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promesse des biens temporels, et qu'ils disent néanmoins que leurs discours sont obscurs, et que leur sens ne sera point entendu. D'où il paraît que ce sens secret n'était pas celui qu'ils exprimaient à découvert, et que, par conséquent, ils entendaient parler d'autres sacrifices, d'un autre libérateur, etc. Ils disent qu'on ne l'entendra qu'à la fin des temps. Jer. xxx. ult. ' La troisième preuve est que leurs discours sont contraires et se détruisent, de sorte que, si l'on pense qu'ils n'aient entend par les mots de loi et de sacrifice autre chose que celle de Moïse, il y a contradiction manifeste et grossière. Donc ils entendaient autre chose, se contredisant quelquefois dans un même chapitre 2...

6.

Si la loi et les sacrifices sont la vérité, il faut qu'elle plaise à Dieu et qu'elle ne lui déplaise point. S'ils sont figures, il faut qu'ils plaisent et déplaisent. Or, dans toute l'Ecriture, ils plaisent et déplaisent.

Il est dit que la loi sera changée; que le sacrifice sera changé; qu'ils seront sans roi, sans prince et sans sacrifices; qu'il sera fait une nouvelle alliance, que la loi sera renouvelée, que les préceptes qu'ils ont reçus ne sont pas bons; que leurs sacrifices sont abominables; que Dieu n'en a point demandé.

Il est dit, au contraire, que la loi durera éternellement ; que cette alliance sera éternelle; que le sacrifice sera éternel; que le sceptre ne sortira jamais d'avec eux, puisqu'il n'en doit point sortir que le Roi éternel n'arrive. Tous ces passages marquent-ils que ce soit réalité? Non. Marquent-ils aussi que ce soit figure? Non mais que c'est réalité, ou figure. Mais les premiers, excluant la réalité, marquent que ce n'est que figure.

Tous ces passages ensemble ne peuvent être dits de la réalité; tous peuvent être dits de la figure : donc ils ne sont pas dits de la réalité, mais de la figure. Agnus occisus est ab origine mundi".

1. C'est-à-dire, chapitre xxx, dernier verset: In novissimo dierum intelligetis ea. 2. En titre dans l'antograpbe, Figures.

3. L'agneau a été tué dès le commencement du monde. Ces paroles, prises de l'Apocalypse, XIII, 8, répondent à la pensée de Pascal, que le sacrifice des Juifs n'était que la figure passagère du sacrifice éternel, qui est celui de Jésus-Christ. En titre dans l'autographe, Figures.

7.

Un portrait porte absence et présence, plaisir et déplaisir. La réalité exclut absence et déplaisir.

Pour savoir si la loi et les sacrifices sont réalité ou figure, il faut voir si les prophètes, en parlant de ces choses, y arrêtaient leur vue et leur pensée, en sorte qu'ils n'y vissent que cette ancienne alliance; ou s'ils y voient quelque autre chose dont elle fût la peinture; car dans un portrait on voit la chose figurée. Il ne faut pour cela qu'examiner ce qu'ils en disent.

Quand ils disent qu'elle sera éternelle, entendent-ils parler de l'alliance de laquelle ils disent qu'elle sera changée; et de même des sacrifices, etc.?

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Le chiffre à deux sens 1. Quand on surprend une lettre importante où l'on trouve un sens clair et où il est dit néanmoins que le sens en est voilé et obscurci ; qu'il est caché, en sorte qu'on verra cette lettre sans la voir et qu'on l'entendra sans l'entendre; que doit-on penser, sinon que c'est un chiffre à double sens ; et d'autant plus qu'on y trouve des contrariétés manifestes dans le sens littéral ? Combien doit-on donc estimer ceux qui nous découvrent le chiffre et nous apprennent à connaître le sens caché; et principalement quand les principes qu'ils en prennent sont tout à fait naturels et clairs! C'est ce qu'a fait Jésus-Christ, et les apôtres. Ils ont levé le sceau, il a rompu le voile et a découvert l'esprit. Ils nous ont appris pour cela que les ennemis de l'homme sont des passions; que le Rédempteur serait spirituel et son règne spirituel; qu'il y aurait deux avènements : l'un de misère, pour abaisser l'homme superbe, l'autre de gloire, pour élever l'homme humilié ; que Jésus-Christ serait Dieu et homme. Les prophètes ont dit clairement qu'Israël serait toujours aimé de Dieu, et que la loi serait éternelle; et ils ont dit que l'on n'entendrait point leur sens et qu'il était voilé 2.

8.

Jésus-Christ n'a fait autre chose qu'apprendre aux hommes qu'ils s'aimaient eux-mêmes, qu'ils étaient esclaves, aveu

1. Et non, le chiffre a deux sens. C'est une espèce de titre qui annonce la pensée qui

suit.

2 En titre dans l'autographe, Figures.

gles, malades, malheureux et pécheurs; qu'il fallait qu'il les délivrât, éclairât, béatifiât et guérît; que cela se ferait en se haïssant soi-même, et en le suivant par la misère et la mort de la croix.

8 bis.

La lettre tue. Tout arrivait en figures. Voila le chiffre que saint Paul nous donne. Il fallait que le Christ souffrît. Un Dieu humilié. Circoncision de cœur, vrai jeûne, vrai sacrifice, vrai temple. Les prophètes ont indiqué qu'il fallait que tout cela fût spirituel 1.

8 ter.

Double loi, doubles tables de la loi, double temple, double captivités.

9.

... Et cependant ce Testament, fait pour aveugler les uns et éclairer les autres, marquait, en ceux mêmes qu'il aveuglait, la vérité qui devait être connue des autres. Car les biens visibles qu'ils recevaient de Dieu étaient si grands et si divins, qu'il paraissait bien qu'il était puissant de leur donner les invisibles 3, et un Messie.

Car la nature est une image de la grâce, et les miracles visibles sont image des invisibles. Ut sciatis, tibi dico, Surge1 Isaïe, LI, dit que la rédemption sera comme le passage de la mer Rouge 5.

Dieu a donc montré en la sortie d'Egypte, de la mer, en la défaite des rois", en la manne, en toute la généalogie d'Abraham 7, qu'il était capable de sauver, de faire descendre le pain

1. En titre dans l'autographe, Que la loi était figurative. Figures.

2. En titre dans l'autographe, Figures particulières.

3. Latinisme, pour dire, ayant le pouvoir de leur donner.

4. A la page 43 du manuscrit, on trouve : Ut sciatis quod Filius habet potestatem remittendi peccata, tibi dico, Surge. Le texte complet est, Filius hominis habet potestatem in terra. Marc, II, 10, et Luc, v, 20-24. Jésus a dit au paralytique : «Tes péchés te sont remis. » Et les Juifs s'écriant que Dieu seul peut remettre les péchés, Jésus reprend : Quel est le plus facile de dire, Tes péchés te sont remis, ou de dire à celui qui ne peut se mouvoir, Lève-toi et marche? Afin donc que vous sachiez que le Fils de l'homme a le pouvoir ici-bas de remettre les péchés, je te l'ordonne, lève-toi et marche. »

5. A la page 43 du manuscrit, on trouve au contraire que la mer Rouge, c'est-à-dire la sortie de la mer Rouge, est l'image de la Rédemption. Ce sont les versets 10 et 11 du chapitre LI d'Isaïe que Pascal interprète ainsi.

6. Nombres, xxi.

7. A moins que Pascal n'entende par là simplement la postérité d'Abraham, je ne vois pas bien ce qu'il veut dire.

du ciel, etc.; de sorte que le peuple ennemi est la figure et la représentation du même Messie qu'ils ignorent, etc.

Il nous a donc appris enfin que toutes ces choses n'étaient que figures, et ce que c'est que vraiment libre, vrai Israélite, vraie circoncision, vrai pain du ciel, etc.

Dans ces promesses-là, chacun trouve ce qu'il a dans le fond de son cœur, les biens temporels ou les biens spirituels, Dieu ou les créatures; mais avec cette différence, que ceux qui y cherchent les créatures les y trouvent, mais avec plusieurs contradictions, avec la défense de les aimer, avec l'ordre de n'adorer que Dieu et de n'aimer que lui, ce qui n'est qu'une même chose1, et qu'enfin il n'est point venu Messie pour eux; au lieu que ceux qui y cherchent Dieu le trouvent, et sans aucune contradiction, avec commandement de n'aimer que lui, et qu'il est venu un Messie dans le temps prédit pour leur donner les biens qu'ils demandent.

Et ainsi les Juifs avaient des miracles, des prophéties qu'ils voyaient accomplir; et la doctrine de leur loi était de n'adorer et de n'aimer qu'un Dieu : elle était aussi perpétuelle. Ainsi elle avait toutes les marques de la vraie religion : aussi elle l'était. Mais il faut distinguer la doctrine des Juifs d'avec la doctrine de la loi des Juifs. Or la doctrine des Juifs n'était pas vraie, quoiqu'elle eût les miracles, les prophéties et la perpétuité, parce qu'elle n'avait pas cet autre point, de n'adorer et n'aimer que Dieu.

10.

Un Dieu humilié, et jusqu'à la mort de la croix : un Messie triomphant de la mort par sa mort. Deux natures en JÉSUSCHRIST, deux avénements, deux états de la nature de l'homme".

10 bis.

On ne peut faire une bonne physionomie qu'en accordant

1. C'est-à-dire, que l'ordre de n'aimer que Dieu est la même chose que la défense d'aimer les créatures. Pascal a sans doute dans l'esprit ces passages du Pentateuque: Tu n'adoreras point les créatures. Exod. xx, 5. « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta force. Deut. vi, 5. Tu craindras le Seigneur ton Dieu, et tu ne serviras que lui seul. » Ibid. x, 20. C. Matth. xx11, 37, etc. 2. Avant et après le péché d'Adam. En titre dans l'autographe: Sources des contra

riétés.

toutes nos contrariétés 1, et il ne suffit pas de suivre une suite de qualités accordantes sans accorder les contraires. Pour entendre le sens d'un auteur, il faut accorder tous les passages contraires.

Ainsi, pour entendre l'Écriture, il faut avoir un sens dans lequel tous les passages contraires s'accordent. Il ne suffit pas d'en avoir un qui convienne à plusieurs passages accordants, mais d'en avoir un qui accorde les passages même contraires. Tout auteur a un sens auquel tous les passages contraires s'accordent, ou il n'a point de sens du tout. On ne peut pas dire cela de l'Écriture et des prophètes; ils avaient assurément trop bon sens. Il faut donc en chercher un qui accorde toutes les contrariétés.

Le véritable sens n'est donc pas celui des Juifs; mais en JÉSUS-CHRIST toutes les contradictions sont accordées.

Les Juifs ne sauraient accorder la cessation de la royauté et p incipauté prédite par Osée avec la prophétie de Jacob'.

Si on prend la loi, les sacrifices, et le royaume, pour réalités, on ne peut accorder tous les passages. Il faut donc par nécessité qu'ils ne soient que figures. On ne saurait pas même accorder les passages d'un même auteur, ni d'un même livre, ni quelquefois d'un même chapitre. Ce qui marque trop quel était le sens de l'auteur. Comme quand Ézéchiel, ch. xx, dit qu'or vivra dans les commandements de Dieu et qu'on n'y vivra pas 1.

11.

Il n'était point permis de sacrifier hors de Jérusalem, qui était le lieu que le Seigneur avait choisi, ni même de manger ailleurs les décimes. Deut. xII, 5, etc. Deut. XIV, 23, etc.; xv, 20; xvi, 2, 7, 11, 155.

Osée a prédit qu'ils seraient sans roi, sans prince, sans sa

Je na

1. Port-Royal: On ne peut bien faire le caractère d'une personne, etc pense pas qu'il s'agisse du caractère, mais de la figure, dont on ne peut bien rendre l'expression dans un portrait, ce que Pascal appelle faire une bonne physionomie, sans accorder les contraires, par exemple la sévérité et la douceur, la tristesse et l'agrément, etc. Car les expressions opposées se rencontrent souvent dans une même figure.

2. Osée, 111, 4; Gen. XLIX, 10.

3. C'est-à-dire, plus même qu'il n'est nécessaire.

4. Je n'aperçois pas dans ce chapitre la contradiction indiquée par Pascal. Aussi P. R. a supprimé cette citation. En titre dans l'autographe, Contradiction.

5. On retrouve dans tous ces passages la formule, in loco quem elegerit Dominus.

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