LETTRE A M. TECHENER. • Monsieur, « Votre intéressant Bulletin paroît devoir s'ouvrir naturellement à la réparation des erreurs et omissions bibliographiques. Persuadé que vous le pensez comme moi, je vous propose de venir en aide, après cent soixante-cinq ans, au docte et bien chanceux Daniel Clasen. A ma connoissance, aucune bibliographie ni biographie françoise ne parle de lui. Bayle, son contemporain, n'en dit mot, non plus que Chauffe-Pied. Ce savant homme n'eût peut-être pas été exhumé de long-temps, si vous ne m'aviez pas vendu un charmant exemplaire en veau fauve, aux: armes du comte d'Hoym, de son livre de Religione politica, Magdebourg, 1655, in-12, ce qui m'a procuré une lecture aussi solide qu'attachante, tant ce livre curieux renferme de science et de sagesse, ainsi que je vous le montrerai peut-être quelque jour au cas que vous l'ayez pour agréable. Il faut convenir que c'est, pour cet honorable mort, avoir joué de bonheur et de malheur tout ensemble. Pour apprendre quelque chose de sa personne et de sa destinée, figurez-vous que j'ai été obligé de recourir au précieux et peu commun catalogue raisonné de Fabricius, intitulé: Historia bibliotheca Fabriciana, 5 vol. ou parties in-4o, Wolfenbuttel, 1721; mais aussi là j'ai été plei-、 nement satisfait. On y lit, t. IV, p. 26 et 27, que Daniel Clasen, né à Lunebourg, fut d'abord correcteur, puis bientôt recteur de l'école de Magdebourg, ensuite professeur de droit, de morale et de politique à l'Académie équestre de Lunebourg, et enfin qu'après avoir obtenu les honneurs du doctorat, il fut professeur ordinaire de droit à l'Académie de Juliers. La cité de Magdebourg venoit de lui offrir le syndicat lorsqu'atteint de scorbut et d'hydropisie, il mourut en 1678, à 55 ans et demi. C'étoit, continue Fabricius, un homme vraiment savant et profondément versé dans l'étude de la sagesse divine et humaine. « Vir divinæ humanæque sapientiæ studiis haud proletarie, sed profunde eruditus. On a de lui trois livres d'exercices touchant la Passion du Sauveur, Magdebourg, 1657; un commentaire sur le Tableau de Cébès; un sur le Banquet des sept sages de Plutarque; un traité de la religion politique, c'est-à-dire de la politique par rapport à la religion, sujet capital que l'auteur traite chrétiennement et philosophiquement; un autre du droit de grâce; trois livres sur les oracles des Gentils que Van-Dale, ni son ingénieux abréviateur Fontenelle, ni leur réfutateur Baltus, n'ont cités; un abrégé de doctrine politique; et un commentaire sur les constitutions criminelles de Charles-Quint. Morhof, dans son Polyhistor, qualifie ainsi Daniel Clasen, auctorem diligentissimum. • Vous voyez bien, monsieur, que nos biographes auroient aussi bien fait de lui donner une place qu'à Utenhova, critique allemand, qu'à Tinctor, musicien flamand, qu'à Vanden-Zyp, qu'à Trigneros, poète espagnol, et qu'à tant d'autres que ni vous, ni moi, ni personne ne connoîtront jamais. A ce propos, permettez-moi quelques réflexions pour en finir. Le Vocabu laire des personnes remarquables inséré dans les dernières éditions du Dictonnaire de Boiste, ne contient guère que 10,500 noms, et il y en a beaucoup d'obscurs. Quant à la Biographie universelle de M. Michaud, réputée à bon droit le meilleur et le. plus complet des ouvrages de ce genre, à supputer dans l'autre, trois cent vingt-quatre noms par volume, comme je l'ai fait d'après l'examen de quelques uns des plus gros volumes, on trouve que les cinquante-deux premiers volumes contiennent environ seize mille huit cent quarante-six noms; or, en y ajoutant, d'après les mêmes bases, neuf mille sept cent vingt noms pour les trente volumes que probablement le supplément formera pour aller jusqu'à l'année 1853, on trouvera que, dans l'innombrable multitude d'êtres humains qui auront passé sur la terre dans le cours de cinq mille huit cent cinquante-sept ans, l'érudition la plus patiente et la plus indulgente pour la célébrité n'aura pu réunir que vingt-six mille cinq cent soixantehuit noms, sur lesquels une critique tant soit peu sévère doit hardiment rayer une bonne moitié. Il n'est done pas si aisé qu'on le pense, de passer à la postérité, par ses actions, ses discours, ses écrits ou sa destinée. Je dis que, du moins, cela n'étoit pas si aisé jusqu'à l'an de grâce 1828; car, a en juger par le train dont va la renommée, depuis que décidément elle est devenue marchande, la célébrité biographique sera désormais plus commode et plus accessible. En effet, depuis la création du monde jusqu'à l'an de Jésus-Christ, 1828, M. Michaud n'a pu célébrer que seize mille huit cent quarante-huit noms, et depuis 1828 jusqu'à l'année 1853 environ, qui verra possible finir son éternel supplément, il en aura célébré neuf mille sept cent vingt autres, c'est-à-dire plus de moitié en sus pour une période de vingt-cinq ans (mettons, si l'on veut, pour une période de cent ans, à cause des omissions réparées); période qui, comparée à la première, laquelle est de cinq mille huit cent trente-deux ans, donne pour résultat que la nature produit environ quatre-vingt-une fois plus de gens célèbres aujourd'hui qu'avant le règne de Louis XV. Quand la poudre à canon commença sérieusement à être employée en guerre, ón rapporte que Bayard s'écria: C'est fait de la valeur! Ne pourra-t-on pas à l'avenir dire plus justement: C'est fait de la gloire?» « Agréez, monsieur, l'assurance de ma parfaite considération et de mon sincère attachement. En insérant, dans l'un des derniers numéros de votre Butle tin, l'article de M. Barbier, relatif à l'histoire du système bibliographique, peut-être eût-il été juste de ne pas oublier tout-àfait de comprendre dans cette histoire le système de classification en usage dans quelques unes de nos anciennes bibliothèques. Ce système n'a, il est vrai, qu'un bien foible mérite scientifique; mais il a du moins l'avantage d'être très simple, parfaitement clair; et par conséquent plus facile à retenir et à appliquer que ceux qui ont été en usage depuis. Voici cette classification bibliographique ancienne, telle qu'on le trouve dans l'excellent et curieux ouvrage de M. Barrois intitulé: Bibliothèque protypographique, in-4. 1. Bonnes mœurs, éthique et politique. 2. Chapelle. 3. Librairie mêlée. 4. Livres de gestes. 5. Livres de ballades, d'amour. 6. Chroniques de France. 7. Outre-mer, médecine, anthologie. 8. Livres non parfaits. Je vous prie, en conséquence, M. l'Éditeur, de donner une petite place à cette note dans votre Bulletin, ne fût-ce que par respect pour une des plus anciennes, pour la plus ancienne peutêtre des bibliothèques de la France. Paris, 24 mai 1845. Monsieur, IGNOTUS. En annonçant, dans votre dernier numéro du Bulletin, que la Société des bibliophiles m'avoit fait l'honneur de m'admettre au nombre de ses membres, vous ajoutez qu'elle avoit paru d'abord devoir cesser d'exister. Permettez-moi de vous faire connoître que vous avez été mal informé. La Société n'a jamais pensé à se dissoudre, et l'importante publication qu'elle va bientôt émettre sur les cartes à jouer, prouvera qu'elle a fait, dans ces dernières années, meilleur emploi que jamais de ses fonds de cotisation. Ma qualité de nouveau membre m'auroit empêché de prendre l'initiative de cette réclamation, mais l'impression pénible que m'a causé votre article m'a porté à agir différemment. J'ai éprouvé le besoin de protester contre l'espèce de valeur que votre article sembloit attribuer à ma nomination, 'nomination devenue plus insignifiante encore pour la Société, par l'impor tance de la pérte qu'elle venoit d'essuyer (1). Agréez, etc. Château de Brevannes, 18 mai 1843. JEROME PICHON. (1) M. Pichon succède à M. de Montmerqué, à qui ses occupations n'ont pas permis de rester membre de la société. ET CATALOGUE DE LIVRES RARES ET CURIEUX, DE SE TROUVENT A LA LIBRAIRIE DE 283 ADVIS FIDÈLE aux véritables Hollandois, etc. (par de Wicquefort), sans indication de lieu (Holl., Elzevir), 1673, in-12, vél. bl., 4 p.. 10 lig -) 284 ALLARD LE ROY. La Vertu enseignée par les oiseaux. Liége, 1653, in-8, v., fig I 12 Ce volume renferme un grand nombre d'historiettes morales. 285 AMADIS DE GAULE. Les 21 livres d'Amadis de Gaule, traduits du Castillan par Nic. de Herberay, seigneur des Essarts, Cl. Colet, G. Aubert, Jacq. Gohory, Gabr. Chappuys, et Jacq. Charlot. Paris et Lyon, 1557 à 1582, 21 vol. in-16, m. citr. fil., tr. dor., dos à pet. fers..... 150 - 1er Livre. Lyon, Benoist Rigaud, 1575. Reliure bien conservée.— 2e livre. Paris, Groulleau, 1557; charmant volume.—3e livre. Paris, V Sertenas, 1557; charmant volume. 40 livre. Lyon, B. Rigaud, 1574; charmant volume.-5e livre. Lyon, F. Didier, 1577; charmant volume. 6e livre. Lyon, F. Didier, 1577; charmant volume. 7e livre. Lyon, F. Didier, 1577; reliure bien conservée.- 8e livre. Lyon, Rigaud, 1575; charmant volume. - 9e livre. Lyon, F. Didier, 1557. - 10e livre. Lyon, F. Didier. Reliure propre extérieurement. 11e livre. Lyon, B. Rigaud. Reliure propre. 12€ livre. Lyon, Didier, 1577. Reliure très bien conservée. Breyer, 1571; charmant volume. - - - 15e livre. Paris, Lucas 14e livre. Lyon, François Di 15e livre. Lyon, Benoist Ri16e livre. Lyon. François Di17e livre. Lyon, Est. Michel, 4578.18 livre. Lyon. Loys Cloquemin, 1579. Très jolie reliure. |