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mais les aveuglait. Ainsi ceux qui refusent de croire les miracles d'aujourd'hui, pour une prétendue contradiction chimérique, ne sont pas excusés.

17.

JÉSUS-CHRIST guérît l'aveugle-né, et fit quantité de miracles, au jour du sabbat. Par où il aveuglait les pharisiens, qui disaient qu'il fallait juger les miracles par la doctrine.

« Nous avons Moïse mais celui-là, nous ne savons d'où il est1. » C'est ce qui est admirable, que vous ne savez d'où il est, et cependant il fait de tels miracles.

JÉSUS-CHRIST ne parlait ni contre Dieu, ni contre Moïse. L'Antechrist et les faux prophètes, prédits par l'un et l'autre Testament, parleront ouvertement contre Dieu et contre JÉSUSCHRIST, qui n'est point caché. Qui serait ennemi couvert, Dieu ne permettrait pas qu'il fit des miracles ouvertement.

18.

Fondement de la religion. C'est les miracles. Quoi donc ? Dieu parle-t-il contre les miracles, contre les fondements de la foi qu'on a en lui?

S'il y a un Dieu, il fallait que la foi de Dieu fût sur la terre. Or les miracles de JÉSUS-CHRIST ne sont pas prédits par l'Antechrist3, mais les miracles de l'Antechrist sont prédits par JESUS-CHRIST; et ainsi, si JÉSUS-CHRIST n'était pas le Messie, il aurait bien induit en erreur; mais l'Antechrist ne peut bien induire en erreur 5. Quand JÉSUS-CHRIST a prédit les miracles de l'Antechrist, a-t-il cru détruire la foi de ses propres miracles? Moïse a prédit JÉSUS-CHRIST, et ordonné de le suivre"; JÉSUS-CHRIST a prédit l'Antechrist, et défendu de le suivre".

1. Voir Jean, Ix, 14 (et Luc, XIII, 14).

2. Qui n'est point caché. Qui ne l'est plus depuis sa résurrection.

3. Avant ces mots, il faudrait ajouter, pour que le raisonnement fût complet : Donc il fallait qu'on ne pût être induit ea erreur; or les miracles, etc.

4. Matth., xxiv, 24. Surgent enim pseudochristi, etc. ■ Il s'élèvera de faux christs et de faux prophètes, et ils feront de grands miracles et des prodiges capables d'induire en erreur, s'il était possible, même les élus. » Quant à l'Antechrist par excellence, ce nom se trouve dins la première des épitres qui portent le nom de Jean, II, 18; iv, 3. 5. Remarquez ce bien. L'Antechrist induira en erreur sans doute, mais non pas bien, à bon titre; les élus pourront se préserver de l'illusion (ita ut in errorem inducantur, si fieri potest, etiam electi. Malth., ibid.).

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6. Pascal veut parier de ce passage du Deutéronome : « Le Seigneur ton Dieu t'enverra un prophète sorti comme moi de ta race et d'entre tes frères : écoute-le. » (xviii, 15.) 7. Nolile credere. Matth., xxiv,

23.

Il était impossible qu'au temps de Moïse on réservât sa croyance à l'Antechrist, qui leur était inconnu; mais il est bien aisé, au temps de l'Antechrist, de croire en JÉSUS-CHRIST, déjà

connu.

Il n'y a nulle raison de croire en l'Antechrist, qui ne soit à croire en JÉSUS-CHRIST; mais il y en a en JÉSUS-CHRIST, qui ne sont pas en l'autre.

19.

Les miracles sont plus importants que vous ne pensez : ils ont servi à la fondation, et serviront à la continuation de l'Église, jusqu'à l'Antechrist, jusqu'à la fin.

20.

Ou Dieu a confondu les faux miracles, ou il les a prédits; et par l'un et par l'autre il s'est élevé au-dessus de ce qui est surnaturel à notre égard, et nous y a élevés nous-mêmes.

21.

Les miracles ont une telle force, qu'il a fallu que Dieu ait averti qu'on n'y pense point contre lui, tout clair qu'il soit qu'il y a un Dieu; sans quoi, ils eussent été capables de troubler.

Et ainsi tant s'en faut que ces passages, Deut. xIII, fassent contre l'autorité des miracles, que rien n'en marque davantage la force. Et de même pour l'Antechrist : « Jusqu'à séduire les élus, s'il était possible. »

22.

Judæi signa petunt et Græci sapientiam quærunt, nos autem Jesum crucifixum. - Sed plenum signis, sed plenum sapientia; vos autem Christum non crucifixum, et religionem sine miraculis et sine sapientia 1.

Ce qui fait qu'on ne croit pas les vrais miracles, c'est le manque de charité. Joh. [x, 26]: Sed vos non creditis quia non estis ex ovibus. Ce qui fait croire les faux est le manque de charité. II Thess. 11.

1. La phrase, Judæi signa petunt... est prise de Paul, I Cor. 1, 22 (il y a Christum an lieu de Jesum). Mais c'est Pascal qui ajoute pour son propre compte, s'adressant à ses adversaires qui s'étaient servis de ce texte de Paul contre lui, Sed plenum signis, ole. 2. En titre dans l'autographe, Raisons pourquoi on ne croit point.

23.

Ayant considéré d'où vient qu'on ajoute tant de foi à tant d'imposteurs qui disent qu'ils ont des remèdes, jusqu'à mettre souvent sa vie entre leurs mains, il m'a paru que la véritable cause est qu'il y en a de vrais; car il ne serait pas possible qu'il y en eût tant de faux, et qu'on y donnât tant de créance, s'il n'y en avait de véritables. Si jamais il n'y eût eu remède à aucun mal, et que tous les maux eussent été incurables, il est impossible que les hommes se fussent imaginé qu'ils en pourraient donner; et encore plus que tant d'autres eussent donné créance à ceux qui se fussent vantés d'en avoir : de même que, si un homme se vantait d'empêcher de mourir, personne ne le croirait, parce qu'il n'y a aucun exemple de cela. Mais comme il y [a] eu quantité de remèdes qui se sont trouvés véritables, par la connaissance même des plus grands hommes, la créance des hommes s'est pliée par là; et cela s'étant connu possible, on a conclu de là que cela était. Car le peuple raisonne ordinairement ainsi : Une chose est possible, donc elle est; parce que la chose ne pouvant être niée en général, puisqu'il y a des effets particuliers qui sont véritables, le peuple, qui ne peut pas discerner quels d'entre ces effets par uliers sont les véritables, les croit tous. De même, ce qui fait qu'on croit tant de faux effets de la lune, c'est qu'il y en a de vrais, comme le flux de la mer 1.

Il en est de même des prophéties, des miracles, des divinations par les songes, des sortiléges, etc. Car, si de tout cela il n'y avait jamais eu rien de véritable, on n'en aurait jamais rien cru; et ainsi, au lieu de conclure qu'il n'y a point de vrais miracles parce qu'il y en a tant de faux, il faut dire au contraire qu'il y a certainement de vrais miracles, puisqu'il y en a de faux, et qu'il n'y en a de faux que par cette raison qu'il y en a de vrais.

Il faut raisonner de la même sorte pour la religion; car il ne serait pas possible que les hommes se fussent imaginé tant de

Port-Royal substitue

1. Sur ces faux effets de la lune, voyez le fragment vii, 17. au texte de l'alinéa suivant celui d'une variante qu'on trouve aussi dans le cahier autographe. On a par hasard la date de cette variante, ou du moins une limite, car elle est écrite au verso d'une lettre adressée à Pascal et datée du 19 février 1660.

fausses religions, s'il n'y en avait une véritable. L'objection à cela, c'est que les sauvages ont une religion; mais on répond à cela que c'est qu'ils en ont ouï parler, comme il paraît par le déluge, la circoncision, la croix de saint André, etc 1.

24.

Il est dit, Croyez à l'Église, mais il n'est pas dit, Croyez aux miracles, à cause que le dernier est naturel, et non pas le premier. L'un avait besoin de précepte, non pas l'autre.

25.

... Ces filles, étonnées de ce qu'on dit, qu'elles sont dans la voie de perdition; que leurs confesseurs les mènent à Genève, qu'ils leur inspirent que JESUS-CHRIST n'est point en l'Eucharistie, ni en la droite du Père: elles savent que tout cela est faux, elles s'offrent donc à Dieu en cet état : Vide si via iniquitatis in me est 3. Qu'arrive-t-il là-dessus? Ce lieu, qu'on dit être le temple du diable, Dieu en fait son temple. On dit qu'il en faut ôter les enfants: Dieu les y guérit. On dit que c'est l'arsenal de l'enfer Dieu en fait le sanctuaire de ses grâces. Enfin on les menace de toutes les fureurs et de toutes les vengeances du ciel : et Dieu les comble de ses faveurs. Il faudrait avoir perdu le sens pour en conclure qu'elles sont donc en la voie de perdition. 26.

Pour affaiblir vos adversaires, vous désarmez toute l'Eglise.

1. Montaigne, Apol., p. 271: Epicurus [dit], qu'en mesme temps que les choses sont icy comme nous les veoyons, elles sont toutes pareilles et en mesme façon en plusieurs aultres mondes; ce qu'il eust dict plus asseureement, s'il eust veu les similitudes et convenances de ce nouveau monde des Indes occidentales avecques le nostre present et passé, en de si estranges exemples...; car on y trouve des nations n'ayants, que nous sçachions, iamais ouï nouvelles de nous, où la circoncision estoit en crédit...: où nos croix estoient en diverses façons en credit; icy on en honoroit les sepultures; on les appliquoit là, et nommeement celle de sainct André, à se deffendre des visions nocturnes... On y trouve... l'usage des mitres, le cœlibat des presbtres...; et cette fantasie... qu'ils furent creez avecques toutes commoditez, lesquelles on leur a depuis retrenchées pour leur péché... : qu'aultrefois ils ont esté submergez par l'inondation des eaux celestes..., etc., etc. - -On lit dans la Biographie universelle article André (saint) • L'opinion commune est que cet apôtre fut crucifié. Les peintres donnent à sa croix une forme différente de celle de JÉSUS-CHRIST et la représentent en forme d'un X., En tête, dans le cahier autographe: Titre. D'où vient qu'on croit tant de menteurs qui disent qu'ils ont vu des miracles, et qu'on ne croit aucun de ceux qui disent qu'ils ont des secrets pour rendre l'homme immortel ou pour rajeunir.

2. Matth. XVIII, 17-20.

2. < Vois si la voie de l'iniquité est en moi », Ps. CXXXVIII, 24.

4. Tout ce fragment se rapporte aux religieuses de Port-Royal. Pascal les représente calomniées par les Jésuites, mais justifiées et vengées par Dieu même dans le miracle de la Sainte-Epine.

27.

... S'ils disent que notre salut dépend de Dieu, ce sont des hérétiques. S'ils disent qu'ils sont soumis au pape, c'est une hypocrisie. S'ils sont prêts à souscrire toutes ses constitutions, cela ne suffit pas. S'ils disent qu'il ne faut pas tuer pour une pomme, ils combattent la morale des catholiques 1. S'il se fait des miracles parmi eux, ce n'est point une marque de sainteté, et c'est au contraire un soupçon d'hérésie.

28.

... Les trois marques de la religion : la perpétuité, la bonne vie, les miracles. Ils détruisent la perpétuité par la probabilité1; la bonne vie par leur morale; les miracles, en détruisant ou leur vérité, ou leur conséquence.

Si on les croit, l'Eglise n'aura que faire de perpétuité, sainteté ni miracles. Les hérétiques les nient, ou en nient la conséquence; eux de même. Mais il faudrait n'avoir point de sincérité pour les nier, ou encore perdre le sens pour nier la conséquence.

...

29.

Quoi qu'il en soit, l'Église est sans preuve, s'ils ont

raison.

30.

L'Église a trois sortes d'ennemis : les Juifs, qui n'ont jamais été de son corps; les hérétiques, qui s'en sont retirés; et les mauvais chrétiens, qui la déchirent au dedans.

Ces trois sortes différentes d'adversaires la combattent d'ordinaire diversement. Mais ici ils la combattent d'une même sorte. Comme ils sont tous sans miracles 3, et que l'Église a toujours eu contre eux des miracles, il ont tous eu le même intérêt à les éluder, et se sont tous servis de cette défaite : qu'il ne faut pas juger de la doctrine par les miracles, mais des miracles par la doctrine. Il y avait deux partis entre ceux qui

1. Voir la septième Provinciale.

2. Il s'agit des Jésuites et de cette doctrine de leurs casuistes, qu'une opinion toute nouvelle, contraire aux Pères et à la tradition, mais soutenue par ce qu'on appelle un anteur grave, devient probable, et peut être suivie en sûreté de conscience. Voir les Provinciales, et en particulier la cinquième.

3. Quand Pascal dit cela des Juifs, il n'entend parler que des Juifs depuis l'arrivée du Messie, les Juifs opposés à JESUS-CHRIST.

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