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seul professeur qui est le chef responsable de son « département », et qui en répartit la tâche commune entre ses associés, assistants, << instructeurs » et «<lecteurs ». « Je ne conçois pas de meilleur moyen, plus simple ni plus sûr, d'imprimer aux études en tout genre une féconde unité de direction. >> M. Brunetière estime que cette organisation a été empruntée à notre École pratique des hautes études. Et cela est possible quant au fait. Mais il faut remonter plus haut pour en découvrir la première idée. C'est au XIIIe siècle que l'organisation de l'Université par collèges avec maîtres-régents responsables, bacheliers, titulaires ou aspirants, lecteurs publics et privés a eu son apogée. Et cette organisation, dont le principe s'est conservé dans certaines écoles catholiques et spécialement dans nos collèges dominicains, ne demande qu'à revivre au grand jour, si la liberté et les moyens d'existence lui sont donnés.

Il n'est pas jusqu'aux séries de lectures, que M. Brunetière trouve si original d'avoir accomplies en Amérique, qui ne soient représentées au moyen âge dans ces séries de disputes solennelles que les Maîtres les plus fameux s'en allaient soulever tantôt à Bologne, tantôt à Paris, à Cologne, à Rome... sur les questions à l'ordre du jour.

Au fond, et il s'en félicite, c'est du vieux-neuf que M. Brunetière nous a rapporté de l'Est américain. Les Universités style moderne lui ont paru faire exception. Peut-être faudrait-il en rabattre. Sur ce terrain comme sur tant d'autres, la Tradition a possédé le meilleur du présent. « C'est ici comme ailleurs », écrivait un jour du fond du Zanguebar l'écrivain distingué que la Congrégation du Saint-Esprit a mis à sa tête. Ce mot est bien la morale qui ressort du premier récit de voyage de l'illustre critique. Aujourd'hui comme autrefois, pourrait-on ajouter..., même en fait d'améliorations universitaires.

(Revue des Deux Mondes, 1er novembre.,
A. G.

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES

GEORGES GOYAU (Léon Grégoire). Autour du catholicisme social.
In-12, 324 pages; librairie Perrin et Cle, 1897.

Du 1er mai 1894 au 1er avril 1897, M. G. Goyau avait publié dans la revue La Quinzaine de remarquables articles sous la rubrique Les idées et les faits. Il vient de les réunir pour la plupart, sous le titre : Autour du catholicisme social, en y ajoutant, non pas un, comme il le dit

H

par distraction, mais deux articles parus ailleurs Anne de Xainctonge (Revue du Clergé français, 15 déc. 1896) et l'Election de M. de Mun (Figaro, 2 avril 1897).

Ce n'est pas de la littérature, c'est de l'action.

M. Goyau est un de ces catholiques qui proclament « qu'il y a une question sociale ». Il n'a guère de respect pour les doctrines classiques de l'économie politique; il n'a pas la moindre vénération pour les principes individualistes du libéralisme; et il ne craint point de choquer les préjugés égoïstes de ceux qui, s'intitulant «< conservateurs »>, songent surtout à <«< conserver » l'état social dont ils profitent et les privilèges dont ils jouissent. Les seuls dogmes qu'il accepte, ce sont les dogmes catholiques; les seuls principes qu'il prétende appliquer, ce sont ceux qu'il puise dans les encycliques pontificales, et surtout dans l'encyclique Rerum novarum; les seuls conseils qu'il veuille suivre, ce sont ceux que Léon XIII a donnés et donne aux catholiques français (cf. Le Pape, les catholiques et la question sociale, publié sous le pseudonyme de Léon Grégoire).

M. Goyau veut élargir à la fois le sens des deux mots justice et charité. La justice pour lui, ce n'est point la justice répressive, règle de fer qui régit les rapports des hommes entre eux, loi aveugle et sourde qui permet d'user égoïstement de ses droits, ou d'en abuser jusqu'à la férocité; c'est une justice plus large qui ne dépend point des institutions mais les doit dominer, qui s'indigne des misères imméritées et des inégalités injustifiées, qui veut corriger les défauts de notre état social, et même les iniquités du sort. La charité, ce n'est point l'aumône, palliatif humiliant pour le pauvre et inefficace à guérir réellement les maux dont il souffre; c'est, dans la plénitude de son sens latin, la caritas, l'amour du prochain, amour actif, effort sincère pour améliorer d'une façon durable le sort des humbles et des malheureux.

Voilà les deux conceptions d'où découle tout le système des idées sociales de M. Goyau; et elles forment le fonds de tous ses articles. Aussi ces pages écrites au jour le jour, selon la succession des événements et les caprices de l'actualité, forment cependant un tout harmonieux : ce n'est pas un recueil factice, c'est un livre; ce ne sont plus des articles détachés, ce sont des chapitres cohérents.

M. Goyau pose d'abord des Définitions et des distinctions: à propos de la Rome de M. Zola, il montre que le catholicisme social, forme nouvelle de doctrines anciennes, n'a rien de commun avec le néo-catholicisme, forme passagère de certaines tendances plus généreuses que durables; à propos du beau livre de M. de Pressensé sur le cardinal Manning, il montre que le catholicisme social fait partie intégrante du vrai, du complet catholicisme ; à propos des ouvrages de MM. Yves Guyot et Léon

Bourgeois, il montre que l'altruisme du premier est un mythe, la solidarité du second un postulat, et que la fraternité n'existe que dans et par le catholicisme seul,

La définition du catholicisme social ainsi posée et rendue claire, M. Goyau démontre l'accord intime, ou pour mieux dire l'unité de cette doctrine et de la doctrine catholique, en étudiant les aspects sociaux du catholicisme. Le phénomène de la communion des saints lui sert à prouver que, jusque dans le domaine du surnaturel lui-même, la religion établit une solidarité effective, une coopération perpétuelle entre les hommes; le Livre de l'Apôtre de Mme de la Girennerie, qu'en vertu de cette solidarité, tout homme a le devoir d'agir pour le bien, l'obligation d'être apôtre. Et pour ceux qui douteraient encore ou de la possibilité ou de l'utilité d'agir, M. Goyau apporte des exemples. Il eût pu choisir celui de Mme de la Girennerie elle-même, mais il a préféré en chercher un tout semblable d'ailleurs dans l'histoire du passé, et nous raconte la vie et l'œuvre d'Anne de Xainctonge; plus près de nous enfin, il nous désigne deux autres modèles à suivre, deux prêtres, le curé de la VieilleLoye et le curé de la Chapelle-Montligeon.

Faut-il d'ailleurs un supplément de preuves pour confirmer encore la vérité de sa doctrine, M. Goyau la fournit en montrant que les disciples du « pape social » ne restent point isolés dans leurs efforts, et que de toutes parts se manifestent des Convergences vers le catholicisme social. L'école saint-simonienne avait déjà commencé à poser la question sociale, et même, elle n'avait point hésité à se tourner déjà vers l'Eglise; de nos jours, en France, l'évolution du parti modéré semble l'amener à deux pas du parti catholique, tandis que le catholicisme et le radicalisme en Italie semblent sur le point, sinon de coopérer, du moins de s'unir. Que dis-je, il n'y a pas seulement des promesses ou des espérances, il y a des faits : la disgrâce de l'économie libérale que manifestent les délibérations de nos Chambres, les progrès de l'idée d'organisation dont témoigne la création de l'Office central des institutions charitables.

Enfin, comme encouragement à l'action, M. Goyau dresse le bilan du catholicisme social en 1896-1897: la colonne de l'actif est bien remplie ce sont les congrès catholiques de Padoue et de Fiesole, avec leurs études sur l'usine et l'impôt progressif, le congrès lyonnais de la démocratie chrétienne avec ses travaux sur l'usine et la représentation professionnelle, et l'élection de M. de Mun triomphe de l'ouvrier de la première heure qui semble promettre le succès à ceux qui sont venus après lui travailler dans le même champ, et qui permet à M. Goyau, dans ses Conclusions, d'espérer la victoire.

Tel est ce livre, livre de foi et de charité, livre de bonne foi et d'action

surtout. L'auteur assurément fait bon marché de ses mérites littéraires, et pourtant ils sont réels: la fermeté, la netteté, l'heureuse subtilité de la pensée, l'ardeur de la conviction, s'y expriment dans un style énergique et vivant, un peu téméraire parfois comme les idées qu'il traduit le paraîtront sans doute à beaucoup. C'est un livre à lire,

ne fût-ce que pour le discuter : et il en vaut la peine.

GAMM.

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LA SOCIOLOGIE, par AUGUSTE COMTE. (Résumé par Emile Rigolage, agrégé de l'Université, ingénieur des arts et manufactures. 1 vol. in-8° de la Bibliothèque de philosophie contemporaine, Paris. Félix Alcan.) Il y a vingt et un ans que M. Rigolage a commencé ce résumé: voyageur au pays de l'éducation, comme il dit lui-même, il cherchait une méthode éducative et scolaire. Comte seul la lui a donnée. Et, par reconnaissance de ce don précieux, par intérêt pour « les deux principales applications de la sociologie », l'éducation et la politique, M. Rigolage ne veut pas mourir sans que ce résumé, pieusement élaboré, n'ait rendu la doctrine du Maître plus compréhensible et plus facilement applicable. « A présent, dit-il, j'ai terminé mon voyage, j'ai pris ma retraite; mais mon but est resté le même et, si la maladie ou la mort m'empêche de l'atteindre, du moins je le ferai apercevoir à d'autres qui, plus jeunes ou plus heureux, y toucheront sans doute un jour ». Le Résumé sera donc un document pour l'histoire de la doctrine positiviste; mais nous doutons beaucoup qu'il devienne jamais le livre de chevet des éducateurs et des politiques de l'avenir. La méthode de Comte ne suffit plus ni aux savants, ni aux philosophes : c'est une méthode bâtarde, hybride, qui postule indûment d'imposer à la philosophie les abstentions de la science expérimentale; c'est l'interdiction a priori de tout a priori. Savants et philosophes n'en veulent plus; sous ce rapport les idées ont bien changé depuis cette année 1876 où M. Rigolage commençait de résumer Comte. Ecoutez plutôt cette voix d'outre-tombe, Comte lui-même, disant de son œuvre : « J'ai osé la concevoir et l'exécuter pour compléter celle qui fut entreprise par Bacon et Descartes. Dégagée de la métaphysique autant que de la théologie et parvenue à l'état pleinement positif, mon intelligence s'efforce d'attirer au même point tous les penseurs énergiques » (p. 470). Les « penseurs énergiques », bien convaincus du néant du positivisme, s'engagent plus que jamais aujourd'hui dans la métaphysique, voire même dans la théologie.

M. B. S:

G. TARDE: La Graphologie.

L'article de M. Tarde à propos de la quatrième édition du livre de M. Crépieux-Jamin: « l'Ecriture et le Caractère», contient des vues intéressantes et de fines remarques. Pourtant l'analyse n'est pas assez poussée sur bien des points; de là des erreurs, et des indications dont l'exactitude laisse à désirer.

Dans une première partie, M. T. compare l'écriture au corps humain et à ses mouvements, comme moyens d'expression, et note certaines conditions qui influent sur le degré de signification de l'écriture. Les observations de M.T. sur ce dernier point sont une preuve de sa sagacité, mais les raisons qu'il apporte pour donner au graphisme la supériorité sur le visage et sur le corps pour l'étude du caractère, ne semblent pas suffisamment appuyées, ni prises d'un point de vue assez large. Je ne vois pas que l'avantage reste à l'écriture, parce que les mouvements de la plume sont plus libres vis-à-vis du type traditionnel que ceux du visage dont la direction et l'amplitude sont déterminées dans une certaine mesure par la forme héréditaire. En effet plus l'être qu'on étudie offre de fixité, de nécessité, plus il est facile d'en avoir la science; et si les manifestations libres ont une plus grande richesse d'expression, l'interprétation en est aussi beaucoup plus difficile.

D'ailleurs la comparaison aurait dù être plus étendue; il eût fallu joindre les formes aux mouvements, car il y a un lien intime entre ces deux espèces de signes. Dans l'écriture, le tracé propre à chaque lettre qui est sa forme est effectué par le mouvement de la plume et des doigts. Dans le corps humain, la forme est le résultat d'abord du mouvement qui aboutit à la génération, puis de ceux d'augmentation et de diminution dont l'origine n'est pas purement extérieure, et de même qu'on ne peut qualifier les types humains de conventionnels, de même ceux des écritures ne le sont pas absolument, comme l'insinuent les faits apportés par M. Tarde dans sa troisième partie.

Dans cette dernière partie, M. T. signale aux graphologues l'importance de la psychologie, comme nous l'avons fait nous-mêmes à propos du livre de M. Crépieux-Jamin (cf. Revue Thomiste, juillet 1897), mais il y aurait beaucoup à dire sur celle qu'il propose. Assez exacte dans sa division de l'âme en « versant judiciaire » et «< versant volontaire » elle méconnaît la nature de l'intelligence, en faisant de la croyance et non de l'intuition son acte principal et donne une idée très incomplète de la volonté en y indiquant seulement le désir, sans parler ni des passions, ni des difficultés que crée la liberté pour la valeur des signes. M. T. n'a pas évité, non plus,le défaut commun des graphologues de rattacher une forme ou un

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