AVERTISSEMENT. Dame Decade, par où j'ai commencé, j'ai tâché Ans la Préface que j'ai mise à la tête de la troi de donner une jufte idée des évenemens qui y font racontés, & des Héros qui y ont eu la principale part. A l'égard de la naissance & des premiers accroiffemens de Rome,je renvoye le: Lecteur à ce que T. Live: lui-même dit de plufieurs faits que la crédulité des premiers Romains a adoptés comme véritables, mais qui lui paroiffent fi fufpects, que, malgré le refpect qu'il a pour fes ancêtres, il laiffe à fes Lecteurs la liberté d'en croire tout ce qu'ils voudront, fans les confirmer, ni les contredire. Il eneft de même d'un nombre infini de prodiges qu'il n'a rapportés que pour ne pas déplaire à un peuple fuperftitieux, qui en faifoit une partie de fa Religion; mais dont il parle de façon à faire juger qu'il les regarde com me de vains phantômes enfantés par une imagination effraiée ou féduite,& reçus fans examen par la multitude toujours avide du merveilleux.. Il eft bon auffi d'avertir qu'il y a, dans cette premiere partie,plufieurs paffages difficiles à entendre,& un grand nombre de faits confus, qu'il n'eft pas aisé d'expliquer s femblables, comme dit notre Auteur,à ces objets qui, n'éBant apperçus que dans un grand éloignement, font.quelquefois imperceptibles aux yeux les plus pénétrans. Je me fuis fervi utilement, dans l'un & l'autre cas, des fçavantes Notes de M. CREVIER, les plus exas es, les plus folides & les plus claires qu'on ait données jufqu'ici. Car il a choisi ce qu'il y avoit de meilleur dans les Interprêtres les plus judicieux, & y a joint lui-même des réflexions qui en ont encore augmenté le mérite & le prix. Il étoit jufte qu'aiant appris de moi pendant trois années les principes & les regles d'un art qu'il enfeigne avec tant de fuccès depuis vingt ans, il me fervit à fon tour de guide dans les obfcurités de ces premiers fiécles, dans lesquelles il a jetté tout le jour qu'elles pouvoient recevoir. Au refte, au jugement des perfonnes qui ont le plus de goût, cette Décade, malgré ces défauts, eft affurément la mieux écrite de toutes celles qui nous reftent de T. Live. Et de mon côté,jai tâché de répondre dans notre langue, autant qu'il a été en moi, à la beauté de fon ftile, tant dans les penfées, que dans les expreffions. La feconde Decade,qui a été suppléée par Freinshemius, & qui contient des événemens & des guerres plus confidérables & plus intéressantes, à mesure que les Romains étendoient leur Empire, eft actuellement fous la Preffe, & contiendra deux Volumes. La quatriéme Décade, qui termine tout ce qui nous refte de T. Live, fuivra immédiatement en quatre Volumes. Et pour donner une Hiftoire complette fuivie de toute la République Romaine, je continuërai les Supplémens du même Freinshemius, jufqu'à la bataille d'Actium, qui rendit Augufte maitre de l'univers, & ôta toute efpérance à la liberté de fe réta blir à Rome. Ainfi je remplirai, à quelque chofe près, tout le deffein de Tite Live. PREFACE, HISTOIRE ROMAINE DE TITE LIVE. PREMIÈRE DECADE, Qui contient l'origine de Rome, & fes premiers progrès dans l'Italie. D PREFACE. ند ANs le deffein que j'ai d'écrire l'Hiftoire Ro-. maine, depuis fon origine, jufques à notre temps, je ne fuis je ne fuis pas affûré que le fuccès de mon travail réponde à la grandeur de mon entreprise. Quand je pourrois m'en flatter j'éviterai toujours de le dire: Je Tome I. BLUE DE LA LYON *1895 VILLE A ne me vanterai point d'avoir travaillé fur des mémoires plus certains que ceux qui m'ont précédé, ni d'avoir furpaffé, par l'élégance & la pureté de mon ftile, fa rudeffe & la groffiereté des anciens. C'est un défaut qu'on a reproché à tous ceux qui ont écrit fur des fujets que d'autres avoient déja traittés, & dans lequel je ne veux point tomber. Quoiqu'il puiffe arriver, je me ferai du moins un plaifir d'avoir contribué, autant que j'aurai pû, à perpétuer la mémoire du premier Peuple de la terre: Et fi, dans une fi grande foule d'écrivains, mon nom demeure obfcur, la gloire de ceux qui l'auront effacé me fervira de confolation. Ce qui doit encore donner à un auteur une jufte défiance de fes forces, c'eft la longueur infinie d'une Hiftoire, dans laquelle il faut remonter plus de fept cens ans, pour trouver la fource d'une Nation, qui, n'ayant |