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PREFACE.

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OMME T. LIVE, en commençant cete partie de fes ouvrages, n'a pas craint d'avancer que la guerre d'Annibal contre les Romains étoit la plus mémorable qu'on eût jamais faite, je ne ferai pas difficulté d'affarer que l'histoire qu'il en donne eft le plus beau morceau qu'on ait jamais écrit en ce genre. Car fi on en ju ge par les événements qui y font racontés, batailles fanglantes, républiques & monarchies ébranlées ou abbattuës, Généraux & Rois vaincus, tués, ou chargés de chaînes ; il n'y en eut jamais de plus célebres, ni de plus intéreffants. Si on confidere les héros & les capitaines qui ont été les in ftruments de tant de grandes révo

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lutions, les Fabius, les Marcellus, les Emiles, les Scipions, & . tant d'autres du côté des Romains & de celui des Carthaginois, Annibal, qui feul les a tous foutenus, exercés & fouvent vaincus, avant de leur ceder; on n'en trouve point ailleurs qui les furpaffent, ou même qui leur foient compa rables. A l'égard de la beauté du ftile & de la force de l'éloquence, perfonne n'a égalé T. Live en ce genre. Il eft quelquefois étendu dans fes récits, fouvent ferré dans fes harangues; mais on le trouve toujours ou concis fans obfcurité, ou diffus fans ennui. Que dirai-je maintenant de toutes les vertus morales, civiles & militaires? l'amour de la patrie, le défintereffement, la grandeur d'ame, la valeur, la fageffe, la bonne conduite, la religion même ? Où les viton jamais placées dans un plus beau jour, & attachées à des faits plus éclatants, & plus capables de

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graver dans la mémoire ? Je puis ajouter que les vices oppofés, la perfidie, l'avarice, la trahison, l'orgueil, l'ignorance, ou la témérité, ne contribuent pas moins que les vertus mêmes, quoique d'une façon differente, à donner du plaifir aux hommes, ou à les inftruire, ce qui doit être la feule fin du lecteur, auffi-bien que de l'hiftorien. Voilà les raifons qui m'avoient engagé, dès le temps que j'enseignois publiquement, à traduire, préférablement aux autres, cette partie, à laquelle je comptois m'entenir, & qu'on peut d'ailleurs regarder comme un tout féparé, & indépendant du refte. Mais comme il m'est refté affez de loifir, depuis que j'ai quitté la profession, j'ai continué à traduire les autres parties de cet excellent écrivain, que j'ai expliqué publiquement pendant plus de trente années. Je compte même que la premiere Décade

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qui contient la naiffance & les pre miers accroiffements de Rome, par où il étoit à propos de commencer l'impreffion, fuivra de fi près celle que je donne ici qu'on ne s'appercevra prefque pas que j'aye renversé l'ordre naturel de cette hiftoire.

Au refte, il eft bien certain que c'eft dans la lecture de ces fortes d'écrits que les hommes peuvent & fe corriger & s'inftruire, en s'occupant agréablement. Il n'y a que le vrai qui frappe, & qui faffe des impreffions durables. Il y a bien de la difference entre les héros réels de l'hiftoire, & les perfonnages imaginaires qu'on nous offre dans ces brochures dont on recommence à inonder Paris, depuis quelques années. Je ne parle pas ici de ces drames de l'une & de l'autre efpece, qu'on met fur le théâtre depuis trente ou quarante ans, dans lefquels Racine & Moliere, s'ils revenoient, na

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