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voirs s'élèvent, ses droits grandissent de la même manière et il arrive que ceux qui possèdent les droits les plus augustes n'en jouissent que parce qu'ils portent les plus graves responsabilités. C'était le sens de la parole de Pie VII. Nos droits viennent de nos devoirs et ne sauraient s'en séparer. Tous nos privilèges, en définitive, viennent en quelque manière de nos devoirs envers Dieu.

Maintenant si nous comparons les hommes non plus à leur Auteur, mais entre eux, il ne páraît pas que le devoir s'explique suffisamment par le droit, ni le droit par le devoir. Dira t-on, par exemple, que le devoir des enfants envers leurs parents est expliqué suffisamment par le droit de ceux-ci? Mais ce droit, à son tour, n'a-t-il pas sa meilleure garantie dans les devoirs des parents envers leurs enfants? Quelle sera ensuite l'origine de ces devoirs? Nous ne pouvons chercher le premier principe de l'ordre moral ni dans le droit seul, ni dans le devoir seul: il faut remonter plus haut, jusqu'à la loi, qui seule explique à la fois et les devoirs des uns et les droits des autres; elle embrasse également les deux termes du rapport, elle les pose simultanément, les éclaire elle-même tous les deux, en même temps qu'elle leur permet de s'éclairer l'un l'autre.

1243. La force n'est pas le principe des droits et des devoirs. En expliquant les droits et les devoirs par la loi morale, nous rejetons l'hypothèse de Hobbes et autres moralistes indignes de ce nom, qui regardent la force comme le premier principe de l'ordre moral. Selon Hobbes et les évolutionnistes d'aujourd'hui, l'humanité a débuté par l'état de pure animalité, ou de barbarie, dans lequel chacun prétend

à tout et ne renonce qu'à ce qui n'est pas en son pouvoir. L'équilibre des forces et des appétits tend à s'établir et, comme il est de l'intérêt de tous de le fixer, des coutumes et des lois naissent qui ne sont que la consécration des conquêtes de la force. Les lois sans doute introduisent une nouvelle force dans la société; mais cette force n'est une force morale qu'en apparence, car elle naît uniquement de la nécesité physique et tend toujours à rester en accord avec elle. Si le désaccord est trop grand, l'équilibre est rompu, et, à la suite d'un désordre passager, le droit se met de nouveau d'accord avec la force.

Critique. Nous avouons que, de fait, la force prime souvent le droit, et qu'elle est même le point de départ de certains états de choses qui, injustes à l'origine, peuvent devenir justes à la longue et en vertu d'autres principes (Cf. no 1231). Mais on reconnaîtra que, malgré l'injustice des hommes et les triomphes insolents de la force, il y a encore une foule de droits universellement reconnus et respectés, qui n'ont plus aucune force à leur service et qui n'ont pas d'autre garantie que la conscience. En étudiant bien l'histoire on verrait même que c'est moins la force qui attire à elle le droit, que le droit qui attire la force. Quoi qu'en disent nos adversaires, on est bien fort quand on a droit, et la faiblesse d'aujourd'hui sera la force de demain. Mais quelles que soient les injustices dont nous avons le spectacle dans l'histoire ou à notre époque, il faut maintenir que le droit a pour cause unique la loi morale, celle dont nous avons reconnu l'existence, qui n'est autre, en définitive, que la loi naturelle promulguée par la raison et dans la conscience. Il n'y a que la loi morale qui incline l'homme

en tant qu'homme, c'est-à-dire en tant qu'être raisonnable et moral; il n'y a que cette loi qui puisse lui donner l'empire sur lui-même, sur ses passions, et par là même sur toute la nature. La force ne mène l'homme que comme elle mène l'animal; elle ne peut être par elle-même le principe d'aucun ordre moral, d'aucun droit ni d'aucun devoir.

En ra

1244. L'animal a-t-il des droits? menant le droit à la force, nos adversaires le suppriment en réalité. S'obstinant néanmoins à le maintenir verbalement, il n'est pas étonnant qu'ils l'attribuent quelquefois et ainsi défiguré aux animaux. D'autres philosophes, qui comprennent mieux la nature du droit et professent le spiritualisme, se montrent non moins généreux envers la bête et paraissent lui prêter des droits proprement dits: ils insistent tout au moins sur de prétendus devoirs de l'homme envers elle. Plus d'un partisan exagéré de la loi protectrice des animaux (loi Grammont) est de ce nombre. Ceux qui condamnent absolument la vivisection paraissent tomber dans le même excès. Cette sorte de commisération et d'humanité, pour ainsi dire, envers l'animal, rappelle certaines pratiques indiennes, inspirées, il est vrai, par la croyance ridicule à la métempsycose. Il est étrange que l'homme, qui a regardé son semblable et son frère comme un vil esclave et une brute, ait pu réserver ainsi des trésors de pitié pour la bête. Nous ne méconnaîtrons certes aucun de nos devoirs d'humanité et de douceur. Mais nous dirons à quel titre l'animal en est l'objet.

Affirmons d'abord que l'animal n'a aucun devoir niaucun droit proprement dit, puisque le droit et le devoir sont essentiellement fondés sur la loi morale, dont il

n'est pas le sujet. Incapable de délibération et de liberté proprement dite, dépourvu de conscience morale, il n'est pas le maître de sa vie ni d'aucun de ses actes, il n'a pas de responsabilité, de personnalité, ni partant pas de droit. Comment aurait-il des droits, puisqu'il n'a pas de devoirs? Il ne connaît pas sa fin comme telle; il n'a pas dès lors le devoir de s'y acheminer ni les droits qui découlent de ce devoir. Bref l'animal n'a aucune valeur morale, celle que donnent la connaissance du bien moral, de l'honnête, le pouvoir et la conscience de le pratiquer.

Ajoutons les absurdités où tombe le système que nous combattons. Les Indiens et les Egyptiens ont bâti des hôpitaux et autres refuges pour les animaux et il s'est trouvé plus d'un Europén qui les a imités; le fétichisme règne encore dans presque toute l'Afrique; sans partager certes les mêmes erreurs grossières, nombre de personnes d'ailleurs sensées ont cependant pour les animaux domestiques et familiers des attentions sans nombre et une sorte de culte ridicule, qui dénotent plus de sensibilité que de cœur et de manie que de raison. Tel d'ailleurs comblera de soins ses animaux favoris qui laissera son semblable mourir de faim. Toutes ces pratiques renouvelées d'un certain paganisme sont absurdes; car il faut, pour les justifier, recourir aux pires des théories païennes.

Si nous les condamnons, ce n'est pas certes que nous soyons plus sévères pour l'animal; mais le mieux que nous puissions faire c'est de le laisser dans sa condition naturelle et de ne pas changer ses justes rapports avec nous. L'homme ne peut donc user et abuser de l'animal, qui est sa chose: il ne peut lui infliger sans raison et sans mesure le travail et la douleur. L'homme,

qui ne doit abuser de rien, serait particulièrement coupable, s'il abusait de l'animal, créature sensible et qui ressemble si étonnamment à la partie inférieure de nous-mêmes. Il se doit à lui-même d'épargner à l'animal, surtout à l'animal qui le sert, toute douleur inutile; et ainsi l'animal a pour garantie vis-à-vis de son maître la modération, la douceur, disons même à quelques égards, la gratitude de celui-ci, ce qui vaut mieux que des droits chimériques.

1245. La vivisection. Jusqu'où s'étendent maintenant les droits de l'homme ainsi compris et mitigés dans leur application par les sentiments de douceur? Il est assez facile de le déterminer ou du moins il y a peu de cas qui puissent faire l'objet d'un doute. Pour ne parler que de la vivisection, elle a été condamnée absolument par certains esprits et excusée outre mesure par d'autres. En nous appuyant sur les principes établis, nous n'hésiterons pas à la condamner dans tous les cas où elle n'est pas nécessaire ou sérieusement utile pour l'instruction de l'homme et le progrès des connaissances. Elle ne sera donc permise que dans des laboratoires où travaillent des hommes voués à la science et des élèves soucieux de s'instruire. Encore devra-t-on user de tous les moyens raisonnablement possibles pour rendre ces expériences moins cruelles par exemple insensibiliser l'animal sur lequel on opère. Quant à prohiber absolument la vivisection, on ne le peut sans assimiler l'animal à l'homme, sans le considérer comme une personne au lieu d'une chose et lui prêter quelques-uns de ces droits absolus que l'homme tient de sa raison et de sa dignité morale.

1246. Les préceptes négatifs de la loi na

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