Obrazy na stronie
PDF
ePub

tions, ni un avertissement en lettres italiques qui, dans les autres exemplaires, précède immédiatement le premier chapitre des Pensées. Mais ce volume n'appartient évidemment pas à une édition de 1669 qu'aucun bibliographe n'auroit connue, et dont l'existence se révèleroit pour la première fois. C'est un exemplaire de l'édition qui a été répandue plus tard dans le public avec la date de 1670. Le caractère de l'impression, le papier, tout le démontre.

La date de 1669 ne prouve qu'une chose, c'est que l'édition avoit été imprimée et devoit d'abord paroître en 1669. Avant de la rendre définitivement publique, les éditeurs en communiquèrent quelques exemplaires tout imprimés à l'autorité ecclésiastique, soit de leur propre mouvement, soit sur la demande de l'archevêque de Paris, dans le diocèse duquel l'édition alloit paroître. Cette autorité exigea des corrections: de là l'erratum. qu'on dut mettre à l'édition avant de la livrer au public, et un changement plus considérable dont je dirai tout à l'heure un mot. Cependant le temps s'étoit écoulé, et lorsque l'édition put enfin paroître on n'étoit plus en 1669, mais en 1670. Nécessité, par conséquent, de faire un nouveau titre et d'y inscrire la date de 1670. Qu'est-ce donc que ce volume qui porte la date de 1669? c'est l'exemplaire, ou l'un des exemplaires communiqués à l'autorité ecclésiastique avant la publication, et voilà aussi pourquoi on n'y trouve pas les approbations. En un mot, le volume découvert et acheté par la Bibliothèque nationale confirme tout ce que j'avois avancé sur les signes auxquels on doit reconnoître la véritable édition originale des Pensées de Pascal. Cette édition a été imprimée en 1669; elle n'a paru qu'en 1670 et avec l'erratum qui explique les motifs de ce retard!

M. Techener m'a communiqué un autre exemplaire de la même édition, qui n'est pas moins curieux que celui de la Bibliothèque nationale. Il porte la date de 1670; mais outre l'erratum on y trouve le carton relatif au changement beaucoup plus considérable dont j'ai parlé plus haut. C'est à la

page 150 et au chapitre 20, intitulé: On ne connoit Dieu utilement que par Jésus-Christ. On sait maintenant que dans le manuscrit ce chapitre, où Pascal infirme jusqu'à un certain point la preuve de l'existence de Dieu par l'ordre de l'univers, commence ainsi : « J'admire avec quelle hardiesse << quelques personnes entreprennent de parler de Dieu, en adressant leurs discours aux impies. Leur premier chapitre "est de prouver la divinité par les ouvrages de la nature, etc. » Les éditeurs avoient d'abord reproduit fidèlement le texte de Pascal, qu'on retrouve, en effet, tel que je viens de le citer dans l'exemplaire unique de la Bibliothèque nationale. La hardiesse de ces paroles effraya l'autorité ecclésiastique qui exigea un changement, et le chapitre parut avec ce début sans couleur: « La plupart de ceux qui entreprennent de prouver la « divinité aux impies, commencent d'ordinaire par les ouvrages <<< de la nature, et ils y réussissent rarement, etc. » L'exemplaire que M. Techener m'a communiqué a le carton. Voilà donc encore un exemplaire rare et précieux, celui-ci appartient à la collection de M. Parelle.

Résumons-nous. La première édition des Pensées de Pascal devoit paroître en 1669. L'édition imprimée, avant de la répandre, on en remit quelques exemplaires à l'autorité ecclé siastique qui exigea de nouveaux changements. Le commencement du chapitre 20 subit un remaniement complet. Les autres corrections moins importantes donnèrent lieu à un erratum qu'on retrouve dans tous les exemplaires de l'édition originale. Retardée par ces préliminaires, l'édition ne parut qu'en 1670, et l'on fut obligé de changer la date du titre. L'exemplaire de la Bibliothèque nationale avec sa date de 1669, et l'exemplaire de M. Parelle avec le carton de la page 150, sont les monuments authentiques de cette histoire secrète de la première publication des Pensées de Pascal.

S. DE SACY.

UN PETIT PROCÉS DE PIRON

AU SUJET DU Fâcheux Veuvage (1).

Voicy l'état de la question : L'on m'est venu prier de composer un divertissement pour l'opéra comique pour le prix ordinaire de 50# par représentation; Je m'en suis acquitté avec bien de la peine et du travail; on l'a donné au public huit fois. J'ay reçu 100#. Je demande 300 # qui me sont deuës pour les 6 dernieres représentations.

Rien n'est plus simple ny plus juste; et toute la suite de ce mémoire ne contient que des raisons surabondantes, dont on peut s'épargner la lecture comme je pourrois m'en épargner l'étalage.

L'on se retranche sur le mauvais succès de ma pièce pour m'en disputer le payement. La chute ou la réussite ne fait rien à l'affaire; et supposant le contraire un instant; et que ma pièce eût eû un mauvais succès déterminé; ce seroit moins à moy qu'il faudroit s'en prendre qu'à nombre d'inconvénients que je n'ay pû ny prévoir ny parer. L'on peut donc en ac

cuser

1o La gueuserie des habillements et la maladresse des décorateurs. 2° L'inhabilité grossière de plusieurs acteurs. 3° La malignité du principal d'entre eux, nommé Hamoche, qui pour des raisons particulières de mécontentement, au vû et scû de tout le monde, a décrié partout la pièce, avant qu'on la joüât. 4° La négligence affectée du même acteur dans l'exécution des

(1) Publié d'après le manuscrit original et autographe de Piron.

rôles principaux dont on l'avoit malheureusement chargé. 5o Le malheur public qui se déclara plus qu'en tout autre temps pendant les 8 jours qu'on a représenté le Facheux Veuvage. 6o La Marianne suivie d'une comédie nouvelle du fameux Voltaire, et une autre nouveaûté; données alternativement chez les François et les Italiens justement pendant ces 8 jours là. Et enfin la pluye orageuse qu'il fit toujours positivement à l'heure où l'on pouvoit se mettre en chemin. Ajoutons encore que la recette n'a pas été si mince qu'on l'a dit à Monsieur Charpentier, à qui l'on ose en imposer là dessus; comme il est aisé de vérifier, à la veüe des feüilles du 16 au 23 août.

Tout cela joint ensemble mérite bien qu'on suspende un peu son jugement sur le véritable mérite et la juste destinée qu'eût pû avoir cette pièce en d'autres lieux et en d'autres temps.

Mais ce détail est superflu. Je ne dois point me justifier d'une accusation aussy inutile dans le fond qu'injuste dans la forme.

Premièrement, la proportion des salaires d'un auteur avec le succès de sa pièce, est un privilège des Théâtres réglez; où les décences du Théâtre, le choix et les talents des Acteurs, mettent un auteur disgracié du Parterre, hors de réplique. En second lieu, cette proportion peut encore s'observer dans ces sortes de Théâtres qui, ayant un crédit bien étably sur un grand fonds de pièces et d'ouvrages immortels, ne viennent point prier un auteur de s'en mêler; et ce profit casuël convient à des Écrivains aspirants d'ailleurs à briller sur le premier Théâtre de France. Mais non pas à nous autres qui sacrifions notre temps aux instantes sollicitations des entrepreneurs d'un spectacle méprisé, décrié, destitüé de tout ce qui peut contribuer au sucçès d'une pièce; influant mal (même en cas de réussite,) sur la réputation d'un homme de lettres; et pourtant plus pénible que tout autre dans sa ridicule espèce. Nous' ne surmontons notre répugnance et ces obstacles que dans la veuë d'un gain seûr dont nous convenons avec ces entrepreneurs. C'est leur afaire de se bien addresser; et sauf à eux tou

jours, comme ils ont fait, de quitter le plustôt qu'ils peuvent une pièce où ils ne trouvent pas assez de profit pour tirer 50 # par jour à l'auteur.

Troisieme raison. Dez que mon honoraire n'est point proportionné au gain, pourquoy le sera-t-il à la perte ? Une pièce vaut 1500 par représentation : les Entrepreneurs nous en donnent-ils un sou davantage? Me gratifièrent-ils d'un gain proportionnel à mon Caprice qui rapporta l'an passé trente bonnes représentations? Non. Et je subirois perte ou diminution sur huit malheureux jours précédez de quatre mois de travail assidu! Ce seroit renverser en faveur du frélon et au dommage de l'abeille, la loy naturelle: Quem sequuntur commoda, eumdem et sequuntur incommoda. Et contrà,

Revenons donc à l'invincible et première raison. C'est qu'en un mot le marché n'est point conditionnel; c'est un marché absolu, fait à tout événement. Marché conclu avec M. Lesage et M. Fuzelier comme avec moy, depuis le commencement de l'Entreprise; Marché tenu avec eux dans des circonstances bien plus onéreuses. Pourquoy la premiere exception faite à mes dépens?

Ainsy sans me vouloir récrier sur les 4 mois que j'ay mis à travailler le Facheux Veuvage comme il y paroit bien de l'aveu même des gens déclarez contre Moy, sans vouloir soutenir que la piece un peu mieux joüée, joüée sous de meilleurs auspices et donnée comme je l'avois demandé, après le départ des comédiens du Roy; eut eû tout un autre sort: sans attester icy les gens du métier qui ont dit tout haût que cette comédie aux Italiens eût eû un succès merveilleux, sans reprocher à l'entreprise les remises considérables que j'ay faites les foires passées; Que la premiere représentation a valu 800# et la dernière plus qu'on ne devoit raisonnablement espérer d'un tems plus facheux encore ce jour là que les 7 autres; j'en reviens toujours à dire que je n'ay composé qu'a condition du prix fait de 50# par représentation; Qu'il y en a eù huit; Que je n'ay receû que 100# et qu'il m'en est deû 300 que la malice des

« PoprzedniaDalej »