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plus de coups, à cause du pouvoir qu'il a par la connaissance. Qui justus est justificetur adhuc (Apoc. xxII, 11); à cause du pouvoir qu'il a par la justice. A celui qui a le plus reçu sera le plus grand compte demandé, à cause du pouvoir qu'il a par le

secours.

195.

La république chrétienne, et même judaïque, n'a eu que Dieu pour maître, comme remarque Philon juif, De la Monarchie. Quand ils combattaient, ce n'était que pour Dieu; n'espéraient principalement que de Dieu; ils ne considéraient leurs villes que comme étant à Dieu, et les conservaient pour Dieu. I Paralip., XIX, 131.

196.

La victoire sur la mort. [I Cor., xv, 57.] Que sert à l'homme de gagner tout le monde, s'il perd son âme [Luc, 1x, 25]? Qui veut garder son âme la perdra [ibid., 24].

Je ne suis pas venu détruire la loi, mais l'accomplir [Matth., v, 17]. Les agneaux n'ôtaient point les péchés du monde, mais je suis l'agneau qui ôte les péchés [Jean, I, 29]. Moïse ne vous a point donné le pain du ciel [ibid., vi, 32]. Moïse ne vous a point tirés de captivité et ne vous a point rendus véritablement libres [ibid., viii, 36].

197.

Saint Augustin a dit formellement que les forces seraient ôtées au juste. Mais c'est par hasard qu'il l'a dit; car il pouvait arriver que l'occasion de le dire ne s'offrit pas. Mais ses principes font voir que, l'occasion s'en présentant, il était impossible qu'il ne le dît, ou qu'il dit rien de contraire. C'est donc plus d'être forcé à le dire, l'occasion s'en offrant, que de l'avoir dit, l'occasion s'étant offerte; l'un étant de nécessité, l'autre de hasard. Mais les deux sont tout ce qu'on peut demander.

198.

Quand Auguste eut appris qu'entre les enfants qu'Hérode avait fait mourir, au-dessous de l'âge de deux ans, était son propre fils, il dit qu'il était meilleur d'être le pourceau d'Hérode que son fils. Macrob. (Saturn.) livre II, c. 4.

1. En titre dans l'autographe, République.

199.

Voir ce qu'il y a de clair dans tout l'état des Juifs, et d'incontestable 1.

200.

Non.

Eh quoi! Ne dites-vous pas vous-même que le ciel et les oiseaux prouvent Dieu ? Et votre religion ne le ditelle pas? Non. Car encore que cela est vrai en un sens pour quelques âmes à qui Dieu donne cette lumière, néanmoins cela est faux à l'égard de la plupart.

201.

Nihil tam absurde dici potest quod non dicatur ab aliquo philo• sophorum. Cic. de Divin. II, 582.

202.

Est et non est sera-t-il reçu dans la foi, aussi bien que dans es miracles?

Quand saint Xavier fait des miracles .."!

Miracles continuels, faux.

203.

Toujours ou les hommes ont parlé du vrai Dieu, ou le vrai Dieu a parlé aux hommes.

Les deux fondements, l'un intérieur, l'autre extérieur; la grâce, les miracles; tous deux surnaturels.

204.

Judith. Enfin Dieu parle dans les dernières oppressions. Si le refroidissement de la charité laisse l'Eglise presque sans vrais adorateurs, les miracles en exciteront. C'est un des derniers effets de la grâce.

S'il se faisait un miracle aux Jésuites !

Quand le miracle trompe l'attente de ceux en présence desquels il arrive, et qu'il y a disproportion entre l'état de leur foi et l'instrument du miracle, alors il doit les porter à changer. Mais vous, autrement. Il y aurait autant de raison à dire que,

1. En titre dans l'autographe, Ordre.

2. On trouve çà et là dans le manuscrit quelques textes semblables, isolés, et probablement pris dans Montaigne. Il suffira d'avoir reproduit le plus caractéristique: « Il n'y a rien de si absurde à dire qui ne soit dit par quelque philosophe. Apol., t. 1, p. 268. 3. Saint François-Xavier était jésuite.

si l'Eucharistie ressuscitait un mort, il faudrait se rendre calviniste que demeurer catholique. Mais quand il couronne l'attente, et que ceux qui ont espéré que Dieu bénirait les remèdes se voient guéris sans remèdes...

205.

Comme Dieu n'a pas rendu de famille plus heureuse, qu'il fasse aussi qu'il n'en trouve point de plus reconnaissante 1.

206.

Roi et tyran. J'aurai aussi mes pensées de derrière la tête. Je prendrai garde à chaque voyage.

207.

Qu'y a-t-il de plus absurde que de dire que des corps inanimés ont des passions, des craintes, des horreurs? Que des corps insensibles, sans vie, et même incapables de vie, aient des passions, qui présupposent une âme au moins sensitive pour les ressentir? De plus, que l'objet de cette horreur fût le vide? Qu'y a-t-il dans le vide qui puisse leur faire peur? Qu'y a-t-il de plus bas et de plus ridicule? Ce n'est pas tout: qu'ils aient eu eux-mêmes un principe de mouvement, pour éviter le vide? Ont-ils des bras, des jambes, des muscles, des nerfs 2?

208.

Venise. Quel avantage en tirerez-vous, sinon du besoin qu'en ont les princes, et de l'horreur qu'en ont les peuples? S'ils vous avaient demandés, et que pour l'obtenir ils eussent imploré l'assistance des princes chrétiens, vous pourriez faire valoir cette recherche. Mais que durant cinquante ans tous les princes s'y soient employés inutilement, et qu'il ait fallu un aussi pressant besoin pour l'obtenir..... 3

1. En titre dans l'autographe, Sur le miracle.

2. Ce fragment porte dans l'autographe cette indication: Part. I, l. II, c. 1, s. 4; c'est-à-dire, sans doute, ire partie, livre II, chapitre 1, section 4, du Traité du Vide, auquel Pascal a travaillé longtemps. Voyez un fragment considérable de ce Traité dans les Opuscules.

3. Les Jésuites avaient été bannis en 1606 du territoire de Venise. En 1657, la République venait d'accorder enfin leur rappel aux instances du pape, de la cour de France et des autres puissances catholiques, qu'elle était alors dans la nécessité de ménager, se érouvant très-embarrassée de la guerre qu'elle soutenait contre les Turcs.

209.

LE MYSTÈRE DE JÉSUS'

1.

JESUS Souffre dans sa passion les tourments que lui font les hommes; mais dans l'agonie il souffre les tourments qu'il se donne à lui-même : turbare semetipsum. C'est un supplice d'une main non humaine, mais toute puissante, car il faut être tout-puissant pour le soutenir.

JESUS cherche quelque consolation au moins dans ses trois plus chers amis, et ils dorment. Il les prie de soutenir un peu avec lui, et ils le laissent avec une négligence entière, ayant si peu de compassion qu'elle ne pouvait seulement les empêcher de dormir un moment. Et ainsi JÉSUS était délaissé seul à la colère de Dieu.

JÉSUS est seul dans la terre, non-seulement qui ressente et partage sa peine, mais qui la sache; le ciel et lui sont seuls dans cette connaissance.

JESUS est dans un jardin, non de délices, comme le premier Adam, où il se perdit, et tout le genre humain; mais dans un de supplices, où il s'est sauvé, et tout le genre humain.

Il souffre cette peine et cet abandon dans l'horreur de la nuit.

Je crois que Jésus ne s'est jamais plaint que cette seule fois; mais alors il se plaint comme s'il n'eût plus pu contenir sa douleur excessive: Mon âme est triste jusqu'à la mort.

JESUS cherche de la compagnie et du soulagement de la part des hommes. Cela est unique en toute sa vie, ce me semble. Mais il n'en reçoit point, car ses disciples dorment.

1. Ce morceau précieux a été publié pour la première fois par M. Faugère. Il se trouve à la page 87 du cahier autographe. On doit le regarder comme faisant partie des Pensées. 2. Jean, x1, 33, en parlant de l'émotion que Jésus éprouve à la vue de ceux qui pleurent sur Lazare mort. Il y a seipsum dans le texte.

3. Pascal traduit mot à mot l'expression latine: Sustinete hic, Patientez ici. Matth. XXVI, 38.

Jésus sera en agonie jusqu'à la fin du monde : il ne faut pas dormir pendant ce temps-là.

JÉSUS, au milieu de ce délaissement universel, et de ses amis choisis pour veiller avec lui 1, les trouvant dormant, s'en fâche à cause du péril où ils exposent non lui, mais eux-mêmes, et les avertit de leur propre salut et de leur bien, avec une tendresse cordiale pour eux pendant leur ingratitude, et les avertit que l'esprit est prompt et la chair infirme.

JÉSUS, les trouvant encore dormant, sans que ni sa considération ni la leur les en eût retenus, il a la bonté de ne pas les éveiller, et les laisse dans leur repos.

Jésus prie dans l'incertitude de la volonté du Père, et craint la mort; mais l'ayant connue, il va au-devant s'offrir à elle : Eamus. Processit (Joannes) *.

Jésus a prié les hommes, et n'en a pas été exaucé.

Jésus, pendant que ces disciples dormaient, a opéré leur salut. Il l'a fait à chacun des justes pendant qu'ils dormaient, et dans le néant avant leur naissance, et dans les péchés depuis leur naissance.

Il ne prie qu'une fois que le calice passe, et encore avec soumission; et deux fois qu'il vienne, s'il le faut.

Jésus dans l'ennui. JESUS voyant tous ses amis endormis et tous ses ennemis vigilants, se remet tout entier à son père. JÉSUS ne regarde pas dans Judas son inimitié, mais l'ordre de Dieu qu'il aime, et l'avoue, puisqu'il l'appelle ami 3.

JÉSUS s'arrache d'avec ses disciples pour entrer dans l'agonie: il faut s'arracher de ses plus proches et des plus intimes pour l'imiter.

JESUS étant dans l'agonie et dans les plus grandes peines, prions plus longtemps*.

2.

Console-toi tu ne chercherais pas, si tu ne m'avais

trouvé.

1. Comme s'il y avait : ce délaissement de la part de tous et de ses amis.

2. Matth., xxvi, 46, et Jean, xviii, 4.

3. Matth., xxvi, 30.

4. Luc, XXII, 43: Et étant entré en agonie, il pria longtemps (prolixius orabat). • Il semble que Pascal fait ici une pause, et passe de la méditation à l'oraison, à une oraison parcille à celle de Jésus, inquiète et tourmentée.

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