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écoutaient JÉSUS-CHRIST : les uns qui suivaient sa doctrine par ses miracles; les autres qui disaient '... Il y avait deux partis au temps de Calvin... Il y a maintenant les jésuites.... etc.

31.

Ce n'est point ici le pays de la vérité : elle erre inconnue parmi les hommes. Dieu l'a couverte d'un voile, qui la laisse méconnaître à ceux qui n'entendent pas sa voix. Le lieu est ouvert au blasphème, et même sur des vérités au moins bien apparentes. Si l'on publie les vérités de l'Évangile, on en publie de contraires, et on obscurcit les questions, en sorte que le peuple ne peut discerner. Et on demande : Qu'avez-vous pour vous faire plutôt croire que les autres? Quel signe faitesvous? Vous n'avez que des paroles, et nous aussi. Si vous aviez des miracles, bien. Cela est une vérité, que la doctrine doit être soutenue par les miracles, dont on abuse pour blasphémer la doctrine. Et si les miracles arrivent, on dit que les miracles ne suffisent pas sans la doctrine; et c'est une autre vérité, pour blasphémer les miracles.

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32.

Que vous êtes aise de savoir les règles générales, pensant par là jeter le trouble, et rendre tout inutile! On vous en empêchera, mon père; la vérité est une et ferme.

33.

Un miracle parmi les schismatiques n'est pas tant à craindre; car le schisme, qui est plus visible que le miracle, marque visiblement leur erreur. Mais quand il n'y a point de schisme, et que l'erreur est en dispute, le miracle discerne *.

et

34.

Jean, Ix: Non est hic homo a Deo, quia sabbatum non custodit.

1. Les éditions suppléent: Il chasse les démons au nom de Belzebuth. Matth. xii, 24. 2. La suite de la pensée doit être qu'il se fit alors des miracles du côté des catholiques que les hérétiques les méconnurent.

3. Expression consacrée. Un signe, c'est un miracle, signe d'une puissance surnaturelle. 4. Les schismatiques sont ceux qui, sans avoir d'autres dogmes que l'Église, ce qui serait hérésie, se séparent d'elle et de son chef, et ne reconnaissent pas son autorité. Tels sont les Grecs. Les jan sénistes, au contraire, reconnaissaient hautement en prin. cipe l'Église et le pape, et leur désobéissaient dans le fait.

Alii: Quomodo potest homo peccator hæc signa facere? Lequel est le plus clair1?

Cette maison n'est pas de Dieu; car on n'y croit pas que les cinq propositions soient dans Jansénius. Les autres : Cette maison est de Dieu; car il y fait d'étranges miracles. Lequel est le plus clair?

Tu quid dicis? Dico quia propheta est. Nisi esset hic a Deo, non poterat facere quidquam3.

35.

Si vous ne croyez en moi, croyez au moins aux miracles. Il les renvoie comme au plus fort.

...

36.

Il avait été dit aux Juifs, aussi bien qu'aux Chrétiens, qu'ils ne crussent pas toujours les prophètes. Mais néanmoins les pharisiens et les scribes font grand état de ses miracles, et essaient de montrer qu'ils sont faux, ou faits par le diable: étant nécessités d'être convaincus, s'ils reconnaissent qu'ils sont de Dieu.

Nous ne sommes pas aujourd'hui dans la peine de faire ce discernement. Il est pourtant bien facile à faire : ceux qui ne nient ni Dieu, ni JÉSUS CHRIST, ne font point de miracles qui ne soient sûrs: Nemo faciat virtutem in nomine men, et cito possit de me male loqui. Mais nous n'avons point à faire ce discernement. Voici une relique sacrée. Voici une épine de la couronne du Sauveur du monde, en qui le prince de ce monde n'a point puissance, qui fait des miracles par la propre puissance de ce sang répandu pour nous. Voici que Dieu choisit lui-même cette maison pour y faire éclater sa puissance *.

1. Quelques Pharisiens disaient: Cet homme n'est pas de Dieu, car il n'observe pas le sabbat. Mais d'autres disaient: Comment un pécheur pourrait-t-il faire de tels miracles? Et il y avait division entre eux. Il y a dans le texte: Alii autem dicebant. Jean, ix, 16. 2. Même chapitre, versets 17 et 33. Il y a dans le texte : Tu quid dicis de illo qui aperuit oculos tuos? Ille autem dixit : Quia propheta est. Et toi, quen dis-tu [les Pharisiens s'adressent à l'aveugle-né que Jésus a guéri]? Il répondit: Que c'est un prophète. Si cet homme n'était de Dieu, il ne pourrait rien faire de pareil.

3. Marc, Ix, 38. Maître, nous venons de voir un homme qui chasse les démons en ton nom, et qui ne nous suit pas, et nous l'avons empêché. Mais Jésus dit: Ne l'empêchez point. Il n'est pas possible qu'on exerce une vertu surnaturelle en mon nom, et qu'er même temps l'on parle mal de moi. Le texte est : Nemo est enim qui faciat virt. in nom. m., et possit cito male loqui de me.

4. Le prince de ce monde est le diable (Jean, XII, 31, etc). Il ne peut se servir pour ses opérations infernales d'un objet consacré par le sang du Sauveur. Un prodige fait avec la Sainte-Epine ne peut donc être l'œuvre du démon.

Ce ne sont point des hommes qui font ces miracles par une vertu inconnue et douteuse, qui nous oblige à un difficile discernement. C'est Dieu même; c'est l'instrument de la passion de son Fils unique, qui, étant en plusieurs lieux, choisit celui-ci, et fait venir de tous côtés les hommes pour y recevoir ces soulagements miraculeux dans leurs langueurs 1.

37.

Les miracles ne sont plus nécessaires, à cause qu'on en a déjà. Mais quand on n'écoute plus la tradition, quand on ne propose plus que le pape, quand on l'a surpris, et qu'ainsi ayant exclu la vraie source de la vérité, qui est la tradition, et ayant prévenu le pape, qui en est le dépositaire, la vérité n'a plus de liberté de paraître : alors les hommes ne parlant plus de la vérité, la vérité doit parler elle-même aux hommes. C'est ce qui arriva au temps d'Arius.

38.

Joh., vi, 26: Non quia vidistis signum, sed quia saturati estis 2. Ceux qui suivent JESUS-CHRIST à cause de ses miracles, honorent sa puissance dans tous les miracles qu'elle produit; mais ceux qui, en faisant profession de le suivre pour ses miracles, ne le suivent en effet que parce qu'il les console et les rassasie des biens du monde, ils déshonorent ses miracles, quand ils sont contraires à leurs commodités.

39.

Juges injustes, ne faites pas des lois sur l'heure; jugez par celles qui sont établies, et par vous-mêmes: Væ qui conditis leges iniquas 1.

40.

La manière dont l'Église a subsisté est, que la vérité a été sans contestation; ou, si elle a été contestée, il y a eu le pape, et sinon, il y a eu l'Église.

1. En plusieurs lieux, parce qu'il ne s'agit que d'épines détachées, et non de la couronne tout entière.

2. Le texte est, sed quia manducastis ex panibus, et satis. est. C'est Jésus qui parle à la foule qui le poursuit après le miracle des cinq pains: En vérité je vous le dis, vous me cherchez, non parce que vous avez vu des miracles, mais parce que vous avez eu à nanger avec ces pains, et que vous avez été rassasiés. »

3. Voir au fragment 32: Que vous êtes aise de savoir les règles générales! Elles étaient donc posées dans le livre auquel répond Pasca..

4. Il y a dans le texte Væ qui condunt. « Malheur à ceux qui établissent des lois niques! Is., x,

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41.

Miracle. C'est un effet qui excède la force naturelle des moyens qu'on y emploie; et non-miracle, est un effet qui n'excède pas la force naturelle des moyens qu'on y emploie. Ainsi ceux qui guérissent par l'invocation du diable ne font pas un miracle; car cela n'excède pas la force naturelle du diable. Mais...

42.

Les miracles prouvent le pouvoir que Dieu a sur les cœurs par celui qu'il exerce sur les corps.

43.

Il importe aux rois et princes d'être en estime de piété; et, pour cela, il faut qu'ils se confessent à vous.

44.

Les jansénistes ressemblent aux hérétiques par la réformation des mœurs; mais vous leur ressemblez en mal.

REMARQUES SUR L'ARTICLE XXIII

Tout cet article, qui depuis l'édition de Port-Royal a continué d'être placé presque à la fin des Pensées, est cependant le véritable point de départ et l'origine du livre que méditait Pascal, comme on l'a vu dans sa Vie écrite par sa sœur, page LXXIV de l'Introduction.

Il ne se proposait d'abord que de faire valoir le miracle de la SainteEpine, le miracle de Port-Royal, contre les adversaires de Port-Royal. Et c'est où il s'en tient à peu près dans les fragments dont se compose cet article.

Il n'y a donc pas de pensées que MM. de Port-Royal aient dû avoir plus à cœur de faire connaître au public; mais il n'y en a pas non plus où les nécessités de la situation leur aient imposé plus de retranchements, car ces fragments sont tout pleins de l'ardeur du combat, et de ce fanatisme que la persécution allume. Les traits les plus vifs furent sacrifiés au respect de la paix de l'Église.

Mais, dès 1727, l'évêque de Montpellier, Colbert, un des derniers champions du jansénisme, et qui croyait aux miracles du tombeau du liacre Paris, recueillait dans le manuscrit la plupart de ces fragments

pour les citer à l'appui de sa foi, dans la crise extrême et désespérée où les dissidents étaient alors, à la date même de la condamnation du vieux Soanen.

L'esprit de Pascal, que nous sentons souvent, avec une admiration profonde, si voisin de nous, ou même pénètrant si avant dans notre propre pensée, en est ici séparé comme par un abîme. Je ne dis pas seulement de nous, je dis de Descartes et de la lumière nouvelle qui se levait alors, et dont le monde s'est bientôt trouvé rempli. Il n'y a pas de surnaturel. Il n'y a jamais eu, il ne peut y avoir jamais de miracle ni de prophétie. C'est dorénavant un principe en dehors duquel on ne peut plus philosopher, et ce principe anéantit tout le travail qui s'était fait, sur ce sujet des miracles, dans l'âme tourmentée de Pascal.

Fragment 1. « Les miracles discernent la doctrine, et la doctrine discerne les miracles. >>

Cette première phrase nous jette tout de suite au cœur des difficultés théologiques sur les miracles. L'Église admet qu'il y en a, comme Pascal va le dire, de vrais et de faux; et par faux miracles, elle n'entend pas de pures illusions; elle entend des actes qui sont réellement hors de la nature, mais qui mentent en quelque sorte, en ce qu'ils ne viennent pas de Dieu, et doivent être attribués au démon. Dès lors comment discerner les faux et les vrais miracles? par la doctrine. Les miracles faits à l'appui d'une doctrine contraire à Dieu ne peuvent être de Dieu; ce sont de faux miracles: la doctrine discerne les miracles. Mais d'un autre côté, pourquoi sont faits les miracles, les vrais miracles, sinon pour témoigner en faveur d'une doctrine sainte et méconnue, et montrer qu'elle vient véritablement de Dieu? Ainsi donc, les miracles discernent la doctrine. Voilà un cercle vicieux, dont Pascal tâche de sortir. Il y a fait d'autant plus d'efforts, que la cause à laquelle il a donné toute son âme, la cause du jansénisme et de Port-Royal, est intéressée dans ce débat. Il s'agit de prouver contre les Jésuites que le miracle de la Sainte-Épine, qu'ils n'osaient nier absolument, mais où ils ne voulaient voir qu'un prestige de l'esprit de mensonge, était au contraire un témoignage formel de JÉSUS-CHRIST en faveur de ses défenseurs persécutés. On peut résumer en quelques mots la thèse de Pascal. Dieu ne peut vouloir tromper les hommes, du moins les justes, qu'il a fait dignes de la vérité. Il n'est donc pas possible que les miracles et la doctrine soient équivoques en même temps. Si la doctrine est évidemment contraire à Dieu, Dieu peut permettre qu'elle ait pour elle de faux miracles, car ils ne tromperont pas les cœurs droits. La doctrine discernera les miracles. Mais quand la doctrine est dou

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