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vie domestique, dans sa vie monastique, dans sa vie politique, dans sa vie scientifique, dans sa vie apostolique: cinq époques qui caractérisent les diverses périodes de sa prodigieuse existence, telle qu'elle s'est formée dans le mystère, sanctifiée dans la religion, produite dans les affaires publiques, et manifestée au grand jour par les travaux de la science et de l'apostolat.

1863. En publiant les premières éditions de cet ouvrage, nous étions loin de prévoir que les aberrations de nos temps, poussées à l'excès, s'appuieraient sur saint Bernard pour combattre le pouvoir temporel des Papes. C'est cependant ce qu'une fausse érudition a tenté de nos jours. On a extrait des divers écrits de notre Saint quelques phrases incomplètes, incohérentes; et, par un procédé facile, on en a tiré une doctrine subversive que la vie entière de saint Bernard désavoue et réprouve.

En effet, toutes ses lettres, ses discours, ses enseignements, aussi bien que son intervention personnelle dans les affaires publiques, attestent l'inflexible dévouement qu'il a mis au service du Saint-Siége; et si d'une part nous lisons avec émotion les conseils ascétiques qu'il a donnés aux Pontifes dont il était le guide spirituel, pour les porter au détachement des choses de la terre et à la modération dans l'exercice de l'autorité suprême; d'une autre part, nous constatons le zèle ardent et persévérant avec lequel il revendiquait les titres sacrés de la royauté terrestre des Pontifes romains.

Saint Bernard, en ce point, ne diffère d'aucun

autre docteur de l'Eglise; car je ne sache pas que jamais nul d'entre eux se soit mépris sur le sens des deux glaives que Jésus-Christ a laissés entre les mains de saint Pierre. Comment aurait-il pu méconnaître la signification du symbole de cette double puissance, lui qui l'a expliquée, publiée à la face du monde pour confondre les sophistes du XIIe siècle? « C'est une injure solennelle qu'on a faite à saint Bernard 1,» s'écrie en cette circonstance le grand et éloquent Évêque de Nîmes. Bien loin d'avoir approuvé les agresseurs de la souveraineté temporelle des Papes, saint Bernard les a poursuivis et flétris; il a soulevé contre eux la conscience publique, aussi bien que les armes des princes chrétiens; il a sacrifié son repos, il a épuisé ses forces et sa vie dans la défense de la sainte cause qui unit ensemble le sceptre royal à la houlette du Pasteur suprême.

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le monde lui refuserait une pierre pour reposer sa tête. Mais ce qui n'est pas moins manifeste, c'est que la Providence, dans l'intérêt des peuples et des rois, a voulu placer le Chef de l'Église dans une sphère éminente et indépendante, d'où son action médiatrice pût s'étendre

avec une souveraine impartialité sur tout l'univers, et subordonner les gouvernements des hommes à la royauté de Dieu.

Telle est la doctrine des saints; nous verrons avec quel éclat saint Bernard l'a professée.

HISTOIRE

DE

SAINT BERNARD

ET DE SON SIÈCLE

HISTOIRE

DE SAINT BERNARD

ET DE SON SIÈCLE

INTRODUCTION

L'idée première, l'idée-mère, pour ainsi dire, de l'histoire humaine, c'est l'idée de l'unité du ⚫ genre humain. Mais cette unité n'est point un être de raison, une abstraction logique, une généralisation opérée par le travail de la pensée; c'est un être réel et véritable, une grande existence ayant sa vie propre, individuelle, complète.

Le genre humain est un dans son principe et dans sa nature; il a été créé un, constitué dans l'unité, organisé en un seul corps: il a été personnifié en Adam, l'homme primitif, embrassant en lui les races et les espèces; l'homme-genre, engendrant toutes les générations humaines, et formant, avec la totalité de ses descendants, l'humanité générale ou le genre humain.

Cette idée simple, mais fondamentale, inscrite sur le frontispice des Livres sacrés, est comme le dogme de l'histoire. Sans elle, point de lignée vitale entre les hommes et les générations d'hommes, point de tradition vivante entre les âges et les siècles, point de liaison nécessaire et sympathique entre les nations et les peuples; sans elle point de transmissions, point de solidarité, point de causalité, nulle communauté d'origine, de nature, de loi, de destinée entre les individus et les sociétés.

Le dogme de cette unité, qui domine tout à la fois les enseignements de la religion et ceux de la vraie philosophie, est donc aussi la base, le point de départ de l'histoire.

TOME I.

Or, le péché, principe de corruption, pénétra dans les sources des générations humaines; car, dit l'Apôtre, comme le péché est entré dans le monde par un seul homme, et par le péché la mort, ainsi la mort est passée dans tous les hommes par ce seul homme en qui tous ont péché 1. Ce vice originel eut pour conséquence la dissolution des liens vivants de l'unité, et par suite, la séparation des éléments qui la constituent, amena la multiplication du genre humain par les voies de la concupiscence 2.

Adam devint multiple; mais cette multiplicité, opérée sous l'action du péché, dut être ramenée à l'unité sous l'influence de la grâce; et les générations charnelles, conçues et enfantées dans l'iniquité, durent être rappelées, par les voies de l'esprit, à l'unité spirituelle et immortelle.

De là deux grandes phases, deux lois, deux voies, deux mouvements contraires dans la vie de l'humanité sur la terre: mouvement centrifuge, qui porte le dedans au dehors, versant, dispersant dans le monde extérieur les éléments individuels de la race d'Adam; puis, mouvement centripète, refluant vers le centre, ramenant les hommes du dehors au dedans, de la chair à l'esprit, de la multiplicité à l'unité.

1 Rom., XII.

2 In iniquitatibus conceptus sum, et in peccatis concepit me mater mea. (Psal. L.) Saint Augustin (De Civit. Dei, cap. XXI et seq.) enseigne que si la chute n'était intervenue, les générations eussent été produites sans concupiscence.

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