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fin, que l'on peut toujours multiplier : il en a autant et plus que de gouttes d'eau ; mais la substance même de l'eau, l'essence de l'eau n'est pas divisée avec ces gouttes : chacune d'elles a la nature de l'océan tout entier. L'océan peut augmenter ou diminuer, il couvrait autrefois toute la terre et il se desséchera un jour; mais la nature même de l'eau ne disparaîtra qu'avec la dernière goutte. Divisibilité indéfinie d'une part, indivisibilité d'autre part : tels sont les caractères de la quantité et de la substance. Il n'est donc pas permis de confondre l'essence de l'une avec l'essence de l'autre.

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495. Où est l'essence de la quantité. avant. L'essence de la quantité ne consiste pas dans la divisibilité et l'étendue extérieures, mais plutôt dans la divisibilité et l'étendue intérieures. Elle consiste évidemment dans une certaine divisibilité, comme nous l'avons supposé plus haut. Ce qui est sujet à la quantité est divisible, et divisible en parties de même nature: c'est là ce qui fait la différence des parties quantitatives et des parties essentielles. L'eau, par ex., est divisible en oxygène et hydrogène; mais ce n'est pas cette divisibilité de ses éléments qui la rend étendue : c'est plutôt la divisibilité de sa masse, où il y a une multitude de gouttes qui sont déjà de l'eau.

Mais cette première notion de la quantité ne nous suffit pas. Le mot de quantité peut signifier plusieurs propriétés 1o une divisibilité, et, pour ainsi dire, une étendue tout intérieure, qui n'affecte que le sujet, sans rapport avec l'extérieur, et qui fait qu'il est divisible en parties de même nature, dont l'une n'est pas l'autre ; 2o une divisibilité et une étendue extérieures, qui fait que les divers corps peuvent se comparer dans leur étendue et se mesurer les uns les autres. A ces propriétés principales peuvent s'en joindre d'autres, comme l'impénétrabilité, qui provient de l'occupation de l'espace par un premier corps. Or nous soutenons que l'essence de la quan

tité consiste dans la première seulement de ces propriétés : la divisibilité ou l'extension interne. Nous joignons ces deux mots que plusieurs scolastiques opposent l'un à l'autre; mais nous leur donnons, au fond, le même sens. Il nous paraît aussi vrai de dire que le corps est étendu parce qu'il est divisible, que de dire qu'il est divisible parce qu'il est étendu. Quoi qu'il en soit, tous les scolastiques rejettent l'opinion de Descartes, qui place l'essence de la quantité dans l'étendue extérieure, sensible. Voici leurs raisons:

Il faut regarder comme l'essence d'une chose ce que l'esprit conçoit comme le principe intrinsèque de cette chose, ce qui suffit pour la faire connaître et la constituer, ce qui ne pourrait être nié d'elle sans la rendre inintelligible et impossible. Or telle est pour la quantité la divisibilité ou l'étendue intérieure dont nous avons parlé. En effet, ce qui fait, en dernière analyse, qu'une substance est sujette à la quantité, c'est qu'elle est divisible, c'est qu'elle a des parties placées en dehors les unes des autres et qui peuvent se mesurer réciproquement. Admise une telle substance, nous concevons la quantité comme réelle ; si on ne l'admet pas, la quantité est impossible. La divisibilité interne est donc bien l'essence de la quantité.

La divisibilité et l'étendue externes n'offrent point, au contraire, les mêmes caractères ; on les conçoit comme dérivées d'une divisibilité ou d'une étendue plus intime à la substance. Avant de se comparer aux choses extérieures, les parties de la substance doivent se comparer entre elles ; avant de mesurer ensemble ce qui les entoure, elles doivent se mesurer elles-mêmes : ce n'est même que parce qu'elles se mesurent au dedans qu'elles mesurent le dehors. Il serait étrange que la quantité consistât précisément dans ce qui est extrinsèque et que les corps n'eussent leur quantité que par ce qui les entoure, par les relations qu'ils soutiennent avec les corps extérieurs. On comprend très bien que ces relations constituent le lieu et l'espace, qui sont des relations de quantités, mais elles

ne sauraient constituer la quantité elle-même. La quantité d'un corps ne consiste pas en ce que ce corps occupe l'espace ou le lieu, mais en ce qu'il puisse l'occuper au moyen de ses parties ce n'est pas la quantité des corps qui résulte de l'espace; c'est plutôt l'espace qui résulte des quantités des corps.

Ici encore les vérités de la foi sont des indications précieuses et confirment nos conclusions philosophiques. Le corps de Jésus-Christ est dans le saint sacrement; il y est impassible, tout entier, sans diminution, sans altération; il a donc toutes ses propriétés, sa stature, ses proportions, mais sans que les saintes espèces le mesurent, il n'est mesuré que par lui-même.

Concluons de tout ceci que l'impénétrabilité des corps, leur faculté d'occuper l'espace, de mesurer ce qui les entoure, etc..., ne sont que des propriétés secondaires. On voit par là que non seulement les substances nous échappent, mais encore les essences des accidents: nos sens ne saisissent que la superficie des choses, et il n'y a que l'esprit qui puisse pénétrer au delà. (Cf. no 674.)

496. Objection. Si l'on nous objecte ici que cette quantité est inimaginable et que l'on ne se représente pas de corps qui ne soit dans un lieu, nous répondrons que cette quantité se conçoit et que cela suffit. En supposant même qu'un corps ne puisse exister sans être dans un lieu, on ne voit pas d'impossibilité à ce que ce corps soit dans ce lieu sans le mesurer et sans en être mesuré à son tour.

497. La qualité. Un autre accident important et absolu, c'est la qualité. Elle est même plus remarquable que la quantité, car elle affecte les esprits aussi bien que les corps. Impossible de la définir, à proprement parler, de même que les autres genres suprêmes; mais elle est assez connue par elle-même : c'est elle qui qualifie la substance, c'est-à-dire qui la modifie, la dispose en elle-même, a complète dans son existence et sa causalité. .

Il importe de distinguer ici la catégorie de la qualité, dont nous voulons parler, des autres qualités qui ne méritent ce nom que d'une manière indirecte. 1o Dans un sens très large, on appelle qualité tout ce qui est attribué à une substance ou à un sujet de cette manière, l'unité, la vérité, la bonté, l'existence, etc., sont des qualités. Mais il est évident qu'il s'agit ici de qualifications, d'attributs ou de modes quelconques, et non de qualités réelles, proprement dites. - 2o D'une autre manière, la qualité sort de sa catégorie et affecte toutes les autres en s'ajoutant à elles, pour ainsi dire; car il y a des qualités de quantités; par ex. la forme est grande ou petite; il y a des qualités d'action, de passion, de temps, de lieu. Mais la catégorie de la qualité est un accident distinct de tous les autres et qui affecte immédiatement la substance.

Elle diffère de la quantité, qui elle aussi affecte immédiatement la substance, en ce que la quantité dérive du principe matériel de la substance, de la matière première, tandis que la qualité se rattache à la forme substantielle. Elle diffère de la relation, qui n'est pas un accident absolu et n'affecte la substance ou ne lui appartient que par rapport à autre chose. Mais, malgré leur distinction essentielle, la qualité, la quantité, la relation et en général tous les accidents reviennent en quelque sorte les uns sur les autres et achèvent de se déterminer mutuellement ; car il y a, comme nous le disions, des qualités de quantité etc., et il y a aussi des quantités de qualité, etc. On qualifie les nombres et on mesure les qualités ; les nombres ont leurs proportions, c'est-à-dire leurs relations, et les qualités ont leurs opposées, c'est-à-dire leurs relations encore. Ceci fera mieux comprendre ce qui suit.

498. Propriétés des qualités. Les qualités ont diverses propriétés; on a surtout remarqué les trois suivantes: 1o Les qualités ont leurs contraires. C'est-à-dire qu'à chacune d'elles en correspond généralement une autre qui l'exclut dans le même sujet ainsi à la lumière corres

pondent les ténèbres; aux vertus, les vices; à la science et aux connaissances, l'ignorance ou l'erreur et la fausse science. Et si par qualités nous entendons non seulement la catégorie de la qualité mais toute qualification, il faudra dire que toute chose a son contraire: le fini, l'infini; l'être, le néant ; le bien, le mal, comme l'avaient fort bien remarqué les pythagoriciens.

2o Les qualités sont susceptibles d'augmentation et de dimi cution. C'est-à-dire que généralement elles tombent de quelque manière sous la quantité, comme nous l'avons expliqué plus haut: ainsi il y a plus ou moins de lumière, de science, de force, de vertu.

30 Enfin les qualités sont le fondement de la ressemblance ou similitude et de la dissimilitude. C'est-à-dire que les choses sont dites semblables à cause de leurs qualités communes. L'égalité, au contraire, est fondée sur la quantité (v. Vocab.: Qualité. Egalité).

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499. Espèces de qualités. Les scolastiques réduisent à quatre principales toutes les espèces de qualités: l'habitude et la disposition; la puissance; la passion (v. Vocabulaire); la forme et la figure. L'habitude et la disposition préparent à agir; la puissance est la faculté même. d'agir, dont l'habitude n'est qu'une détermination, bonne ou mauvaise. Il ne faut pas confondre cette puissance, qui n'est qu'une qualité, un accident, avec la puissance, notion transcendante, qui est opposée à l'acte et à l'existence. Quant à la forme et à la figure, ou bien elles proviennent de la nature même du sujet (ainsi la forme humaine dans l'homme, la forme de plante dans la plante, la forme de cristal dans les minéraux), et alors ce sont des qualités proprement dites; ou bien elles proviennent d'une action extérieure et sont de simples limites de la quantité (ainsi la forme humaine dans la statue), et alors ce sont des qualités de quantité plutôt que des qualités proprement dites, car elles affectent la quantité sans affecter immédiatement la substance même.

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