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vères. On va le voir pardes exemples qui dédommageront un peu de la sécheresse de mes observations. Salluste peint Catilina.

Lucius Catilina... Voyez Salluste ou les Leçons Latines anciennes.

De ce caractère et de celui de César, Bossuet semble avoir formé le portrait de Cromwell, où le ton de l'éloquence est plus élevé que celui de l'histoire.

« Un homme s'est rencontré, etc. » Voy. plus bas. Mais la différence est plus sensible encore dans le portrait qu'a fait Cicéron de ce même Catilina, en justifiant Cœlius d'avoir été lié avec ce factieux, reproche important à détruire.

« Habuit Catilina..., etc. » Voyez les Leçons Latines anciennes.

Que l'on rapproche ce morceau de celui de Salluste; et des deux côtés on aura un modèle de perfection dans l'art de peindre en orateur et en historien.

Mais pour ceux qui n'entendent point la langue de Cicéron et de Salluste, voici dans la nôtre de grands exemples de l'un et de l'autre genre d'écrire. Le cardinal de Retz, dans ses Mémoires, fait ainsi les portraits du grand Condé et Turenne.

« M. le Prince, né capitaine, etc. (1). »

« M. de Turenne a eu dès sa jeunesse, etc. (2). » Voilà l'historien, voici l'orateur :

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« Vit-on jamais en deux hommes, dit Bossuet (3) ? Rien n'éblouit tant les lecteurs superficiels que les portraits de fantaisie; rien ne décèle mieux l'ignorance de l'écrivain aux yeux de l'homme instruit et clairvoyant. Sans même consulter les faits, et avoir présent le modèle, un lecteur judicieux distingue un portrait qui ressemble, d'un portrait vague et imaginaire.

MARMONTEL. Elémens de Littérature, t. IV.

(1-2-3) Voyez plus bas.

CARACTÈRES POLITIQUES.

Le Peuple Athénien.

L'HISTOIRE nous le représente, tantôt comme un vieillard qu'on peut tromper sans crainte, tantôt comme un enfant qu'il faut amuser sans cesse, quelquefois déployant les lumières et les sentimens des grandes âmes; aimant à l'excès les plaisirs et la liberté, le repos et la gloire; s'enivrant des éloges qu'il reçoit, applaudissant aux reproches qu'il mérite; assez pénétrant pour saisir aux premiers mots les projets qu'on lui communique, trop impatient pour en écouter les détails et en prévoir les suites; faisant trembler ses magistrats dans l'instant même qu'il pardonne à ses plus cruels ennemis; passant avec la rapidité de l'éclair, de la fureur à la pitié, du découragement à l'insolence, de l'injustice au repentir; mobile surtout et frivole, au point que, dans les affaires les plus graves et quelquefois les plus désespérées, une parole dite au hasard, une saillie heureuse, le moindre objet, le moindre accident, pourvu qu'il soit inopiné, suffit pour le distraire de ses craintes ou le détourner de son intérêt.

BARTHÉLEMY. Voyage d'Anacharsis.

Même sujet.

Il y a un peuple fier et poli, savant et guerrier, passionné pour la gloire et pour le plaisir, qui, par le haut degré d'excellence où il porta tous les arts, condamna les âges suivans à l'éternelle nécessité de les imiter, et au désespoir de les surpasser jamais. L'Athénien, disposé aux émotions douces avant même qu'il vit le

jour, par le soin qu'il fallait avoir de n'offrir aux yeux d'une mère enceinte que des objets agréables; l'Athé-nien qui, dès ses premières années, réglait tous ses mouvemens sur les sons cadencés et mélodieux de la voix et des instrumens; qui, dès son enfance, formait ses yeux au discernement des plus belles formes, en les dessinant lui-même; qui puisait ses premières instructions dans les vers les plus harmonieux de la plus harmonieuse des langues, et dont l'âme, successivement préparée par la jouissance des chefs-d'œuvre de musique, de peinture, de sculpture et d'architecture, recevait au théâtre l'impression simultanée de tous les arts combinés et réunis ; l'Athénien dut être et fut en effet prodigieusement sensible aux charmes de l'éloquence; il abhorrait les fers de la tyrannie, mais il volait au-devant des chaînes de la persuasion.

L'Abbé ARNAUD.

Les Mours de Sybaris.

ON ne met point, dans cette ville, de différence entre les voluptés et les besoins; on bannit tous les arts qui pourraient troubler un sommeil tranquille; on donne des prix, aux dépens du public, à ceux qui peuvent découvrir des voluptés nouvelles. Les citoyens ne se souviennent que des bouffons qui les ont divertis, et ont perdu la mémoire des magistrats qui les ont gouvernés.

On y abuse de la fertilité du terroir, qui y produit une abondance éternelle; et les faveurs des Dieux sur Sybaris ne servent qu'à encourager le luxe et à flatter la mollesse.

Les hommes sont si efféminés, leur parure est si semblable à celle des femmes, ils composent si bien leur teint, ils se frisent avec tant d'art, ils emploient tant de temps à se corriger à leur miroir, qu'il semble qu'il n'y ait qu'un sexe dans toute la ville.

Bien loin que la multitude des plaisirs donne aux Sybarites plus de délicatesse, ils ne peuvent plus distinguer un sentiment d'avec un sentiment.

Leur âme, incapable de sentir les plaisirs, semble n'avoir de délicatesse que pour les peines; un citoyen fut fatigué toute la nuit d'une feuille de rose qui s'était repliée dans son lit.

La mollesse a tellement affaibli leur corps, qu'ils ne sauraient remuer les moindres fardeaux; ils peuvent à peine se soutenir sur leurs pieds; les voitures les plus douces les font évanouir; lorsqu'ils sont dans les festins, l'estomac leur manque à tous les instans.

Ils passent leur vie sur des siéges renversés, sur lesquels ils sont obligés de se reposer tout le jour sans être fatigués; ils sont brisés quand ils vont languir ailleurs.

Incapables de porter le poids des armes, timides devant leurs concitoyens, lâches devant les étrangers, ils sont des esclaves tout prêts pour le premier maître (1). MONTESQUIEU.

Les Grecs, les Romains.

Quoi qu'en dise un des plus judicieux écrivains de l'antiquité qui cherche à diminuer la gloire des Grecs, leur histoire ne tire point son principal lustre du génie et de l'art des grands hommes qui l'ont écrite. Peut-on jeter les yeux sur tout le corps de la nation grecque, et ne pas avouer qu'elle s'élève souvent au-dessus des forces de l'humanité? On voit quelquefois tout un peuple être magnanime comme Thémistocle, et juste comme Aristide. Salluste nierait-il que Marathon, les Thermopyles, Salamine, Platée, Mycale, la retraite des Dix-Mille, et tant d'autres exploits exécutés dans le sein même de la Grèce.

(1) Voyez en vers, Portraits, la traduction de ce morceau.

pendant le cours de ses guerres domestiques, ne soient au-dessus des louanges que leur ont données les historiens? Les Romains n'ont vaincu les Grecs que par les Grecs mêmes. Mais quelle aurait été la fortune de ces conquérans, si, au lieu de porter la guerre dans la Grèce corrompue par mille vices, et affaiblie par ses haines et ses divisions intestines, ils y avaient trouvé ces capitaines, ces soldats, ces magistrats, ces citoyens qui avaient triomphé des armes de Xerxès? Le courage aurait été alors opposé au courage, la discipline à la discipline, la tempérance à la tempérance, les lumières aux lumières, l'amour de la liberté, de la patrie et de la gloire, à l'amour de la liberté, de la patrie et de la gloire.

Un éloge particulier que mérite la Grèce, c'est d'avoir produit les plus grands hommes dont l'histoire doive conserver le souvenir. Je n'en excepte pas la république romaine, dont le gouvernement était toutefois si propre à échauffer les esprits, à exciter les talens, et à les produire dans tout leur jour. Qu'opposera-t-elle à un Lycurgue, à un Thémistocle, à un Cimon, à un Epaminondas, etc. etc.? On peut dire que la grandeur des Romains est l'ouvrage de toute la république. Aucun citoyen de Rome ne s'élève au-dessus de son siècle et de la sagesse de l'Etat, pour prendre un nouvel essor et lui donner une face nouvelle. Chaque Romain n'est sage, n'est grand, que par la sagesse et le courage du gouvernement; il suit la route tracée, et le plus grand homme ne fait qu'y avancer de quelques pas plus que les autres. Dans la Grèce, au contraire, je vois souvent de ces génies vastes, puissans et créateurs, qui résistent au torrent de l'habitude, qui se prêtent à tous les besoins différens de l'Etat, qui s'ouvrent un chemin nouveau, et qui, en se portant dans l'avenir, se rendent les maîtres des événemens. La Grèce n'a éprouvé aucun malheur qui n'ait été prévu longtemps d'avance par quelqu'un de ses magistrats; et plusieurs citoyens ont retiré leur patrie du mépris où elle

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