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La perfection de la charité et de l'union intime avec Dieu est donc la fin vers laquelle doit tendre le Religieux avec toute la force de son ame, telle est sa vocation. Mais par quels moyens peut-il parvenir à cette fin? Les docteurs répondent, avec S. Thomas (1), par ses vœux et par ses règles; ce sont les moyens dont il doit nécessairement se servir pour atteindre à cette fim, c'est la seule voie qui puisse le conduire à son but. Dans la première conférence de Cassien, l'abbé Moyse fait un excellent discours sur ce sujet à ses religieux: Vous savez, leur dit-il, que dans tous les arts et toutes les vocations les hommes ont toujours un but et des moyens pour y arriver; le laboureur, le marchand, le soldat se proposent une fin; pour y parvenir ils souffrent beaucoup de choses sans se rebuter. « Et nous aussi, ajoute le saint abbé : « Nous avons dans la vie religieuse et notre but «< et notre fin; c'est pour cela que nous supportons, je «< ne dis pas seulement sans lassitude, mais avec joie, « tous les travaux qui nous y conduisent; les jeûnes ne « nous ennuyent pas ; la longueur des veilles nous plaît; «la lecture et la méditation des saintes Ecritures ne << sauraient nous rassasier, nous en sommes toujours af« famés; le travail continuel, la nudité, la privation de

toutes choses, l'horreur même de cette profonde solitude « ne nous effrayent pas; c'est pour arriver à ce but que « vous vous êtes arrachés à l'affection de vos parens, que vous avez abandonné votre patrie et foulé aux pieds toutes les délices du monde (2).

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(1) S. Thom. q. citata a. 2. in c. Sanchez, loco cit. n. 2. Layman lib. 4. tract. 5. cap. 1. cap. 2.

(2) Habet ergo et nostra professio, 'scopum proprium ac finem suum, pro quo labores cunctos non solum infatigabiliter, verùm etiam gratanter impendimus, ob quem nos jejuniorum inedia non fatigat, vigiliarum

Il ajoute plus bas, en parlant de cette noble fin et des moyens d'y parvenir, les paroles de saint Thomas : nous sommes obligés par notre vocation de fuir les péchés, de pratiquer les vertus, c'est-à-dire d'observer nos vœux, d'être fidèles à nos règles, afin que par ces degrés nous puissions monter au sommet de la charité (1). Voilà quelles sont les obligations du religieux; il doit désirer d'être parfait, d'arriver à toute la profondeur de la charité et de l'union intime avec Dieu; il doit donc prendre les moyens qui peuvent l'aider à les remplir; ces moyens sont l'observation exacte des vœux et des règles; s'il néglige de les employer il se rend coupable d'une faute plus grave qu'il ne croit. Sachez bien, dit « l'abbé Pinufius dans Cassien, que ce n'est point un péché léger de faire des choses imparfaites lorsque « l'on a embrassé une vie qui doit nous conduire à la perfection. Mais quel est ce péché? Est-il mortel? «Est-il véniel? En quoi consiste-t-il? Il est mortel, disent les docteurs (2), si le religieux n'a pas le désir d'arriver à la perfection de son état, de prendre les moyens d'y parvenir, car, quoiqu'il ne soit pas obligé d'être parfait dans l'instant même, il doit, comme nous l'avons dit, n'avoir pas de volonté contraire, il ne doit pas se déclarer l'ennemi de la perfection; il irait alors

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lassitudo defectat, lectio ac meditatio scripturarum continuata non satiat, labor etiam incessabilis, nuditasque ac omnium rerum privatio, horror quoque hujus altissimæ solitudinis non deterrent; ob quem parentum sprevistis affectum et patrium solum ac delicias mundi despexistis. Cap. 7.

(1) Ut ad perfectionem charitatis istis gradibus possimus ascendere. 2. 2. q. 86. a. 1.

(2) Non leve noveris esse peccatum, perfectionem professum quempiam, ea quæ sunt imperfecta sectari. Lib. 4. de institut. Renunt. cap. 38.

contre le but de sa vocation, paraître religieux sans l'être; mais Dieu le voit.

Si le religieux a un véritable dessein de tendre à la perfection de la vie religieuse, s'il est fidèle à tout ce qui est commandé sous peine de péché mortel, mais qu'il s'inquiète un peu moins de ce qui ne lui est pas commandé avec tant de rigueur, que ce ne soit pas par un mépris formel de la règle, mais par une certaine lâcheté et négligence, parce qu'il hésite trop à se perfectionner; sa faute est vénielle; c'est là une véritable faute, parce qu'il doit témoigner plus de zèle et d'ardeur pour sa perfection; il ne doit pas rebuter le Saint-Esprit qui le porte sans cesse à la vertu, et à se rendre meilleur (1). Si le religieux se voit devant Dieu, il comprend tout cela.

Mais quelle est la source du péché ? Nous n'entrerons pas ici dans des questions inutiles (2). Le religieux a promis solennellement d'observer les vœux et les règles, il l'a fait volontairement et librement, la source est dans la promesse.

Concluons de tout cela, que par l'essence de son état le religieux est obligé par sa vocation de tendre à la perfection, qu'il est obligé de travailler de toutes ses forces, en tout temps, en tous lieux, en toutes circonstances pour arriver à cette heureuse fin. Son œil ne peut se porter que sur ce seul et unique objet : l'unique moyen sont les vœux et les règles ! Nous allons parler des règles.

(1) Sanchez, loco cit. n. 10.

(2) Ibid. n. 9.

CHAPITRE III.

DES RÈGLES.

Je dirai peu de mots sur cette matière, j'en ai parlé ailleurs (1).

Le religieux étant obligé par état de tendre à la perfection du Christianisme, c'est-à-dire, à la perfection de la charité et à l'union intime avec Dieu, il faut qu'il ait des moyens propres et efficaces pour arriver à cette fin; autrement comment pourrait-il le faire par lui-même ? L'oiseau ne vole pas sans ailes, le quadrupède ne peut marcher sans pieds. Le Religieux est pourvu de tous ces moyens par les trois vœux et les règles de son institut.

Les vœux de pauvreté, de chasteté, d'obéissance le disposent parfaitement à acquérir l'union intime avec Dieu, puisque ces vœux détruisent tout ce qui peut être un obstacle à cette union : le désir des richesses est détruit par le vœu de pauvreté, la concupiscence de la chair et des plaisirs sensuels, par celui de chasteté, l'amour de son indépendance et de sa liberté, par celui d'obéissance.

Les règles sont les aides et les secours qui nous sont donnés, pour observer les vœux avec plus de facilité, Les vœux forment l'essence de l'état religieux, c'est en cela que consiste sa vie, c'est pour cela qu'ils sont les mêmes dans tous les ordres. Mais les règles sont différentes; tous les ordres tendent à l'accomplissement des

(1) Au ch. 5 de la 2. P. du Livre 3 de la Connaissance et de l'amour de N. S.

trois vœux, se proposent la fin générale de la vie religieuse, la charité parfaite et l'union intime avec Dieu; mais par des voies différentes, et prennent dans la fin générale une fin particulière. Ainsi dans la Compagnie de Jésus (1) et quelques autres on joint à l'amour de Dieu la charité la plas ardente pour le prochain. Chaque ordre religieux adapte ses règles à la fin particulière qui est toujours renfermée dans la règle générale.

Les premiers religieux, ceux qui reçurent du ciel cette noble pensée d'abandonner tout ce que le monde aime et estime pour s'attacher uniquement à Dieu, dressaient eux-mêmes la règle qu'ils voulaient observer, et ne suivaient dans leurs exercices de piété que leurs propres lumières.

C'est ainsi qu'en usaient les Moines de ces fameuses solitudes de Sceté et de Nitrie en Egypte, comme le remarque Sozomène (2). St. Epiphane appelle cela se faire une manière de vivre à soi. Les uns, dit-il (3), s'abstiennent de chair, les autres d'oeufs, les autres de poisson; il en est qui couchent sur la dure, tous se conduisent suivant leur idée particulière.

Mais, comme il est très facile de s'égarer quand on n'a d'autre guide que soi-même, quelques uns prenaient les ordres et les règlemens des plus anciens. Ainsi Sozomène rapporte (4) que saint Macaire d'Alexandrie se fit bien quelques règles, mais qu'il en avait d'autres qu'il avait prises de ses maîtres.

Tout ce qui va à Dieu se perfectionne peu à peu; on commença à établir des lois et des constitutions pour régler et conduire tout un Monastère. Un superieur fut

(1) Summ. constitut. n. 2.
(2) Sozom., lib. 3. cap. 13.
(4) Loco citato.

(3) S. Epiphan., lib. 3. c. ult.

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