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possède rien avec amour, il n'a aucune difficulté ni à vaquer aux devoirs extérieurs, ni à se recueillir inté rieurement.

C'est avec raison, certes, que l'Apôtre saint Pierre disait : « Seigneur, voici que nous avons tout quitté. Domine, ecce reliquimus omnia » (Math., 19), encore qu'il n'eut quitté qu'une barque et des filets. Saint Grégoire commentant ces paroles, dit : « Oui, il a quitté beaucoup, celui qui a renoncé non seulement à ce qu'il possédait, mais encore à la concupiscence ». Ceux qui ont suivi le Christ, ont quitté tout ce que pouvaient convoiter ceux qui ne le suivaient pas. Quand on a renoncé à sa volonté et à soi-même, on a vraiment quitté toutes choses, absolument comme si on avait eu en propre, en sa possession, toutes choses. N'est-ce pas, en effet, tout quitter, que de ne vouloir plus, par amour pour Dieu, rien désirer?

Notre-Seigneur lui-même a dit : Bienheureux les pauvres en esprit (Math., 5), c'est-à-dire ceux qui n'ont plus de volonté. Assurément, s'il était une voie meilleure que celle-là, Notre-Seigneur est trop bon pour ne nous l'avoir pas indiquée. Or, dans un autre endroit, Il nous dit : « Celui qui veut venir après moi, qu'il se renonce d'abord lui-même » (Math., 16.) N'est-ce pas dire que tout est là ?

Observe-toi donc avec soin, et si tu trouves un peu de recherche propre, immédiatement, renonce-toi. Plus souvent tu te renonceras et plus tu deviendras apte à te renoncer davantage. Et toutes les fois que tu t'appliqueras à cet exercice de l'abnégation, que ce

ne soit pas tant pour arriver à la vertu que pour procurer la gloire de Dieu.

Je ne veux pas cependant vous laisser ignorer qu'il n'y a personne dans ce monde tellement renoncé en tout, qui ne puisse trouver encore quelque chose où il doit se renoncer. Mais ils sont rares ceux qui s'appliquent sincèrement à commencer par là: c'est pourtant à ce prix exactement, qu'on achète la vertu. Dans la mesure où tu sors de toi-même et où tu te quittes, dans cette même mesure (sans plus ni moins) Dieu entre dans l'intime de ton âme avec toutes ses richesses. Dans la mesure où tu meurs à toi-même, dans cette même mesure Dieu vit en toi. Par conséquent, emploie tout ce que tu as et tout ce que tu peux pour arriver à l'abnégation de toi. C'est ainsi, et pas autrement, que tu jouiras de la vraie paix, et cette paix, personne ne pourra la troubler parce qu'elle sera établie et fondée en Dieu.

Ah! certes, les hommes devraient faire plus d'attention à ce qu'ils sont qu'à ce qu'ils font. Car si vraiment ils étaient bons dans leur fond, leurs actions aussi ne manqueraient pas d'être bonnes et droites. Mais la plupart mettent leur sainteté dans l'action (1)

(1) Cette remarque n'a jamais été aussi vraie que de nos jours. On n'entend parler que d'œuvres. Agir, multiplier les fondations, travailler à la préservation ou à la conquête des âmes, en donnant un emploi extérieur à leur activité, il semble, dans certains milieux, que toute la vie de l'Eglise est là. Vila in motu. Et on ne s'aperçoit pas que, souvent, tout ce mouvement n'est que de l'agitation. Les âmes prises dans un tourbillon d'affaires n'ont pas le temps de se recueillir et de penser: l'extérieur les absorbe et, au-dedans, elles se meurent d'inani

mais ce n'est pas le meilleur, cela, car la sainteté réside si je puis m'exprimer ainsi, dans l'être (in essendo). Si saintes en effet que soient nos œuvres, elles ne nous sanctifient pas, en tant qu'œuvres; c'est seulement dans la mesure où nous-mêmes nous sommes saints, et où nous avons un fond saint, que nous sanctifions aussi nos œuvres, qu'il s'agisse de manger, de boire, de veiller, de dormir, de prier, de parler, de mortifier la chair par des jeûnes, ou de toute autre chose, tout cela sera grand uniquement dans la mesure où cela procédera d'un amour plus intense de la gloire éternelle de Dieu. Plus l'amour qu'on a pour Dieu est grand et plus aussi le fond est saint. Nous devons donc apporter toute notre attention à conserver un fond grand et pur et à faire, autant que possible, toutes nos actions d'après ce principe. C'est, en effet, dans le fond de l'âme que se trouve l'essence et la béatitude de l'homme.

Toutes les œuvres sont rendues vertueuses par cela seul que l'esprit est bon et élevé constamment vers Dieu par l'amour. C'est donc à cela que devront tendre sans cesse toutes nos intentions et tous nos efforts; c'est pour cette fin que nous devons faire ou laisser tout ce que nous avons à faire ou à laisser,

tion, d'ignorance, quand ce n'est pas de vanité et d'amour propre. Le mouvement est bon, les œuvres sont bonnes, l'action est nécessaire; mais à la condition que tout cela prendra sa lumière, sa force et sa vie dans un principe intérieur, car la vie ne vient pas du dehors, mais du dedans. Turbari erga plurima, c'est bien le signe du temps. Il y a beaucoup de Marthes, mais très peu de Madeleines. Celles-ci cependant ont choisi la meilleure part, l'unum necessarium; mais qui y pense?

c'est-à-dire pour que Dieu soit magnifié en nous, pour qu'il soit fait grand en nous. Plus nous arriverons à ce but et plus aussi nos œuvres, quelles qu'elles soient seront grandes et divines.

Et maintenant, ô âme fidèle, adhère à ton Dieu et, en retour, tous les biens adhéreront à toi. Ah! si tu ne cherchais que Dieu seul, comme tu trouverais tous les biens en Lui! Car celui qui quitte tout, et qui, par amour pour Dieu, ne se réserve rien, possède incontestablement tout en Dieu, suivant le témoignage de l'Apôtre (2 Corinth. 6). Il n'y a rien de plus agréable à Dieu, de plus utile et de plus doux pour nous que de faire, laisser ou supporter, tout ce que nous faisons, laissons ou supportons, uniquement pour la gloire de Dieu. Il est impossible que nous fassions cela sans en retirer un grand fruit, et il n'y a pas d'œuvre sûrement plus apte à nous faire obtenir toutes les vertus, dans leur perfection. Etes-vous attaché à Dieu par l'amour et la louange? Vous êtes dans la disposition parfaite pour recevoir la grâce, et Dieu vous donnera sans nul doute la plénitude de ses biens.

Quand nous en sommes arrivés là, tout ce que nous cherchions autrefois avec tant de peine et d'effort, pour nous y complaire, nous le trouvons maintenant dans la joie, après nous être complètement renoncés pour penser à Dieu et pour adhérer à Lui, continuellement par l'amour. C'est alors que tout contribue à notre bien (Rom. 8, 28).

Nous devons donc, de grand cœur, renoncer à toute propriété, car il n'y a rien de plus pernicieux et de

plus funeste que cela. Autant en effet qu'il dépend d'elle, cette détestable disposition tendrait à dépouiller Dieu de toute puissance, de toute sagesse, de toute justice, car elle serait bien aise que Dieu ne pût ni connaître, ni venger ses péchés ; et c'est ainsi qu'elle voudrait qu'Il ne fût ni sage, ni puissant, ni juste enfin pour ne pas avoir de châtiment à subir pour ses crimes. De même, en effet, que l'âme aimante consentirait à passer par toutes les épreuves et les peines plutôt que de ravir la plus petite parcelle de la gloire infinie de Dieu; de même, hélas! le fond qui est infesté par la lèpre de la volonté propre préférerait voir Dieu privé de son excellence, plutôt que de renoncer lui-même à sa propriété.

Daigne Celui qui fut obéissant pour nous jusqu'à la mort et à la mort de la croix, éloigner de nous ce malheur. Ainsi soit-il.

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