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donner le pas fur fes Epigrammes. On verra que notre langue, & notre nation font faites pour le lyrique, malgré tout ce qu'en difent ceux qui ne favent que rimailler des Tragédies en Profe.

Nous touchions au moment de n'avoir plus de Poë fie. L'Ode qui en eft le vrai champ, étoit négligée, profcrite, & même regardée comme un genre ridicule par ce gros Public & ce beau monde qui fe laiffe entraîner, fans réfléchir, au tor rent de la mode.

Effectivement rien n'étoit plus fou que de donner le style Pindarique à nos Héroïnes de la Scène, ou plutôt de le défigurer pour le mettre dans leurs bouches: de hériffer le naïf fentiment d'un amas de métaphores déplacées, qui ne paroiffent fouvent trop hardies que par ce qu'elles ne l'étoient pas affez, qu'on croyoit outrées parce qu'elles étoient tron quées, & qu'elles n'étoient ni amenées ni fuivies. C'eft de ce ridicule abus de la Poëfie qui retomboit fur elle; & les vrais Poëtes étoient profcrits par le dégoût qu'infpiroient ceux qui vouloient les contrefaire. Je n'ai point fait d'Odes, & n'en ferai jamais dans le genre Pindarique, mais je n'en lirai jamais de bon

nes fans entousiasme, & je gémirai fur ces petits beaux efprits qui croyent que toute la Poëfie confifte à rimer quelques fyllabes géométriquement com paffées.

Venons à l'objet particulier de votre Ouvrage. On peut dire que le fabli me n'a jamais été employé plus à propos, que pour le fang de Corneille. Sa petite Niéce devoit être un objet bien intéref fant pour les gens de Lettres, & pour ceux qui les aiment. L'action de M. de Voltaire ne m'a pas étonné. Les fecours qu'il a donné à vingt jeunes gens, dont il avoit mal connu le cœur & l'efprit, dépofoient en faveur de fa générofné Quel contrafte entre cette action généreufe & le procédé de M. de Fontenelle Je n'ai jamais aimé les Ouvrages de cé petit Maître du Parnaffe; le plus bel efprit de la France, j'en conviens; mais le Aléau du génie. Il a connu & porté au plus haut point la délicateffe de la galanterie, il ne s'eft jamais donté de celle du fentiment. En vérité, fa conduite ne dément pas plus le fang de Corneille, que cet oubli perpétuel du fublime qui caractérise tous fes Ecrits.

Adieu, mon cher ami, mais adies

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pour peu de tems, en comparaifon de celui que j'ai paffé loin de vous. J'efpere avant quatre mois voir renaître ces beaux jours que nous paffions ensemble fans nous appercevoir que la nuit venoit nous les ravir.

J'ai l'honneur, &c.

L'OMBRE

DU GRAND

CORNEILLE;

ODE

A MONSIEUR

DE VOLTAIRE

L'OMBRE

DU GRAND

CORNEILLE.

AH!

Fama manet facti.

H ce n'eft point des Rois l'orgueilleux
appanage

Ni l'Or ni la Victoire, Amante du carnage,
Que les fils d'Apollon s'empreffent d'obtenir;
L'héritage facré des Nymphes de mémoire,
C'est un Nom que la gloire

Sur des ailes de feu

porte au fombre avenir.

Ce Nom qui, s'échappant des murs de Thebe

en cendre,

A l'ombre de Pindare affervit Alexandre,

Et dompta les fureurs de ce jeune Lion;

Ce nom qui fit couler des larmes généreuses;
Et de gloire amoureuses,

Qui n'envioient qu'Homère au Vainqueur

d'Ilion.

Partie. II.

M

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