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JOURNAL

LITTÉRAIRE ET SCIENTIFIQUE.

Omne tulit punclum qui miscuit utile dulci.

HoR. de Arte Poetica.

TOME I.

M. BIBAUD,

EDITEUR ET PROPRIETAIRE.

MONTRÉAL :

DE L'IMPRIMERIE DE JOHN LOVELL.

1842-43.

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EXTRAIT DU PROSPECTUS.

L'utilité, nous dirions presque, la nécessité d'un journal scientifique et littéraire, publié en langue française dans ce pays, n'a pas besoin d'être prouvée; elle doit être profondément sentie et universellement reconnue. Si l'on n'en jugeait que par l'apparence, sans se rappeller en même temps, combien elle est quelquefois trompeuse, on pourrait être tenté de croire que l'instruction, le goût des arts, l'amour des sciences et des lettres, sont à peuprès nuls parmi la population Canadienne d'origine française, et que, sous ce rapport, cette population est infiniment au-dessous de celle qui parle la langue anglaise.

En effet, tandis que la population Canadienne de naissance ou d'extraction britannique possède, outre un grand nombre de feuilles politiques, plusieurs journaux uniquement destinés à la propagation des arts, des lettres et des sciences, il ne s'en publie pas un seul de cette dernière espèce en langue française, pas un seul du moins qui ne se borne pas à de simples extraits, ou à un genre particulier de littérature. Un journal qui se compose principalement de pièces originales (nous voulons dire canadiennes), ou du moins nouvelles, sur les différentes branches des sciences et des lettres; de morceaux ayant immédiatement rapport à l'état passé ou présent de notre pays, nous a longtemps manqué, et nous manque encore aujourd'hui.

C'est pour suppléer à ce défaut, pour subvenir à ce besoin de la population franco-canadienne, qu'on forme la présente entreprise; et on la forme dans la résolution de faire en sorte que le plan d'après lequel le journal sera conduit réponde au titre qui lui est donné. Une partie

des articles dont il se remplira sera fournie par l'histoire générale, la biographie et la bibliographie du Canada; d'autres seront puisés dans la topographie, la géologie, la minéralogie, la botanique et la zoologie de ce pays et des états voisins: les progrès de l'industrie, de l'agriculture et du commerce procureront des matériaux qu'on s'efforcera de mettre en œuvre de la manière la plus profitable pour les lecteurs : les inventions nouvelles, les découvertes scientifiques ne seront pas oubliées; et les questions légales, médicales, ou autres, ne seront pas regardées comme étrangères au journal, pourvu que les discussions, ou les contestations, s'il y en a, soient conduites avec la modération et la décence convenables. Il n'est pas nécessaire d'avertir que rien de contraire à la religion, à la morale, ou aux convenances sociales, n'y sera admis. Quelques pages de l'ENCYCLOPEDIE CANADIENNE seront égayées par des extraits de ce que les journaux littéraires étrangers offriront de plus intéressant, ainsi que par les anecdotes et bons-mots du jour : enfin, pour que le journal ne laisse rien à désirer, du côté de l'utilité et de l'agrément, on insèrera, à la fin de chaque numéro, un résumé succinct des nouvelles étrangères les plus importantes, et, sous le tître de Chronique Canadienne, ou autre, un précis des incidens les plus remarquables qui auront eu lieu dans la province, durant le mois dont ce numéro portera la date, et qui, pour cet effet, ne sera publié qu'au commencement du mois suivant.

TOME I.

MARS, 1842.

LA LANGUE FRANCAISE.

No. 1.

Il ne s'agira pas, dans cet article, de la beauté, de l'énergie, de l'abondance de la langue française: quelques unes des langues modernes peuvent être préférables à la nôtre par quelqu'un de ces endroits on peut dire, par exemple, que l'italienne est plus douce, l'espagnole plus sonore, l'anglaise plus énergique, l'allemande plus abondante. Mais si ceux qui ne parlent pas naturellement le français veulent mettre de côté les préjugés de l'enfance et de l'habitude, ils conviendront que cet idiôme l'emporte sur tous ceux que parlent les peuples de l'Europe, par la réunion d'un plus grand nombre de qualités estimables, surtout par sa clarté et par la régularité de sa marche, si l'on peut ainsi s'exprimer. Mais, comme nous venons de le dire, ce n'est pas du mérite intrinsèque de la langue française que nous voulons entretenir nos lecteurs ; en faire l'éloge sous ce rapport, ce serait peine perdue, ou chose entièrement superflue, pour ceux qui l'ont assez étudiée pour la bien entendre et la bien parler, comme pour ceux qui la tiennent de leurs ancêtres. Nous nous contenterons d'exposer succintement les faits qui prouvent combien elle est estimée et répandue dans les pays étrangers.

C'est un fait généralement connu que le français est la langue que l'on parle dans presque toutes les cours du continent de l'Europe, et c'est un honneur qui n'est accordé à aucune autre ; car si, chez quelques uns des souverains de l'Italie, l'idiôme du pays est employé dans la conversation, on ne le voit nulle part en usage dans les cours de l'Allemagne et des royaumes du Nord. Si à la cour de St. James, on se sert ordinairement de l'idiôme natal, et non du français, comme à celles de Turin, de Vienne, de Munich, de la Haie, de Berlin, de Petersbourg, &c., du moins il n'est pas un seigneur, et presque pas un gentilhomme anglais qui ne puisse lire et parler ce dernier.

Le français est la langue généralement employée dans les conférences diplomatiques, les négociations et les traités d'alliance ou de paix que font entr'elles les puissances européennes. Le roi des Pays-Bas, choisi pour arbitre entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis d'Amérique, donne sa décision en français, quoique l'anglais soit le langage naturel et national des deux puissances auxquelles il s'adresse.

Si l'empereur ALEXANDRE de Russie harangue la diète de Pologne, à Varsovie, ce n'est pas en polonais ou en russe qu'il le fait, mais en français.

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