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dans la promptitude, & fortant toujours des lieux où il paffoit, avant que les habitants euffent pû prendre aucune mefure pour l'arrêter. Pour Afdrubal, avant de quitter la province, il tira de l'argent de tous les peuples qui étoient encore fous la domination des Carthaginois, perfuadé qu'Annibal lui-même n'avoit obtenu qu'en payant, & le paffage de fes troupes en plufieurs endroits de fa route, & le fecours des Gaulois, qui l'avoient fuivi jufqu'en Italie; & que s'il eût entrepris un fi long voyage, fans avoir beaucoup d'argent, il ne feroit jamais arrivé au pié des Alpes. Ayant donc obligé ces nations de lui fournir promptement tou• tes les fommes qu'il en put tirer, il se rendit fur les bords de l'Hebre. Les deux géneraux Romains n'eurent pas plutôt appris ce qui s'étoit paffé dans le fénat de Carthage, & les ordres qu'on avoit donnés à Afdrubal, que renonçant à toute autre entreprise; ils réunirent leurs armées pour s'oppofer au départ d'Afdrubal, perfuadés que fi ce géneral, avec l'armée qu'il avoit en Efpagne, venoit à bout de paffer en Italie, où on avoit déja bien de la pei ne à réfifter à Annibal feul, la jonc

tion des deux freres entraîneroit infail liblement la ruine de la république. Preffés de ces craintes & de ces inquiétudes, ils joignirent leurs troupes fur les bords de l'Hebre; & ayant paffé ce fleuve, il délibererent long-temps s'ils iroient camper à la vûë de l'ennemi, ou s'ils fe contenteroient d'attaquer les alliés des Carthaginois, pour mettre Afdrubal dans la néceffité de les fecourir, & retarder par là son voyage. Enfin ils fe déterminerent à attaquer la ville la plus opulente en ce temps-là de tout le pays, & à qui le voifinage du fleuve avoit donné le nom d'Ibera. Dès qu'Afdrubal le fçut, pour faire diverfion en faveur de fes al liés, il alla auffi de fon côté attaquer une ville qui s'étoit rendue depuis peu aux Romains: ce qui obligea les géneraux ennemis de lever le fiege d'Ibera, & de tourner tous leurs efforts contre Afdrubal lui même.

Pendant quelques jours, les deux armées demeurerent campées à cinq milles l'une de l'autre, fe contentant d'efcarmoucher, fans qu'aucune des deux parût fonger à une affaire géne rale. Enfin dans le même jour & prefque dans le même moment, les géne

raux des deux partis, comme de concert, donnerent le fignal de la bataille, & defcendirent dans la plaine avec toutes leurs forces. Les Romains étoient partagés en trois corps. Une partie des foldats armés à la legere étoit placée parmi ceux qui étoient aux premiers rangs; les autres dans le centre. La cavalerie étoit répandue fur les deux aîles, & les couvroit. Afdrubal mit les Espagnols au corps de fa bataille, les Carthaginois à l'aile droite, & les Africains à la gauche, avec les troupes auxiliaires. A l'égard de la cavalesie, il plaça celle des Numides devant l'infanterie des Carthaginois, & les autres devant celle qui étoit composée d'Africains, fur les deux aîles. Il ne rangea pas tous les Numides à la droi, te, mais feulement ceux qui traînant deux chevaux à la fois, avoient coutume, dans le plus fort de la mêlée, de fauter tout armés fur le plus frais de deffus celui qui étoit las & harassé. Telle étoit la legereté des cavaliers. Telle étoit la foupleffe & la docilité des chevaux, pour fe prêter à tous leurs mouvements. Les géneraux des deux partis ayant rangé leurs armées dans l'ordre que je viens de dire

avoient autant de motifs d'efperer les uns que les autres; car leurs troupes étoient à peu près égales par rapport à l'efpece & au nombre des foldats. Mais les fentimens & les courages étoient biens differens. Car quoique les Romains fiffent la guerre loin de leur patrie, leurs géneraux n'avoient pas laiffé de leur perfuader qu'ils combat toient pour l'Italie & pour la ville de Rome. C'est pourquoi, faifant dépendre leur retour auprès de leurs femmes & de leurs enfans, du fuccès de cette bataille, ils s'étoient déterminés à vaincre, ou à mourir. L'autre parti étoit compofé de gens qui n'avoient: pas la même ardeur, ni la même réfolution. La plus grande partie des foldats étoient des Efpagnols, qui ai moient mieux être vaincus en Efpagne, que d'y vaincre, pour être traînés en Italie. Ainfi ceux qui étoient au corps de la bataille, lâcherent pié dès le premier choc, prefque avant d'avoir lancé aucun trait. Puis voyant que les Romains s'avançoient contre eux aveo beaucoup de vigueur, ils prirent ouvertement la fuite. Les deux aîles ne combattirent pas pour cela avec moins de courage; les Carthaginois d'un.côs

té, & les Africains de l'autre, pref foient leurs ennemis, qu'ils tenoient comme inveftis. Mais dès que l'infanterie des Romains fe fût avancée toute entiere dans le milieu, elle se trouva en état d'écarter les deux aîles des Carthaginois. Et quoiqu'elle eût deux combats à foutenir en meme-temps, elle fut cependant victorieufe dans l'un & dans l'autre. Car après avoir défait & mis en fuite ceux qui étoient au centre, elle se trouva fuperieure en va leur & en nombre à ceux qui reftoient.. Il y eut beaucoup de fang répandu dans cette occafion : & fi les Efpagnols n'avoient pas pris la fuite dès le commencement de l'action, il s'en fût fauvé très-peu d'une fi grande armée. La cavalerie ne donna point. Car dès les Maures & les Numides virent que la victoire fe déclaroit pour leurs ennemis par la défaite du corps de bataille, il prirent ouvertement la faite; & faifant marcher les élephants devant eux, ils laifferent les deux aîles découvertes. Afdrubal, de fon côté, ayant foutenu le combat jufqu'au bout, fe fauva du milieu du carnage avec un petit nombre de gens. Les Romains s'emparerent de fon camp, & le pil

que

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