire, en faifant tomber la fignification du mot fur la forme.

Enfin arriva Lucilius qui fixa l'état de la Satire, & la préfenta telle que nous l'ont donné Horace, Perfe, Juvenal, & telle que nous la connoiffons aujourd'hui. Et alors la fignification du mot Satire ne

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