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d'un tombeau qui étoit dans l'église d'Emile, ont été arrachées à la destruction.

Un très beau vase de Benvenuto Cellini, que le comité de surveillance de la section du Contrat-Social vouloit livrer à la fonte, est conservé.

A Auteuil, on a sauvé des bas-reliefs sur l'antique qu'on vouloit faire démolir.

A Anet, au milieu d'une pièce d'eau, étoit un cerf en bronze d'un beau jet. On vouloit le détruire, sous prétexte que la chasse est un droit féodal. On est parvenu à le conserver, en prouvant que les cerfs de bronze n'étoient pas compris dans la loi.

A Pont-à-Mousson, un grand tableau, que des connoisseurs avoient proposé de couvrir d'or pour qu'on le leur cédât, avoit été vendu au prix de 48 livres. On l'a fait rentrer dans le mobilier national.

A Mousseaux, on avoit mis le scellé sur des serres chaudes ; si l'on n'étoit parvenu à le faire lever promptement, toutes les plantes étoient perdues.

A Balabre, district du Blanc, département de l'Indre, cent vingt-quatre orangers, dont plusieurs ayant dix-huit pieds de haut, alloient être vendus de 6 à 18 livres pièce, y compris la caisse, sous prétexte que les républicains ont besoin de pommes et non d'oranges. Heureusement on est parvenu à suspendre la

vente.

que

Il faudroit un grand effort d'indulgence pour ne voir dans ces faits de l'ignorance; mais si l'ignorance n'est pas toujours un crime, ses panégyristes devroient sentir qu'au moins elle est toujours un mal.

Presque toujours derrière elle se cachent la malveillance et l'esprit contre-révolutionnaire. Ceux qui, au jardin de botanique de Montpellier, ont fait scier l'arbre de fer, qui avoit, dit-on, plus de cent pieds de tige, pour en faire un arbre de la liberté, sont peut-être les mêmes qui vouloient faire couper les oliviers de la ci-devant Provence.

Un décret sage est-il rendu, à l'instant l'aristocratie tâche de le diriger à ses fins.

Parloit-on d'employer les cloches pour faire des canons, des hommes étrangers peut-être, ou payés par l'étranger, vouloient envoyer à la fonte les statues de bronze qui sont au dépôt des Petits-Augustins, les cercles du méridien, faits par Butterfield, pour les globes de Coronelli, et les médailles qui sont au cabinet de la bibliothèque nationale; on a calculé que réunies elles pourroient former la moitié d'un petit canon.

Parloit-on de la rareté du numéraire, les mêmes hommes vouloient envoyer à la monnoie les deux célèbres boucliers votifs en argent de ce cabinet, tandis qu'à Commune-Affranchie Chassenot jetoit au creuset huit cents médailles antiques

en or.

S'agissoit-il d'extraire le salpêtre, on démolissoit, dit-on, des antiques à Arles.

Les beaux monumens qui sont près de Saint-Remy ont failli subir le même sort.

Vous proscrivites avec raison les objets qui rappeloient l'es-clavage des peuples; alors on vouloit détruire les tableaux d'une femme peintre, parce qu'on l'a dite émigrée;

Détruire chez notre collègue Bouquier des tableaux de Carrache, parce qu'ils représentent des objets de culte;

Détruire ceux de Le Sueur, parce qu'on y voit des chartreux, et anéantir enfin ces chefs-d'œuvre que l'envie avoit déjà mutilés dans le siècle dernier,

A Praslin, district de Melun, les statues des dieux du paganisme ont été brisées comme monumens féodaux.

A Ecouen, deux bas-reliefs représentoient des femmes ailées, soutenant les armes de Montmorency. L'écusson pouvoit se gratter, sans endommager les figures. On proposoit d'y graver des emblêmes républicains en creux, comme l'étoient les hiéroglyphes égyptiens. Tout le contraire a été fait on a brisé les têtes des femmes et conservé les armes de Montmorency. L'on vient encore d'y briser une belle statue de marbre blanc; les débris sont dans la cour.

On a fait plus, des hommes armés de bâtons et précédés de la terreur sont allés chez les citoyens, chez les marchands d'estampes. Une reliure, une vignette, ont servi de prétexte pour

voler ou détruire les livres, les cartes géographiques, les gravures, les tableaux.

On a même déchiré l'estampe qui retraçoit le supplice de Charles Ier, parce qu'il y avoit un écusson. Eh! plût à Dieu que, d'après la réalité, la gravure pût nous retracer ainsi toutes les têtes des rois, au risque de voir à côté un blason ridicule! Sans doute il faut que tout parle aux yeux le langage républicain, mais on calomnieroit la liberté en supposant que son triomphe dépend de la conservation ou de la destruction d'une figure où le despotisme a laissé quelque empreinte, et lorsque des monumens offrent une grande beauté de travail, leur conservation, ordonnée par la loi du 3 frimaire, peut simultanément alimenter le génie et renforcer la haine des tyrans, en les condamnant par cette conservation même à une espèce de pilori perpétuel tel est le mausolée de Richelieu, l'un des chefs-d'œuvre de Girardon.

La frénésie des barbares fut telle, qu'on proposa d'arracher toutes les couvertures des livres armoiriés, toutes les dédicaces, et les priviléges d'imprimer, c'est-à-dire de détruire tout.

Soyez sûrs que ce fanatisme d'un nouveau genre est très fort du goût des Anglois. Ils paieroient fort cher toutes vos belles éditions ad usum Delphini, et ne pouvant les avoir, ils paieroient volontiers pour les faire brûler.

Ce sont eux, peut-être, qui possèdent les mémoires et les plans manuscrits volés aux dépôts de la guerre et de la marine. C'est en Angleterre, dit-on, que sont passées les magnifiquês galeries de la Borde et d'Egalité. Celle de Choiseul-Gouffier alloit vous échapper au moment où le patriotisme y mit l'embargo à Marseille, et l'on vient encore de recouvrer chez un banquier trois tableaux, dont deux de Claude le Lorrain et un de Van Dick, qui étoient achetés pour l'Angleterre.

Permettez-moi de vous présenter ici une série de faits dont le rapprochement est un trait de lumière.

Manuel proposoit de détruire la porte Saint-Denis, ce qui causa pendant huit jours une insomnie à tous les gens de goût et à tous ceux qui chérissent les arts.

Chaumette, qui faisoit arracher des arbres sous prétexte de

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planter des pommes de terre, avoit fait prendre un arrêté pour tuer les animaux rares que les citoyens ne se lassent point d'aller voir au muséum d'histoire naturelle.

Hébert insultoit à la majesté nationale en avilissant la langue de la liberté.

Chabot disoit qu'il n'aimoit pas les savants; lui et sès complices avoient rendu ce mot synonyme à celui d'aristocrate. Lacroix vouloit qu'un soldat pût aspirer à tous les grades sans savoir lire.

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Tandis que les brigands de la Vendée détruisoient les monumens à Parthenay, Angers, Saumur et Chinon, Henriot vouloit renouveler ici les exploits d'Omar dans Alexandrie. Il proposoit de brûler la bibliothèque nationale, et l'on répétoit sa motion à Marseille.

Dumas disoit qu'il falloit guillotiner tous les hommes d'es. prit, p

Chez Robespierre, on disoit qu'il n'en falloit plus qu'un. Il vouloit d'ailleurs, comme on sait, ravir aux pères, qui ont reçu leur mission de la nature, le droit sacré d'élever leurs enfans. Ce qui, dans Lepelletier, n'étoit qu'une erreur, étoit un crime dans Robespierre. Sous prétexte de nous rendre Spartiates, il vouloit faire de nous des ilotes, et préparer le régime militaire qui n'est autre que celui de la tyrannie.

Pour consommer le projet de tarir toutes les sources des lumières, il falloit paralyser ou anéantir les hommes de génie, dont l'existence est d'ailleurs si souvent tourmentée par ceux qui les outragent pour se dispenser de les admirer; il falloit leur refuser indistinctement des certificats de civisme, crier dans les sections: Défiez-vous de cet homme, car il a fait un livre, les chasser des places qu'ils occupoient, flatter l'orgueil de l'ignorance, en lui persuadant que le patriotisme, qui est indispensable partout, suffit à tout; et, sous le prétexte même de faire triompher les principes, compromettre la fortune, l'honneur et la vie des citoyens, en les confiant à des mains inhabiles. C'est à quoi l'aristocratie déguisée avoit complètement réussi.

Sans doute il est des gens de lettres qui, après avoir, dans l'ancien régime, sacrifié au faux goût, à la lubricité, à la flatte

rie, ont continué ce rôle avilissant. Il en est même qui, après avoir fait faire un pas à l'esprit humain, ont rétrogradé et se sont prostitués au royalisme, c'est-à-dire à tous les crimes. Et dans quelle classe n'a-t-on pas vu des scélérats et des hommes estimables? Une république ne doit connoître que des citoyens, et, quels qu'ils soient, la loi doit frapper ceux qui sont coupables et protéger tous ceux qui sont purs.

Pourquoi d'ailleurs confondre avec les ennemis de la patrie des hommes qui, sans être doués d'une grande énergie révolutionnaire, chérissent la liberté, mais que le goût et l'habitude de la retraite éloignent des orages? Ne les mettez pas au timon des affaires, mais donnez à celui-là ses livres, à celui-ci ses machines et son laboratoire, à cet autre un télescope et les astres, et la patrie recueillera les fruits inappréciables de leur génie.

Le système de persécution contre les hommes à talent étoit organisé. On a mis en arrestation Desault, un des premiers chirurgiens de l'Europe, qui est à la tête du plus grand hospice de malades à Paris, et le seul presque qui forme des élèves pour nos armées; votre comité de sûreté générale s'est empressé de l'élargir.

Pendant neuf mois on a fait gémir dans une prison le célèbre traducteur d'Homère, Bitaubé, fils de réfugié, que l'amour de la liberté a ramené depuis long-temps dans la patrie de ses pères, et que le tyran de la Prusse prive de ses revenus, parce qu'il est patriote. Thillaye, Cousin, Laharpe, Vandermonde, Ginguené, Lachabaussière, Lamétherie, François-Neufchâteau, Boncerf, Oberlin, Volney, Laroche, Sage, Beffroy, Vigée et beaucoup d'autres ont éprouvé le même sort...

Mauduit, Latourette et Chamfort ont péri victimes de cette inquisition.

Citoyens, dût-on contester l'authenticité ou atténuer l'importance de quelques uns des faits que j'ai mentionnés, outre que cette énumération est très incomplète, il en resteroit assez pour porter à l'évidence le fléau de l'ignorance et les crimes de l'aristocratie.

Anéantir tous les monumens qui honorent le génie françois,

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