POUR LE V• DIMANCHE APRÈS LA PENTECOTE. ÉPITRE. Saint Pierre, ch. III, v. 8. Mes très-chers frères, qu'il se trouve en vous tous une par faite union, une bonté compatissante, une amitié de frères, une affection pleine de tendresse, une douceur qui gagne les cœurs. Ne rendez point mal pour mal ni outrage pour outrage; mais au contraire bénissez ceux qui vous maudissent; sachant que c'est à cela que vous avez été appelés, afin de recevoir comme héritiers la bénédiction que Dieu vous réserve. Car si quelqu'un aime la vie, et désire d'avoir des jours heureux, qu'il empêche que sa langue ne se porte à la médisance, et que ses lèvres ne prononcent des paroles de tromperie; qu'il se détourne du mal et fasse le bien; qu'il recherche la paix, et travaille pour l'acquérir. Car le Seigneur tient ses yeux arrêtés sur les justes, et ses oreilles attentives à leurs prières; mais il regarde les méchans avec un visage plein de colère. Et qui vous fera du mal, si vous ne pensez qu'à faire du bien ? Que si néanmoins vous souffrez pour la justice, vous serez heureux. Ne craignez point les maux dont ils veulent vous donner la crainte, et n'en soyez point troublés; mais rendez gloire dans vos cœurs à la sainteté du Seigneur notre Dieu. CETTE épître renferme le précis de la morale chrétienne c'est le développement de la loi de charité que Jésus-Christ a établie, et qui est comme le ciment de l'édifice du christianisme. Voici ce que saint Pierre nous recommande : Union parfaite, bonté compatissante, amitié fraternelle, charité indulgente, accompagnée de douceur et d'humilité. Tels sont nos devoirs les uns envers les autres, et les vertus d'une société de chrétiens. Ah! si tout un peuple remplissait ces devoirs, s'il pratiquait ces vertus, quel beau spectacle il offrirait! Il n'y aurait plus de différends parmi les hommes; ils se préviendraient mutuellement; loin de chercher à se dominer, ils n'ambitionneraient qu'à se servir les uns les autres; chacun s'entr'aiderait; plus d'envie, plus de jalousie, plus d'injustice. Cet état n'est point chimérique. La religion chrétienne tend continuellement à l'établir; et quoiqu'il ait peu duré, l'Église primitive en a pourtant présenté le parfait modèle. C'est ce dont demeureront convaincus ceux qui liront l'excellent livre de M. l'abbé Fleury, intitulé Mœurs des chrétiens. Les Actes des apôtres, d'ailleurs, nous en offrent la preuve. Ils persévéraient, y est-il dit des pre-miers chrétiens, dans la doctrine de Jésus. Ceux qui croyaient étaient tous unis ensemble, et tout ce qu'ils avaient était commun, et ils le distribuaient à tous selon les besoins de chacun.... Toute la multitude de ceux qui croyaient n'avaient qu'un cœur et qu'une âme..... Il n'y avait point de pauvres parmi eux...., point de besoin auquel il ne fût pourvu, point de malheur qui ne fût soulagé, point d'affligé qui ne recût des consolations. Si nous sommes aujourd'hui bien loin de ces temps heureux, tâchons du moins de nous mettre dans des dispositions qui nous en approchent.' Ce qu'il faut surtout remarquer dans cette épître, parce que c'est en cela que consistent l'excellence du christianisme et sa supériorité sur toute autre doctrine, c'est qu'en nous ordonnant la bienfaisance, il ne la fonde pas sur les représailles. Ce n'est pas parce qu'on nous fait du bien qu'il veut que nous en fassions; c'est parce que le bien est bon à faire, et si bon à faire, que nous devons en faire même à ceux qui nous font du mal. La raison seule conduirait au même résultat, si elle n'était pas communément offusquée par les passions. Car, de ce qu'un autre est méchant et vicieux, il ne s'ensuit pas qu'on doive l'être. Il faut en conclure, au contraire, que, puisqu'il encourt notre blâme et celui des autres, nous devons nous efforcer de ne pas lui ressembler, pour ne pas être blámé à notre tour; et, rien ne nous paraissant si noble que de se venger, par du bien, du mal qu'on nous fait, il serait naturel d'aspirer à l'estime qu'une si belle conduite obtient toujours. Mais ces motifs humains seraient trop faibles, si la religion ne venait les renforcer. En nous commandant de faire du bien à ceux qui nous font du mal, elle nous en offre de plus puissans, en ce que nous faisons alors pour Dieu ce qu'autrement nous ne ferions que pour une vaine gloire ou pour notre satisfaction personnelle; et qu'en accomplissant au contraire le précepte, nous avons l'espoir d'une récompense à laquelle tous les biens de ce monde ne sont point comparables. ÉVANGILE. Saint Matthieu, ch. V, v. 20. Ex ce temps-là, Jésus dit à ses disciples: Je vous dis que, si votre justice n'est plus pleine et plus parfaite que celle des docteurs de la loi et des pharisiens, vous n'entrerez point dans le royaume du ciel. Vous avez appris qu'il a été dit aux anciens Vous ne tuerez point; et quiconque tuera méritera d'être con damné par le jugement. Mais moi je vous dis que quiconque se mettra en colère contre son frère méritera d'être condamné par le jugement; que celui qui dira à son frère, Raca, méritera d'être condamné par le conseil; et que celui qui lui dira, Vous êtes un fou, méritera d'être condamné au feu de l'enfer. Si donc, lorsque vous présentez votre don à l'autel, Vous vous souvenez que votre frère a quelque chose contre vous, laissez là votre don devant l'autel, et allez vous réconcilier auparavant avec votre frère, puis vous reviendrez offrir votre don. CET évangile est tiré de la première prédication de Jésus-Christ, intitulée sermon de la montagne. Dans cette prédication, qui eut lieu presque immédiatement après son baptême, le Sauveur posa tous les fondemens de la morale chrétienne. On peut regarder le discours qu'il tint alors à ses disciples comme un code complet de justice et de charité, comme une règle de conduite chrétienne qu'on ne saurait trop méditer, et qui surpasse en excellence ce qu'ont écrit de mieux les moralistes les plus sages de tous les temps. Les devoirs de tous les états y sont tracés, et le grand principe de la fraternité entre les hommes y brille de tout son éclat. |