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tres montagnards, mais des foldats mêmes d'Annibal, qu'ils n'eftimoient pas moins heureux ceux qui recevoient généreufement la mort, que ceux qui fortoient vainqueurs du combat.

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Annibal après quelques combats de ces barbares, un contre un, congédia fes foldats, ravi de les voir dans des difpofitions fi favorables. Puis les ayant affemblés une feconde fois, il leur parla en ces termes. Si vous jugez de " votre condition, foldats, comme vous avez fait il n'y a que quelques " heures de celle de vos prifonniers, la " victoire eft à nous. Ne croyez pas que mon intention ait été de vous don- "" ner un fpectacle, plûtôt qu'une vé- “ ritable idée & une image parfaite de " votre fituation. Et je ne fçai fi la for- " tune ne vous a pas mis dans une né- “ ceffité plus preffante que ces barba- " res; & fi les chaînes dont elle vous a " chargés, ne font pas plus péfantes" que celles que nous leur faifons porter. Nous fommes enfermés à droit “ & à gauche par les deux mers, fans " avoir aucun vaiffeau, pas même pour nous fauver fi nous fommes vaincus. " Nous avons devant nous & autour " de nous le Pô, plus grand & plus "

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Harangue d'Annibal à fes foldats.

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,, rapide que le Rhône même : & derriere nous les Alpes, que nous avons ,, eu tant de peine à paffer lorfque nous avions encore toute notre vigueur & ,, toutes nos forces. Ainfi le premier lieu ,, où nous avons rencontré l'ennemi,doit être témoin de notre victoire ou de ,, notre mort. Et la même fortune qui ,, nous a mis dans la néceffité de combattre, promet à notre victoire des récompenfes fi grandes, que les hommes ne fçauroient ni en imagi,, ner, ni en attendre de plus confiderables des dieux mêmes. Quand ,, nous ne devrions recouvrer par no◄ ,, tre valeur que la Sicile & la Sardai,, gne, qui ont été enlevées à nos pe,, res, ce feroit un motif affez puiffant pour nous engager à bien faire notre devoir dans la bataille. Mais ,, la victoire nous rendra les maîtres des tréfors immenfes que tant de ,, conquêtes & de triomphes ont acquis ,, aux Romains, & des Romains euxmêmes. Prenez donc les armes avec la protection des dieux, & dans la vûe des glorieufes récompenfes que ,, je vous propofe. Il y a affez long,, temps que vous faites la guerre fur ,, les montagnes stériles de la Lufita

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nie & de la Celtiberie, fans trouver " d'autre butin que quelques trou- “ peaux, pour payer tant de travaux " & de périls, où vous vous êtes ex- “ pofés. Il eft temps que vos cam pagnes deviennent utiles: il eft temps " que vous vous enrichiffiez, après " avoir traversé tant de fleuves & de " montagnes, au milieu des nations." féroces, qui avoient pris les armes " pour vous arrêter. Auffi c'est en ce " lieu que la fortune a fixé le terme de " vos travaux & de vos fervices, auffi- " bien que la récompenfe qui leur est “ due. Et ne vous imaginez pas que la " victoire foit auffi difficile à rempor- " ter, que le nom de votre ennemi eft" célebre. Il est arrivé plus d'une fois “ qu'une nation pour laquelle on n'a« “voit que du mépris, a livré de fan- " glantes batailles: & fouvent les peuples & les Rois les plus illuftres ont " été vaincus fans effort. Car à moins 46 qu'on ne fe laiffe éblouir par le vain " éclat du nom Romain, en quoi vos ❝ ennemis vous font-ils comparables P ?<s Pour ne point parler de vingt cam- “ pagnes que vous avez terminées ❝** avec autant de courage que de bon- " Heur, vous êtes venus jufqu'ici des. Ey

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,, colomnes d'Hercule, des bords de ,, l'océan, & des extrémités de la ter,, re, malgré la réfistance des nations: fieres & belliqueufes de l'Espagne &. ,, de la Gaule; toujours accompagnés ,, de la victoire. Vous combattrez ,, contre des foldats nouvellement ,, levés, trompés, vaincus & mis ,, en fuite cette campagne même parles Gaulois : contre des troupes qui ,, ne connoiffent point encore leur général, & ne font point connues de lui. Car moi, qui fuis presquepour né, qui ai du moins été élevé dans la tente de mon pere, le plus grand général de fon temps; qui ai domptéles Efpagnes & les Gaules, qui ai vaincu les habitans des Alpes, & ce: ,, que j'eftime encore davantage, les. ,, Alpes mêmes; je croirois me dè ho,, norer, fije me comparois à ce capi

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taine de fix mois,qui vient d'abandon,, ner fon armée, pour commander des ,, troupes inconnues. Car je fuis bien. perfuadé que fi on faifoit difparoître les étendards, & qu'on lui montrât les: ,, Carthaginois & les Romains, il ne ,, diftingueroit pas ceux dont il eft le ,, général & le conful. Ce que je regarde comme un grand avantage,

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foldats, c'est qu'il n'y a perfonne de « vous fous les yeux de qui je n'aye fait « plus d'une fois quelque exploit glorieux; & à qui je ne puiffe raconter «< à mon tour les belles actions qu'il a « faites, & dont j'ai moi-même été le « témoin. Je marche donc avec des cc foldats que j'ai mille fois loüés & « mille fois récompenfés, & dont j'ai « été le nourriffon avant que je fuffe leur chef; contre un général & des « troupes qui ne fe connoiffent pas encore. De quelque côté que je tourne « les yeux, je ne vois que des gens « pleins de confiance & de réfolution. Des fantaffins qui ont joint à la valeur une longue expérience; des cavaliers de toute efpece, tirés des na tions les plus guerrieres: des alliés d'une fidélité inviolable: & vous, « mes compatriotes, qui allez com- « battre pour venger Carthage, & fatisfaire le plus jufte reffentiment. C'eft nous qui allons chercher nos ennemis jufque dans le cœur de l'Italie : & votre valeur eft autant au- « deffus de celle des Romains, que « l'aggreffeur a d'avantage fur celui qui ne fe défend que par néceffité... L'indignité avec laquelle ils nous «

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