Obrazy na stronie
PDF
ePub

Tous deux excellaient dans toutes ces branches des connaissances humaines, et personne n'était plus capable de réaliser une œuvre dont le double but était la plus grande gloire de Dieu par la pratique des vertus, le bien public par le service du prince. Deux considérations surtout les portaient en effet à fonder cet établissement l'une, que rien, suivant eux, ne contribuait davantage à introduire et entretenir le désordre dans une ville que l'oisiveté; l'autre, qu'Annecy possédait un bon nombre d'esprits solides et d'un grand savoir, qui, faute d'être aidés, ne faisaient pas dans les sciences tous les progrès dont ils étaient capables. Toutes choses étant disposées pour l'exécution de ce dessein, les deux amis en écrivirent au duc de Savoie pour le prier d'accorder à l'académie naissante quelques priviléges qui fussent un encouragement pour les membres qui la composeraient. Ce prince accueillit leur requête avec la plus grande faveur, et le duc de Nemours, Henri de Savoie, accepta le titre de protecteur et de président de la compagnie, à condition d'avoir pour assesseurs l'évêque de Genève et le président Favre, le premier, chargé de la philosophie et de la théologie; le second, de la jurisprudence; tous les deux ensemble, des belles-lettres et des sciences. Les statuts furent dressés, on choisit des sujets capables de faire

1 Ces statuts font partie des Mélanges (t. V des Œuvres), sous le titre : Constitutions de l'Académie Florimontane. Le lieu désigné pour les assemblées, dit Charles-Auguste, fut la maison du président Favre, et on y tenait chaque semaine une séance publique dont l'objet était réglé d'avance. On y distribuait des prix et des couronnes aux meilleures compositions de tout genre: c'est la première société littéraire qui ait existé en deçà des Alpes. Saint François de Sales fit l'ouverture des séances par une harangue qui ne nous a pas été conservée, et il y tint dans la suite la place du président. On choisit les meilleurs professeurs que l'on put trouver. Le cours de mathématiques commença cette année par l'arithmétique de Jacques Pelletier du Mans et les éléments d'Euclide. On y enseigna encore la sphère, la géographie, l'hydrographie, l'art de naviguer et la théorie de la musique. Dans la suite on y donna des leçons sur la grammaire française, et l'on s'appliqua avec beaucoup de soin à approfondir les règles de cette langue. Ce fut là que Vaugelas, jeune encore, et qui était le second fils du président Favre, commença

honneur à la compagnie, et le saint prélat fit l'ouverture de la première séance par un discours des plus éloquents; le président Favre fit l'ouverture de la seconde. François avait donné à cette nouvelle académie le nom gracieux d'Académie Florimontane; son emblème non moins gracieux fut un oranger en fleurs avec cette devise: Flores fructusque perennes! Fleurs et fruits immortels des monts de la Savoie.

à cultiver ce genre d'études dans lequel il s'est rendu célèbre. Le nombre des académiciens fut fixé à quarante. La réputation que cette académie acquit bientôt, attira à Annecy plusieurs gens de lettres, non-seulement du comté du Genevois, mais encore de toute la Savoie.

LIVRE VII

(1607-1622)

SOMMAIRE

CHAPITRE I. Jubilé de Thonon. Réforme de l'abbaye d'Abondance. François prononce l'oraison funèbre de la duchesse de Nemours. II. Consulté par le Pape, il donne son sentiment sur la question de Auxiliis. Mort de Jeanne de Sales, sa plus jeune sœur. Il prêche le carème à Rumilly. III. François, accusé à Rome, se justifie. Réforme de l'abbaye de Puy-d'Orbe. Il est pris pour arbitre afin de régler avec l'évêque de Bâle le différend existant entre l'archiduc d'Autriche et le clergé de la Franche-Comté à l'occasion des Salines. Ses actes à Faverney, à Dôle, à Besançon, à Baume et à Salins. — IV. Publication de l'Introduction à la Vie dévote, et conversions nouvelles parmi les hérétiques. Réforme de l'abbaye de Talloires. V. François sacre Jean-Pierre Camus évêque de Belley. Intimité qui s'établit entre les deux prélats. - VI. François se rend à Gex en traversant Genève. Mort de Mme de Boisy, sa mère. Fondation de l'ordre de la Visitation. - VII. Le saint évêque ramène à la vraie foi de l'Eglise romaine Mme de Saint-Cergues et d'autres nombreux hérétiques. Il sollicite auprès du Saint-Siége l'érection d'un évêché à Chambéry, et la canonisation d'Amédée IX, troisième duc de Savoie. Son opinion dans la fameuse question du pouvoir des Papes sur le temporel des rois. Ses sentiments à l'égard de la France qui montrent qu'il était Français par le cœur, dès son vivant, avant de le devenir au ciel par la nationalité. — VIII. Pèlerinage de François de Sales au tombeau de saint Charles Borromée à Milan. Il participe à la cérémonie de l'exposition du Saint-Suaire à Turin. Il établit les Barnabites à Annecy et à Thonon, et les Chartreux à Ripaille. Miracles opérés par lui. Nouveaux actes de sa constante sollicitude pour le progrès du catholicisme dans le pays de Gex. IX. Visite de François de Sales à l'archevêque de Lyon. Il se rend au sacre de l'évêque de Sion, et prèche dans la cathédrale de cette ville. Fermes représentations qu'il adresse au duc de Nemours au sujet de calomnies par lesquelles on s'efforçait de le noircir dans l'esprit de ce prince avec deux de ses frères. X. Le saint évêque nomme grand vicaire Jean-François de Sales. Voyage de Mgr de Marquemont à Annecy. Nouveaux traits de charité de François. Il contribue à l'introduction de l'industrie de la soie en Savoie. Siége d'Annecy

par le duc de Nemours. XI. Publication du Traité de l'amour de Dieu. François prêche l'Avent et le Carême à Grenoble. Conversion du duc de Lesdiguières. Effets des Sermons de l'évêque de Genève. Sa dévotion à saint François de Paule. — XII. Mort du jeune baron et de la baronne de Thorens, frère et belle-sœur de François ; son affliction. Il écrit deux lettres au Pape, l'une en faveur de religieuses pauvres, l'autre au sujet de la béatification de Juvenal Ancina. Un second Avent et un second Carême à Grenoble. François visite la Grande-Chartreuse. Un peintre parvient à faire le portrait du saint prélat. Sa lettre au jésuite Lessius. Il accompagne à Paris le cardinal de Savoie. Fondation du premier monastère de la Visitation de Paris. Ses nombreux sermons et ses travaux sans relâche dans cette capitale. XIII. Ses rapports avec saint Vincent de Paul. Maladie occasionnée par l'excès de ses fatigues. 11 refuse la coadjutorerie de Paris. Son retour à Annecy, et nomination de son frère Jean-François à la dignité de coadjuteur de l'évêque de Genève. Constitutions des ermites du mont Voiron. François, après avoir refusé de nouveau le siége de Paris avec le cardinalat, refuse l'archevêché de Turin. Il initie son frère à toutes les fonctions du ministère épiscopal. Installation des Bernardines réformées à Rumilly, et translation des reliques de Saint-Germain à l'abbaye de Talloires. Education de Charles-Auguste de Sales. - · XIV. Premières années de l'ordre de la Visitation. Les lettres de saint François de Sales. Le livre des Entretiens spirituels. - XV. François préside à Pignerol le chapitre des Feuillants. Plans d'ouvrages considérables qu'il se proposait de composer. Il se rend à Turin, où il fait une grave maladie. Rentré dans Annecy, il reçoit du duc de Savoie l'ordre de partir pour Avignon. Dans son retour de cette ville, il est frappé d'apoplexie, à Lyon, le 27 décembre 1622. Mort et obsèques de saint François de Sales; sa canonisation. Lettre du clergé de France au pape Urbain VIII. Travaux et mort de sainte Chantal. Ce que deviennent les corps des deux fondateurs de la Visitation pendant les orages révolutionnaires de 1793. Première translation solennelle des saintes reliques en 1806, et nouvelle translation encore plus solennelle, en 1826. Le cœur de saint François de Sales à Venise. Influence que ce grand évêque a exercée sur le dix-septième siècle.

CHAPITRE Ior

Jubilé de Thonon. Réforme de l'abbaye d'Abondance. François prononce l'oraison funèbre de la duchesse de Nemours.

François avait à peine fini ses prédications du carême et terminé tout ce qui concernait l'établissement de l'académie

d'Annecy, qu'il partit pour Thonon, afin d'y célébrer un jubilé que le père Chérubin, lors d'un nouveau voyage à Rome, avait obtenu du Saint-Siége en faveur de cette ville. Ce religieux avait été appelé dans la capitale du monde chrétien. par le Pape Paul V, qui le nommait commissaire apostolique dans le Valais, et il en rapporta le bref qui nommait l'évêque de Genève commissaire apostolique pour la Sainte-Maison, gouvernée jusqu'à cette époque par le Père Chérubin1. François se montra de nouveau dans ce jubilé ce qu'il avait toujours paru jusqu'alors, un apôtre consumé de zèle, et il s'appliqua à sanctifier encore les bons, à convertir les pécheurs, à ranimer la ferveur de ceux qui s'étaient laissés aller au relâchement. Une confrérie du Saint-Sacrement et de la sainte Vierge qui y avait été autrefois érigée était tombée dans un oubli presque total par suite des malheurs de la guerre. François, en la rétablissant, inscrivit son nom en tète de ceux des nouveaux confrères, et son exemple eut une force telle qu'un nombre considérable de fidèles se présenta aussitôt pour faire partie de la confrérie. Pensant que rien ne serait plus propre à exciter la ferveur des nouveaux confrères qu'une visite aux reliques de saint Claude qui étaient l'objet de la vénération singulière des peuples, il les mena lui-même à ce pèlerinage. « Ce fut un beau spectacle, dit un biographe contemporain, de voir cette procession de plus de quatre cents personnes, marchant à pied dans le plus bel ordre, la Croix en tête, chantant des psaumes et des cantiques, et traversant à l'aller et au retour le pays de Vaud tout peuplé d'hérétiques, le territoire de la république de Genève et de Berne, sans qué personne osât les troubler dans leurs pieux exercices. De distance en distance, on faisait halte pour ne pas se fatiguer par une marche trop prolongée; et François profitait de ces instants de repos pour adresser à ses chers enfants des exhortations pleines d'onction et de piété, de sorte que tous les moments

'Lettres inédites, tome VI des Euvres complètes, page 596.

α

« PoprzedniaDalej »