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noblesse innée de la nature est déjà si grande, et qui a été élevé si haut par la possession de la grâce, ce n'est pas une petite peine de se voir impliqué dans les créatures. Il n'ignore pas que s'il était dépouillé, abstrait, dégagé de toute matière, il pourrait enfin s'établir et se fixer, sans intermédiaire et sans accidents, dans son état de souveraine perfection. Aussi ce corps que l'âme soutient et vivifie estil pour l'esprit une prison ténébreuse, horrible et cruelle. Il regarde comme du fumier l'or, l'argent et toutes les richesses, car il n'y trouve absolument rien qui puisse lui donner un plaisir, un goût à son palais. Et comment s'en étonner? L'aigle au vol altier ne se nourrit pas d'herbe et de foin comme le bœuf et le cheval. Or, toute chair c'est du foin, dit le prophète (Isaïe, 40). Toute délectation temporelle est pour lui une amertume insupportable. Comment celui qui a une soif inextinguible serait-il désaltéré par du vinaigre amer quand il désire puiser abondamment à la coupe du vin pur?

Cependant, l'ordre divin est que l'esprit dévot se résigne intérieurement à toute cette amertume, qu'il l'accepte avec une sainte indifférence, qu'il se conforme en paix au bon plaisir de Dieu, et qu'il ne veuille que ce que Dieu veut. Et comme il plaît à Dieu qu'il souffre, cela lui plaît aussi. Que dis-je ? Il est dépouillé complètement de toute volonté, prêt à supporter même dans une sublime résignation que Notre-Seigneur lui dise: « Je ne te connais pas ; je ne sais pas qui tu es. Toute ta conduite m'est indifférente, étrangère, je ne m'en occupe pas ». Voilà,

T. VIII.

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certes, une grande tentation, une épreuve cruelle; mais c'est dans cette épreuve qu'on verra quel est l'esclave, et quel est le vrai fils. Quand l'adversité menace, quand elle arrive, l'esclave fuit. Le fils, au contraire, reste inébranlablement attaché au père, dans l'épreuve comme dans le bonheur. Cela est si vrai que le père a beau s'irriter, lui enlever toutes ses faveurs, le frapper à coups redoublés; le fils ne fuit pas son père, mais il lui reste plus fidèle que jamais. Tel était le grand Apôtre, l'ardent imitateur du Christ dans la voie sublime du sacrifice. Dieu permet qu'il soit assailli par des tentations obscènes et immondes et Paul s'y soumet joyeusement comme au bon plaisir de Dieu (2 Corint., 12), et il se trouvait ainsi que ce vase spirituel parfait portait à la fois et une tentation impure et la resplendissante lumière de la grâce. Saint Paul n'était pas moins cher à Dieu dans sa tentation immonde que dans son ravissement au troisième ciel.

Et c'est encore ainsi que Dieu agit à l'égard de ses autres amis. Souvent il les laisse dans une sorte de pauvreté et de pénurie intérieures, au point qu'il leur semble qu'il n'y a pas un seul chrétien au monde ayant si peu de grâce, si peu de foi, si peu d'amour, si peu de bien enfin qu'ils n'en ont eux-mêmes. Cependant, à leur insu, Dieu les conserve secrètement dans leur fond et, dans cette lourde croix de la pauvreté, Dieu les prépare à cette sublime perfection vers laquelle ils aspirent. Ils appelaient la mort de tous leurs vœux et la mort les fuit, et Dieu continue à les perfectionner sur la croix, comme il l'entend,

jusqu'à ce qu'il les conduise enfin à leur suprêmefélicité.

Souviens-toi donc toujours, ô âme noble, de cette leçon et de cette doctrine. Persiste courageusement dans la vraie résignation, et un jour viendra où tu posséderas aussi, par suite, la vraie perfection en Jésus-Christ, Notre-Seigneur. Ainsi soit-il.

CHAPITRE XIII

De l'obéissance à Dieu, aux supérieurs et en général à tous les hommes. Eloge de cette vertu, et comment nous devons l'acquérir et l'exercër.

Il est bien certain que toutes les vertus prennent leur source dans l'humilité; une de ses filles est encore l'obéissance. C'est de celle-ci que nous allons parler.

L'obéissance est donc une vertu par laquelle l'homme sortant de lui-même et faisant abnégation de sa volonté propre se met dans la ferme disposition de faire ce qui lui est commandé en Dieu et selon Dieu. L'obéissance est encore la docilité et la soumission de la volonté; c'est la promptitude infatigable de l'âme au bien quel qu'il soit.

L'obéissance rend l'homme soumis à la volonté de Dieu, dans tout ce qui est commandé ou défendu; elle fait que les sens et les puissances sensitives sont subordonnées à la raison supérieure, de manière à permettre à l'homme de vivre raisonnablement et suivant les règles de la modestie.

L'obéissance soumet encore l'homme à l'Eglise, aux sacrements de l'Eglise, à tous les supérieurs, à tous les dogmes, toutes les institutions, tous les préceptes, tous les conseils, toutes les règles, toutes les coutumes établis dans l'Eglise; elle le rend disposé et prompt auprès de tous ses frères pour leur don

ner des conseils, venir à leur secours, leur apporter tous les services, spirituels et corporels, suivant leurs besoins et toujours avec prudence. C'est elle encore qui, dans les Congrégations, unit tout le monde dans la paix constante. Personne, en effet, ne peut être vraiment pacifique, s'il n'est vraiment obéissant. Mais celui qui est obéissant est aimé de tous ceux avec qui il vit. Il a mis de côté tout vouloir et tout non vouloir; il n'attend pas le précepte; il ne met aucun délai à exécuter les ordres reçus. Une chose ne lui est pas plus tôt commandée qu'immédiatement il est prêt et dispos.

Mais, hélas! qu'ils sont rares aujourd'hui les vrais et les parfaits obéissants! Comme on en trouve peu qui, ayant abdiqué toute volonté propre, ne désirent pas voir Dieu et les créatures leur obéir, mais sont. bien plutôt toujours aux ordres de Dieu et des créatures, répétant sans cesse avec l'Apôtre : « Seigneur, que voulez-vous que je fasse? » (Act., 9).

Oui, certes, l'obéissance est une si grande vertu, que l'action même la plus petite accomplie sous son impulsion, quelle que soit d'ailleurs la nature de cette action, est bien plus agréable à Dieu que tout ce qu'on pourrait faire de plus grand sans elle, parleriez-vous de l'assistance à la sainte Messe, d'une pieuse lecture, de l'oraison, de la contemplation ou de n'importe quelle œuvre que vous puissiez imaginer.

L'obéissance fait en tout temps, en tout, avant tout, ce qu'il y a de meilleur. Elle ne peut pas se tromper. Elle ne néglige rien. Ses œuvres n'ont pas besoin de

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