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que vous avez efperé d'être fecouru par les Romains. Mais voyant qu'ils « Vous ont entierement abandonnés, « & que vous ne pouvez plus compter «<< fur vos murailles, ni fur vos armes, « ́ je vous propose une paix que la néceffité doit vous faire accepter, quelque fâcheufe qu'elle puiffe être d'ailleurs. Et fi vous voulez qu'elle réuffiffe, il faut que vous en écoutiez les .. conditions en vaincus, comme An- « nibal vous les propofe en vain- « queur: il faut que vous regardiez.. comme un gain tout ce qu'on vous ce laiffe, & non pas comme une perte « tout ce qu'on vous ête, puifque à la rigueur tout appartient au victorieux. « Il veut que vous abandonniez une « ville à moitié ruinée, & dont il eft prefqu'entierement le maître. Mais ce il vous rend vos campagnes, & vous « laiffe la liberté d'en bâtir une nou- « velle, à l'endroit qu'il vous défignera. Il vous ordonne de lui apporter « tout votre or & tout votre argent, « tant public que particulier. Mais il « vous donne la vie & la liberté, à «vous, à vos femmes & à vos enfans, pourvû que vous fortiez de Sagonte fans armes. Voilà les loix que vous

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dicte un ennemi vainqueur, & que » la néceffité veut que vous acceptiez, » quelque triftes qu'elles foient. Pour » moi je ne doute pas qu'il ne rabbatte beaucoup de la dureté de ces condi» tions, quand vous lui aurez témoigné une foumiflion fans réserve. » Mais quand il faudroit les obferver à la rigueur, ne vaudroit-il pas mieux que vous priffiez ce parti,que de vous: » laiffer égorger à la vûë de vos fem» mes & de vos enfants, & que d'expofer des perfonnes fi cheres à tou»tes les indignités que le vainqueur » feroit en droit de faire fouffrir aux vaincus? Quand Alarcus eut ceffé de parler, les premiers du fénat fe féparerent d'avec le peuple, qui étoit accouru en foule pour l'entendre : & fans lui donner aucune réponse, ils firent porter tout l'argent du trefor public,& tout celui qu'ils avoient chez eux, dans un feu qu'ils avoient fait allumer exprès dans la place publique ; & la plûpart fe précipiterent eux-mêmes au milieu des flammes.

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Une réfolution fi défefperée avoit déja jetté la confternation dans toute la ville, lorfqu'on entendit du côté de la citadelle un fracas qui ne donna pas

moins d'effroi. Il étoit excité par la chûte d'une tour que les ennemis battoient depuis long-tems. Une cohorte de Carthaginois étant entrée brusquement par l'ouverture qu'elle laiffa en tombant, fit avertir Annibal que la ville n'avoit plus de défenfe de ce côtélà. Ce général, fans perdre un moment, l'attaqua avec toutes les forces, ordonnant à fes foldats de tuer tous ceux qui étoient en âge de porter les armes. Cet ordre étoit cruel. Mais l'évenement fit connoître qu'il étoit néceffaire. Car à quoi auroit fervi le ménagement qu'on eût eu pour des furieux & des defefperés, qui ou s'étant enfermés dans leurs maifons, s'y brulerent avec leurs femmes & leurs en-' fants; ou ayant pris les armes pour fe défendre, ne les quitterent qu'en perdant la vie?

On trouva dans la ville un trèsgrand butin. Et quoique les habitans euffent à deffein gâté & ruiné tout ce qu'ils avoient de plus beau & de plus magnifique, & que le vainqueur irrité eut fait main baffe fur les vaincus, fans aucune diftinction d'âge ni de fexe, & qu'on eut abandonné tous les prifonniers aux foldats; Annibal ne laiffa pas

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de tirer une fomme d'argent très-con-fiderable de la vente des effets qui fe. trouverent, & d'envoyer à Carthage: une grande quantité de meubles rares. & précieux. Quelques auteurs rappor tent que le fiége de Sagonte dura huit. mois; & qu'Annibal, après s'être rendu maître de cette ville, alla paffer le: quartier d'hyver à Carthagene, avec fes, troupes; & qu'étant parti de cette ville. au milieu du printemps, il arriva en. Italie après cinq mois de marche. Si ce qu'ils difent eft vrai, il eft impoffible. que ce foient les confuls Pub. Corn. &. Tib. Sempronius à qui les Sagontins. envoyerent des ambaffadeurs au com. mencement du fiége de leur ville; &. qui ont combattu pendant leur magi ftrature contre Annibal, l'un auprès du Thefin, & tous deux ensemble. long tems après proche de Trebie. Il faut abfolument ou qu'Annibal ait employé à fes expeditions moins de temps qu'ils ne difent, ou que le fiége. de Sagonte ait fini, & non commencé, avec le confulat de ces deux comman dants* Car on ne peut pas rejetter le combat de Trebie au confulat de Ser

Polybe dit pofitivement que le fiége de Sagonte fis quand ils entrerent dans le confulat,

A

vifius, & de Flaminius qui fit la cé
rémonie de fon inauguration à Rimi-
ni: puifqu'il eft conftant que ce fut le.
conful Sempronius qui après la batail-
le de Trebie, vint à Rome pour pré-
fider aux affemblées ; & qu'après avoir
fait nommer confuls Servilius & Fla-
minius, il retourna joindre son armée
dans fes quartiers d'hyver

Sagonte allar

mains,

Les ambaffadeurs qu'on avoit en- La prife de voyés à Carthage étoient à peine reve- me les Ros nus à Rome pour y annoncer les hoftilités d'Annibal & des Carthaginois, qu'on y apprit la prise & la ruine de Sagonte. Une nouvelle fi affligeante. excita dans le cœur des fénateurs divers mouvements en même-temps; la compaffion pour des alliés fi indignement traités, la honte de ne les avoir. pas fecourus, le defir de fe venger des. Cathaginois, la crainte du péril qui les. menaçoit eux-mêmes: & comme fi. l'ennemi eut déja été à leurs portes, ils s'agitoient inutilement, fans prendre aucune réfolution falutaire. 1ls confideroient qu'ils n'avoient jamais eu affaire à un ennemi plus belli- «. queux & plus redoutable; & que «<. les Romains n'avoient jamais été fi e peu aguerris qu'ils l'étoient alors. m

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