» Je t'exile du ciel jufqu'au moment » où Elife aura comblé tes vœux ». J'efpérois vous fléchir, ajouta le Sylphe, ou plutôt je voulois vous complaire: j'ai fubi cette dure loi. Jugez à préfent fi je vous aime & fi vous devez m'en punir. Ce difcours mit Elife au défefpoir. O le plus imprudent & le plus cruel des efprits aériens! s'écria-t-elle qu'avez vous fait, & à quelle extrémité me réduifez-vous? Volange frémit en voyant les yeux de fa femme se remplir de larmes. Pourquoi ne m'avoir pas confultée? ajouta-t-elle. Etoitce pour ma honte ou pour votre fupplice que je défirois de vous voir; & quel que fût ce défir, avez-vous pu penfer qu'il l'emportât fur ce que je vous dois, & fur ce que je me dois à moi-même ? Je vous aime, Valoé, je' vous le dis encore; & s'il ne falloit que ma vie pour réparer les maux que je vous fais, vous n'auriez plus à vous plaindre. Mais ma vertu m'est plus chère que ma vie & que mon amour. Volange treffaillit de joie. Je ne puis vous blâmer, lui dit-il, d'un excès de délicateffe. Mais voyez combien je reffemble à Volange : c'est presque lui, ou plutôt c'est lui-même qui tombe à vos pieds, qui vous adore, & qui vous demande le prix du plus fidèle & du plus tendre amour. — Non, vous avez beau lui reffembler, vous n'êtes pas lui, & c'est à lui feul qu'est dû le prix que vous me demandez. Levezyous, éloignez-vous de moi, ne me revoyez de la vie. Laiffez-moi, vous dis-je. Êtes vous infensé ? Quelle est cette joie insultante que je vois briller dans vos yeux? Auriez-vous l'audace d'efpérer encore?-Oui, j'efpère, ma chère Elife, que tu ne vivras que pour moi. Ah! c'est le comble de l'ou trage!-Ecoute. -- Non, je ne veux rien entendre. défarmer. Ce mot doit être un éter- que c'est moi 4 Juftine interrogée avoua tout, & on la fit jurer que Valoé n'étoit que Volange. C'est à préfent, dit Elife en se jetant dans les bras de fon époux, c'est à préfent que je fuis enchantée ; & j'espère que la mort feule détruira cet enchantement. NON, Madame, difoit l'Abbé de Châteauneuf à la vieille Marquife de Lifban, je ne puis croire que ce qu'on appelle vertu dans une femme foit auffi rare qu'on le dit, & je gagerois, fans aller plus loin, que vous avez toujours été fage. Ma foi, mon cher Abbé, peu s'en faut que je ne vous dife comme Agnès: Ne gagez pas. -Perdrois-je ?-Non, vous gagneriez; mais de fi peu, fi peu de chofe, que franchement ce n'eft pas la peine de s'en vanter. C'eft-à-dire, Madame, que votre fageffe a couru des rifques.-Hélas! oui; & plus d'une fois je l'ai vue au moment de faire naufrage. Heureufement la voilà au port. Ah! Marquife, confiez-moi le récit de ces aventures.-Volontiers: nous fommes dans l'âge où l'on n'a plus rien à diffimuler; & ma jeuneffe eft fi loin de |