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Je pourrois peut-être, Monsieur, vous donner ce quatrain pour preuve que Gromet étoit bourguignon, car il n'y a guère qu'un homme de cette province qui s'avisât de faire le souhait contenu dans le second vers. Mais vous me répondriez, sans doute, que si cet auteur n'est pas né en Bourgogne, il est du moins de la lisière. Je vais donc tâcher de prouver plus sérieusement et plus solidement qu'il étoit d'Auxerre. J'aurai par là occasion de faire mention de quelques uns de ses ouvrages, dont je ne vous entretiendrai pas long-temps, parce qu'ils se trouvent, pour la plupart, dans la Croix du Maine et dans du Verdier.

Ce dernier nous apprend que Grosnet (ces deux bibliographes le nomment ainsi) a fait le Manuel ou Promptuaire des Vertus morales et intellectuables, imprimé à Paris, chez Pierre Sergent, in-8°, sans date. Je ne connois point ce livre. L'auteur en a parlé dans son épître dédicatoire des Mots dorés. Est-ce la même chose que celui-ci ? Enchiridion virtutum, sive compendiolum morale Petri Grosneti Altissiodorensis, Artium Magistri, necnon in utroque jure Licentiati, in optima Aristotelis Moralia introductorium. Parisiis, apud Johannem Longis. Cum privilegio, 1534, in-16.

Vous voyez, Monsieur, que l'auteur se dit Auxerrois. Il signe son nom en latin Grosnetus, mais il est toujours suivi de ce mot: Altissiodorensis. Après cette épître suit une autre, à la tête de laquelle on lit: Humanissimos, necnon clarissimos fratres et Dominos, Gulielmum Claromontensem Præsulem, et Antonium a Prato, Dominum de Nantoilleto; Petrus Grosnetus, Altissiodorensis Salvere jubet.

On trouve encore quelques autres ouvrages de Grognet dans la Croix du Maine et dans du Verdier. Je ne vous en citerai

plus qu'un. La Croix du Maine dit qu'il a écrit premièrement en latin, et depuis traduit en françois un livre intitulé: Le désenhortement du péché de luxure, et généralement de tous les péchés mortels, imprinié à Paris l'an 1537. Je n'ai point vu la traduction, mais j'ai l'original, qui est relié avec l'Enchiridion dont je viens de parler; en voici le titre : Haud inutile libidinis, sive Luxuriæ dehortamentum, cum Laicis, tum Ecclesias. ticis viris utilissimum, necnon accommodatissimum, 1538.Cam privilegio, Parisis, apud Dyonisium Janotium, in-16...

J'ai peine à concilier la date de 1537, que la Croix du Maine donne à la traduction, avec celle de l'original, qui est de 1538, c'est vraisemblablement une faute de ce bibliothécaire. Le livre, qui est dédié au cardinal Louis de Bourbon, archevêque de Sens, ne contient qu'un tissu de citations triviales d'ancieus auteurs, en prose et en vers, comme vous vous en apercevrez, si vous le parcourez un jour. Je ne répéterai point que l'auteur s'y nomme plusieurs fois Altissiodorensis. Ce qu'il y a de singulier dans tous les ouvrages que j'ai vus de Grognet, c'est qu'il n'y a point de chiffres au haut des pages. La même chose s'observe-t-elle dans votre in-8° et dans votre édition gothique ?

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Au reste, Monsieur, l'amitié qui a été entre vous et feu M. l'abbé Papillon, aussi bien que votre zèle pour la république des lettres et pour votre patrie, à qui vous faites tant d'honneur, m'engagent à vous apprendre qu'on va mettre incessamment sous presse, à Dijon, sa bibliothèque des auteurs de Bourgogne. Comme je suis chargé de l'édition de cet ouvrage, je prendrai la liberté de vous demander, dans le temps, quelques éclaircissemens sur les écrits que vous avez mis au jour. J'espère que vous voudrez bien me les donner. Si vous connoissez quelques autres ouvrages de Grognet, qui ne soient pas dans la Croix du Maine ni dans du Verdier, supposé que cet écrivain soit d'Auxerre, je vous prie de me les indiquer, et de me croire avec respect, etc.

A Dijon, ce 25 avril 1739.

quatre-vingts cordeliers allèrent quérir ladite téte, pour inhumer dans leur couvent.

Si vous ne m'aviez appris, Monsieur, que ces Mots dorés sont un extrait de l'in-8°, j'aurois été tenté d'en douter, et voici par quelle raison. A quel propos l'auteur a-t-il intitulé son livre: second volume des Mots dorés, s'il n'a pas eu dessein d'en don. ner un premier (1)? Or, ce premier ne pourroit-il pas être l'in-16 qu'il auroit composé d'abord, et qu'il n'auroit jugé à propos de publier qu'après le second? Je ne fais cette remarque qu'en tremblant, parce que je n'ai jamais vu l'édition in-8°.

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Quoiqu'il en soit, ces Mots dorés ne sont autre chose qu'une traduction en vers françois des distiques attribués mal à propos à l'ancien Caton, par Vigneul Marville, qui, pour le dire en passant, assure, page 64 du tome 1er de ses Mélanges, édition de 1725, qu'il ne sait sur quel fondement certains critiques prétendent que les distiques de Caton ne sont point de cet ancien Romain, mais de quelque demi-chrétien qui s'est couvert de son nom. Je serois, ajoute-t-il, plutôt de l'avis de ceux qui pensent que ce petit ouvrage est véritablement de Gaton, etc. Pour être de ce sentiment il faut n'avoir pas lu le second livre de ces dis tiques, au commencement duquel l'auteur fait mention de Lucain. Finissons cette digression, Gromet a aussi traduit en vers le prologue de ces distiques, et a fait précéder le tout d'un autre prologue aussi en vers de sa façon. Voici comme il tra duit le dernier distique, ou plutôt les deux derniers vers, puisque ce sont des hexamètres :

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Miraris verdis nudis me scribere versus ;

Hos brevitas sensus fecit conjungere binos.
Tu t'esbahis de la doctrine,

De Cathon lequel pour le mieux

A fait son livre cher et digne,

Par vers et couplets deux à deux.

Il termine sa traduction de la manière suivante :

Mais d'icelui le translateur,

Sans perdre temps et pour s'esbatre,
Comme simple et humble orateur,

De deux vers en a couché quatre.

(1) Le premier volume est le recueil des distiques moraux de Cathon dont il est parlé ci-après que P. Grognet avoit traduits.

C. G.

Vous savez, Monsieur, que les railleurs appliquent ce dernier vers des distiques de Caton: Hos brevitas sensus fecit conjungere binos, aux moines qui sont obligés de sortir accompa gnés.

Puisque je suis en goût de citer, je vais transcrire quelques morceaux singuliers de la composition de Gromet, lesquels suivent la version des distiques de Caton.

Si je m'esbas, faisant rondeaux en ryme,
Le plus souvent en rimant je m'enrime;
Bref, c'est pitié d'entre nous rimailleurs,
Car vous trouvez assés de rime ailleurs,
Et quand vous plaît, mieux que moi rimassez,
Des biens avez et de la rime assés,

Mais moi, à tout ma rime et ma rimaille,

Je ne soustiens, dont je suis bien marri, maille.

Il me semble avoir lu quelque chose de semblable dans Tabourot. On peut deviner aisément lequel des deux est le plagiaire.

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QUESTION D'UNG LÉGISTE A UNG HERMITE.

Homme, que fais-tu en ce bois ?

Au moins parle à moi; se tu daignes.

RÉPONSE DUDICT HERMITE.

Je regarde ces fils d'Iraignes (1),
Qui sont semblables à vos droicts,
Grosses mouches en tous endroits,
Y passent, menues y sont prises.
Povres gens sont sujets aux loix,

Et les grands en font à leurs guises.

DICTON DES BARBIERS CONTRE CEUX QUI PORTENT TROP GRANDE

BARBE.

Qui veult sçavoir que barbe non rasée,
Quel honneur fait à celui qui la porte,
Cogneu qu'elle est au menton mal aisée;
Et que plusieurs en ont fait leur risée,
Et la beauté du visaige transporte,
Conclure on peut, à tous je m'en raporte,
En ung bref mot, voir sans flaterie,

(1) D'araignées.

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RÉPONSE DE M. LE BEUF, CHANOINE ET SOUS-CHANTRE D'AUXERRE, AUX DIFFICULTÉS FORMÉES PAR M. JOLY, CHANOINE DE LA CHAPELLE-AU-RICHE A DIJON, TOUCHANT LA PATRIE ET LE NOM DE PIERRE GROGNET.

Il vous paroît, Monsieur, que je me suis trompé, lorsque j'ai marqué en 1723, dans la préface de l'histoire de la Prise d'Auxerre, que Pierre Grognet étoit né à Touci, et vous m'opposez la Croix du Maine, qui, dans sa Bibliothèque, assure positivement que ce poète étoit natif d'Auxerre en Bourgogne. Cet écrivain manceau a lui-même été trompé par le titre de l'Enchiridion de Pierre Grognet, et par la qualité d'Altissiodorensis, que Groghet prend lui-même dans une de ses épîtres. Soyez persuadé, Monsieur, qu'il n'y a pas assez de fond à faire sur la qualification d'Alissiodorensis, pour en conclure que ceux qui la prennent sont natifs de la ville même d'Auxerre. Il faut seulement en inférer que Grognet étoit natif du diocèse d'Auxerre; et c'est ce qui convient fort bien avec la ville de Touci, qui y est renfermée, et qui n'est éloignée de la ville épiscopale que de quatre ou cinq lieues. Sans sortir de la province ecclésiastique d'Auxerre, je vous apporterai un exemple convaincant.

Dans cinquante ou soixante ans quelque bibliographe s'avisera de caractériser les écrivains de la fin du dernier siècle par le lieu de leur naissance, par leurs talens, ou autres qualités accidentelles. La philosophie du célèbre Edme Pourchot lui tombera entre les mains. L'auteur qui s'y qualifie Senonensis, sera déclaré par notre futur bibliographe, natif de la ville de Sens; et ce sera précisément la même erreur dans laquelle est tombé la Croix du Maine, et qui vous fait croire comme à lui, que Grognet, qualifié Altissiodorensis, étoit natif de la ville d'Auxerre. Edme Pourchot (car il se nommoit ainsi, à la différence du P. Martenne, bénédictin, que nous venons de perdre, lequel signoit Edmond Martenne)(1), Edme Pourchot, dis-je, étoit

(1) Le saint patron de ces deux personnages étoit le saint archevêque de Cantorbéry, qui s'appeloit en latin Edmundus 433

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