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» mais qu'il la donne lui-même de son plein gré (1) »; et ensemble pour nous faire entendre que vraiment il ne vivoit que pour nous, puisque, notre paix étant faite, il ne veut plus rester un moment au monde. Ainsi est mort le divin Jésus, nous montrant combien il est véritable « qu'ayant aimé les siens, il >> les a aimés jusqu'à la fin (2) ». Ainsi est mort le divin Jésus, « pacifiant par ses souffrances le ciel et » la terre (3) ». Il est mort, il est mort, et son dernier soupir a été un soupir d'amour pour les hommes.

Et je le dis, et je le répète, et vous n'êtes pas encore attendris et moi, pécheur, qui vous parle, plus dur et plus insensible que tous les autres, je puis vous parler encore ! Il n'en est pas ainsi de ces personnes pieuses qui assistent à la mort du Sauveur Jésus la douleur les saisit, de sorte qu'elle étouffe jusqu'aux sanglots, qu'elle ne leur permet pas même les soupirs. O Marie, divine Marie! ô de toutes les mères la plus désolée! qui pourroit ici exprimer de quels yeux vous vites cette mort cruelle? Tous les coups de Jésus sont tombés sur vous, toutes ses douleurs vous ont abattue, toutes ses plaies vous ont déchirée : votre accablement incroyable vous ayant en quelque sorte rendue insensible, le dernier adieu qu'il vous dit renouvela toutes vos douleurs, et rouvrit violemment toutes vos blessures : vous étiez en cela plus inconsolable, que, bien loin de diminuer ses afflictions, vous les redoubliez en les partageant; et que vos douleurs mutuelles s'accroissoient ainsi sans mesure, et se multiplioient jusqu'à l'infini,

(1) Joan. x. 18. (2) Ibid. x111. 1. (3) Coloss. 1. 20.

pendant que les flots qu'elles élevoient se repoussoient les uns sur les autres par un flux et reflux continuel. Mais quand vous lui vites rendre les derniers soupirs, c'est alors que vous ne pouviez plus supporter la vie, et que votre ame le voulant suivre, laissa votre corps long-temps immobile.

Ce n'est pas pour cette Vierge, ô Père éternel, qu'il faut faire éclipser votre soleil, ni éteindre tous les feux du ciel; ils n'ont déjà plus de lumière pour elle: il n'est pas nécessaire que vous ébranliez tous les fondemens de la terre, ni que vous couvriez d'horreur toute la nature, ni que vous menaciez tous les élémens de les remettre dans leur première confusion. Après la mort de son Fils, tout le monde lui paroît couvert de ténèbres; la figure de ce monde est passée pour elle, et de quelque endroit qu'elle se tourne, ses yeux ne découvrent partout qu'une ombre de mort. Elle n'est pas la seule qui en est émue et pour ne point parler des tombeaux qui s'ouvrent et des rochers qui se fendent, les cœurs des spectateurs, plus durs que les pierres, sont excités par cette mort à componction. J'entends un centenier qui s'écrie: « Très-certainement cet homme » étoit juste (1) ». Tous ceux qui assistoient à ce spectacle, s'en « retournoient, dit saint Luc, bat>> tant leur poitrine » : Percutientes pectora sua revertebantur (2).

Qu'il ne soit pas dit, chrétiens, que nous soyons plus durs que les Juifs. Ah! toutes nos églises sont aujourd'hui un Calvaire : qu'on nous voie sortir d'ici battant nos poitrines. Faisons résonner tout ce Cal(1) Luc. xx111. 47. — (2) Ibid. 48.

vaire de nos cris et de nos sanglots; mais que ce ne soit pas Jésus-Christ tout seul qui en fasse le sujet. Ne pleurez pas sur moi, nous dit-il ; je n'ai que faire de vos soupirs, ni de votre tendresse inutile. Pleurez, pécheurs, pleurez sur vous-mêmes et pourquoi pleurer sur nous-mêmes? Quia si in viridi ligno hæc faciunt, in arido quid fiet (1)? « Si on fait >> ceci dans le bois verd, que sera-t-il fait au bois » sec »? Si le feu de la vengeance divine a pris si fortement et si tôt sur ce bois verd et fructueux; bois aride, bois déraciné, bois qui n'attends plus que la flamme, comment pourras-tu subsister parmi ces ardeurs dévorantes? etc. (*)

(1) Luc. XXIII. 31.

« (*) Vidimus eum, et non erat aspectus. Is. LIII. 2. » Jésus-Christ défiguré, plus reconnoissable: au jardin » des Olives, par la perte de son repos entre les mains » des Juifs, par la perte de sa puissance: en la croix, par » l'abandonnement de son Père ».

Ces paroles, que Bossuet a écrites à la fin de son sermon, renferment le plan d'un autre discours sur la passion. Edit. de Déforis.

E

II. SERMON

POUR

LE VENDREDI SAINT.

SUR LA PASSION DE N. S. JÉSUS-CHRIST.

Comment Jésus-Christ crucifié nous apprend à discerner ce qui est digne de notre mépris. Pourquoi le Fils de Dieu a-t-il voulu que sa croix fût plus un mystère d'ignominie que de douleur. Grandeur du prix auquel il nous a achetés. Estime que nous devons concevoir de nous-mêmes en qualité de chrétiens : obligation où nous sommes de vivre pour le Sauveur. Victoire qu'il remporte sur la justice de son Père par sa contrition et son obéissance profonde. De quelle manière nous devons nous unir à sa douleur qui déplore nos crimes, et à son obéissance qui les répare.

Non enim judicavi me scire aliquid inter vos, nisi Jesum Christum, et hunc crucifixum.

Je n'ai pas jugé que je susse autre chose parmi vous, que Jésus-Christ, et lui crucifié. I Cor. 11. 1.

QUELQUE étude que nous ayons faite pendant tout le cours de notre vie, et quelque soin que nous ayons pris d'enrichir nos entendemens par la connoissance du monde et des affaires, ou par celle des arts et de la nature; il faut aujourd'hui, chrétiens, que nous fassions sur le Calvaire profession publique d'une

sainte et bienheureuse ignorance, en reconnoissant avec l'apôtre, devant Dieu et devant les hommes, que toute la science que nous possédons est réduite à ces deux paroles: « Jésus, et lui crucifié ». Mais nous ne devons point rougir de cette ignorance; puisque c'est elle qui a triomphé des vaines subtilités de la sagesse du monde, et qui a fait que tout l'univers révère en ce jour sacré, comme le plus grand de tous les miracles, le plus grand et le plus étrange de tous les scandales.

Mais je me trompe, Messieurs, d'appeler du nom d'ignorance la simplicité de notre foi : il est vrai que toute la science du christianisme est réduite aux deux paroles que j'ai rapportées; mais aussi elles renferment les trésors immenses de la sagesse du ciel, qui ne s'est jamais montrée plus à découvert, à ceux à qui la foi a donné des yeux, que dans le mystère de la croix. C'est là que Jésus-Christ, étendant les bras, nous ouvre le livre sanglant dans lequel nous pouvons apprendre tout l'ordre des secrets de Dieu, toute l'économie du salut des hommes, la règle fixe et invariable pour former tous nos jugemens, la direction sûre et infaillible pour conduire droitement nos mœurs, en un mot un mystérieux abrégé de toute la doctrine de l'Evangile et de toute la théologie chrétienne.

C'est, mes Sœurs, ce qui m'a donné la pensée de vous prêcher aujourd'hui ce grand et admirable mystère, dont saint Paul nous a parlé dans mon texte; la doctrine de vérité en Jésus souffrant; la science du chrétien en la croix. O croix, que vous donnez de grandes leçons! ô croix, que vous répan

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