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ment. Ensuite, pourquoi s'étonner qu'une relation s'ajoute à une chose qui n'a pas changé en elle-même, puisque la relation est extrinsèque? Enfin cette réalité n'est pas inutile, car elle explique les précédentes avec lesquelles il est bon de ne pas la confondre. D'ailleurs, il ne faut rien exagérer; la relation n'est qu'un mode, plus incapable que les autres modes accidentels d'exister sans son sujet. Mais si quelques auteurs pèchent par excès de subtilité, les autres ne commettent-ils pas mille confusions sous prétexte de se montrer plus clairs et plus simples, et ne se font-ils pas de la réalité multiple des choses une idée trop grossière, incapable de satisfaire des penseurs plus exacts et plus difficiles?

505. Propriétés des relations. Terminons par quelques mots sur les propriétés des relations; voici les pricipales :

10 Elles n'ont pas de contraire. C'est-à-dire qu'elles ne s'excluent pas dans le même sujet. Par exemple Ulysse peut être le fils de Laerte et le père de Télémaque.

2o Elles n'existent pas plus ou moins, elles sont incapables d'augmenter ou de diminuer par elles-mêmes : une chose, par exemple, est égale ou inégale, semblable ou dissemblable par rapport à une autre.

3o On peut les retourner, et dire par exemple : le père du fils, et le fils du père; le chef-d'œuvre de cet artiste, et l'artiste de ce chef-d'œuvre.

4o Dans les relations mutuelles, les corrélatifs sont donnés simultanément et jamais séparément par exemple il n'y a pas de père sans fils, ni de fils sans père.

5o Les corrélatifs sont connus simultanément, ils se manifestent et se définissent l'un l'autre.

CHAPITRE XXVIII

DE L'ESPACE ET DU TEMPS (1).

506. Espace et temps. Nous voici en présence de deux catégories importantes, qu'il faut comparer sans cesse l'une à l'autre pour les mieux pénétrer. Ce n'est pas certes, que l'espace et le temps aient rien de commun, ainsi que l'a cru Leibniz, qui regarde l'espace comme une coexistence: il n'y a entre eux que des analogies. Mais ces analogies sont profondes. De plus, il s'y ajoute des oppositions non moins instructives que les ressemblances.

L'espace et le temps se ressemblent en ce qu'ils sont l'un et l'autre quelque chose de continu, une quantité; ils peuvent augmenter et diminuer sans fin et se mesurent mutuellement l'espace est mesuré par le temps employé à le parcourir, et le temps par l'espace parcouru. De là cependant nulle confusion. La notion de chacun est claire, distincte, irréductible; elle n'est éclairée par l'autre que pour l'éclairer à son tour: si, par ex., l'immensité du ciel est l'image de l'immensité des siècles, l'exiguïté du temps est l'image de celle de l'étendue, et le moment présent, que nul ne peut retenir, nous fait songer au mouvement d'un point insaisissable.

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(1) Voir Nys, La nature de l'espace d'après les théories dernes, 1908; FARGES, L'idée de continu dans l'espace et le temps, 1892; Van BIEMA, L'espace et le temps chez Leibniz et chez Kant, 1908, thèse ; WARRAIN, L'espace, les modalités universelles de la quantité 1908 ; BouCHER, Essai sur l'hyperespace, le temps, la matière et l'énergie 1905; JOUFFRET, Mélanges de géométrie à quatre dimensions, 1906; LECHALAS, Etude sur l'espace et le temps, 1906.

Il y a cette opposition entre l'espace et le temps, que les parties de l'espace coexistent, tandis que celles du temps se succèdent : l'espace demeure, et le temps s'écoule. Dans l'espace, il n'y a pas de succession: si l'espace est parcouru, le temps s'y ajoute.

L'espace peut paraître avoir plus de réalité que le temps, car il existe tout entier, tandis que le présent seul existe; mais si le temps le cède sous ce rapport, il l'emporte d'une autre manière. Envisagé simplement comme succession, il échappe à la mesure de l'espace, il s'étend jusqu'à l'esprit, aux actes spirituels, et il mesure ainsi de quelque manière toute existence, sauf celle de Dieu. L'espace et le lieu, au contraire, n'affectent et ne mesurent que le corps. Mais nous devons analyser toutes ces notions, les définir autant qu'il est possible et justifier certains points de doctrine, que résume la thèse suivante : THESE. On peut définir l'espace réel, qui est le lieu universel des corps, comme la relation des dimensions de l'univers avec tout ce qu'elles renferment. Quant au temps, c'est essentiellement une succession, et, s'il s'agit du temps proprement dit, c'est une succession uniforme, c'est le nombre et la continuité dans le mouvement. On ne saurait donc confondre le temps, même infini, avec l'éternité.

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507. Le lieu, l'espace. Espace réel, imaginaire. peut concevoir le lieu comme la superficie intérieure d'un contenant par rapport à son contenu, mais considérée comme immobile et n'ayant jamais changé. Plusieurs corps peuvent se succéder dans le même lieu, mais le lieu lui-même ne change pas. Au fond, le lieu n'est qu'une détermination fixe et invariable de l'espace. Celui-ci est l'étendue qui enferme toute chose corporelle dans son sein, c'est la relation des dimensions mêmes de l'univers avec tout ce qu'elles renferment. Quant à la situation ou à la disposition, autre catégorie, qui s'ajoute à l'espace, elle n'est que l'ordre que gardent entre elles les parties d'une chose qui occupe un même lieu ou un certain espace.

On distingue l'espace réel et l'espace imaginaire. Celui ci n'existe que dans l'imagination. Mais y en a-t-il un autre? Y a-t-il un espace réel, objectif, et, s'il y en a un, en quoi consiste précisément sa réalité? Est-il vide? Est-il plein? Les questions se pressent. Avant de les résoudre, signalons les diverses opinions.

Démocrite, Leucippe,

508. Opinions sur l'espace. Epicure ont pensé que l'espace était le vide, et que celuici était comme un réceptacle universel, distinct des corps qui s'y meuvent dans toutes les directions.

Gassendi renouvela. cette opinion et regarda l'espace comme un être éternel, incréé, indépendant, sui generis, ni substantiel, ni accidentel, ayant des dimensions, mais bien différentes de celles des corps.

Contrairement à Démocrite, Platon et Aristote avaient enseigné que l'espace est plein. Platon ne distingua même pas l'espace d'avec la matière. Aristote, plus subtil, dit que l'espace est la superficie du dernier ciel, qui enveloppe toutes choses, si bien que l'espace serait une sphère immense englobant tous les corps.

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Descartes pensa que l'espace ne faisait qu'un avec les corps et que l'essence de ceux-ci était dans l'étendue. C'était confondre trois choses distinctes les corps, leur quantité ou leurs dimensions, et l'espace. Il pensa non seulement que la nature a horreur du vide, mais encore que le vide répugne, et par conséquent que tout est plein et que l'espace réel est infini.

Newton, Clarke ont confondu l'espace avec l'immensité même de Dieu; l'espace serait constitué par là même que Dieu est présent partout. Newton en vint même à dire que l'espace est le sensorium de Dieu.

Leibniz soutint contre eux que l'espace est le plein et non pas le vide; mais il crut pouvoir le définir comme la coexistence des choses matérielles.

Kant poussa beaucoup plus loin et fit de l'espace une forme à priori de la sensibilité extérieure, si bien que l'in

tuition de l'espace précéderait de sa nature l'expérience ou la perception des choses qui sont dans l'espace.

509. Critique. En critiquant ces diverses opinions, nous aurons par là même justifié la nôtre. Et d'abord, il est absurde de dire que l'espace réel est le vide; le vide absolu n'est rien, il n'a pas de dimensions, pas d'extension, il ne peut rien contenir. Quant à l'espace de Gassendi, c'est quelque chose d'inconcevable, à moins que ce ne soit Dieu même ; mais alors son opinion tombe sous la même critique que celle de Newton. L'opinion de ce dernier est inconciliable avec les principes les plus élémentaires de la théodicée. Car si l'espace n'est autre chose que l'immensité divine, s'il est un attribut de Dieu, la divinité est divisible, étendue, etc., puisque Dieu ne fait qu'un avec ses attributs. Cette erreur ressemble au panthéisme des stoïciens, pour lesquels le monde n'est que la matière animée par la divinité.

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On ne peut non plus approuver sans restriction l'opinion de Platon et de Descartes, qui confondent l'espace avec la matière elle-même ils sont sur la voie de la vérité, mais sans y atteindre tout à fait. L'espace contient les corps, mais les corps sont contenus; ils ne se contiennent pas eux-mêmes, du moins en tant que corps; s'ils se contiennent eux-mêmes de quelque manière, c'est par leurs dimensions.

L'opinion de Descartes est particulièrement répréhensible, lorsqu'il confond les espaces imaginaires avec l'espace réel et place l'essence des corps dans cet espace. Cette opinion mène à celle de Kant. Celui-ci, en effet, a soutenu, en somme, que l'espace n'est que subjectif ou imaginaire, qu'il est une pure forme de la sensibilité.

Leibniz n'est pas plus heureux que Descartes quand il cherche l'espace dans une coexistence des choses matérielles. Sans doute, les corps coexistent dans l'espace; mais cette coexistence ne le constitue pas. Et puis il faudrait dire que toutes les choses coexistantes, ou existant

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