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ter, & de paffer du côté des Romains. Enfin on dit qu'Annibal lui-même fongeoit à fe retirer dans la Gaule avec fa cavalerie, en abandonnant toute fon infanterie. Ce géneral voyant fes troupes dans cette difpofition, réfolut de quitter un pays où il étoit en danger de mourir de faim, ou de fe voir abandonné, pour paffer dans la partie de l'Apouille, dont le climat plus chaud faifoit efperer une plus prompte moiffon. Il comptoit en même temps, qu'à proportion qu'il s'éloigneroit davantage des ennemis, il rendroit la défertion plus difficile à fes foldats. Il partit de nuit, ayant allumé des feux comme auparavant, & laiffé un petit. nombre de tentes pour la forme, afin que la crainte de tomber dans des embûches contînt les Romains, comme elle avoit déja fait. Mais le même Marius Statilius ayant vifité, avec beaucoup d'attention, tout le revers des montagnes où on pouvoit craindre de la fraude, rapporta qu'il avoit vû d'affez loin l'armée des ennemis qui fe retiroit tout de bon. Alors on propofa tout de nouveau de les pourfuivre. Les deux confuls étoient toujours de fentiments oppofés. Mais comme Varron

pé à Cannes,

avoit pour lui prefque toute l'armée, au lieu que le feul Servilius, conful de l'année précedente, étoit de l'avis de Paul Emile; les Romains preffés par leur mauvaise destinée, partirent, à la pluralité des voix, pour aller rendre le village de Cannes fameux par la plus cruelle défaite que les Romains ayent jamais effuyée. Annibal s'étoit cam- Annibal cam pé auprès de ce village, de façon qu'il avoit mis au dos de fon armée le vent Vulturne, qui, des plaines arides où il eft fitué, éleve des tourbillons affreux de pouffiere. Outre que ce pofte lui étoit avantageux pour le préfent, il efperoit d'ailleurs qu'il lui feroit falutaire, lorfqu'ayant le vent & la pouffiere derriere lui, il combattroit contre les Romains, qui auroient l'un & l'autre dans le vifage & dans les yeux.

Les confuls ayant fait reconnoître les lieux, commencerent à poursuivre Annibal. Lorfqu'ils furent arrivés près de Cannes, à la vûe de l'armée ennemie, ils fortifierent leurs deux camps, contenant le même nombre de foldats, & féparés l'un de l'autre à la même distance qu'auprès de Geraunium. L'Ofante, qui féparoit les deux camps

n'attend fon falut que de les ennemis,

la témérité de

Romains, couloit affez près d'eux pour leur fournir commodément de l'eau, que chacun alloit puifer dans fon voifinage, ce qui occafionnoit de frequentes efcarmouches entre ceux du grand camp, & les Carthaginois. Car ceux qui étoient dans le petit camp fe fourniffoient d'eau avec beaucoup plus de facilité, n'y ayant de leur côté aucun corps d'ennemis qui les en empêchât. Annibal efperant que les confuls accepteroient le combat dans un lieu fi avantageux pour sa cavalerie, qui étoit la partie de fes troupes où il étoit invincible, rangea fon armée en bataille, & envoya les Numides caracoller jufqu'à la tête de celle des Romains, pour les attirer. La fédition de la part des foldats, & la difcorde entre les confuls, venoit de fe rallumer parmi eux. Paul Emile objectoit des deuxcon- à Varron la témerité de Sempronius & de Flaminius. Et Varron à fon tour, reprochoit à fon collegue la lenteur & la nonchalance de Fabius, dont la prétendue fageffe n'étoit qu'un prétexte fpecieux dont on fe fervoit pour couvrir fa crainte & fa lâcheté. Il prenoit les hommes & les dieux à témoin, que ce n'étoit pas fa faute,.

fuls.

Difcuffion

fi Annibal confervoit la poffeffion " de l'Italie comme de fon patrimoine. " Que fon collegue lui lioit les bras, " & le tenoit comme enchaîné. Qu'il " arrachoit les armes aux foldats indi- " gnés, & qui ne fouhaitoient rien " tant, que de les employer contre les " ennemis. Paul Emile, de fon côté " proteftoit, que fi les legions ve- " noient à fuccomber dans une batail- " le, où on les engageoit avec fi peu de confideration & de jugement, il " n'auroit aucune part à la faute, quoiqu'il ne refufât pas d'avoir part au peril. Que c'étoit à Varron de faire “ en forte que ceux qui avoient la lan- “ gue fi libre avant le combat, n'euf- “ fent pas les bras moins vigoureux dans le combat même.

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Pendant qu'ils perdent le temps à chicanner fur leurs fentiments, plutôt qu'à déliberer fur le bien de la république, Annibal fit rentrer les troupes dans fon camp, après les avoir tenues fur le champ de bataille la plus grande partie de la journée, & ordonna aux Numides de paffer l'Ofante, & d'aller attaquer ceux des ennemis qui viendroient du petit camp pour faire de F'eau. Ils n'eurent pas plutôt paru fus

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le bord, que de leurs feuls cris, ils mirent en fuite cette troupe de gens qui venoient remplir leurs vafes, fans être en état de fe défendre. Après ce fuccès, ils poufferent jufqu'au corps de garde avancé des Romains, & jufques aux portes mêmes de leur camp. Varron crut que c'étoit un affront pour les Romains, qu'une poignée de gens qui marchoient fans ordre & fans difcipline, allât porter l'effroi jufques dans leur camp. Et la feule raifon qui l'empêcha de paffer le fleuve & de mettre fes gens en bataille, c'eft que Paul Emile avoit encore ce jour là le comVarron don mandement. Mais le lendemain, fon ne le fignal tour étant revenu, fans confulter fon malgré fon collegue, il donna le fignal du combat, & mena fes troupes en ordre de batail le contre les ennemis, au-delà de la riviere. Paul fut obligé de le fuivre, ne pouvant fe difpenfer de le feconder, quoiqu'il n'approuvât nullement foa entreprise. Ils mirent la cavalerie Romaine à l'aîle droite la plus voifine du fleuve. L'infanterie étoit au corps de bataille. A l'extremité de l'aîle gauche, on plaça la cavalerie des alliés ; leur infanterie vers le milieu; les frondeurs, encore plus interieurs, fe trou

du combat,

collegue,

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