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tien et de l'histoire qui ne crée pas la vérité des doctrines, mais qui la juge, de donner les vrais principes de solution. Certains, même parmi nos amis, nous trouveront peut-être trop hardi. Nous pouvons nous rendre le témoignage que nous avons eu surtout le souci de dire juste. La témérité en fait de doctrine ne sied à personne, encore moins à celui qui assume l'utile et lourde tâche de former l'esprit des jeunes générations. Mais on court le risque de passer pour un novateur, lorsque, las de formules de convention, de théories d'entre-deux, de doctrines incomplètes, l'on s'applique, en cherchant à les approprier aux conditions de notre temps, à rappeler de vieilles vérités, si oubliées que leur mise en lumière ressemble, aux yeux de beaucoup de gens, à une évocation de fantômes.

Avant tout il est nécessaire d'expliquer le rôle, la fonction du pouvoir public en général.

CHAPITRE LXXXVII

FONCTION DU POUVOIR PUBLIC EN GÉNÉRAL

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1357. Acceptions diverses du mot: Etat. Définition de la société civile. Le mot Etat a une double signification quand on l'applique à l'idée de société ou il signifie la société civile, politique, ou l'on entend par là l'autorité civile supérieure, la souveraineté politique. Il importe grandement de distinguer avec soin ces deux sens. Les confondre peut conduire à de graves erreurs. Rien ne serait plus pernicieux par exemple que de prendre, sous le couvert de ce mot, l'autorité pour la société l'on aboutirait de la sorte à concentrer, à absorber toute la vie sociale dans l'autorité, et l'on poserait le principe du despotisme le plus complet et le plus absolu. Le sens le plus obvie du mot Etat est celui de société civile, politique. L'on entend par société politique « une société complète et parfaite, compoée d'un certain nombre de familles, et qui a pour fin prochaine le bien commun temporel, naturellement nécessaire à tous les hommes ».

La société civile est une société complète, parce que le bien qui lui est propre n'est pas restreint à une classe et à une qualité particulière de bien. Elle est parfaite, parce qu'elle est indépendante, dans son

ordre, des autres sociétés. Elle est composée d'un certain nombre de familles, car, bien que les hommes, comme individus, soient les derniers éléments qui la composent, cependant l'on ne peut les considérer en dehors des familles dont ils sont les membres; rationnellement et historiquement les familles précèdent la société civile qui en est issue, et à laquelle elles fournissent la matière prochaine. Enfin le but de cette société n'est pas autre que de répondre aux légitimes désirs de prospérité temporelle qui agitent le cœur des hommes, et qui en dehors d'elle ne pourraient trouver leur pleine satisfaction. Il va sans dire que par prospérité temporelle l'on n'entend point la prospérité purement matérielle, et qu'elle est subordonnée à la fin suprême qui doit régler toute l'activité humaine. De ce que nous venons de dire, il est facile de conclure que trois éléments constituent la société politique, l'Etat 1° un ensemble d'hommes groupés en familles; 2o une autorité commune souveraine ; 3° l'indépendance vis-à-vis d'autres sociétés de même nature. L'on peut aussi regarder comme faisant partie intégrante de l'Etat, le sol, le territoire qui lui sert comme de support et de point d'appui.

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1358. Objet et perfection de la société civile. Pour connaître plus à fond les droits et les devoirs qui naissent de l'organisation sociale, et de quelle manière doivent être réglés ceux qui lui sont antérieurs, il est bon de ne pas perdre de vue que la société existe non pour le bien de celui-ci ou de celui-là, mais pour le bien de tous. Le pouvoir public, par conséquent, doit chercher à procurer le bien de tous les membres de la société. C'est là un principe fondamental de droit public. Les gouvernés ne sont

pas la propriété des gouvernants. Quand le souverain, prince ou parlement, tourne son pouvoir à procurer, au détriment de la masse, son bien particulier ou celui d'une classe, d'une coterie, d'un parti, il manque à sa mission providentielle toute autorité qui se change en exploitation s'avilit elle-même et mérite de tomber sous le mépris public. L'intérêt commun, d'accord avec la saine morale, doit être la pierre de touche des lois. Mais que de confusion, quelles équivoques, quels malentendus, souvent cherchés, dans ces mots : intérêt public, progrès, bien commun, civilisation, etc., etc.! Les habiles leur attribuent le sens qui leur agrée, et cherchent à faire entrer la société dans des chemins au bout desquels se trouve, déguisée sous le masque du bien public, la satisfaction de leur égoïsme et de leur intérêt personnel.

Il n'est cependant pas très difficile de faire la lumière sur ce point. Le bien public peut-il être autre chose que la perfection de la société? En quoi consiste cette perfection? La société est une réunion d'hommes cette réunion sera d'autant plus parfaite que plus grande sera la somme de perfection qui se rencontrera dans l'ensemble des individus qui la composent, et que cette somme sera mieux distribuée entre tous ses membres. La perfection de la société est en dernière analyse la perfection de l'homme, et plus elle contribuera à la perfection des individus, plus elle sera parfaite.

Dès lors, la solution du problème que nous avons posé est très simple: la perfection de la société consiste dans l'organisation la plus propre au développement simultané et harmonique des individus qui en font partie. Dans l'homme, il y a l'entendement dont

l'objet est la vérité; la volonté dont la règle est la loi morale; des nécessités sensibles dont la satisfaction constitue le bien-être matériel. La société sera donc d'autant plus partaite que son organisation permettra de donner au plus grand nombre plus de vérité à leur intelligence, plus de bien moral à leur volonté, plus de satisfactions légitimes à leurs nécessités physiques.

Il nous est maintenant facile de marquer le dernier terme du progrès social et de la civilisation, en disant qu'il consiste:

Dans le plus grand développement possible de l'intelligence, pour le plus grand nombre possible; dans le plus de moralité possible, pour le plus grand nombre possible; dans le plus de bien-être possible, pour le plus grand nombre possible.

Supprimez l'une ou l'autre de ces conditions, et la perfection disparaît. L'on ne saurait appeler parfait un peuple intelligent, mais sans moralité, et très au dépourvu en fait de moyens de subsistance; qu'il soit ignorant et pauvre, quoique richement doté au point de vue moral, il laissera à coup sûr beaucoup à désirer; bien plus encore si, ignorant et immoral, il regorge de biens matériels. Avec l'intelligence et la moralité, mais misérable, il est digne de pitié; intelligent et riche, mais vicieux, il mérite le mépris; enfin, donnez-lui la moralité et la richesse, mais laissezle plongé dans l'ignorance, il ressemblera à un homme bon, riche et sot, ce qui ne constitue certes pas l'idéal de la perfection humaine.

1359. Double fonction du pouvoir civil. — Le pouvoir civil a deux fonctions générales : il doit protéger et il doit promouvoir. Il doit protéger contre

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