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certainement pas nier que ce motif n'ait été pour quelques-uns d'un grand poids; néanmoins il est également certain qu'un grand nombre de ces biens furent employés à l'avantage des églises et des écoles, ou à des fondations de bienfaisance, et que ce fut déjà une grande bénédiction pour le peuple, qu'une bonne partie de ces propriétés foncières retombât peu à peu dans ses mains; mais il ne faut pas oublier que le projet de sécularisation, ne partit pas moins du côté catholique que du côté protestant, et que tous deux travaillèrent à l'accomplir. Déjà le pape Adrien Vl1 avait accordé aux ducs de Bavière la cinquième partie de tous les revenus ecclésiastiques de leur territoire, afin qu'ils combattissent les ennemis de la foi; en 1525, l'évêché de Brixen fut sécularisé d'après la décision des États du Tyrol, et devint la possession de l'archiduc Ferdinand; le ministre même de Charles V dans les Pays-Bas, HOOGSTRATEN, déclara en 1529, lorsque les Turcs menaçaient l'Allemagne, et quoique les ambassadeurs français soutinssent le contraire, que le meilleur moyen de résister aux Turcs, était d'engager le pape à une sécularisation générale, qu'un tiers des biens ecclésiastiques, vendus à ceux qui en offriraient le plus, suffirait pour chasser les Turcs. D'ailleurs les princes catholiques eux-mêmes se sont emparés, dans tous les temps, aussi volontiers que les protestants, d'un territoire sécularisé.

Enfin le plus grave de tous les reproches, c'est que le protestantisme entretient parmi les peuples un esprit de trouble et de révolte, et menace les trônes. Les jésuites surtout se sont efforcés d'effrayer de ce fantôme les princes et les hommes d'État, et de les indisposer contre la

1 1522-1523.

religion protestante. C'est l'accusation que les prêtres, et les hommes politiques en rapport avec eux, ont de tout temps faite aux nouvelles tendances religieuses qui menaçaient leur considération. Ainsi agissaient les païens å l'égard des chrétiens, ainsi agissent les catholiques à l'égard des protestants; et ainsi, adoptant la même tactique, ont agi plus tard des protestants zélés contre ceux de leurs frères en la foi qui professaient une tendance religieuse plus libre. Mais il est reconnu qu'un clergé ambitieux, partout où il se trouve, ne chemine pas de concert avec les gouvernements, et ne leur prête son appui que lorsque ceux-ci sont à sa dévotion et favorisent ses vues, mais qu'il les abandonne aussitôt, leur prépare des difficultés, et cherche à éloigner d'eux le cœur de leurs sujets, si le pouvoir séculier ne répond pas à leur attente.

L'histoire témoigne suffisamment en faveur du protestantisme. Que l'on compare seulement l'Angleterre protestante avec la France catholique, la fidélité de la Prusse avec l'inconstance italienne. Il nous semble peu convenable de faire du sanctuaire de la foi et de la piété une question de politique et de rapports mondains; mais nous voudrions montrer par là, que la pensée réfléchie, que la conviction consciencieuse, et la plus grande indépendance que le protestantisme accorde aux individus, présentent de plus fortes garanties pour le repos et la prospérité des États, que la foi et l'obéissance aveugle réclamée par l'Église catholique. Le véritable protestant rend à l'autorité ce qui revient à l'autorité, et à Dieu ce qui appartient à Dieu, d'après le commandement de Christ. Mais le catholique trouve souvent l'occasion de faire lui-même l'expérience qu'on ne peut servir à la fois deux maîtres.

SECONDE SECTION

Histoire des différentes Églises jusqu'à nos jours

CHAPITRE Ier

RAPPORTS RÉCIPROQUES ET COMMUNS

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Influence réciproque des Églises

La séparation des Églises était un fait accompli: mais les tentatives pour les réunir ne cessèrent pas pour cela, et ce furent surtout quelques hommes éminents qui en firent leur pensée de prédilection: ainsi BOSSUET, évêque de Meaux, et le philosophe allemand LEIBNITZ2. Mais les oppositions étaient trop grandes et trop profondes pour qu'une réunion fût possible entre les Églises sans qu'elles se reniassent elles-mêmes. C'est cependant une autre question de savoir si l'éducation chrétienne des peuples atteindra un jour à une hauteur assez grande pour que les différences s'effacent, et pour que les chrétiens, dans l'unité la plus élevée, oublient leurs anciennes divisions.

Cependant, malgré l'inimitié et les différences qui existaient entre elles, on ne pouvait empêcher que les Églises n'exerçassent l'une sur l'autre de l'influence, car la vie spirituelle se laisse comprimer encore moins que l'air, et,

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malgré toutes les mesures de prévoyance, les idées nouvelles pénétraient dans les esprits et dans les cœurs. L'Église catholique, avec l'unité, la puissance, la grandeur de son organisation, et avec son culte qui parle aux sens, ne peut pas servir de modèle aux protestants, et les porter à l'imiter; mais elle peut servir à exciter chez eux une rivalité de zèle, pour établir leur Église dans une position plus indépendante, et les amener à ne pas faire trop peu de cas de la partie extérieure du culte. Mais bien plus importante est l'influence que l'Église protestante a exercée, et continue à exercer sur l'Église romaine. Si les catholiques, dans leur culte, donnent une plus grande place à la langue du pays, s'ils mettent plus de soin à la prédication et au chant de leurs assemblées, qu'ils n'en mettaient anciennement, et si, dans les pays mixtes, ils rivalisent de zèle pour l'enseignement scolaire, c'est un résultat de l'action indirecte du protestantisme. Son esprit d'examen et de recherche a pénétré aussi parmi les savants du monde catholique, et, quoique l'Église romaine ait entièrement formulé sa doctrine, et qu'elle ne puisse supporter aucune opinion qui s'en écarte, elle n'a pu empêcher néanmoins, que, dans son propre sein, ne se formassent avec liberté des jugements sur sa doctrine et sa constitution; témoin le célèbre DESCARTES, qui avait été élève des jésuites, qui prit le doute pour point de départ de sa philosophie, et qui ne fit rien moins que de venir en aide au catholicisme en 1650. Mais, comme l'Église catholique ne -permet aux individus aucune conviction indépendante et libre, elle ne doit pas s'étonner, si chez des millions d'âmes, qui en ont plus ou moins la conscience, à côté de la foi de l'Église imposée et extérieurement reconnue, il existe une manière de voir plus protestante que catho

153

Rapports des catholiques et des protestants entre eux. Conversions mutuelles

La réformation demeura, en général, sans influence sur l'Église catholique grecque, et les tentatives de quelques protestants, pour nouer des relations avec elle, n'eurent aucun succès. Un rapprochement fut essayé, entre autres, par Mélanchthon, qui, d'après le désir du patriarche de Constantinople, lui envoya la confession d'Augsbourg traduite en grec. Des savants de Tubingue entretinrent, de 1574 à 1581, une correspondance avec le patriarche JÉRÉMIE. Quoique CYRILLE LUCAR, d'abord patriarche à Alexandrie, et ensuite à Constantinople, inclinat vers le calvinisme, les relations qu'il forma dans ses voyages avec de savants protestants n'amenèrent à cet égard aucun résultat; cela excita la jalousie des chrétiens catholiques romains, qui avaient eu jadis une grande influence à Constantinople, et cet homme distingué fut étranglé, en 1638, comme coupable de haute trahison.

Quant à l'Église catholique romaine, il est dans sa nature, et surtout dans ses prétentions, de vouloir passer pour la seule orthodoxe, pour la seule qui conduise au salut éternel, en sorte qu'elle envisage les protestants comme des rebelles et des hérétiques, qu'on doit ramener à la véritable Église par tous les moyens possibles. La ruse et la persuasion, de brillantes promesses et la violence même, n'ont pas été négligées pour faire des conversions parmi les protestants, et l'on eut surtout en vue celle des hommes haut placés. Aussi les efforts faits dans ce but ne restèrent-ils pas entièrement sans succès. La reine

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