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peuple sont comme les armes d'Achille; il faut savoir les manier.

Le gouvernement français vient de proposer une loi qui remédie aux lésions les plus injurieuses que le Code pénal faisait à la dignité humaine : cette mesure est excellente, non parce qu'elle rend inutile la révision du Code, mais parce qu'elle permet de l'ajourner.

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CHAPITRE IV.

Du Problème de l'Organisation judiciaire.

Détruire les parlemens, créer une magistrature nouvelle destituée de toute influence politique et de toute inspection sur les opinions de la société française, telle était la tâche de l'Assemblée constituante; elle l'accomplit en ce sens, que les tribunaux et les légistes qu'elle répartit sur le territoire, d'après le système administratif qu'elle avait adopté, ne furent qu'un ministère et des officiers de justice, et c'était pour la nation et le temps l'affaire essentielle; il ne s'agissait pas alors de trouver le meilleur système possible, mais d'abolir entièrement celui qui avait régné. D'ailleurs, résoudre du premier coup le problème de l'organisation judiciaire ne se pouvait, tant à cause de la difficulté absolue de l'entreprise que

des circonstances au milieu desquelles elle se tentait. La suppression des parlemens ne faisait pas disparaître les élémens, les habitudes, et, pour ainsi dire, les mœurs de notre ancienne organisation judiciaire; ce vieux monde, qu'on voit se créer peu à peu dans l'histoire de la monarchie, subsistait encore tout entier avec ses préjugés, ses coutumes et ses us, même au milieu des nouveautés les plus tranchées, et des désirs les plus ardens d'innovation. De plus, il fallait respecter le sort et ménager l'influence de tous ceux qui jusqu'alors avaient vécu du régime de la justice, de tant de magistrats, de légistes et d'avocats. Beaucoup d'entre eux travaillaient à la révolution, siégeaient à la Constituante, et délibéraient eux-mêmes sur leurs affaires. Aussi ne faut-il guère s'étonner si l'Assemblée constituante est inférieure à elle-même dans ses discussions et ses lois sur l'organisation judiciaire; il y avait dans les esprits même les plus intelligens, et à leur insu, trop de préjugés et de préoccupations, et il fallut toute l'indépendance et la clarté d'esprit du profond Duport pour conserver seul la puissance de créer un système.

En revanche, la Convention et Napoléon songèrent aux institutions judiciaires avec des préméditations arrêtées. La Convention poursuivait l'œuvre d'une démocratie simple et une, Napo

léon d'un despotisme vaste et compliqué. Avoir de bons juges les occupait moins que de se procurer des instrumens; et, comme dans leur position tout se soumettait à l'unité formidable et nécessaire de leurs desseins, le blâme qu'on serait tenté de jeter sur les détails doit faire place à l'intelligence du tout. Il est temps de dépouiller contre ces deux colosses les colères d'avocat et de les juger, comme ils ont agi, en grand.

La restauration se mit à réchauffer tous les souvenirs de l'ancienne magistrature, et à vouloir s'appuyer sur les cours souveraines en guise de parlemens. Comme la Convention et l'Empire, elle chercha aussi des instrumens; mais son but était moins grand, et ses moyens furent misérables, odieux et ridicules. Il n'y eut pas si mince tribunal auquel on ne s'efforçât de persuader qu'il était le soutien de la légitimité; tout, jusqu'aux huissiers, devait être monarchique. La société était dénoncée chaque jour à la magistrature comme factieuse, comme coupable d'un excès d'embonpoint *; et, pendant quelques années, les emplois de la judicature furent au concours de l'hypocrisie et de la servilité.

Cette expérience successive doit enseigner au pouvoir à ne plus chercher dans la magistrature

* Expression du procureur général Bellart.

que des juges rendant des décisions civiles et criminelles sur des affaires particulières. Plus de tuteurs de la monarchie, plus de censeurs de la société, mais simplement des juges. Il est temps de poser le problème de l'organisation judiciaire d'une manière simple et philosophique : Quelles sont les meilleures institutions judiciaires séparées de toute puissance politique?

Dans l'enfance des sociétés, les établissemens judiciaires sont toujours abandonnés à l'instinct des mœurs. D'abord ils se confondent avec le pouvoir législatif, plus tard avec l'administration. Il n'y a pas d'institution où l'habitude et la coutume exerce plus d'empire, où la réforme soit plus délicate et plus difficile. Quand une nation s'est accoutumée à identifier les garanties mêmes d'une saine justice avec les formes d'une organisation défectueuse, elle résiste long-temps aux améliorations.

Il est impossible au publiciste, sans une enquête générale * sur l'ordre judiciaire d'un pays,

* Le gouvernement français vient d'entrer dans une route nouvelle par le compte rendu de l'administration de la justice civile. Cette publicité, qui deviendra successivement plus complète, doit être aussi efficace pour amener une réforme judiciaire que l'a été en finances la notoriété commencée par M. Necker. « La connais» sance de cette statistique, dit le rapport ( voyez le Moniteur du >> 7 novembre 1831), livrera aux publicistes, en même temps qu'aux » magistrats, un riche sujet de méditation... C'est en continuant à

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