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chaud, qui fe font fentir alternative ment à l'arrivée du printemps, que par les infomnies continuelles, & les vapeurs groffieres du marais, qui lui donnoient de violents maux de tête : comme le temps ni le lieu ne lui permettoient pas d'ufer de remedes, il Annibal perd eut enfin le malheur de perdre un

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œil.

Lorfqu'il fut forti de cesterres humides & marécageufes, après y avoir perdu beaucoup d'hommes & de chevaux de la maniere du monde la plus déplorable, il campa dans le premier endroit fec qu'il rencontra. Et ayant appris par fes coureurs que l'armée ennemie étoit aux environs d'Arretium, il s'attacha, avec une application infinie, à connoître les deffeins & le caractere du conful, la fituation du pays, pays, les moyens dont il devoit fe fervir pour avoir des vivres, les chemins par où il pouvoit les faire conduire dans fon camp, & gé ́néralement toutes les chofes qui pou voient lui être avantageufes, dans les conjonctures préfentes. La contrée de l'Etrurie qui eft entre Fefules & Arretium, étoit la plus fertile de l'Italie. On y trouvoit en abondance des troupeaux, des blés, & tous les fruits

que

que la terre produit pour la nourriture des hommes. Le conful étoit encore

Caractere de

tout fier des fuccès qu'il avoit eus dans Flaminius. fon premier confulat. Il fe mocquoit des loix & des confeils des fénateurs. Il n'avoit pas même pour les dieux tout le refpect qu'il auroit dû. Et la fortune avoit encore nourri & augmenté fa témérité naturelle, par les avantages qu'elle lui avoit procurés, tant en paix qu'en guerre. Ainfi il étoit ailé de prévoir que ne confultant ni les dieux, ni les hommes, il agiroit en tout avec beaucoup d'imprudence & d'emportement. Annibal, de fon côté, n'oublia rien de ce qui pouvoit irriter fon caractere bouillant, & le précipiter avec plus de violence encore dans les vices qui lui étoient naturels. Ainfi laiffant l'armée Romaine à la gauche, il prit fur la droite du côté de Fefules ; & mettant tout à feu & à fang dans le beau milieu de l'Etrurie, il étalla aux yeux du conful le plus de ravage & de défolation qu'il lui fut poffible. Flaminius n'étoit pas d'humeur à refter tranquille dans fon camp, quand même Annibal feroit demeuré en repos dans le fien. Mais quand il vit qu'on pilloit à fes yeux les ·Tom. I. H

terres des alliés, & qu'on emportoit impunément le butin qu'on avoit fait fur eux; il crut que c'étoit une honte pour lui, qu'Annibal marchât la tête levée par le milieu de l'Italie, & s'avançât jufques aux portes de Ròme, fans trouver de réfiftance. Il rejetta avec mépris le sentiment de ceux qui lui donnoient des confeils plus folides que fpécieux; comme d'attendre fon collegue, afin d'agir de concert avec lui; & de fe contenter jufques-là, d'arrêter le pillage des ennemis par le moyen des troupes auxiliaires & des foldats armés à la legere. Sans daigner feulement les écouter, il fortit brufquement du confeil ; & donnant en même-temps le fignal de la marche & » du combat: Que ne demeurons» nous plutôt les bras croifés, dit-il, » auprès des murailles d'Arretium ? >> Car c'eft là qu'eft notre patrie. C'est » là que font renfermés nos Dieux Pe» nates, & tout ce que nous avons de

plus cher au monde. Qu'Annibal » cependant, après être échappé de »> nos mains, défole toute l'Italie par » le fer & par le feu, & aille camper

jufqu'auprès des murailles de Ro» me. Gardons-nous bien de décam

Flaminius

per d'ici, qu'un arrêt du fénat ne « vienne arracher Flaminius d'auprès « d'Arretium, comme autrefois Ca- ce mille d'auprès de Veïes, pour aller «< au fecours de fa patrie. Ayant ainfi « parlé, il ordonna qu'on fe mît en marche au plus vite, & fauta lui-même, avec beaucoup de précipitation, fur fon cheval. Mais cet animal s'étant abbattu sous lui, le renverfa par terre, la tombe de tête la premiere. Tous ceux qui étoient cheval, préfents étant déja effrayés de cette chûte, comme d'un mauvais préfage fur le point de donner bataille; on vint encore l'avertir que le porte-enfeigne ne pouvoit arracher. fon étendard de terre, quelqu'effort qu'il fît. Mais Flaminius, fans s'étonner, fe tournant du côté de celui qui lui annonçoit cette nouvelle : Ne m'apportes-tu point auffi, lui dit-il, des lettres du fénat, ♫ pour m'empêcher de donner batail- « le? Va-t'en: dis au porte-enfeigne, que fi la crainte a glacé fes bras, il « creufe la terre pour retirer fon dra- « peau. Dès-lors l'armée commença à marcher, les principaux officiers étant confternés de ces deux prodiges, outre qu'ils n'avoient pas été du fentiment du conful. Mais les foldats étoient ra

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vis de voir à leur general tant de hardieffe & de fierté, confiderant davantage fes efperances, que les raisons qu'il avoit d'efperer.

Annibal exerça toutes les hoftilités poffibles fur les terres qui font entre la ville de Crotone & le lac de Trafimene, ne doutant point que Flaminius irrité de ces ravages, n'accourût au fecours de fes alliés. Lorfqu'il fut arrivé à l'endroit où le lac de Trafimene s'approche des montagnes de Crotone, il le trouva très-propre pour des embûches. Il n'y a entre ce lac & les montagnes qu'un efpace fort étroit, que la nature femble avoir laiffé tout exprès. On entre par là dans une plaine affez large, au bout de laquelle le terrein s'éleve, & forme differentes collines. Ce fut là qu'il fe campa avec les Africains & les Efpagnols feulement, de façon que les ennemis l'avoient directement en face. Il posta les frondeurs & les autres troupes armées à la legere derriere les montagnes. Il mit la cavalarie à l'entréemême du défilé, à couvert de certaines éminences, qui fembloient faites exprès pour les cacher; afin que quand les Romains feroient entrés dans la plaine

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