& C. Flami l'un & à l'autre la Ligurie pour Province. « Le Conful Lepidus s'oppo-« M. Emilius foit à cet Arrêt, difant hautement «nius Confuls qu'il étoit indigne qu'on renfermât «an de Rome les deux Confuls dans les Vallées de « 565. la Ligurie, tandis que depuis deux « ans M. Fulvius & Cn. Manlius re- « gnoient l'un dans l'Europe, & l'autre « dans l'Afie, en la place de Philippe« & d'Antiochus. Si on croyoit qu'il fut « à propos de laiffer des armées dans « ces terres étrangeres, n'étoit-il pas « plus jufte d'en donner le commande- « ment à des Confuls qu'à des particuliers? Qu'ils couroient de Nation en a Nation, portant par tout la terreur << des armes Romaines, & vendant au a poids de l'or la Paix à des Peuples à « qui on n'avoit point déclaré la Guer- << re. Qu'encore un coup, fi c'étoit une « neceffité de tenir des troupes dans ces << Provinces, les Confuls C. Livius & « M. Valerius avoient dû prendre la «< place de Fulvius & de Manlius,« comme eux avoient pris celle de L. « Scipión; & comme L. Scipion avoit << fuccedé à Manius Acilius. Qu'au « moins à prefent que la Guerre d'Eto-<< lie étoit terminée, qu'on avoit ôté « "l'Afie à Antiochus, & réduit les Gal- « >>lo-Grecs, il falloit ou envoyer les >> Confuls prendre le commandement >> des armées Confulaires, ou ramener >> les Légions à Rome, & les rendre >> enfin à leur Patrie. » Le Sénat, fans avoir aucun égard à ces remontrances, perfifta à donner aux deux Confuls la Province de Ligurie. A l'égard de Manlius & de Fulvius, il fut arrêté qu'ils abandonneroient leurs Provinces, & rameneroient leurs Légions à Rome. M. Fulvius & M. Emilius étoient ennemis depuis long-tems; & de plus Emilius reprochoit à Fulvius d'avoir été caufe par fes brigues, qu'il avoit été Conful deux ans plus tard qu'il Fulvius ac- n'auroit dû. C'eft pourquoi afin de le cufé par les rendre odieux, il lui fufcita pour accuà la follicita fateurs les Ambaffadeurs d'Ambracie tion du nou- & après leur avoir fait leur leçon, il Ambraciens veau Conful Emilius. les introduifit dans le Sénat. » Ils ac» cuferent Fulvius de leur avoir décla »ré la Guerre dans le tems qu'ils é>>>toient en paix quoiqu'ils euffent >>executé ponctuellement tout ce que »les Confuls précédens leur avoient >> ordonné, & qu'ils lui offriffent à lui>>-même une foumiffion & une obéïf» fance égales. Qu'il avoit commencé les <<< par ravager leurs campagnes, menaçant de piller leur Ville, & d'en « égorger les habitans afin que la «< crainte de ces hoftilités les forçât à« fermer leurs portes. Qu'enfuite ayant << affiégé & pris la Ville d'affaut, il « leur avoit fait éprouver tous les ou-«< trages qu'il eft possible d'imaginer «< dans la Guerre. Que non content d'a- «< voir faccagé, brûlé & abattu les «< maisons, confifqué les biens des << citoyens, & inondé la Ville de leur «< fang, il avoit réduit leurs femmes & « leurs enfans dans la fervitude, & ce « qui leur étoit encore plus fenfible que «< tout le refte, enlevé tous les ornemens << de leurs Temples, n'épargnant ni les << Statues des Dieux, ni les Dieux eux-<< mêmes; enforte que les malheureux << Ambraciens ne fçavoient plus à qui adreffer leurs prieres & rendre leurs << hommages, fi ce n'étoit aux murail- « les qu'ils avoient laiffées nuës & dé- « figurées. » Le Conful, après avoir entendu ces invectives, fit aux députés plufieurs questions dont il avoit concerté les réponses avec eux, & par-là leur donna lieu d'en dire beaucoup davantage, comme fi ç'eût été malgré eux. Comme les Senateurs paroiffoient touchés de ces plaintes, le Conful C. Flaminius prenant la défense de Fulvius en fon abfence, reprocha aux Ambraciens de renouveller contre les Généraux Romains des accufations vieilles & furannées, & aufquelles ort avoit renoncé depuis long-tems. » Que » c'étoit ainsi que M. Marcellus & Q. >> Fulvius avoient autrefois été appel»lés en jugement par les Syracufains » & les Campaniens qu'ils avoient » vaincus. Que ne fouffrez-vous auffi, "Meffieurs, continua-t'il, que tout » d'un tems & pour les mêmes rai» fons, T. Quintius foit accufé devant » vous par le Roi Philippe, Manius "Acilius & L. Scipion par Antiochus, » Cn. Manlius par les Gaulois, & Ful» vius lui-même par les Etoliens & les » Peuples de la Cephallenie? Vous » imaginez-vous, Meffieurs, que j'aye » deffein de nier, au nom de Fulvius qu'Ambracie ait été affiégée & prife, » qu'on en ait enlevé plufieurs dépouilles, & qu'elle ait éprouvé les » autres malheurs des Villes prifes de >> force? doutez-vous que M. Fulvius à fon retour, ne convienne lui-mê»me de ces faits, lui qui doit vous de»mander le triomphe qu'il a mérité » par ces actions-là mêmes & faire conduire devant fon char, l'image de la prise d'Ambracie, avec les Sta- « tues & les autres ornemens qu'on દ l'accufe d'en avoir enlevés & qui « compte de fufpendre une partie de « ces dépouilles au frontifpice de fon & Hôtel? Les Ambraciens affectent en-« vain de féparer leur caufe de celle <<< des Etoliens. Il n'y a aucune diffé- « rence entre l'une & l'autre. Qu'ainsi « mon Collégue faffe tomber fa mau- « vaise humeur fur quelque autre : ou<< s'il en veut abfolument à Fulvius, « qu'il retienne les Ambraciens fes amis «< à Rome, jufqu'à l'arrivée de ce Gé- « néral. Pour moi je vous déclare que « je ne fouffrirai pas qu'on décide rien « en fon abfence fur l'affaire des Ambraciens ou des autres Etoliens. >>> Emilius ne manqua pas de reprocher a fon ennemi, que par une malice que tout le monde, difoit-il, connoiffoit, il s'arrêtoit exprès en chemin, pour ne plus trouver à Rome un Conful de quí il fçavoit bien qu'il ne devoit pas être aimé. Ces conteftations durerent deux jours; & il ne paroiffoit pas qu'on pût rien décider tant que Flaminius feroit prefent. Mais le hazard ayant permis qu'il tombât malade, à la follicitation |