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sion douloureuse, qu'il n'y aura aucun de ses enfans à qui nous ne puissions dire ce que l'apôtre disoit aux Galates (1): que Jésus-Christ a été crucifié devant ses yeux. Elle commence aujourd'hui à lire dans l'action de son sacrifice l'histoire de la passion de son Rédempteur: commençons aussi dès ce premier jour à nous en remplir tellement l'esprit, que nous n'en perdions jamais la pensée pendant ces solennités pleines d'une douleur qui console, et d'une tristesse si douce, que pour peu qu'on s'y abandonne, elle guérit toutes les autres.

Parmi ces spectacles de mort et de croix qui s'offrent à notre vue, le chrétien sera bien dur, s'il ne suspend, du moins durant quelques jours, ce tendre amour des plaisirs, pour se rendre capable d'entendre combien les peines de Jésus-Christ lui rendent nécessaire l'amour des souffrances. C'est pourquoi j'ai différé jusqu'à ces saints jours à vous proposer dans cette chaire cette maxime fondamentale de la piété chrétienne. Il m'a semblé, chrétiens, que pour vous entretenir avec efficace d'une doctrine si dure, si contraire aux sens, si considérable à la foi, et si peu goûtée dans le siècle où l'on n'étudie rien avec plus de soin que l'art de vivre avec volupté, il falloit attendre le temps dans lequel Jésus-Christ lui-même nous prêche à la croix; et j'ai cru que je parlerois foiblement, si ma voix n'étoit soutenue par celle de Jésus mourant, ou plutôt par le cri de son sang, « qui parle mieux, dit saint Paul (2), et plus forte» ment que celui d'Abel ».

Servons-nous donc, chrétiens, de cette occasion (Heb. x11. 24.

(1) Gal. 111. 1.

favorable, et tâchons d'imprimer dans les cœurs la loi de la patience, qui est le fondement du christianisme. Mais ne soyons pas assez téméraires pour entreprendre un și grand ouvrage, sans avoir imploré le secours du ciel par l'intercession de Marie: Ave, Maria.

DANS les paroles que j'ai rapportées pour servir de sujet à ce discours, vous aurez remarqué, Messieurs, que saint Paul nous propose un combat auquel nous devons courir par la patience; et en même temps il nous avertit de jeter les yeux sur Jésus, l'auteur et le consommateur de notre foi; c'est-à-dire qui l'inspire et qui la couronne, qui la commence et qui la consomme, qui en pose le fondement et qui lui donne sa perfection. Ce combat, dont parle l'apôtre, est celui que nous devons soutenir contre les afflictions que Dieu nous envoie et pour apprendre l'ordre d'un combat où se décide la cause de notre salut, l'apôtre nous exhorte, de la part de Dieu, à regarder Jésus-Christ, mais Jésus-Christ attaché en croix car c'est là qu'il veut arrêter nos yeux, et il s'en explique lui-même par ces paroles : « Jetez, dit-il (1), les yeux sur Jésus, qui, s'étant proposé la joie, a soutenu la mort de la croix, >> après avoir méprisé la confusion » : Qui proposito sibi gaudio sustinuit crucem, confusione contemptá.

De là nous devons conclure, que pour apprendre l'ordre, la conduite, les lois en un mot, de ce combat de la patience, l'école c'est le Calvaire, le maître

Heb. X11: 2.

c'est Jésus-Christ crucifié : c'est là que nous renvoie le divin apôtre. Suivons son conseil; allons au Calvaire; considérons attentivement ce qui s'y passe.

Le grand objet, chrétiens, qui s'y présente d'abord à la vue, c'est le supplice de trois hommes. Voici un mystère admirable : « Nous voyons, dit saint Au

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gustin (1), trois hommes attachés à la croix; un qui donne le salut, un qui le reçoit, un qui le » perd » Tres erant in cruce, unus salvator, alius salvandus, alius damnandus. Au milieu l'auteur de la grâce d'un côté un qui en profite, de l'autre côté un qui la rejette. Au milieu le modèle et l'original d'un côté un imitateur fidèle, et de l'autre un rebelle et un adversaire sacrilége. D'un côté un qui endure avec soumission, de l'autre un qui se révolte jusque sous la verge Un juste, un pécheur pénitent, et un pécheur endurci un juste souffre volontairement, et il mérite par ses souffrances le salut de tous les coupables: un pécheur souffre avec soumission et se convertit, et il reçoit sur la croix l'assurance du paradis : un pécheur souffre comme un rebelle, et il commence son enfer dès cette vie. Discernement terrible et diversité surprenante! Tous deux sont en la croix avec Jésus-Christ, tous deux compagnons de son supplice; mais, hélas ! il n'y en a qu'un qui soit compagnon de sa gloire. Voilà le spectacle qui nous doit instruire. Jetons ici les yeux sur Jésus, l'auteur et le consommateur de notre foi, . nous le verrons, chrétiens, dans trois fonctions remarquables. Il souffre lui-même avec patience, il couronne celui qui souffre selon son Esprit, il 'con(1) In Ps. XXXIV, Serm. 11, n. 1, tom. iv, col. 238.

damne celui qui souffre dans l'esprit contraire. Il établit la loi de souffrir, il en couronne le droit usage, il en condamne l'abus. C'est ce qu'il nous faut méditer; parce que si nous savons entendre ces choses, nous n'avons plus rien à désirer touchant les souffrances.

En effet, nous pouvons réduire à trois chefs ce que nous devons savoir dans cette matière importante quelle est la loi de souffrir, de quelle sorte Jésus-Christ embrasse ceux qui s'unissent à lui parmi les souffrances, quelle vengeance il exerce sur ceux qui ne s'abaissent pas sous sa main puissante, quand il les frappe et qu'il les corrige; et le Fils de Dieu crucifié nous instruit pleinement touchant ces trois points. Il nous apprend le premier en sa divine personne, le second dans la fin heureuse du larron si saintement converti, le troisième dans la mort funeste de son compagnon infidèle. Je veux dire que comme il est notre original, il nous enseigne, en souffrant lui-même, qu'il y a nécessité de souffrir: il fait voir, dans le bon larron, de quelle bonté paternelle il use envers ceux qui souffrent comme ses enfans enfin il nous montre, dans le mauvais, quels jugemens redoutables il exerce sur ceux qui souffrent comme des rebelles. Apprenons aujourd'hui, Messieurs, apprenons de ces trois patiens, dont la cause est si différente, trois vérités capitales. Contemplons, dans le patient qui souffre étant juste, la nécessité de souffrir imposée à tous les coupables; apprenons du patient qui se convertit, l'utilité des souffrances portées avec soumission; voyons dans le patient endurci la marque certaine de réprobation

:

dans ceux qui souffrent en opiniâtres et comme ces trois vérités enferment, si je ne me trompe, toute la doctrine chrétienne, touchant les souffrances, j'en ferai aussi le partage et tout le sujet de ce dis

cours.

PREMIER POINT.

C'ÉTOIT la volonté du Père céleste que les lois des chrétiens fussent écrites premièrement en JésusChrist. Nous devons être formés selon l'Evangile ; mais l'Evangile a été formé sur lui-même. « Il a fait, » dit l'Ecriture (1), avant que de parler » : il a pratiqué premièrement ce qu'il a prescrit; si bien que sa parole est bien notre loi, mais la loi primitive, c'est sa sainte vie. Il est notre maître et notre docteur, mais il est premièrement notre modèle.

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Pour entendre solidement cette vérité fondamentale, il faut remarquer, avant toutes choses, que le grand mystère du christianisme, c'est qu'un Dieu a voulu ressembler aux hommes, afin d'imposer aux hommes la loi de lui ressembler. Il a voulu nous imiter dans la vérité de notre nature, afin que nous l'imitassions dans la sainteté de ses mœurs : il a pris notre chair, afin que nous prenions son esprit : ensin nous avons été son modèle dans le mystère de l'incarnation, afin qu'il soit le nôtre dans toute la suite de sa vie. « Soyons, dit saint Grégoire de Nazianze (2), » semblables à Jésus-Christ, parce qu'il a voulu être >> semblable à nous : devenons des dieux pour l'amour » de lui, parce qu'il a voulu devenir homme pour >> l'amour de nous » : Simus ut Christus, quoniam (2) Orat. XLI. n. 8, tom. 1, p. 674.

(1) Act. 1. 1.

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