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et des derniers Pères de l'Église, et s'il ne s'en affranchissait que peu à peu, Zwingli demeura ferme sur le fondement de l'Écriture sainte, il se sépara plus promptement et sans restriction de l'ancienne Église, et fut exempt de maints préjugés qu'entretenait encore Luther. Zwingli fut dès le commencement ce qu'il fut ensuite, dans les objets essentiels, clair et d'accord avec lui-même, tandis que Luther ne parvint que peu à peu à la pleine connaissance des besoins de l'Église.

L'activité de Luther était plus grande, plus puissante, et s'étendait de tous côtés. Il passa pour le centre et pour le chef de la réformation en Allemagne et dans les autres pays qui lui durent l'épuration de l'Église. Involontairement on transportait sur lui une partie de la considération qu'on avait pour les évêques et pour le pape, et des princes et des seigneurs réclamaient ses conseils, même pour des choses toutes temporelles. L'action immédiate de Zwingli se borna à une partie de la Suisse. L'Église formée par Luther, dont les membres, au commencement, furent compris sous le nom de membres de la confession d'Augsbourg, fut plus tard, et d'après lui, appelée luthérienne1, tandis que l'Église formée d'après Zwingli et ses sectateurs, fut nommée réformée, quoique, dans un sens plus étendu, ce mot sóit employé avec raison pour désigner toutes les Églises provenues de la réformation du xvie siècle. La différence du théâtre sur lequel se mouvaient l'un et l'autre, l'empire d'Allemagne, avec ses parties et ses rapports divers, et la Suisse partagée en un grand nombre de petites républiques, aussi bien que, d'autre part, la courte carrière de Zwingli, contribuèrent essen

1 Il s'était cependant toujours opposé à ce que son nom servît de drapeau à un parti. (Note du trad.)

DE LA RÉFORMAT. A NOS JOURS (1517-1857) tiellement à la différence d'activité des deux réformateurs; mais on en trouve encore une autre cause dans la nature de leur esprit et dans la diversité des circonstances où ils vécurent.

Tous deux étaient d'accord dans les points les plus essentiels de la doctrine et du service divin. Mais il ne faut pas s'étonner que, s'avançant dans des routes indépendantes, ils différassent aussi à maints égards l'un de l'autre. Luther était, autant que possible, conservateur, et, autant qu'il le pouvait, demeurait fermement attaché au développement historique de l'Église. Zwingli s'opposait d'une manière beaucoup plus tranchée et plus irréconciliable à l'organisation ecclésiastique qui avait régné jusqu'alors, et il allait plus avant pour rejeter et pour refondre. Luther ne repoussait que ce qui était contredit par une déclaration claire de l'Écriture sainte, par conséquent, ce qu'elle condamnait positivement. Zwingli, au contraire, rejetait tout ce qui n'était pas fondé sur l'Écriture, ce qui n'était pas démontré par elle; aussi cherchait-il le plus possible à ramener le service divin à la simplicité des temps apostoliques. Il avait plus égard à l'intelligence qu'au sentiment, et tenait peu de compte de la nature sensible de l'homme, qui est cependant une porte pour conduire à la vie spirituelle. Tandis que Luther, dans la doctrine du péché originel, pensait entièrement comme Augustin, et, dans sa dispute avec Érasme, se laissa entraîner jusqu'à nier le libre arbitre de l'homme, le péché originel n'était pour Zwingli qu'une simple maladie, la volonté morale ne cessant d'être libre que par rapport å la Providence; aussi ne croyait-il pas exclues du salut éternel les âmes vertueuses des temps antérieurs au christianisme. La différence de direction de leur esprit se fit voir surtout dans la doctrine de la sainte Cène, et elle

caractérise également ce qui distingue leurs tendances ecclésiastiques. Ils étaient tous deux d'accord pour rejeter la doctrine catholique de la transsubstantiation; mais Luther tenait fortement à une présence corporelle de Christ dans la Cène, et il enseignait que, dans, avec et sous le pain et le vin, chacun participe au vrai corps et au vrai sang de Jésus-Christ. Zwingli, au contraire, ne reconnaissait dans la sainte Cène qu'une présence spirituelle de Christ, et encore seulement pour l'âme fidèle; le pain et le vin étaient pour lui uniquement des signes, qui rappelaient la mort de Christ, des symboles de son corps rompu pour les hommes et de son sang versé sur la croix. Il s'appuyait sur l'esprit de la Parole divine, et traduisait « cela est » par « cela représente. » Luther s'appuyait sur la lettre, et ne voulait pas permettre à ce sujet d'explication.

Il ne pouvait manquer d'arriver que Zwingli et Luther, qui, au commencement, avaient travaillé sans se connaître à l'œuvre de la réformation, n'entendissent parler l'un de l'autre, ne lussent réciproquement leurs écrits, et n'entrassent enfin en rapport. Mais, avant même qu'une communication existât entre eux, ils furent malheureusement séparés par la doctrine de la sainte Cène. Cependant, quoique Luther s'emportât sur ce sujet avec violence, et que ce fût lui qui repoussât un rapprochement, on serait injuste si l'on attribuait cela à la vivacité de son caractère, ou à son amour-propre blessé. C'était pour lui affaire de conscience; la prétention de Zwingli lui semblait une négation de la divinité de Christ; pour ce motif, il ne pouvait pas apprécier exactement la différence des deux explications, et, vu l'importance qu'il attachait à la sienne pour la piété même, il ne pouvait pas y donner moins de valeur. Zwingli, au contraire, jugeait les choses avec

plus de liberté d'esprit; puis, d'un caractère plus doux, il pouvait mieux être porté à la conciliation. Cependant diverses tentatives d'accommodement demeurèrent sans résultat, et la conférence ménagée par le landgrave Philippe, à Marbourg, où Luther et Mélanchthon, Zwingli et Ecolampade se divisèrent, rendit la séparation encore plus prononcée. Malheureusement elle influa d'une manière nuisible sur l'état extérieur des protestants, en ce que les réformés furent exclus de l'alliance des États luthériens de l'empire, et en ce que ce manque d'accord réciproque empêcha la réunion de leurs forces, quoique le landgrave Philippe, qui avait des opinions plus favorables à la liberté, et qui inclinait pour la manière de voir de Zwingli, obtînt, en 1530, le droit de bourgeoisie dans les villes réformées de la Suisse.

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Les anabaptistes

Le nom d'anabaptistes désigne un parti qui non-seulement rejetait le baptême des enfants, mais qui surtout, sous l'influence du mouvement général du temps, se laissait entraîner aux idées et aux actes les plus fanatiques, et faisait en diverses manières de l'opposition à l'autorité séculière; mais il présentait parmi ses membres les différences les plus multipliées. Les uns réprouvaient le service militaire et le serment; les autres voulaient réformer l'état du mariage, ou introduire la pluralité des femmes; la plupart étaient opposés au gouvernement de l'Église par les magistrats et les prédicateurs, et voulaient que le soin de prêcher ne fût laissé à aucune classe d'hommes parti

culière; beaucoup enfin étaient pour la communauté des biens, attendaient l'établissement prochain du règne messianique, et se berçaient de toutes les autres chimères du fanatisme. Ces efforts des anabaptistes, que nous avons déjà vus à Zwickau et à Wittenberg (voy. § 122), et qui contribuèrent en grande partie à la guerre des paysans, eurent lieu presque partout en Allemagne, et, non-seulement les gouvernements catholiques, mais encore les gouvernements protestants sévirent contre eux avec rigueur.

Ce fut surtout à Munster que les anabaptistes exercèrent les plus grandes violences, et prirent un caractère des plus menaçants. Ce n'était pas sans combat que la réformation y avait remporté la victoire1; mais les idées anabaptistes y avaient aussi trouvé de nombreux sectateurs ; c'était surtout le prédicateur ROTTMANN qui leur servait de centre et d'appui. A la fin de l'année 1533, Munster se remplit d'étrangers qui étaient disposés en faveur des anabaptistes; au commencement de 1534, parut le soidisant prophète JEAN MATHIS (Jean Mathias), boulanger de Harlem, avec son ardent apôtre JEAN BOCKELSOHN, tailleur de Leyde, et tous deux furent bien reçus par un bourgeois considéré de la ville, qui se nommait BERNARD KNIPPERDOLLING. Aussitôt ils annoncèrent un nouveau règne de Dieu; le conseil de la ville, le chapitre de la cathédrale, la noblesse et les bourgeois riches furent chassés; outre le baptême anabaptiste, on introduisit la communauté des biens et la pluralité des femmes; on établit la domination de la populace, grâce à laquelle, sous prétexte d'inspiration divine, on se livra aux actions les plus honteuses, et ceux qui possédaient le pouvoir firent servir la communauté des biens à satisfaire leurs passions sensuelles de la

1 1532-1533.

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