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son utopie de l'Etat; dans le Timée il chante la nature et en déroule la magnifique universalité pour en faire le type d'une sociabilité rationnelle à laquelle doit s'élever l'humanité. Enfin dans le Critias il réunit de nouveau la nature et la société dans le mythe d'un monde primitif. Il s'est donc trouvé un homme, contemporain de la guerre du Péloponèse et qui mourut vers le temps où Démosthène prononçait sa première philippique, qui, au sein de la démocratie athénienne, a fait la théorie philosophique de la monarchie du sacerdoce, a innové contre le polythéisme, et s'est fait le chantre d'un mysticisme plein de poésie et de mystère, entre Périclès et Philippe de Macédoine. Dans cette position il a efficacement réagi contre la démocratie grecque et la corruption du paganisme, en ramenant dans la législation l'ordre, la morale et Dieu. Ces sociétés capricieuses et pétulantes de la Grèce oubliaient dans l'étourdissement de leur liberté arbitraire les idées immuables de l'humanité, sacrifiaient la raison à la volonté populaire et aux inépuisables sophismes du génie national. Platon, majestueux comme un prêtre de Saïs, oppose à cette légèreté des enseignemens nouveaux qui changeront la philosophie et prépareront le christianisme. Débarrassez cet Athénien des voiles brillans dont il couvre sa pensée, vous

serez surpris de la trouver déjà si chrétienne, et tellement chrétienne * que plus tard les néoplatoniciens accuseront le christianisme de s'être emparé des doctrines du fondateur de l'Académie, et que de leur côté les chrétiens revendiqueront Platon pour le placer dans leur Eglise.

C'est en considérant ainsi toute la profondeur des nouveautés platoniciennes que l'on arrivera à ne plus s'étonner des étranges erreurs où est tombé ce grand homme. Platon est si fort préoccupé de Dieu, qu'il méconnaît l'homme; de l'ordre universel, qu'il outrage la liberté de l'individu; de l'Etat, qu'il efface la famille; il assimile tellement l'humanité à la nature, qu'il veut faire vivre dans la société les hommes d'une vie commune, comme les arbres d'une vaste forêt, dont la végétation appartient à la fois au ciel et à la terre. Ainsi toutes les variétés inviolables de la liberté humaine seront étouffées dans ce despotisme novateur qui semble n'avoir pu retrouver l'ordre, qu'en demandant à la nature de l'homme les plus sanglans sacrifices.

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Voyez, entre autres détails, la célèbre peinture du juste et de sa destinée, au liv. 11 de la République.

CHAPITRE II.

Aristote.

Vers la cent troisième olympiade entrait dans Athènes un jeune Macédonien, sujet du roi Philippe. Aristote, fils de Nicomaque, apportait à l'école de Platon une raison vaste et sévère, disposée à faire peu de cas des images et des symboles, cherchant à se rendre compte de tout et ne voulant conclure qu'après avoir observé. Ce jeune homme commença par suivre les leçons d'un maître qu'il devait contredire et balancer au moins. L'idéal de Platon donna l'éveil à son génie, lui fit exercer des qualités tout-à-fait contraires, qui le menèrent à substituer la réalité dans la philosophie sociale au poétique mysticisme du père de l'Académie.

Aristote ne réfléchit plus le siècle de Périclès;

il introduit dans la philosophie l'esprit et la monarchie d'Alexandre; même dictature, mêmes conquêtes, et la Grèce ne devient assez forte pour envahir l'Orient qu'en laissant mourir Démosthène, en faisant taire sa tribune, et disparaître la richesse et la variété de son génie démocratique sous le despotisme puissant et uniforme d'Aristote et d'Alexandre.

Le philosophe macédonien apportait une indépendance facile dans l'examen de l'histoire et des constitutions politiques. Libre des préjugés et des liens de la démocratie athénienne, il put observer les différentes formes sociales, l'aristocratie, la monarchie, comme la démocratie, apprécier leurs avantages, condamner sévèrement leurs inconvéniens. S'il a quelque penchant pour Lacédémone, il en voit toutefois les causes de corruption et de décadence. Quand il parle d'Athènes, il n'est pas fâché de pouvoir la blâmer; il ne l'aimait pas, et il avait coutume de dire que les Athéniens, qui avaient trouvé à la fois les lois et le blé, se servaient bien du blé, mais non pas des lois*.

Avant d'arriver à sa politique, constatons en passant que, s'il a combattu la théorie des idées

* Πολλάκις δὲ καὶ ἀποτεινόμενος, τοὺς ̓Αθηναίους ἔφασκεν ευρηκέναι πυροὺς καὶ νόμους · ἀλλὰ πυροῖς μὲν χρῆσθαι, νόμοις δὲ μή. DioG. LAERT., Aristoteles, lib. v, cap. 1, XI.

de Platon, il n'en a pas moins séparé tout-à-fait l'intelligence de la sensibilité; les formes constitutives de l'entendement, de ses applications particulières ; la nécessité, de la contingence; la science de l'opinion ; le général, du particulier ; et qu'il a écrit de la manière la plus explicite, dans son Organum* et dans sa métaphysique, une véritable critique de la raison. Il vit même dans l'intelligence une identité avec Dieu, et dans la❤❤ spéculation la jouissance la plus pure et la plus haute de l'homme. M. Hegel, à la fin de son Encyclopédie, relève cette métaphysique qui met

* Dans ses Analytiques, Aristote part de la description du syllogisme, examine ses espèces, ses conditions dans ces différentes espèces; puis il considère les conditions même de la science et de la démonstration; les différences qui les séparent, comment la démonstration a, au-dessus d'elle, des principes nécessaires dont elle découle. Les principes eux-mêmes échappent à la démonstration. Théorie de la causalité. Excellence de la méthode à posteriori, qui remonte à singularibus ad universalia. Relation de la cause à l'effet. Origine de la connaissance des principes. Là, le Stagyrite sépare la science tant de l'opinion que de l'intelligence elle-même, source dernière, mode dernier de tous ses principes. Je citerai ses dernières paroles : Επεὶ δὲ τῶν περὶ τὴν διάνοιαν ἕξεων, αἷς ἀληθέυομεν, αἱ μὲν ἀεὶ ἀληθεῖς εἰσιν αἱ δὲ ἐπιδέχονται τὸ ψεῦδος, οἷον δόξα καὶ λογισμός· ἀληθὴ δ ̓ ἀεὶ ἐπιστήμη καὶ νοῦς· καὶ οὐδὲν ἐπιστήμης ἀκριβέστερον ἄλλο γένος, ἢ νοῦς · αἱ δ ̓ ἀρχαὶ τῶν ἀποδείξεων γνωριμώτεραι · ἐπιστήμη δ ̓ ἅπασα μετὰ λόγου ἐστί· τῶν ἀρχῶν ἐπιστήμη μὲν οὐκ ἂν εἴη. Επεὶ δ ̓ οὐδὲν ἀληθέστερον ἐνδέχεται εἶναι ἐπιστήμης, ἢ νοῦν, νοῦς ἂν εἴη τῶν ἀρχῶν· ἐκ δὲ τούτων σκοποῦσι, καὶ ὅτι ἀποδείξεως ἀρχὴ οὐκ ἀπόδειξις · ὥστ ̓ οὐδ ̓ ἐπιστήμης ἐπιστήμη. Εἰ οὖν μηδὲν ἄλλο παρὰ ἐπιστήμην ἔχομεν γένος ἀληθές, νοῦς ἂν εἴη ἐπιστήμης ἀρχὴ. Καὶ ἡ μὲν ἀρχὴ τῆς ἀρχὴς εἴη

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