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pourrait facilement arriver que la consolation fut la perte et la ruine de tous nos biens. Que dis-je ? la plupart du temps, Dieu n'accorde la consolation que par pitié pour la fragilité et la pusillanimité humaines. Quoiqu'il en soit, il est certain que celui qui désire être continuellement consolé par Dieu dans ce monde, jouira d'une moindre consolation dans la vie future. De tels hommes, en effet, sont bien loin d'être donnés puisqu'ils refusent de servir Dieu à leurs dépens, puisqu'ils exigent, comme récompense, de savoir, de sentir, d'expérimenter quelque chose ; alors qu'ils devraient se réjouir à bon droit de posséder, s'ils le pouvaient, la foi nue et pure sans la moindre connaissance. Plus la foi est pure, simple, nue, plus et au centuple elle est noble, louable et méritoire. Une foi pareille dans un homme, mérite que Dieu se manifeste à lui, d'une manière admirable, en Lui-même, dans son ineffable essence! La foi nue, la foi pure est le lot de cette terre d'exil; savoir et voir sont réservés au siècle futur. Par conséquent tout notre salut, toutes nos œuvres prennent leur source dans la foi. Demandez à un homme quels sont ses parents; d'autres lui ont dit que c'était un tel et un tel. Il croit ce qu'on lui a dit. Il apprend également de la bouche d'autrui que telles et telles personnes sont mortes. Il ajoute foi à ce qu'on lui dit, et cependant il ne sait pas, il ne voit pas les réalités qui lui sont dites. Il en est de même pour les Sacrements de l'Eglise. Ah! que la foi nue est donc une grande chose! Je dis bien la foi nue, ce qui ne signifie pas qu'elle doive être dépourvue de bonnes

œuvres (1), mais qu'elle doit se contenter de ne rien savoir et de manquer de toute consolation sensible.

Non, la vraie perfection ne consiste pas dans les consolations et les révélations. La preuve en est que bien souvent, lorsque la consolation et la dévotion sensible ont quitté et abandonné une âme, cette âme est plus portée au mal, plus remplie de défauts qu'elle n'était auparavant.

Comme nous l'avons dit, ces faveurs sont, d'ordinaire, réservées aux commençants, aux jeunes plantes qui ne font que de naître dans le champ de la grâce. Mais ceux qui sont plus avancés dans le bien, ne trouvent d'autre consolation, d'autre force, que dans une adhésion ferme et toute simple à la foi nue; et bien qu'ils ne perçoivent que plus rarement les illuminations divines, ils possèdent maintenant Dieu lui-même d'une manière plus complète. D'où il suit que ceux qui s'appliquent à se mortifier, à se briser courageusement aussi bien dans le bonheur que dans l'adversité, arrivent bien plus vite à une haute perfection par la vraie soumission à une foi simple, que tous les autres.

Cependant quelque fois il arrive que Dieu soustrait la dévotion sensible et la douceur de la grâce aux imparfaits et aux commençants, précisément pour leur apprendre à s'humilier et pour bien leur montrer que cette ferveur dans la dévotion et ce premier élan

(1) Comment Luther et les protestants ont-ils pu s'autoriser d'une pareille doctrine pour affirmer, contre toute évidence, que la foi seule sans les œuvres justifie ?

vers Dieu, ne venaient pas d'eux. C'est aussi un moyen de les éprouver pour savoir s'ils persévéreront dans la véritable patience, uniquement pour l'amour de Dieu. Quelquefois aussi, la dévotion sensible est ôtée parce qu'une âme oubliant peut-être la reconnaissance pour les dons reçus, néglige de s'exercer dans les bons désirs. Dieu la prive de ses dons pour la purifier et la rendre plus apte à recevoir des faveurs plus grandes, et lui apprendre à l'avenir à estimer davantage et à accepter avec un cœur reconnaissant la grâce divine. Ce que Dieu veut aussi c'est d'être recherché pour lui-même et non pour ses dons.

Une question peut se présenter ici. Comment se fait-il qu'un homme ayant perdu la grâce puisse la recouvrer et en devenir de nouveau capable ? Je vais vous l'apprendre.

Cet homme commencera d'abord, avec une humilité profonde à reconnaître devant Dieu qu'il a été ingrat vis-à-vis de la grâce reçue et qu'il en était indigne. Puis il s'offrira généreusement et sincèrement à rester sans la moindre dévotion ou affection sensible, aussi longtemps qu'il plaira à Dieu. Il évitera ensuite très soigneusement, comme la mort même, tout plaisir sensuel et toute recherche de bienêtre, pour s'enfermer dans son fond intérieur, et, loin de négliger les bons exercices, il s'y appliquera de toutes ses forces, et il attendra, ferme et inébranlable dans le culte et le service de Dieu. Ce n'est pas tout, prenant la passion du Christ comme unique sujet de méditation, il s'y attachera obstinément,

qu'il y trouve du goût ou non. De plus, il s'approchera de l'adorable Sacrement du Corps de NotreSeigneur avec une grande humilité, afin que, par la vertu de ce Sacrement, l'amour éternel de Dieu s'allume en lui, que toute dissemblance soit abolie et que lui-même soit tout entier transformé, surnaturellement, en Dieu. Assurément, quiconque aura soin de s'exercer à toutes ces choses ou même à quelquesunes seulement, recouvrera la grâce de Dieu, j'en réponds, à moins toutefois qu'il ne plaise à Dieu de le priver, pour un temps, de sa présence et de le laisser accablé de dénûment, pour lui ménager une plus grande gloire. N'est-ce pas ce que fait Dieu envers ses plus chers amis dans ce monde ? Il les laisse dans la pauvreté, dans le manque absolu de toute consolation au dedans et au dehors, pourquoi ? Parce qu'il veut qu'ils s'offrent eux-mêmes tout entiers au feu de l'amour, pour le temps et pour l'éternité, suivant le bon plaisir divin.

CHAPITRE IX

+ Que nous pouvons acquérir et exercer vraiment l'humilité et la charité, et connaître à fond la bonté de Dieu et notre malice.

L'humilité est le fondement et la gardienne de toutes les vertus. C'est l'humilité que Notre-Seigneur Jésus-Christ (l'essence et le miroir de toutes les vertus) a choisie spécialement pour attaquer et pour vaincre l'orgueil du démon; c'est l'humilité qu il nous a léguée comme le gage le plus précieux et la voie la plus sûre que nous puissions suivre pour arriver au salut. « Apprenez de moi, nous dit-il, que je suis doux et humble de cœur» (Math., 11). C'est l'humilité que l'Apôtre appelle la force du Christ. « Volontiers, dit-il, je me glorifierai dans mes faiblesses pour que la force du Christ habite en moi » (2 Corinth., 12).

Il n'y a donc pas lieu de rougir quand on se voit l'objet du mépris ou condamné à faire des œuvres petites, car c'est par là que nous nous conformons au Roi de gloire. De plus, sans humilité, toutes les autres vertus dégénèrent en vices. Mais qu'est-ce que la vraie humilité? Ce n'est pas autre chose, assurément, qu'un profond abaissement, une prostration totale de l'esprit et du cœur, en la présence de la majesté divine. La justice elle-même nous ordonne cette attitude et l'amour nous y pousse.

Or, il y a une double humilité : l'une est éclairée

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