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Annibal fait

combat,

chemins obliques. Et après avoir fait reconnoître les lieux avec beaucoup de foin, il alla chercher l'ennemi dans le deffein qu'il forma dès-lors, & dont il ne s'écarta jamais depuis, de ne point hazarder de bataille, qu'autant que la néceffité l'y obligeroit. Le jour même qu'il campa à la vûë des Carthaginois, affez près d'Arpi, Annibal ne manqua de vains efpas de faire fortir les troupes de fon forts pour camp, & de lui préfenter la bataille. l'attirer au Mais quand il vit que tout étoit tranquille dans le camp du dictateur, & que toutes fes démarches n'y excitoient -pas le moindre mouvement, il fe retira dans le fien, blâmant en apparence la lâcheté des Romains, à qui il reprochoit d'être infenfibles à la gloire, & d'avoir perdu cette valeur martiale, fi naturelle à leurs peres, & de lui ceder ouvertement une victoire aifée. Mais dans le fond du coeur, il étoit outré de voir qu'il avoit affaire à un general fi different de Flaminius & de Sempronius, & que les Romains, inftruits par leurs défaites, avoient enfin choifi un general capable de lui tenir tête. Et dès ce jour il craignit beaucoup plus la prudence de Fabius, que le nombre de fes foldats, & l'autorité Tome I.

I

que lui donnoit la dictature. Mais comme il n'avoit pas encore éprouvé fa conftance, il effaya fi par de fréquents mouvements, & par les ravages continuels qu'il exerçoit fur les terres des alliés, il ne pourroit point ébranler fon courage. Et tantôt il décampoit avec précipitation, tantôt il s'arrêtoit tout court dans quelque chemin détourné, où il fe tenoit caché, pour voir s'il ne le pourroit point furpren dre en raze campagne. Mais Fabius, fans le perdre de vûë, conduifoit fon armée par des lieux élevés, ne s'approchant jamais affez de l'ennemi, pour être obligé de combattre mal gré lui; mais ne s'en éloignant pas non plus tellement, qu'il lui pût échapper. Il tenoit fes foldats renfermés dans fon camp, dont il ne les laiffoit jamais fortir que par néceffité, pour aller au fourage, pour faire provision de bois & d'eau, avec la précaution de, les envoyer toujours en grand nombre, & de s'affurer des lieux où ils alloient. Il avoit un corps de cavaliers & de foldats armés à la legere, qui étoit deftiné à tomber à propos fur les ennemis, ou à s'oppofer à leurs attaques imprévûës. Par là, fes fourageurs

étoient toujours en fureté, au lieu que ceux d'Annibal ne s'écartoient jamais impunément. Il évitoit avec foin les actions generales: & les actions peu confiderables, mais qui tournoient toujours à l'avantage des fiens, à qui il avoit foin d'affurer une retraite, rendoient infenfiblement à fes foldats la confiance que les défaites précedentes leur avoient ôtée, & les accoutumoit à compter davantage fur leur bonheur & fur leur courage. Mais le maître de la cavalerie n'étoit pas moins irrité qu'Annibal de la fage conduite du dictateur, & n'étoit pas moins attentif à les traverfer. C'étoit un homme d'un caractere bouillant & impetueux, plein de vanité & de fuffifance, & que la feule autorité de Fabius, à qui il étoit obligé d'obéir, empêchoit de fe perdre & la république avec lui. Il étoit au furplus grand parleur, & ne gardoit aucune mesure dans les reproches qu'il faifcit au dicta

d'abord devant un petit nombre de perfonnes, & bien-tôt en préfence de toute l'armée; le traitant de lâche & d'indolent, au lieu de prudent & de circonfpect qu'il étoit ; & donnant à fes vertus le nom des vices qui en avoient l'apparence. Ainfi par un arti

Caractere

de Minucius.

fice qui n'a que trop fouvent réuffi, il établiffoit fa réputation fur les ruines de fon general & de fon fuperieur.

Annibal paffa du pays des Hifpiniens dans le Samnium, ravagea le territoire de Benevent, & prit la ville de Telefie. Enfin il exerça à deffein toute forte d'hoftilité fur le pays des alliés de la république, afin de voir fi Fabius, pour les venger, ne prendroit point le parti de lui donner bataille. Il y avoit parmi les alliés du nom latin, qu'Annibal avoit fait prifonniers à la journée de Trafimene, & renvoyés depuis fans rançon, trois cavaliers Campaniens, que ce general avoit comblés de préfents, & à qui il avoit fait des promeffes magnifiques, pour porter à faire entrer leurs compatriotes dans fes interêts. Ils lui avoient fait entendre, que s'il paffoit avec fon armée dans la Campanie, il lui feroit aifé de fe rendre maître de la capitale de cette province. L'affaire lui paroiffoit trop importante pour l'entreprendre fur la parole que lui donnoient de fi foibles garants. Cependant après avoir balancé quelque temps entre la crainte de s'engager trop legerement, & l'efperance de réuffir, il s'avança du côté de Capouë. Ces cavaliers l'étant

les

venus trouver dans fon camp, il les fomma de confirmer par des effets la promeffe qu'ils lui avoient faite de bouche: & après leur avoir ordonné de le venir trouver avec quelques-unsdes principaux de la ville, il les renvoya. En attendant il commanda à fon guide de le.conduire dans le territoire de Cafin, ayant fçû de ceux qui connoiffoient le pays, que s'il s'empa roit de ce défilé, les Romains n'auroient plus de paffage pour venir au fecours de leurs alliés. Mais la manierebarbare dont il prononça ce nom, fit. que le guide entendit Cafilin, au lieu de Cafin. Ainfi en prenant une route' Erreur d'Antoute differente, il traverfa les terres nibal. d'Allifa, de Calatium & de Calene, & fe trouva, contre fon intention dans les plaines de Stella. S'étant apperçû qu'il étoit entouré de fleuves & de montagnes, il fit venir le guide, &.

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lui demanda où il étoit: Celui-ci luiayant répondu que ce jour-là il camperoit à Cafilin, il reconnut enfin fonerreur, & que Cafin étoit bien loin delà. Pour intimider les autres guides par le châtiment de ce malheureux & empêcher qu'on ne le fit tomber à l'avenir dans un pareil inconvenient 27

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