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avait été déterminée par les actes des conciles et par les canons. Le concile général de Florence, où les Latins et les Grecs s'unirent dans un symbole commun, est de 1439.

Fragment 77. « Duo aut tres in unum. »

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Ces paroles ne se trouvent nulle part textuellement dans l'Écriture. Ce qui s'en rapproche le plus, et que Pascal paraît avoir en vue, est un passage de la première Lettre à ceux de Corinthe, xiv, 27.Paul se plaint que, dans les assemblées des fidèles, il y en a trop qui veulent montrer qu'ils ont reçu de Dieu l'esprit de prophétie, ou le don des langues, de façon qu'on y entend à la fois toutes sortes de langues et toutes sortes de révélations, et il ajoute : « Si donc il y en a qui aient le don des langues, qu'on n'en entende que deux ou trois au plus, et chacun à son tour, et qu'il y ait un interprète pour traduire leurs paroles (et unus interpretetur). » Et un peu plus loin « Que deux ou trois prophétisent (duo aut tres dicant), et que les autres écoutent et jugent.» Pascal qui use et abuse des textes, paraît avoir détourné celui-ci, dans sa pensée, à signifier qu'il peut y avoir dans l'Église, non pas une seule opinion (celle du pape) mais deux ou trois c'est-à-dire plusieurs, à la condition que cette pluralité se réduira à l'unité par une décision collective (celle des conciles).

Peut-être faut-il lire séparément : Duo aut tres. In unum.

Fragment 78. «Il y a hérésie à expliquer toujours omnes de tous. >> Voyez le fragment 11, et la note.

Fragment 79. « La mer entière change pour une pierre. » Cette assertion se fonde sur l'hypothèse cartésienne du plein absolu et continu dans la nature. Si tout est plein, aucune force, aucune action ne se perd dans le vide; il y a communication infinie du moindre mouvement imprimé en un point quelconque de la matière.

Fragment 84. « L'infaillibilité... dans la multitude, cela paraft si naturel... »

Il est naturel en effet de mettre l'autorité plutôt dans le consentement général, et dans une majorité, que dans un seul homme. Mais l'autorité n'est pas l'infaillibilité; celle-ci n'appartient naturellement ni à plusieurs, ni à tous; elle ne saurait jamais être que chose surnaturelle, et miracle.

Fragment 87.

« Dire les choses de telle façon que ceux à qui l'on parle puissent les entendre sans peine et avec plaisir. »

Τὸ γὰρ μανθάνειν ῥᾳδίως ἡδὺ φύσει πᾶσιν ἐστιν. Aristote, Rhet., III, 10.

» Ce qui suppose qu'on aura bien étudié le cœur de l'homme, pour en savoir tous les ressorts. »

Cette rhétorique philosophique est la même dont Platon a le premier exposé les principes dans le Phèdre, chap. LVI (page 271 d'Estienne): «Puisque le talent du discours est un art de mener les âmes (Yıxaywyía), celui qui veut être orateur doit nécessairement connaître à fond l'âme humaine, etc. »>

« Il faut se mettre à la place de ceux qui doivent nous entendre. » C'est aussi le précepte de Cicéron, de Oratore, II, 24.

«Ne pas faire grand ce qui est petit, ni petit ce qui est grand. » Fénelon a dit :

« L'art se décrédite lui-même; il se trahit en se montrant. Isocrate, dit Longin, est tombé dans une faute de petit écolier... Et voici par où il débute: Puisque le Discours a naturellement la vertu de rendre les choses grandes petites, et les petites grandes ; qu'il sait donner les grâces de la nouveauté aux choses les plus vieilles, et qu'il fait paraître vieilles celles qui sont nouvellement faites... En faisant de cette sorte l'éloge du discours, il fait proprement un exorde pour exhorter ses auditeurs à ne rien croire de ce qu'il leur va dire. » Lettre à l'Académie, ¿ IV.

Fragment 88. « Il n'est pas certain qu'elle soit [la religion], mais qui osera dire qu'il est certainement possible qu'elle ne soit pas? » Il y a ici une confusion manifeste. Pascal transporte la considération du possible dans un ordre de choses qui ne la comporte pas. Pour les faits, pour les choses accidentelles, ou, comme on dit en philosophie, contingentes, il y a être, il y a n'être pas; il y a, avant l'événement, être possible. Mais pour les principes absolus et indépendants de tout événement, ils sont simplement vrais ou faux; là, la considération du possible n'a plus lieu. Pour être certain qu'un fait quelconque peut n'être pas, il n'y a pas besoin d'être certain que ce fait n'est pas en effet; car telle chose est, qui pourrait ne pas être. Mais pour être certain que Dieu peut ne pas être, il faudrait être certain qu'il n'est pas; car s'il est, il ne pouvait pas ne pas être. Etre incertain s'il est, ou être incertain s'il peut-être, c'est la même chose, c'est un seul et même doute, et non deux degrés de doute différents. L'argument de Pascal mènerait jusqu'à l'absurde. Supposons qu'on présente à un homme cette proposition : Les trois angles d'un triangle sont égaux à deux droits et demi; et que cet homme ne sache pas assez de géométrie pour affirmer que cette proposition n'est pas vraie; dès lors, et par cela seul, il est également incapable d'affirmer qu'elle peut n'être pas

1. Dans le Discours panégyrique

vraie. Lui dira-t-on : Voici une proposition douteuse pour vous, mais qui pourtant doit vous paraître plus sûre qu'il n'est sûr que vous viviez demain; car vous êtes certain que vous pouvez ne pas vivre demain, et vous n'êtes pas certain que cette proposition puisse n'être pas vraie?

<< On doit travailler pour l'incertain, par la règle des partis, qui est démontrée. »>

Si elle est démontrée, il ne faut donc pas dire que rien n'est certain. Cela même, qu'on doit agir pour l'incertain, il faut que ce soit une certitnde. Et, si la règle des partis était incertaine, Pascal ne pourrait nous proposer d'agir d'après la règle des partis.

Les éditeurs de Port-Royal suppriment ce fragment; ils ont craint qu'on ne pût supporter ces propositions, que la religion n'est pas certaine, etc., ou eux-mêmes ne les ont pas supportées.

Fragment 89. « La nature de l'homme n'est pas d'aller toujours, elle a ses allées et venues... Les inventions des hommes de siècle en siècle vont de même. La bonté et la malice du monde en général en est de même. »>

Cette pensée manque dans l'édition de Port-Royal. Ceux qui l'ont publiée depuis l'ont transformée de manière à faire dire à Pascal tout le contraire de ce qu'il disait. Ils l'ont réduite aux deux phrases suivantes :

« Les inventions des hommes vont en avançant de siècle en siècle. La bonté et la malice du monde en général reste la même. »

A l'occasion de cette pensée, substituée à celle de Pascal, M. SainteBeuve dit qu'en effet il faut chercher le progrès « dans la marche et dans les résultats des sciences mathématiques, physiques et naturelles, et aussi de la science historique, en tant qu'elle procède de l'observation comparée, et qu'elle ne cesse de s'armer en tout sens d'une critique positive. C'est grâce à ces sciences seules que se modifie et se modifiera à la longue, lentement, très-lentement, mais d'une manière certaine et à fond, l'état moral et intellectuel de l'humanité. » Et il ne doute pas que Pascal ne l'eût bien compris, s'il avait été « un peu moins frappé de terreur sacrée. » Châteaubriand et son groupe (1861), t. I, p. 147, en note.

Il n'y a que trop de vérité dans la pensée même de Pascal; elle n'est pas cependant, espérons-le, toute la vérité. Si la nature de l'homme n'est pas d'aller toujours; si, à mesure qu'il avance, il recule ensuite, du moins il ne recule pas toujours autant qu'il avance. La cause de la raison et de la justice avait bien gagné déjà dans le

monde au temps de Pascal, elle a gagné depuis davantage. Que ceux qui emploient leurs forces à servir cette cause ne se flattent donc pas, mais qu'ils ne désespèrent pas non plus.

Fragment 93.

<< Est fait prêtre qui veut l'être, etc. »

Ce fragment appartient encore à la polémique contre la religion relâchée. Les jansénistes reprochaient à la discipline ecclésiastique de leur temps d'avoir abaissé et comme dégradé, avec la grâce même de JÉSUS-CHRIST, les instruments de cette grâce, la direction des consciences, les sacrements de la Pénitence et de l'Eucharistie, et le caractère auguste du prêtre, dispensateur de la parole, des sacrements, de la grâce même. Il faut voir dans le Port-Royal de M. Sainte-Beuve, 1re édit., t. I, page 454 et suivantes, l'idée que le maître du jansénisme français, Saint-Cyran, se faisait du sacerdoce. Il croit que c'est à peine si on peut trouver un bon prêtre sur dix mille. Le prêtre est plus qu'un ange; combien donc doit-il être pur! Les hommes de l'ortRoyal ne redoutaient rien tant que ce fardeau de la prêtrise; ils ne le recevaient que forcés. Voici enfin ce qu'on lit dans l'interrogatoire de Saint-Cyran à Vincennes (Recueil d'Utrecht, p. 138, no 207): « (Interrogé s'il n'a pas dit qu'un homme qui a une fois péché contre la chasteté ne doit point se porter au sacerdoce, a dit... qu'il sait assez qu'il y a des canons qui veulent qu'on reçoive des pénitents lorsqu'on ne trouve pas des innocents. Avoue avoir dit à quelques-uns, afin de tempérer l'ardeur qu'ils avaient de se faire prêtres, que l'Église n'a reçu jusqu'au septième siècle que ceux qui avaient conservé leur innocence (Saint-Cyran a-t-il pu oublier tant de pénitents devenus prêtres et Saints, et saint Augustin avant tous?); et c'est peut-être un des sujets pour lesquels il a tant relevé la pureté de l'Eglise en ses premiers siècles, mais... etc. » Pascal n'est que l'écho de ces oracles. Maintenant, où en était-on dans la pratique? Des hommes coinme Retz figuraient aux plus hauts rangs de l'Église; et que trouvait-on, quand on descendait dans la foule? Je demande ici qu'on me permette de citer un simple manuscrit de famille que j'ai entre les mains, un journal écrit par un bourgeois d'une petite ville de Normandie, qui était doyen des avocats de son hailliage à la fin du règne de Louis XIV. Plusieurs pages de ce journal (années 1708-1722) sont remplies par l'histoire des tribulations que lui cause l'aîné de ses nombreux enfants, qui a pris le petit collet, et s'est destiné pour l'ordre de prêtrise. L'abbé, comme il l'appelle, est sous-diacre, et par conséquent engagé, en 1706, avant d'avoir atteint 22 ans. Il est ordonné diacre en 1708, après avoir été refusé deux fois, puis il demande la prêtrise. Il est d'abord refusé cinq fois de suite par l'archevêque de Rouen; il pense

alors à se faire bénédictin, mais il est renvoyé après une épreuve d'un mois Il a 29 ans, et son père écrit: Il est temps qu'il change de conduite. Il revient pour tenter encore une fois fortune, et je lis dans le journal: L'abbé ne s'est point présenté, ni à l'ordination de saint Michel, ni à celle de Pâques 1714; il a eu raison, car s'il ne change de conduite, il ne sera jamais prêtre. Puis en 1715: L'abbé continue toujours sa vie irrégulière: c'est le fléau que Dieu m'a donné pour faire pénitence. Et la même année : L'abbé, après bien des déréglements, est enfin parti du pays: Dieu veuille le convertir! L'abbé entre à la Trappe, pour en sortir tout de suite; puis dans un autre couvent, d'où il est aussitôt mis dehors pour sa mauvaise constitution de corps et d'esprit. Il revient chez son père, et au bout d'un an, étant encore plus passionné pour la boisson, et point disposé pour l'ordre de prêtrise, il quitte la maison sans dire adieu, étant en état de vivre de son bien. Il y rentre au bout de trois ans, à 36 ans (1720), ne sachant où prendre du pain, sans habits, sans linge, sans argent, sans bien, et sans esprit. Il est encore refusé en 1721 par l'archevêque; puis tout à coup on lit ce qui suit: A la fin, après bien des peines, des voyages et de la dépense, l'abbé est prêtre du 20 septembre 1722. Le père n'ajoute pas un mot à cette mention, si ce n'est qu'il enregistre soigneusement, ici comme partout, le compte des sommes qu'il lui a fallu débourser pour son fils. Il me semble que ce récit d'un journal obscur vaut bien ce qu'on pourrait chercher dans l'histoire, ou dans les Mémoires de personnages célèbres, pour commenter le texte de Pascal. On y voit sans doute qu'on n'était pas prêtre absolument dès qu'on voulait l'être, et que l'Église tâchait d'écarter ceux qui se montraient trop indignes; mais aussi on voit que la mesure de ses scrupules et de ses sévérités ne pouvait pas satisfaire certaines âmes difficiles et impatientes du mal. Cet éclat de l'Église de France, au siècle de Bossuet et de Rancé, nous cache bien des misères.

Fragment 96. « Mais le moyen que ce qui est si faible étant enfant, soit bien fort étant plus âgé! » La Bruyère retourne cette pensée quand il dit : « Les enfants sont hautains, dédaigneux, colères... ils rient et pleurent facilement... ils ne veulent point souffrir de mal et aiment à en faire. Ils sont déjà des hommes.» De l'homme, 50.

Fragment 97.

etc. >>

- ་...

Que le monde soit créé, qu'il ne le soit pas,

Ce sont précisément les antinomies de Kant (ou lois contraires de la raison). Voir la Critique de la raison pure.

Fragment 99.

Ils croient les miracles de Vespasien. » De bons

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