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L'HOMME RELIGIEUX.

de ses membres avec honneur (1). Il dit en parlant aux Hébreux: Tâchez d'avoir la paix avec tout le monde, et de conserver la sainteté, c'est-à-dire la pureté, sans laquelle personne ne verra Dieu (2). La chasteté est unie à la sagesse; elles sont comme deux sœurs étroitement liées; c'est ainsi qu'elles apparurent à 'saint Grégoire de Nazianze lorsqu'il étudiait à Athènes, et lui promirent de l'accompagner, de l'assister, de le protéger, de l'enseigner et de le conduire au ciel (3). La sagesse, dit le Saint-Esprit, n'entre pas dans une ame malveillante, elle n'habite pas dans un corps assujetti au péché (4).

4o Enfin la chasteté a ses douceurs et fait goûter de si grandes délices qu'elles surpassent incomparablement toutes les voluptés des sens. Les ames parfaitement chastes et pures ont plus de joie dans leur chasteté, dans le mépris qu'elles font de tous les plaisirs du monde, que les hommes sensuels dans toutes leurs voluptés. Il serait bien étrange que ce qui souille pût délecter davantage que la pureté, et le vice plus réjouir que la vertu. Les saints et innocens plaisirs que la chasteté verse dans une ame sont si grands et si délicieux, que l'abbé Chœremon dit dans Cassien: Celui qui n'en a pas l'expérience ne saurait avoir aucune pensée pour le concevoir; et celui qui les a éprouvés ne saurait trouver aucune parole pour

(1) Hæc est voluntas Dei sanctificatio vestra, ut abstineatis vos à fornicatione; ut sciat unusquisque vas suum possidere in sanctificatione et honore. 1. Thes. 4. 3.

(2) Pacem sequimini cum omnibus et sanctimoniam, sine qua nemo videbit Deum. Hebr 12. 14.

(3) S. Greg. Naz. carm. de calamit. animæ suæ. Rufin in prolog. apol.

(4) In malevolam animam non introibit sapientia, nec habitabit in corpore subdito peccatis. Sap. 1. 4.

DU VOEU DE CHASTETÉ.

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les faire comprendre (1). Celui qui a mangé du miel ne peut en faire comprendre la douceur à celui qui n'en a jamais goûté. Le fruit de la chasteté, dit saint Bernard, est la suavité et le plaisir (2). N'est-ce pas un bonheur d'être affranchi des soins qu'entraînent les unions terrestres ? Quelle félicité, dit saint Jérôme, de n'être pas esclave d'une femme ou d'un époux, mais de Jésus-Christ: de ne point servir la chair, mais l'esprit ? Celui qui s'attache à Dieu, dit saint Paul, devient un même esprit avec lui (3).

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Concluons par ces belles paroles de saint Ephrem, qui renferment presque tout ce que nous avons dit : « O chasteté, mère de la sainte dilection, vie angélique! « ô chasteté, qui rends les hommes semblables aux anges! ô chasteté, qui comble de joie celui qui te possède, et lui donne des ailes pour voler au ciel! ô chasteté, source des plaisirs spirituels, qui dissipe << les tristesses et les ennuis! ô chasteté, qui ralentit « l'ardeur des passions et délivre l'ame des troubles! ô chasteté, véritable chariot d'Elie, qui transporte celui qui t'aime dans les profondeurs des choses cé

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lestes et divines! ô chasteté, tu es comme une rose

qui fleurit entre l'ame et le corps, et qui remplit l'être

<< tout entier de son odeur suave (4). »

(1) Ut vim lætitiæ hujus inexpertus mente non valet percipere, ita explicare sermone non valebit expertus. Collat. 42. cap. 13.

(2) Fructus castitatis est suavitas. Serm. 22. ad Soror.

(3) Quanta felicitas non uxoris servum esse, sed Christi? non carni servire, sed spiritui? qui enim adhæret Deo, unus spiritus est. Lib. 1. contr. Jovin.

(4) O castitas mater dilectionis et angelicæ vitæ ratio! ô castilas, quæ homines Angelis similes reddis! ô castitas, quæ cor possidentis te lætificas, et animæ ad cælestia alas adjungis! ò castitas, quæ spirituale gaudium paris, et mærorem aufers! ô castitas, quæ passiones minuis

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Saint Ephrem vient de nous dire que la chasteté est une belle rose ; c'est une rose, il est vrai, mais qui n'est pas sans épines. Les Pères nous ont appris, dit Cassien, que ce combat contre la chair est beaucoup plus long que les autres, qu'il est bien plus terrible, et que peu de personnes ont entièrement vaincu ce formidable adversaire (1). Les autres vices, dit saint Jérôme, ont `leur temps, mais celui de la concupiscence est si profondément enraciné en nous, qu'il peut durer toujours et nous donner toujours à combattre. « Il n'appartient qu'à « une grande vertu, à la vigilance la plus minutieuse, de surmonter ce à quoi notre nature nous porte avec violence; de vivre dans la chair sans la chair, d'être

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- tous les jours aux prises avec soi-même, et d'être obligé de regarder continuellement avec les yeux d'Argus, cet ennemi domestique (2). Saint Augustin

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et animum à perturbationibus liberas! ô castitas currus spiritualis, possessorem tuum in sublime evehens! ô castitas, quæ rosæ instar in medio animæ et corporis efflorescis, et domum universam fragrantià comples! Ser. de Cast.

(1) Juxta traditionem patrum adversus spiritum fornicationis certamen est longum præ cæteris ac diuturnum, et perpaucis ad purum devictum, immane bellum. Lib. 6. cap. 1.

(2) Grandis virtutis est et sollicita vigilantiæ superare quod natus sis; in carne non carnaliter vivere, tecum pugnare quotidie et inclusum hostem Argi, ut fabulæ ferunt, centum oculis observare. Epist. 10 ad Furiam.

avoue qu'entre tous les combats que les Chrétiens ont à soutenir pour leur salut, les plus longs, les plus rudes et les plus dangereux, sont ceux que l'on a à soutenir pour la conservation de la chasteté; car cette vertu a un furieux ennemi auquel il faut résister tous les jours, et dont il faut avoir toujours peur (1).

Puisque la chasteté est si difficile à conserver, il faut veiller avec grand soin et faire de grands efforts pour ne pas avoir le malheur de la perdre. Si on ne peut acquérir les choses précieuses et les conserver sans soins et sans travail, il est bien juste que le précieux trésor de la chasteté coûte quelque chose, et ne s'acquière et ne se conserve pas sans peine. Plus la chasteté est céleste et sublime, plus le prix en est grand; plus elle doit être fortement combattue par ses ennemis, et plus il y a de danger de la perdre (2). Choisissons donc des moyens efficaces le premier, sans aucun doute, c'est la prière.

Ce moyen est absolument nécessaire pour acquérir et conserver cette vertu. Elle est au dessus de notre nature, nous ne pouvons donc pas la trouver en nous, ni l'obtenir par nos propres forces, il faut nécessairement qu'elle nous vienne d'ailleurs, il faut qu'elle découle d'une source plus noble et d'un principe supérieur à la nature humaine. J'ai connu, dit le Sage, que je ne pouvais posséder la continence si Dieu ne me la donnait (3). Si nous avons à cœur, dit Cassien, de surmonter l'esprit immonde, il ne faut pas nous appuyer sur nos

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(1) Gravem namque fortita est castitas inimicum, cui semper resistitur quotidie, et semper timetur. De honest. mul. cap. 2.

(2) Quantum sublime cælesteque est præmium castitatis tanto gravioribus adversariorum insidiis lacessitur. Lib. 6. c. 12.

(3) Scivi quoniam aliter non possem esse continens, nisi Deus det. Şap. 8. 21.

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L'HOMME RELIGIEUX.

propres forces, notre nature ne saurait remporter la « victoire dans un tel combat; hâtons-nous de demander à Dieu son secours. Il faut que l'ame soit bien assurée qu'elle sera toujours attaquée par le vice, jusqu'à ce qu'elle connaisse qu'elle besoin de ce secours de Dieu, qu'elle soutiendra un combat qui est au dessus « de ses forces, et qu'elle sera toujours vaincue si Dieu ne vient à son aide (1). Comment un homme mortel, revêtu d'un corps, peut-il sortir de ce corps et s'élever au dessus de la nature? comment peut-il dans une «< chair fragile ne pas ressentir les aiguillons de la chair? a Il est donc impossible que l'homme s'élève par lui« même à une chose si sublime et si céleste; à moins « que la grâce de Dieu ne l'arrache à la boue qui le retient et lui fasse prendre son essor (2)

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Aucun de ceux qui s'appliquent à acquérir la chasteté, et qui l'ont acquise en quelque manière, dit saint Jean Climaque, ne peut rapporter à lui-même la jouissance du bonheur qu'il éprouve dans cette vertu; surmonter la nature est une action qui surpasse la nature : si la nature est surmontée, il est certain que la force est venue de l'auteur de la nature. Celui qui croit par ses efforts terrasser un ennemi comme la concupiscence, res

(1) Si nobis cordi est, hunc immundissimum spiritum superare, non nostris viribus confidentes, hoc enim industria humana perficere non prævalet, sed opitulatione Domini festinemus. Tamdiu namque hoc vitio animam necesse est impugnari, nec se bellum gerere supra vires suas agnoscat, nec labore vel studio proprio victoriam obtinere se posse, nisi fuerit Domini auxilio ac protectione suffulta. Lib. 6. c. 5.

(2) Quodammodo enim exire de carne est in corpore commorantem, et ultra naturam est fragili carne circumdatum carnis aculeos non sentire, et idcirco impossibile est hominem suis, ut ita dixerim, pennis ad tam præcelsum cælesteque præmium subvolare, nisi cum gratia Domini de terræ cæno munere evexerit castitatis.

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