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sur les régions du pays où la maladie était le plus fréquente, sur les cas familiaux ou héréditaires.

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Après ces formalités, « le prieur des lépreux, prenant le

lépreux par la main, devra le conduire à la chambre qui << lui aura été destinée, le curé marchant devant avec l'eau bénite, laquelle à l'entrée il devra asperger par la << chambre en prononçant une oraison. Et que là le lépreux << soit laissé en paix avec une bonne exhortation à la patience avec les autres lépreux. Et le guidon devra avoir préparé tout ce qui sera nécessaire et surtout un repas pour lui et les autres lépreux anciens qui devront tous dîner ce jour-là avec le nouveau lépreux et à ses dé« pens. »

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Ce n'est donc pas d'aujourd'hui que les Genevois des sociétés les plus diverses ont l'habitude et le goût des repas de corps.

Le chapitre sur le mode de vivre des lépreux entre eux débute en insistant sur le caractère religieux dont leur maison et leurs personnes devront être revêtues. Ils doivent vivre entre eux dévotement et honnêtement, ne pas porter de vêtements de couleurs voyantes comme le rouge et le vert. Leurs habits ne seront ni trop longs, ni trop courts. Le port de toute espèce d'armes leur est interdit. L'épée est remplacée à la ceinture par un chapelet de vingt-cinq paters. Les hommes doivent vivre comme des clercs, les femmes comme des religieuses. Ils sont obligés à un certain nombre d'oraisons journalières et doivent quatre fois l'an se confesser et communier sous peine de dix gros d'amende et de rester en prison jusqu'à satisfaction.

Les lépreux de Carouge sont astreints à aller ouïr la messe les jours de fête à leur église paroissiale de Saint

Léger. Ils y ont leur eau bénite distincte et une place séparée au bout de l'église, où on devra leur élever une tribune grillée pour qu'ils puissent mieux voir et entendre.

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Le prêtre lépreux était tenu de dire sans diminution toutes ses heures, et, s'il n'y a pas en lui une horreur excessive de lèpre», qu'il puisse célébrer la messe dans la chapelle, avec un calice et des vêtements sacerdotaux spéciaux qu'il devra apporter avec lui en se rendant à la maladière.

La fréquentation avec d'autres femmes que la sienne était interdite au lépreux. La femme du guidon elle-même ne devait entrer dans les chambres des malades que pour leurs besoins et nécessités et expédier la chose brièvement. Les lépreux des deux sexes étaient rigoureusement séparés et ne se rencontraient qu'à la chapelle. Le lépreux marié pouvait dans sa propre chambre, ou dans quelque lieu voisin et honnête, rendre ou exiger le devoir conjugal, mais ne devait pas pour ce motif rester plus de trois heures de jour hors de la maladière. Des absences plus prolongées ne pouvaient être permises que par le curé pour affaires importantes. Si le permissionnaire rentrait après l'heure fixée, il était passible de deux jours de prison et de trois gros d'amende.

Les lépreux célibataires étaient tenus de vivre en chasteté et continence. Toute infraction à cet article était punie de vingt-quatre heures de prison avec un seul repas de pain et d'eau et de deux gros d'amende.

Les assemblées des lépreux pour délibérer sur les affaires de la maison ou pour élire le guidon et le prieur se faisaient dans la chapelle en forme de chapitre conventuel convoqué au son de la cloche. Le curé, le guidon ou le

prieur proposaient le cas, puis chacun donnait son vote en ordre en commençant par le curé, selon Dieu et sa conscience. Si quelque lépreux était à ce point infirme qu'il ne pût se rendre au chapitre, il devait confier son vote à l'un de ses collègues. Tout semble indiquer que les lépreuses votaient comme les lépreux. Ainsi ces deux progrès encore contestés, le vote des femmes et le vote par procuration, étaient déjà régulièrement appliqués dans les maladières de Genève au XVe siècle.

Le chapitre ne pouvait rien changer à l'ordonnance de réformation, il n'avait pas pouvoir constituant. Toutes les fois qu'il s'agissait de réceptions de biens ou d'affaires ayant des conséquences pécuniaires, le trésorier devait être présent.

Chaque année, au jour de la fête du patron de la maladière, le chapitre nommait ou confirmait un des lépreux en qualité de prieur. Celui-ci, qui devait être dûment qualifié, gardait les clefs de la caisse des écritures, du grenier à blé et du trone. Il devait d'une part noter les manquements commis par le curé dans ses fonctions sacerdotales, d'autre part rapporter au curé les délits et infractions commis par les lépreux et le guidon.

Une chambre avec lit garni était destinée aux lépreux passants qui ne pouvaient y séjourner plus de vingt-quatre heures. Le guidon, aux frais de la fabrique, leur y fournissait du pain en suffisance ainsi que la paille et le foin à leur monture s'ils en avaient une.

Quand un lépreux était à l'article de la mort, ses confrères ou le guidon devaient y veiller et envoyer chercher le curé. Les lépreux étaient généralement enterrés dans le cimetière à côté de leur chapelle. Ceux de Carouge pouvaient, s'ils en exprimaient le désir, être portés

au cimetière de Saint-Léger où un coin leur était réservé.

Deux femmes, qui étaient tantôt les femmes des guidons, tantôt des quêteuses choisies d'un commun accord par le trésorier, les deux curés et les deux guidons étaient chargées de recueillir les aumônes dans la ville. Chaque matin, l'une d'elles devait se rendre devant l'église du couvent de Plainpalais et l'autre devant celle du couvent de Rive avec une caisse devant elle, une image pendue au cou et une petite crécelle pour bien montrer que c'était là qu'on devait donner l'aumône aux lépreux. Chaque samedi, elles devaient faire le tour des boucheries pour recueillir la viande que les bouchers étaient tenus de donner pour les lépreux en compensation de la suppression d'une autre redevance. Le dimanche matin, avec un sac, une clochette et l'image de saint Lazare pendues au cou et un petit tronc à la main, elles avaient à parcourir toute la ville, demandant et quêtant diligemment du pain, de l'argent et autres pieuses aumônes pour les lépreux. Ce jour-là, elles devaient aussi aller recueillir les legs qui pouvaient avoir été faits en faveur des maladières par les gens morts dans la semaine.

Le samedi et le dimanche dans la soirée, les deux quêteuses avaient rendez-vous avec les guidons des deux maladières au Bourg-de-Four, vers la pierre des lépreux. Sur cette pierre, se faisait le partage égal entre les deux maisons du pain, de la viande et des autres comestibles, après que les guidons avaient donné aux quêteuses, avec discrétion, la portion due pour leurs peines. L'argent, les vêtements et autres objets pouvant se conserver n'étaient partagés que tous les trois mois dans la maison du trésorier.

Ce fonctionnaire, choisi parmi les bourgeois riches et

considérés de la ville était élù ou confirmé chaque année par les deux curés, le procureur des pauvres et les guidons.

Chaque maladière avait en outre devant sa porte un tronc à côté duquel chaque lépreux faisait tour à tour sa semaine, demandant l'aumône aux passants. Le produit du tronc allait sans partage à la maladière où il se trouvait.

La répartition des dons et autres revenus de la maladière était faite par le guidon chaque semaine pour les comestibles usuels, tous les trois mois pour le blé, l'argent, les vêtements et les meubles. A chaque partage trimestriel, le guidon prélevait d'abord les honoraires du curé, en argent et en blé; il divisait ensuite le reste entre les lépreux par portions égales, gardant une portion pour la fabrique et la dernière pour lui.

Si les revenus dépassaient les besoins, le surplus était placé en rentes en blé ou en immeubles par le trésorier sur l'avis conforme des curés, du procureur des pauvres et des guidons, et avec l'assentiment des lépreux.

Telles sont, trop longuement résumées, les principales dispositions de l'ordonnance de réformation de l'évêque de Corneto. Pour que les lépreux en fussent bien instruits, un exemplaire in lingua romancia, ce qui semble vouloir dire en patois, était attaché à une chaine dans leur chapelle et leur était lu entièrement une fois l'an après l'élection du guidon.

Ce règlement eut longtemps force de loi. En 1506, les syndics obtinrent du pape Jules II une bulle qui le confirmait pleinement et, même après la Réformation, on y eut recours et on tàcha de remettre en vigueur celles de ses prescriptions temporelles qui pouvaient cadrer avec le nouvel ordre de choses.

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