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vrant sur un jabot de dentelle limité par un ruban rouge. Toile acquise en 1844 pour 600 frs à une dame Voïart, probablement la femme de lettres citée, en passant, par Sainte-Beuve. Soulié l'enregistre dans sa Notice, sous le n° 4.274, comme Racine en l'attribuant à l'« école de Mignard ». Mentionnée plus tard par Nolhac et Pératé, mais dédaignée lors de la réorganisation des collections, elle fut exhumée en 1949 par le conservateur Mauricheau-Beaupré qui la commenta avec une admiration qui étonne, car la peinture est de facture lourde et vulgaire, indigne du sévère traducteur des visages que fut Pierre Mignard, et le personnage donne l'impression d'un riche satisfait, non d'un intellectuel ardent ».

Nous nous associons au vou exprimé par Gaston Brière dans la lettre que nos lecteurs trouveront ici même, deux pages plus haut: « Le vrai visage de Racine, peint par Santerre, voilà l'image que je voudrais voir entrer dans le Panthéon' national versaillais ». Le pauvre portrait de l'exposition actuelle ne représente assurément pas Racine.

D'autre part, le même catalogue est injuste lorsqu'il dit (page 147), à propos de Segond-Weber: « Son tempérament fit d'elle l'interprète idéale de Corneille, comme Mlle Bartet fut celle de Racine ». Bartet avait un tempérament de comédienne, et non de tragédienne, et elle était loin de posséder, physiquement et vocalement, les dons de Segond-Weber. On a surtout retenu d'elle son interprétation de Bérénice : quiconque l'a vue dans Bérénice ne peut plus l'oublier. Mais c'est SegondWeber qui a interprété avec quelle magistrale puissance! à peu près toutes les grandes héroïnes de Racine, et notamment Andromaque, Agrippine, Clytemnestre, Phèdre et sauf erreur Roxane et Athalie.

Quant aux lacunes, qui sont inévitables, on ne saurait les reprocher aux organisateurs. Il y en a une qui nous est imputable, et certes nous aurions pu, si nous avions été avertis à temps, offrir une relique pour cette exposition. C'est au sujet de Rachel, la géniale actrice qui après le romantisme ramena le goût public vers la tragédie classique. Sa place est importante dans cette exposition, qui nous montre ses diadèmes, couronnes, collier et bracelets, coffret, châle, mouchoir, pantoufles, etc... Pour notre part, nous possédons l'exemplaire de travail, des tragédies de Corneille, qui a été celui de Rachel.

C'est un vilain petit volume habillé de carton marron : Chefsd'œuvres (sic) dramatiques de P. Corneille, à Paris, chez Lefèvre,

éditeur, rue de l'Eperon 6. 1844. Combien de fois Rachel l'at-elle tenu dans ses mains? Bien souvent, certes, puisqu'elle l'emportait dans ses tournées à l'étranger. Il porte, au dos de la page de titre, les lignes suivantes, écrites de la main de Rachel :

Oh! mon grand Corneille,

remplis sans cesse mon cœur des
élans sublimes, des héroïques
sentiments que tu as tant de
fois placés dans ma bouche!
Prouve à tous que, modeste
interprète de ton génie, je
puis gagner au contact de
tes nobles pensées autre chose
que de les bien traduire.

Rachel

Turin le 16 octobre 1851.

Ce volume est assorti d'une lettre de Dinah Félix, sœur de Rachel.

La revue de vulgarisation Miroir de l'Histoire, de juillet 1962, dans sa rubrique : « Quand l'histoire dit son mot », a placé le mot de Mme de Maintenon : « Elles sont comme moi, elles regrettent leur bourbe », en ajoutant un commentaire qui débute ainsi : << Mme de Maintenon à Mme de Caylus, qui lui avait fait remarquer l'air de tristesse des carpes du bassin de Marly ». L'anecdote est prise des « Particularités sur M. Racine » et a été révélée par le Cahier Racinien II (pages 69 et 70). Où le Miroir de l'Histoire a-t-il été chercher Mme de Caylus ? Quant à « l'air de tristesse », il est drôle, car le document original ne parle que « des mortes et des mourantes ». Naturellement, l'auteur de cette citation arrangée n'a pas eu la probité de dire sa source.

Il y a mieux dans ce genre. La Semaine Radio-Télé du 25 février 1962 a publié un article intitulé : « Secret d'Etat : Racine a-t-il empoisonné sa première Andromaque ? ». Le titre est en

cadré de deux figures à gauche une tête de femme avec cette légende << Mlle Duparc... De mort naturelle ?». A droite un portrait d'homme présenté : « Racine... Le bras long ». Ce n'est d'ailleurs ni Racine, ni Mlle du Parc. La page imprimée est bourrée de grossières erreurs. Cependant, il est visible qu'elle n'a pas pu être faite sans avoir recouru à la Vie de Marquise du Parc, d'André Chagny, que nous avons publiée ici même.

Que ces revues pour gros public pillent les Cahiers Raciniens, cela leur est commode, et cela est honorable pour nous. Il est heureux qu'elles ne citent pas leur source, tant elles la déforment et pourraient ainsi la discréditer. Mais on ne saurait trop mettre en garde les honnêtes gens contre de tels procédés.

D'un compte-rendu que M. V.-H. Debidour consacre, dans Le Bulletin des Lettres (n° 237), à la parution du livre d'André Chagny Marquise du Parc aux éditions de la Nef de Paris, nous extrayons les lignes suivantes :

<< Le grand lettré lyonnais qu'est André Chagny a trouvé dans la biographie de Marquise du Parc un sujet à sa mesure. Rien qu'en suivant d'aussi près que possible la vie de Marquise, c'est toute l'histoire grande et petite du théâtre français dans sa plus belle époque, avec ses trois plus grands génies, qui est évoquée. Et c'est bien ce que nous donne André Chagny, interrogeant avec patience et sagacité tous les textes, depuis les registres paroissiaux jusqu'aux correspondances et pamphlets, en passant par les gazettes rimées de Loret et de Robinet, et sans oublier, bien sûr, le registre de La Grange, ni l'Histoire du Théâtre des frères Parfaict... Tout cela est passé au crible d'une érudition alerte, qui n'est jamais dupe ni victime de ses méthodes : car celles-ci, rigoureuses, écartent sagement la tentation des hypothèses hasardeuses et des suggestions scandaleuses. Les Cahiers Raciniens, dont André Chagny est le collaborateur, n'ont pas coutume de s'ouvrir à des élucubrations chancelantes, et c'est une garantie supplémentaire d'autorité, s'il en était besoin, pour un travail qui s'impose désormais à l'attention de quiconque voudra parler de Racine.

<< Et puis ce qui fait plaisir, c'est l'énergie avec laquelle André Chagny repousse les « racontars », qu'ils viennent des folliculaires de l'époque, ou d'un Pifteau ou d'un Léopold Lacour. On dirait que sa ferveur pour les grands génies, son bon

sens raisonnable et raisonné, enfin les exigences de la charité chrétienne, convergent pour le mettre en garde ; et il nettoie la mémoire de Molière et celle de Racine des imputations malveillantes dont elles ont pu être chargées. Celle de Marquise aussi, qu'il nous montre avoir été une comédienne passionnée pour son art, mais une femme saine et droite, sachant tenir jusqu'à son veuvage la dragée haute à tant de soupirants: il refuse, d'instinct, toutes les interprétations « réductrices ». Et c'est une joie bien rare aujourd'hui de rencontrer un tel esprit, qui rompt en visière courageusement car c'est courage, il faut le dire à cette tendance qui de tant de manières porte à rabaisser ce qui est grand, à salir ce qui est beau. On songe aux sarcasmes vengeurs de Péguy contre Bahut, contre tous les critiques démolisseurs qui ne sont jamais si fiers d'eux-mêmes que quand ils ont « prouvé » qu'une auréole est usurpée. André Chagny, c'est l'anti-Guillemin, grâces lui en soient rendues. Je viens de parler de Péguy: André Chagny a réussi à appliquer à Molière, Corneille et Racine la méthode d'analyse critique la plus précise << lansonienne >> sur les << alentours » de leur œuvre, tout en éclairant de respect et de dignité ces géniales figures. Il a bien servi à la fois l'intelligence que nous pouvons avoir d'eux, et la vénération que nous devons avoir pour eux »>.

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CORRESPONDANCE

Sur deux vers de Britannicus

A propos de mon article Sur deux vers de Britannicus, (1) un lecteur belge, M. Pierre-Marie Gason, élève de l'Institut supérieur d'Histoire de l'Art et d'Archéologie de l'Université de Liège, m'adresse les remarques suivantes.

<< ...Le rapprochement établi par vous des situations familiales d'Agrippine et d'Anne d'Autriche emporte, évidemment, la conviction que la formule célèbre Moi, fille, femme, sœur et mère de vos maîtres, est ambivalente. Cette situation cependant n'est pas exceptionnelle, et il convient d'apporter quelque tempérament à l'affirmation de Limiers: Nulle autre ne porta ces grands noms à la fois. En cette même année 1669 où Britannicus parut sur la scène, Bossuet évoquait le 16 novembre dans l'éloge funèbre d'Henriette-Marie de France, reine de la Grande-Bretagne, la mémoire d'une grande reine fille, femme, mère de rois si puissants. Elle était encore, et Racine a pu s'en souvenir, sœur de Louis XIII ».

Je m'étais limité, un peu étroitement peut-être, à mon propos, ne voulant pas épiloguer trop longuement sur deux vers. Mais M. Gason est parfaitement fondé à rappeler l'oraison funèbre d'Henriette de France, et puisqu'il soulève avec beaucoup de

(1) Voir Cahier Racinien X (page 692).

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