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style ne soient pas en même temps des fautes de logique. 2o La définition doit être précise. On obtient la précision en assignant le genre prochain et la différence spécifique. Le genre prochain, en effet, indique la place de l'objet, et la différence spécifique le circonscrit rigoureusement. En vertu de cette règle, on ne définira pas l'aigle : un animal carnassier, ni le passereau : un animal qui vit de grain. Ces définitions, qui ne sont que des ébauches de la définition parfaite conviennent à d'autres espèces.

30 Il faut que la définition puisse se substituer au défini. Car elle est son expression exacte, elle a mêmes limites. Il faut donc que l'on puisse prendre indifféremment la définition pour le défini, sans altérer la vérité du discours. 4o On ne doit pas employer dans la définition le terme que l'on se propose précisément de définir ou quelque autre qui suppose cette définition : ce serait tomber dans la tautologie et la redondance ou dans un cercle vicieux. Par exemple, on ne définira pas la terre : une matière terrestre, ni la quantité: ce qui est susceptible d'augmentation ou de diminution.

5o En général, la définition ne doit pas être négative, parce que la négation ne saurait,' par elle seule, nous instruire de rien. Cependant, si deux choses sont opposées contradictoirement, et si l'une des deux est connue, il suffira de nier l'une pour affirmer l'autre. Ainsi nous définirons la brute : « un animal qui n'est pas doué de raison » le simple: «< ce qui n'a pas de parties » ; l'infini : « ce qui n'a pas de fin ». Bien souvent, toute autre définition qu'une définition négative est impossible.

6o Enfin, dans la définition, on doit s'abstenir des termes ambitieux et métaphoriques (1) qui éblouissent,

(1) Sous ce rapport comme sous les autres, les définitions proposées par les scolastiques sont, en général, bien supérieures à celles des modernes et surtout des Allemands. Voici, à ce sujet, l'aveu d'un philologue qui n'est point prévenu en notre faveur : « C'est à la scolastique

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donnent le change, occupent l'imagination, mais n'apprennent rien. Par exemple, la superbe description que Buffon donne du cheval est la dernière des définitions que puisse choisir un naturaliste : « La plus noble conquête que l'homme ait jamais faite, etc. »>

On voit facilement que toutes ces règles découlent de la première et qu'on peut les résumer en disant que la définition doit être claire sous tous les rapports. question se présente maintenant :

Une

107. Est-il possible de tout définir? Il est évident d'abord qu'on ne peut pas tout définir avec rigueur, car : 1o les définitions n'auraient pas de fin. Définir, c'est assigner les principes d'une chose; mais ces principes, à leur tour, peuvent être l'objet d'une demande et d'une définition il faut donc s'arrêter devant les premières idées, les premiers principes, qui servent à tout définir, mais sont eux-mêmes indéfinissables.

:

2o D'anleurs, sans remonter bien haut, nous trouvons nombre d'actes et de perceptions très simples, qu'on ne peut définir avec rigueur, puisqu'ils sont indécomposables et que toute définition suppose quelque analyse.

3o Considérons encore que toute définition essentielle devant se faire par le genre et la différence, il faut, par là même, que les genres suprêmes et les réalités transcendantes soient indéfinissables. Tels sont la substance, l'accident, l'être, la vérité, l'unité, etc., Dieu surtout.

4o Enfin, si les réalités les plus hautes ou les plus abstraites échappent à la définition, comme étant indécomposables, il en est de même des réalités individuelles, comme étant trop complexes: on ne peut que les décrire. Nous

et au bas latin, disons-le en passant, que le français doit l'incomparable netteté qu'il apporte dans la langue philosophique. Les termes sont presque tous abstraits (sauf dans la terminologie de la sensibilité) et ne donnent aucune prise à ces trahisons qu'entraînent les expressions métaphoriques. (A. DARMESTETER, la Vie des mots, p. 12, note.)

pouvons bien définir l'homme, l'animal, la plante, le minéral, mais non pas l'individu qui s'appelle Pierre ou Paul, ni telle plante, tel minéral nous pouvons seulement les désigner sans équivoque. Comment définir le particulier en tant que tel, puisque toute définition est une idée plus ou moins générale? Et puis, comment saisir la raison dernière pour laquelle un individu n'est pas un autre?

Il résulte déjà de ces considérations qu'on ne peut définir parfaitement que les substances. Elles seules, en effet, ont proprement un genre et une différence spécifique. Cette conclusion s'éclaire encore, si nous considérons qu'on ne peut définir les choses, assigner leur essence, qu'autant qu'elles ont l'être ; or, l'être appartient d'abord et parfaitement aux substances seules: il s'ensuit qu'on ne peut définir parfaitement qu'elles. Les définitions des accidents sont moins parfaites; celles des privations et des négations moins encore.

Mais si, au lieu d'une définition parfaite et rigoureuse, il s'agit d'une définition quelconque, rien alors n'est indéfinissable, ni ce que nous connaissons le mieux, ni ce que nous connaissons le moins et soupçonnons à peine. Il y a pour tout des explications utiles ou des définitions. provisoires (selon le mot de Leibniz), qui préparent des définitions plus sûres. Voilà pourquoi les lexicographes sont fondés à définir tous les termes de la langue : les philosophes ont les mêmes droits sur les idées et sur les choses.

108. Pascal et la définition. On ne peut donc approuver sans réserve Pascal quand il s'élève contre certaines définitions : « Il n'y a rien de plus faible, dit-il, que le discours de ceux qui veulent définir ces mots primitifs. Quelle nécessité y a-t-il par exemple d'expliquer ce qu'on entend par le mot homme? >> L'exemple est mal choisi. Rien n'est moins connu que l'homme à certains égards: si le nom est compris de tous, rien ne l'est moins que la chose. Aujourd'hui encore les écoles ne tombent point

d'accord sur une définition précise: c'est, en effet, l'une des conclusions capitales, toujours discutée, de la psychologie. Quant à certains autres mots primitifs et très généraux, comme l'être, l'unité, etc., s'il n'est pas possible de les définir avec rigueur, il est bon du moins de les expliquer aucun philosophe n'a pu s'empêcher de le faire. (( II y en a, continue Pascal, qui vont jusqu'à cette absurdité d'expliquer un mot par le mot même. J'en sais qui ont défini la lumière en cette sorte: la lumière est un mouvement luminaire des corps lumineux; comme si on pouvait entendre les mots luminaire et lumineux sans celui de lumière. » Ceci confirme nos propres réflexions; mais ce qui suit est moins juste: «< Car combien y a-t-il de personnes qui croient avoir défini le temps quand elles ont dit que c'est la mesure du mouvement, en lui laissant cependant son sens ordinaire? Et néanmoins elles ont fait une proposition, et non pas une définition. Nous convenons qu'on ne peut pas rigoureusement définir le temps; mais il est bon de l'expliquer, et il est possible de signaler de quelque manière sa nature et ses propriétés.

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109. Moyens d'arriver à une bonne définition. On arrive à bien définir comme on arrive à bien connaître, par la comparaison. C'est en comparant les animaux, les plantes et les minéraux, que les naturalistes arrivent à déterminer les genres, les espèces, les familles, à classer les trois règnes de la nature. S'il faut indiquer quelques procédés, on trouve la définition de chaque chose en repassant tous les mots dont on se sert pour la désigner, en remarquant ses semblables, ses contraires, ses opposés, ses causes, ses effets, son origine, les circonstances de son apparition, surtout en déterminant ses éléments, s'il est possible. Tantôt il faut employer l'analyse et tantôt la synthèse; l'esprit doit monter et descendre, observer au dehors et au dedans. Le tout est d'arriver à connaître ce que chaque chose a de commun avec celles qui lui

ressemblent (genre) et ce qu'elle a de particulier (différence) (1):

110. Importance de la définition. Si l'on pouvait douter encore, après ce qui précède, de l'importance de la définition, nous ferions remarquer qu'elle a la même fortune que la science : « Les définitions partagent toutes les vicissitudes de la connaissance humaine », a dit un philosophe (2). Et, en effet, plus une science progresse, plus les définitions dont elle s'éclaire et qu'elle cherche à établir sont nombreuses, claires et complètes. A mesure que la chimie s'est développée, elle a perfectionné son langage, elle a créé sa nomenclature, elle a mieux décrit, spécifié, défini les éléments des corps et les composés dont elle s'occupe. Les sciences naturelles ont suivi la même voie. Pour ce qui est de la philosophie et de la théologie, on peut dire qu'elles consistent dans un certain nombre de principes, d'idées parfaitement claires et partant très bien définies. Observons en particulier que le progrès du dogme est marqué précisément par de nouvelles définitions dogmatiques, qui éclairent les premières et s'y ajoutent. Bref, la définition est à la fois le principe et le terme de la science. On part d'une définition incomplète ou provisoire, ou entendue imparfaitement, pour arriver à une définition complète et parfaitement comprise (3). Les définitions, comme les idées, sont d'abord confuses : elles s'éclaircissent ensuite par des observations et des recherches. Celuilà même qui reçoit d'un, maître des définitions parfaites n'en aura la pleine intelligence que lorsqu'il pourra les justifier et qu'elles lui serviront à résumer sa connaissance.

(1) Cf. S. Th., In II Poster., 1. XVI.

(2) Dict. des sciences phil. d'Ad. FRANCK. V. Définition.

(3) C'est au fond, ce que veut dire de son côté Stuart Mill dans ce passage: «Tant que les sciences sont imparfaites, les définitions doivent partager leurs imperfections ; et si les premières progressent, les secondes progresseront aussi. Tout ce qu'on peut donc attendre d'une définition placée en tête d'une étude, c'est qu'elle détermine le but des recherches. >> (Logique, Préface, § 1.)

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