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1. Fréquente communion utile aux pécheurs. Je parle de ces pécheurs qui se sont reconnus et sont retournés à Dieu. Ce sont des morts ressuscités: car ils étoient morts selon Dieu, et la pénitence leur a rendu la vie; mais, quoique vivants, ils se ressentent encore des blessures mortelles qu'ils avoient reçues; elles ne sont pas tellement guéries qu'il ne leur en reste une foiblesse extrême. Cependant, tout foibles qu'ils sont, ils ont, pour ne pas retomber, bien des ennemis à combattre et bien des efforts à faire ; ils ont, de leur part, des passions qui les dominent, des habitudes qui les tyrannisent, de malheureuses concupiscences qui les attirent; ils ont, de la part du monde, des railleries à essuyer, des respects humains à surmonter, des exemples à quoi résister. Combien ont-ils de tentations à repousser de la part de cet esprit de ténèbres qui les sollicite, qui les presse, qui tourne sans cesse autour d'eux, comme un lion rugissant, pour les dévorer! Ah! Seigneur, au milieu de tout cela, que feront-ils? où iront-ils? que deviendront toutes leurs résolutions? et sans un secours puissant et présent, que peut-on se promettre de leur persévérance? Or ce secours, c'est vous-même, Seigneur, c'est votre sacrement. Ainsi l'Église nous le déclare-t-elle formellement dans le concile de Trente: car ce sacrement de salut, dit le saint concile, est comme un antidote le plus excellent, par où nous sommes tout à la fois, et purifiés des fautes journalières, et préservés des fautes grièves. C'est donc pour le pénitent un préservatif contre les rechutes. La grace attachée au sacrement est pour lui une grace de combat; et l'effet propre de cette grace, disent saint Cyrille et saint Thomas, est de dessécher en nous la racine du péché; elle réprime les aiguillons de la chair, elle amortit le feu de la cupidité, elle éteint les traits enflammés de l'ange de Satan; elle le met en fuite, et, suivant la pensée de saint Chrysostome, elle nous rend terribles à toutes les puissances de l'enfer.

De là il est aisé de voir si c'est une bonne conduite à l'égard du pécheur nouvellement converti, de lui interdire l'usage de la communion jusqu'à ce qu'il ait rempli toute la mesure des œuvres satisfactoires qui lui sont imposées comme le juste châtiment de ses désordres. Est-il raisonnable, dit-on, et paroît-il convenir qu'un homme, une femme, à peine sortis du péché, osent entrer dans la salle du festin, et qu'ils viennent prendre place à une table toute sainte ? Où est la bienséance chrétienne? où est l'honneur dû au sacrement le plus vénérable? Enfin, conclut-on, cette séparation même du corps du Seigneur est une pénitence. Mais je réponds, moi: Quelle pénitence, qui prive ce pécheur du moyen le plus nécessaire pour se maintenir dans l'état de sa pénitence! Hé quoi! l'on veut qu'il demeure ferme et inébranlable dans son retour, qu'il détruise ses habitudes vicieuses, qu'il résiste à toutes les attaqués, qu'il pare à tous les coups, qu'il remporte mille victoires, tout cela par la grace divine; et on l'éloigne de la source des graces! et, au milieu des plus rudes combats, on le désarme! et B. 5. 40

lorsqu'il est plus à craindre que ses forces ne viennent à défaillir, on lui soustrait le pain qui doit les réparer et le conforter! Il est vrai, et je veux bien toujours m'en souvenir, c'est un pécheur: mais on n'entendit autrefois que les pharisiens murmurer et se plaindre que Jésus-Christ reçût les pécheurs et qu'il mangeât avec eux. C'est un pécheur, mais ami de Dieu comme pénitent, mais rétabli dans la maison paternelle et remis au nombre des enfants, comme le prodigue pour qui l'on tua le veau gras, après l'avoir revêtu d'une robe neuve. Dieu de miséricorde, c'est selon vos sentiments que je parle, et vous ne m'en désavouerez point. Gardons-nous toutefois de confondre les états; distinguons le pécheur marchant encore dans la voie de la pénitence, et le Juste depuis long-temps confirmé dans les voies de Dieu; ce que nous donnons à l'un, ne l'accordons pas indifféremment à l'autre; mais faisons-en le discernement, pour distribuer à chacun sa portion. Le fidèle économe de l'Évangile, que le maître a établi sur ses domestiques, ne laisse manquer personne, mais il leur donne à tous la mesure de blé qu'il faut, et dans le temps qu'il faut (MATTH., 24).

2. Fréquente communion utile aux Justes, soit pour se soutenir et ne pas reculer, soit pour faire toujours de nouveaux progrès et pour s'avancer: pour se soutenir et ne pas reculer en tombant dans un état de tiedeur; pour faire de nouveaux progrès et pour s'avancer en s'élevant toujours, jusqu'à ce qu'ils parviennent au point de perfection où Dieu les appelle. Reprenons. Utile pour se soutenir et ne pas reculer. Malheureuse condition de l'homme, que le poids de la nature corrompue assujettit à tant de vicissitudes! L'ame aujourd'hui la plus fervente sentira demain son feu se ralentir. Après avoir aujourd'hui foriné les plus beaux desseins et s'être déterminée à tout, elle sera demain chancelante, indécise, irrésolue : les moindres obstacles l'étonneront, et peu à peu elle commencera à déchoir, si elle n'a quelques ressources pour se réveiller de son assoupissement, et pour rallumer sa première ardeur. C'est pour cela que saint Paul exhortoit tant de fidèles au renouvellement de l'esprit, qui est un renouvellement de zèle dans le service de Dieu et pour le service de Dieu. Ce grand apôtre savoit que sans cela il n'y a point de piété si bien affermie en apparence et si constante, qui ne s'altère, qui ne se démente, et ne dégénère enfin dans un relâchement où l'on se laisse entrainer plus vite qu'on ne s'en relève.

Or ce qui doit plus contribuer à ce renouvellement intérieur, c'est sans contredit la communion fréquente. Pour peu qu'on ait quelque fonds de crainte et d'amour de Dieu, il est difficile, quand on approche régulièrement de la table de Jésus-Christ, il n'est pas même moralement possible qu'au pied de l'autel, où tout inspire le recueillement et la dévotion, on ne soit éclairé de certaines lumières, touché de certains sentiments qui remuent une ame, qui la rappellent à elle-même, qui lui font voir les pertes qu'elle peut avoir faites, qu qu'elle est en

danger de faire; qui lui découvrent les piéges où elle pourroit s'engager, et dont elle doit se préserver; qui lui reprochent divers manquements, quoique légers, et diverses infidélités capables de la conduire par degré à un attiédissement entier, et de la dérouter; qui lui suggèrent les mesures qu'il faut prendre pour prévenir une telle décadence, et pour ne se point écarter de son chemin; qui la piquent, qui l'encouragent, qui redoublent son activité et sa vigilance. Peut-être une communion n'opère-t-elle pas tout cela; mais celle qui la suit achève l'ouvrage que l'autre a commencé. Elles s'aident mutuellement, et contribuent de la sorte à entretenir la santé de l'ame, de même que de bons aliments, pris à des temps réglés, entretiennent la santé du corps. Parceque ces troupes qui marchoient à la suite de Jésus-Christ n'avoient pas eu soin de pourvoir à leur nourriture, et que tout ce peuple avoit passé trois jours sans manger, le Sauveur du monde craignit, ou parut craindre, que, dans l'affoiblissement où ils se trouvoient, ils ne vinssent tout-à-fait à tomber, et qu'ils ne restassent en chemin. Dès que les Juifs se dégoûtèrent de la manne que Dieu leur envoyoit du ciel, l'Écriture nous dit qu'ils furent sur le point de périr tous, et qu'ils allèrent jusques aux portes de la mort. Et quand on néglige la communion, qu'elle est trop rare et qu'on est trop long-temps privé de la vertu du sacrement, bientôt le goût des choses de Dieu s'émousse; on se ralentit, on se dérange à l'égard de tous les autres exercices, et insensiblement l'esprit de piété s'éteint. Aussi est-ce par-là qu'on a vu bien des personnes se relâcher. La fréquentation des sacrements les gênoit; c'étoit un frein qui les captivoit et les retenoit. Elles ont peu .à peu secoué le joug, et, s'émancipant là-dessus, elles se sont émancipées sur tout le reste.

Mais je dis plus, et j'ajoute : Fréquente communion utile aux Justes, non seulement pour se soutenir et ne pas reculer, mais pour faire plus de progrès et pour s'avancer. Car, selon la maxime de tous les Pères et de tous les maîtres de la vie spirituelle, dans les voies de Dieu le Juste ne doit jamais s'arrêter, ni dire : C'est assez. La sainteté est un fonds où l'on trouve toujours à puiser, c'est une vaste carrière où il y a toujours à courir pour emporter le prix; et voilà pourquoi le docteur des Gentils, après les avoir convertis à la foi, leur recommandoit si expressément, tantôt de rechercher les dons les plus sublimes (1. Cor., 12), tantôt de prendre une voie plus excellente encore (lb.) que celle où ils avoient marché, tantôt de croitre incessamment et de toutes manières en Jésus-Christ, jusqu'à ce qu'ils fussent parvenus à l'état d'hommes faits (Ephes., 4). Or comment l'ame juste peut-elle mieux croître en Jésus-Christ que par une union aussi étroite avec JésusChrist que l'est la participation de son corps et de son sang? Union en vertu de laquelle, selon l'oracle de Jésus-Christ même, nous demeu rons en lui et il demeure en nous; et puisqu'il demeure, qu'il vit dans nous, conclut saint Jérôme, il s'ensuit que la sagesse, que la force, que

la charité, que la piété, que toutes les vertus vivent dans nous avec lui et par lui; qu'elles y agissent, et que, par les actes réitérés qu'elles produisent, elles nous perfectionnent de plus en plus et nous sanctifient. Je ne puis donc mieux finir ce discours qu'en adressant à tout ce qu'il y a ici d'ames justes et fidèles les paroles de l'ange au prophète Élie : Ne vous trompez pas, ne pensez pas que vous soyez déja au terme; il vous reste bien du chemin à faire (3. Reg., 19). Mais, afin de ne vous point lasser dans la route et de la poursuivre heureusement, prenez et mangez (Ibid.). Le pain que je vous présente est le pain des forts. Élie obéit à l'ange, il mangea; et, remis de toutes ses fatigues, il ne cessa point de marcher qu'il ne fût arrivé à la montagne d'Horeb. Puissions-nous, munis du divin aliment qui nous est offert, avancer nous-mêmes dans les sentiers de la justice chrétienne, et atteindre jusques au sommet de la montagne du Seigneur! Ainsi soit-il.

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SUR LES OUTRAGES FAITS A JÉSUS-CHRIST DANS LE SAINT-SACREMENT.

Saturabitur opprobriis.

Il sera rassasié d'opprobres. JÉRÉM. Thren., chap. III.

Étoit-ce donc là le partage du Messie, de cet envoyé du ciel, le desiré des nations, et le Sauveur promis au monde? Est-ce à cela qu'étoit destiné le Fils unique de Dieu, égal à son Père et Dieu lui-même? N'étoit-ce pas assez qu'en se revêtant de notre humanité, il fût revêtu de toutes nos misères; et falloit-il encore qu'il fût exposé à tant d'oppro2 bres de la part de ces mêmes hommes pour qui il avoit quitté le séjour de sa gloire, et étoit descendu sur la terre? Nous n'en pouvons douter, chrétiens Auditeurs, puisque le Prophète l'avoit ainsi prédit, et que Jésus-Christ même l'annonça à ses apôtres en des termes si précis, lorsque, sur le point d'entrer dans Jérusalem, il leur dit : Voici que nous allons à Jérusalem; et là tout ce qui est écrit du Fils de l'Homme s'accomplira. Il sera livré aux Gentils, moqué, flagellé, couvert de toutes sortes d'ignominies (MATTH., 20). J'ose dire néanmoins que la prédiction ne fut pas alors tellement accomplie qu'elle ne se soit vérifiée tout de nouveau dans la suite des temps. Il est resté avec nous et au milieu de nous, ce divin médiateur. En nous privant de sa présence visible, il ne s'est point séparé de nous, et nous avons toujours le bonheur de le posséder dans son adorable sacrement. Mais qui jamais pourroit se le persuader, si nous n'en étions convaincus par la triste et malheureuse évidence des faits? C'est là, c'est à l'égard de cet auguste mystère, qu'ont été renouvelés tous les opprobres de la passion de Jésus-Christ; et n'est-ce pas là même qu'ils se renouvellent tous les jours? Que d'excès! que d'attentats, que d'irrévérences! que d'outrages! A qui viens-je adresser cette plainte, et à qui dois-je re

procher de telles abominations? Est-ce à ces déserteurs de la foi, que l'hérésie a suscités contre le sacrement de nos autels? est-ce à ces fifidèles prétendus, qui, dans la pratique et par la plus monstrueuse contradiction, démentant leur foi, déshonorent le sacrement qu'ils font profession d'adorer? C'est aux uns et aux autres : ennemis de l'Église, enfants de l'Église, hérétiques, catholiques, tous ont outragé le Seigneur dans ses tabernacles. Outrages éclatants et pleins de violence de la part des uns, ennemis déclarés de l'Église : premier point. Outrages, quoique moins violents, plus sensibles encore et plus piquants de la part des autres, indignes enfants de l'Église second point.

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Voilà, mes Frères, ce que j'ai à vous mettre devant les yeux. Ce sont des horreurs que je devrois, ce semble, s'il étoit possible, tenir cachées sous le voile, et dérober à votre connoissance; mais d'ailleurs il ne sera pas inutile de vous en retracer le souvenir: pourquoi? non point précisément pour exciter dans vos cœurs une juste indignation, non point pour déplorer seulement avec vous des profanations qui méritent toutes nos larmes, mais afin que vous compreniez toute la charité d'un Dieu, laquelle ne put être éteinte par la vue anticipée qu'il eut de tant de désordres, en se donnant à nous dans l'institution du sacrement de son corps; mais afin que vous admiriez son invincible patience à souffrir tout cela et à le dissimuler, sans en tirer une vengeance aussi prompte qu'il le pouvoit et que la justice le demandoit; mais afin que vous preniez la généreuse résolution du Prophète royal, lorsque, voyant le Dieu d'Israël offensé par un peuple rebelle, il s'écrioit, dans un saint transport de zèle: Ah! Seigneur, puis-je être témoin des injures que vous recevez, et ne les pas ressentir jusques au fond de l'ame? Dans l'ardeur du ressentiment qui me dévore, elles me deviennent comme personnelles, et elles retombent sur moi (Psalm. 68). Si je n'ai pu les arrêter, du moins je veux, autant qu'il est en mon pouvoir, les réparer; et c'est le dessein que je forme. Je me promets de votre piété, Chrétiens, que ce sera là pour vous-mêmes le fruit de ce discours.

PREMIER POINT. Outrages éclatants et pleins de violence de la part des hérétiques, ennemis déclarés de l'Eglise. Nous prêchons JésusChrist (1. Cor., 1), écrivoit saint Paul aux chrétiens de Corinthe: cet oint du Seigneur, ce Christ, est la force même de Dieu et la sagesse de Dieu pour les vrais fidèles qui ont cru et qui croient en lui: mais pour les Juifs c'a été un sujet de scandale, et il a paru aux Gentils une folie. Paroles que j'applique en particulier au grand mystère du corps et du sang de Jésus-Christ présents sous les espèces du pain et du vin.

Nous prêchons cet ineffable mystère, nous en démontrons l'incontestable vérité, et les ames dociles à la foi nous écoutent, se soumettent, reconnoissent dans ce sacrement leur Sauveur et leur Dieu : mais

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