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librement un lieu qui jouissait de la liberté de Dieu et n'était soumis à aucune autre église; ainsi l'affirmait la fondatrice qui en avait, dit-on, le privilége entre les mains. Cependant les religieux de Carraccedo se sont plaints, comme vous l'écrivez, qu'une injustice leur eût été faite en cela, et n'écoutant pas cette parole de Salomon: N'arrêtez pas celui qui veut faire bien, et, si vous le pouvez, faites bien vous-même1, ils nous ont été contraires dans une si sainte entreprise. Or, comme il ne faut pas que des serviteurs de Dieu plaident entre eux, nous avons résolu de remettre l'affaire à votre très-puissante décision, afin que par votre autorité et par vos soins toute cette querelle qu'on dit injuste et sotte, s'apaise, et qu'un Ordre, reçu dans la maison du Seigneur pour sa gloire et pour votre salut à vous-même, demeure dans la paix.

2. Au surplus, mon frère Nivard, qui se loue beaucoup de vous, nous a conseillé d'avoir làdessus toute confiance en vous, tant à cause de votre dévouement particulier pour nous, qu'à cause de la bonne promesse que vous lui avez faite à ce sujet. Si, dans leur esprit de contradiction, ces gens ne veulent pas se rendre à vos avis et à vos conseils salutaires, qu'alors toute la discussion soit terminée par le jugement des deux évêques, qu'on connaît comme ayant ces deux monastères sous leur autorité paroissiale. Ce sera ensuite à vous à ratifier et à faire exécuter fermement ce qu'ils auront décidé et établi. Si vous craignez Dieu, ne souffrez pas qu'on empêche l'accomplissement d'un si grand bien, que cette vertueuse femme soit frustrée dans son désir, que ces religieux soient privés du fruit de leur piété, que Dieu enfin se voie enlever le sacrifice agréable de la réforme de

1 Prov., III, 27.

On a conclu de là avec raison que Nivard, le plus jeune frère de saint Bernard, avait été envoyé en Espagne par son frère, pour y fonder le monastère de Spina. (Voyez les lettres 372 et 373.) Auparavant il avait été envoyé dans le diocèse de Bayeux pour y organiser un nouveau monastère à Soleuvre. près de Vire. Vers 1146, Robert, fils d'Hernesius, donna sa maison à Bernard, abbé de Clairvaux, et à l'église de SainteMarie de Soleuvre. Algare, évêque de Coutances, confirma vers la même époque « une donation faite par un certain Guillaume Sylvain à Dieu, à Sainte-Marie de Soleuvre, et aux religieux qui servent Dieu en ce lieu, donation faite entre les mains de Nivard, frère du seigneur Bernard, abbé de Clairvaux ». On a conclu de ce passage que Nivard avait été abbé de ce monastère. En 1150, le monastère, à cause de l'exiguité et des inconvénients de son emplacement, fut transporté dans le ValRicher, qui relevait du fief de l'église de Bayeux, et Soleuvre retourna entre les mains de l'évêque de Bayeux à qui elle appartenait auparavant. Il y eut à cet effet un acte d'échange qui fut confirmé par Hugues, archevêque de Rouen. L'abbé du Val-Richer était alors Thomas, auquel succéda Roger.

cet Ordre. Nous vous prions encore pour votre nouvelle fondation, je veux parler des religieux de Spina: ayez pour eux des entrailles de miséricorde, que, soutenus par vos bienfaits, ils persévèrent dans le service de Dieu et dans leur Ordre.

LETTRE CCCII.

(Écrite l'an 1153.)

AUX LÉGATS APOSTOLIQUES, POUR L'ARCHEVÊQUE

DE MAYENCE.

Il recommande l'affaire de cet archevêque opprimé par ses adversaires.

A ses révérends seigneurs et pères, aux Légats du Siége Apostolique, le serviteur de leur sainteté, Bernard, dit abbé de Clairvaux qu'ils plaisent à Dieu en toutes choses et emportent une heureuse moisson des fruits de leur légation.

Corporellement éloigné de vous, nous en sommes rapproché par notre affection et notre bon vouloir; car nous désirons et nous demandons que vos intentions et vos actes tendent à tout ce qui est convenable et utile. Aussi, ayant appris que ce malheureux archevêque de Mayence était appelé devant vous pour y répondre à ses adversaires, nous avons pris la liberté d'implorer pour lui votre bonté. Nous croyons que vous honorerez votre ministère, si, autant que vous le pouvez sans blesser la justice, vous soutenez, de l'appui de votre autorité, le mur qui penche et la maison ébranlée; et si, autant qu'il dépend de vous, vous ne permettez pas qu'on écrase le roseau brisé ni qu'on éteigne la mèche qui fume encore. Nous vous le demandons avec instance, qu'il ressente quelques avantages de notre prière et de sa simplicité; c'est elle qui l'a fait, dit-on, circonvenir par de faux frères, et on ne trouve rien en lui qui puisse le faire déposer.

1 Baronius dit au sujet de cette légation: La même année, le pape Eugène envoya des légats en Allemagne pour juger l'archevêque de Mayence. Le prêtre Bernard et le diacre Grégoire furent choisis pour cette mission. Bernard, prieur du monastère de Latran, puis chanoine régulier, fut créé en 1145, cardinal au titre de Saint-Clément. On pense que Grégoire est celui qui, en 1137, fut fait par Innocent cardinal au titre de Saint-Ange. Conrad qui, cent ans plus tard, écrivit la chronique de Mayence, dit qu'Henri fut déposé, et il en rejette la faute sur un traitre, nommé Arnold, et sur les deux légats qui auraient été gagnés à prix d'argent. Otto de Frisingen, qui était présent, dit que la déposition était j ste (voy. Friderici vita,lib. II, cap. 9). Quoiqu'il en soit, Henri, après la déposition, se retira en Saxe, et, peu de temps après, il mourut saintement dans un monastère de l'ordre de Citeaux. La lettre 365 lui est adresséc.

LETTRE CCCIII.

A LOUIS LE JEUNE, ROI DES FRANÇAIS. Ce que doit faire le roi dans la cause d'un homme de Bretagne, adultère et excommunié.

Si cet homme de Bretagne veut renvoyer la femme adultère, afin de pouvoir être délivré du lien de l'excommunication qui l'enchaîne, et que cette femme vous demande sa part dans l'héritage paternel, conformément au partage qu'elle a fait avec ses frères, peut-être ne faudrait-il pas la repousser, quelqu'indigne qu'elle soit; car vous obtiendrez ainsi le service et l'appui d'un homme puissant. Autrement, l'avis de votre humble et fidèle serviteur n'est pas que vous donniez une terre à un étranger, ni la protection de votre souveraineté à un incestueux et à un excommunié; de crainte, ce qu'à Dieu ne plaise! qu'un jour on ne vous applique, à vous aussi, cette parole: Quand vous voyiez un voleur, vous couriez avec lui et vous partagiez avec les adultères1. Cependant je ne vous conseillerai pas de rien précipiter et de rompre brusquement avec lui. Il faut autant que possible agir par un intermédiaire fidèle et prudent, afin de négocier si l'on peut et de gagner du temps. Que s'il n'y veut pas consentir et qu'il aime mieux persévérer dans la malice, il faut espérer du Seigneur qu'elle ne prévaudra pas. Car la justice qui est du côté du roi combattra pour le roi. Je ne sais pas si l'évêque peut convenir et s'il est propre à cette mission. Ce n'est pas qu'il ne soit fidèle, et même très-fidèle; mais cet homme le déteste et je crains qu'il ne lui confie pas ses intentions. Cependant ce prélat est prêt à faire, pour vous obéir, tout ce qu'il pourra sans déplaire à Dieu. S'il vous dit quelque chose de secret comme venant de ma part, croyez qu'en effet il le tiendra de moi, et recevez-le comme de ma propre bouche. Car c'est un homme que j'aime beaucoup, et j'ai une grande confiance en lui; vous pouvez donc avec assurance, si je ne me trompe, lui confier ce que vous voudrez.

LETTRE CCCIV. (Écrite l'an 1153.) AU MÊME.

Il se réjouit que le roi prenne intérêt à sa santé; il lui recommande Robert, qui était cousin du roi.

La lettre que vous avez daigné m'adresser

1 Ps. XLIX, 18.

Cet évêque est peut-être Jean de Saint-Malo, auparavant moine de Citeaux, et auquel sont adressées plusieurs lettres de Pierre de Celles.

2

réjouit mon âme; que Dieu, en vue duquel vous avez agi, vous remplisse de joie à son tour. Qui suis-je, moi, et quelle est la maison de mon père, pour que votre royale Majesté s'inquiète de ma mort ou de ma vie? Cependant puisque vous m'avez considéré au point de vouloir être informé de mon état, sachez que je me trouve un peu mieux'; autant que je puis en juger, j'ai échappé pour quelque temps au danger de la mort, quoique cependant je sois faible, et bien faible. Au reste, je désire que vous sachiez que le seigneur Robert, votre cousin, a daigné nous visiter avec beaucoup de dévouement, pendant notre maladie. Par les choses qu'il nous a dites, il nous a laissé dans la joie et nous a donné de lui de meilleures espérances. Aimez-le : si ses actes répondent à ses paroles, vous vous complairez en lui; et si vous le jugez à propos, faites-lui savoir que vous voyez avec plaisir qu'il ait promis de se rendre désormais aux conseils des gens de bien et aux nôtres. Je n'avais pas de cachet sous la main; mais, à la lecture de cette lettre, vous reconnaîtrez ma plume, car c'est moi-même qui l'ai écrite.

LETTRE CCCV.

(Écrite l'an 1153.)

AU SEIGNEUR PAPE EUGÈNE.

L'évêque de Beauvais n'a pas pu, pour de justes raisons, faire le voyage de Rome; c'est pourquoi il remet toute son affaire à la sagesse du Pape.

L'évêque de Beauvais, votre fils 3, que j'appellerais aussi le nôtre, si cela ne sentait la présomption, se rendait devant vous, comme il y avait été invité, et il y allait avec joie, confiant dans la justice de sa cause, et ne doutant pas de votre paternelle protection. Mais je m'y suis opposé, et ce n'est pas sans peine que j'ai pu l'arrêter, tant il désirait contempler votre visage. Si j'ai voulu le retenir, j'avais pour cela de nombreuses raisons; la principale, c'est que je ne connaissais pas vos intentions. De plus, sans compter beaucoup d'autres inconvénients qui me semblaient s'y opposer, cet évêque et le roi son frère ne marchent pas dans le même esprit, et il n'eût pas été très-sûr pour le premier de s'absenter longtemps de son diocèse. Ne me demandez pas lequel des deux a tort, ce n'est à moi d'accuser personne. Il me suf

pas

1 Voyez la lettre 307, no 2.

2 Voyez les lettres 222, 224, 376.

• Henri, frère de Louis le Jeune; il en est question dans la lettre 307; il était religieux à Clairvaux.

fit d'excuser l'évêque. Nous l'avons vu rendre toutes les marques d'humilité et de déférence qu'il a pu, et cela sans succès. Cependant quelles que soient ses craintes et quoi qu'il puisse arriver, sachez qu'il partira, dès qu'il saura que tel est votre bon plaisir. Sa personne et sa cause sont entre vos mains. Or il vit et se conduit dans le poste qui lui est confié, de façon à ne pas se croire indigne d'une telle protection. C'est pourquoi il a envoyé cet homme à sa place, sachant qu'il l'adressait à un père. Voulez-vous connaître les instructions qu'il lui a données? Ne rien faire de ce qui lui avait été prescrit, mais tout remettre à votre décision à laquelle lui-même s'abandonne tout entier. Car il a le ferme espoir que non-seulement vous jugerez sa cause, mais que vous l'aiderez, que vous le protégerez, que vous le soutiendrez. Si vous voulez confier cette affaire au seigneur archevêque de Reims, nous avons confiance qu'avec l'aide de Dieu elle pourra recevoir une prompte solution, pourvu que la ressource de l'appel soit enlevée aux deux parties.

LETTRE CCCVI. (Écrite l'an 1151.)

AU SEIGNEUR d'ostie pour l'élection de TUROLD1 ABBÉ DE TROIS-FONTAINES.

Il se justifie des accusations portées contre lui, par Hugues, évêque d'Ostie, qui supportait avec peine la nomination de Turold comme abbé de Trois-Fontaines; car l'évêque en désignait un autre à ce poste, à savoir Nicolas. Il défend l'élection de Robert comme abbé d'un nouveau monastère.

1. Malheur au monde, à cause des scandales?! Quoi! c'est moi qui vous scandalise, c'est moi qui suis pour vous un sujet de scandale? Qui croirait que cela pût arriver, à moins d'ignorer notre conformité de sentiments, notre charité mutuelle, l'unanimité avec laquelle nous marchions dans la maison du Seigneur? O chan

1 Hugues était auparavant abbé de Trois-Fontaines, en Champagne; voyez les lettres 273 et 274. Devenu cardinal, il conserva la haute direction du monastère de Trois-Fontaines. Turold, qui lui succéda en ce monastère, avait été lui-même abbé du monastère de Fontaines, en Angleterre, où il avait succédé à Maurice; il avait administré ce monastère pendant deux ans, agissant souvent contrairement aux conseils et aux ordres de son archevêque. De là des conflits à la suite des uels Turold, sur l'ordre de saint Bernard, donna sa démission et revint à Rievalle d'abord, puis ensuite à Clairvaux. Son archevêque était l'archevêque d'York, Henri Murdach, anglais, qui lui-même avait été moine à Clairvaux et abbé de Fontaines. La lettre 106 lui est adressée.

2 Matth., XVIII, 7.

gement soudain et que je déplore! Celui qui me soutenait se dispose maintenant à m'opprimer; celui qui me défendait m'effraie par ses menaces, me poursuit de ses injures, m'accuse de prévarication. Après le crime énorme et singulier de nos premiers parents, on leur demanda un aveu'; on attendit que les Ninivites fissent pénitence; les habitants de Sodome furent punis, non pas sur des témoignages, mais sur la constatation de leur crime3. On en a agi avec moi tout autrement et avec bien plus de dédain. Je n'ai point été jugé digne d'être mis à même de me défendre, d'être invité à donner mes excuses, d'être interrogé sur ma propre cause, ni de recevoir la permission de répondre. J'ai été jugé sans avoir été appelé, condamné, sans avoir été convaincu.

2. Et maintenant, daignez écouter, si vous le voulez bien, ma justification; elle est juste, bien que peut-être elle ne vous paraîtra point suffisante. Vous auriez voulu qu'on mît à votre place le frère Nicolas; je m'en souviens, je l'avoue. Nous en convînmes ensemble et j'ai cru que cela se ferait, c'est pourquoi j'ai parlé. S'il n'en a point été ainsi, c'est par nécessité et non par artifice. L'affaire a amené un dissentiment, que dis-je? un dissentiment; il y a eu plutôt unanimité, car tous se sont trouvés si bien d'accord pour se séparer de notre avis commun, qu'il n'y a pas eu même un moine ou un convers, qui, à l'exception de deux ou trois de votre parti, ait voulu se rendre à notre opinion. Nous avons cependant eu recours à plusieurs arguments pour tenter, soit par flatterie, soit par intimidation, d'arriver à ce résultat; mais ils ont résisté avec autant d'obstination que d'unanimité. Nous aurions pu leur faire violence; mais que Dieu m'épargne comme nous avons épargné cet homme, en évitant que timide, faible de caractère, ennemi des charges comme vous le connaissez, il demeurât dans un si grand embarras. Car, sans parler des affaires du dehors dont vous avez, vous aussi, fait l'expérience, tout paraissait être au-dessus de ses forces. C'est pourquoi l'enlevant avec ses religieux, nous l'avons chargé d'un fardeau qu'il portera d'autant plus facilement que nos religieux le porteront avec lui. Il s'agit d'un monastère nouvellement fondé avec quelquesuns de nos frères; ce lieu est rapproché de nous, et nous pourrons, sans difficulté, le visiter souvent. Quant au choix d'un abbé pour le monastère, nous n'avons rien osé décider à ce sujet, sans avoir votre assentiment; nous vouJon., III. 3 Gen., XIX.

1 Gen., III.

nement répondra pour nous et vous en jugerez par là; vous connaîtrez notre empressement à notre sollicitude pour vos injonctions, ou au moins au souvenir que nous gardons de votre amitié. Pierre, le frère de Votre Altesse, prince digne de toute gloire, nous a rapporté vos ordres. Après avoir traversé la France avec ses troupes, il combat en Lorraine, et il combattra bientôt pour le Seigneur des armées. Le frère Roland, notre fils, vous porte les lettres octroyées par la générosité apostolique. Nous vous recommandons ce religieux ainsi que nousmêmes et ceux de nos frères qui sont avec vous.

LETTRE CCCIX.

(Ecrite l'an 1153.)

AU PAPE EUgène.

Il fait l'éloge de l'abbé Suger et recommande ses messagers au Pontife.

A son très-tendre seigneur et père, à Eugène, par la grâce de Dieu Souverain Pontife, le frère Bernard, dit abbé de Clairvaux : le peu qu'il est.

Si dans notre Église de France il y a quelque vase digne d'être placé avec honneur dans la maison magnifique du grand Roi; s'il y a un homme qui, fidèle comme David', va et vient au commandement du Seigneur, c'est à mon avis le vénérable abbé de Saint-Denis. Je le connais, en effet, comme un homme qui est prudent et fidèle dans les affaires temporelles, humble et fervent dans les affaires spirituelles; et, ce qui est le plus difficile, irréprochable dans les unes et dans les autres. Devant César, il est comme un membre de la cour de Rome; devant Dieu, comme un membre de la cour céleste. Nous vous demandons et nous vous conjurons d'accueillir avec bienveillance le messager d'un tel homme, et de lui adresser en retour, comme il est convenable à vous de le faire et comme lui-même le mérite, des paroles aimables et bonnes, pleines de tendresse et d'abandon, de protection et de bienveillance; car aimer et honorer spécialement sa personne, c'est honorer votre ministère.

1 I Reg., XXII, 14.

LETTRE CCCX. (Écrite l'an 1153.)

A ARNOLD DE CHARTRES 1, ABBÉ DE BONNEVAUX. Bernard parvenu à son dernier moment, écrit cette dernière lettre à son ami

Nous avons accueilli les marques de votre affection avec affection, mais non avec joie. l'amertume envahit tout entier? S'il me reste Car, quelle peut être la joie d'un homme que encore quelque plaisir, c'est celui de ne plus rien manger. Le sommeil s'est éloigné de moi, en sorte qu'un assoupissement salutaire ne vient même jamais m'enlever le sentiment de la douleur. Ce que je souffre provient presque entièrement de la faiblesse de mon estomac. Il demande à être fréquemment réconforté, jour et nuit, par quelques gouttes de liqueur; car il rejette sans rémission tout ce qui est solide. Et encore ce n'est pas sans beaucoup de peines qu'il supporte ce qu'il veut bien recevoir; mais il redoute une douleur plus grande, quand il reste entièrement vide. Que si parfois il se décide à prendre un peu plus, la douleur est des plus cruelles. Mes pieds et mes jambes sont enflés, comme il arrive d'ordinaire aux hydropiques. Mais dans tout cela, pour ne rien cacher à un ami inquiet de l'état de son ami, je vous dirai peut-être avec peu de sagesse, qu'au point de vue de l'homme intérieur, l'esprit est plein de vivacité dans cette chair malade. Prions le Seigneur, qui ne veut pas la mort du pécheur, de ne plus différer un passage dont le moment est venu, mais de me garder dans ce passage. Prenez soin de fortifier de vos prières un homme dépouillé de mérites, afin que celui qui est en embuscade ne puisse trouver en moi aucune place où il enfonce sa dent et porte sa blessure. J'ai moi-même écrit cette lettre dans l'état ou j'étais, afin qu'à ma main bien connue de vous vous reconnussiez mon affection. Cependant j'aurais mieux aimé vous répondre que de vous écrire.

1 Quelques auteurs pensent que cet Arnold était autre que celui qui a écrit le livre 2 de la Vie de saint Bernard et qui était abbé de Bonnevaux de l'ordre de Citeaux dans le diocèse de Vienne; le destinataire de notre lettre aurait été au contraire l'abbé du monastère de Bonnevaux, monastère de l'ordre des Bénédictins dans le diocèse de Chartres. Mais Dom Mabillon démontre que c'était là un seul et même personnage.

Ici finit la première collection des lettres de saint Bernard, qui fut faite de son vivant même par ses disciples. La vénérable antiquité de cette collection ne permet pas qu'on y porte atteinte, et nous l'avons reproduite scrupuleusement, sans rien changer à l'ordre des lettres.

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