Ausone naquit à Bordeaux, l'an 309 de Jésus-Christ, et fut élevé au consulat en 379 par l'empereur Valentinien Ier, qui l'avait choisi pour précepteur de son fils Gratien. Il mourut en 394. Esprit vif et brillant, mais peu solide et peu sérieux, ce poète ne sut renoncer ni aux préjugés de son éducation, ni aux habitudes qu'il avait contractées au sein du paganisme, et toujours il nourrit au fond de son âme un sentiment secret de résistance au christianisme. Peut-être ne futil chrétien que parce que la cour était chrétienne. Sa correspondance avec saint Paulin de Nole, le plus illustre de ses disciples, est du plus haut intérêt; elle nous fait assister à la lutte du paganisme et du christianisme au sein même des familles, et c'est à ce titre seul que nous la faisons entrer dans ce recueil. S'adressant à un élève qui le révérait et le chérissait comme son protecteur et son père, Ausone, pour le dissuader de se consacrer entièrement à JésusChrist, emploie toutes les séductions de la poésie et de l'amitié, et se surpasse lui-même de l'aveu des plus grands critiques. Nous verrons comment saint Paulin put soutenir un si rude assaut. 1. Ausonius Paulinos. Discutimus, Pauline, jugum, quod certa fovebat 3 Quod per tam longam seriem volventibus annis Saint Paulin s'était retiré en Espagne vers la fin de l'année 389. Ausone, désolé de se voir abandonné par son disciple, lui écrivit de Bordeaux quatre lettres successives dont trois seulement sont parvenues jusqu'à nous. Nous donnons des extraits de ces trois lettres. Jugum, quod certa... temperies, ce joug de l'amitié 10 15 qu'un juste tempérament entretenait. 3 Fabula, mauvais bruit, calomnie. Utrique parentes, »> nos deux pères, ton père et le mien. Nec tam promptum, » et il n'est pas si aisé. 6 Pari, camarade. Construisezunum sodalem perferre ge tata duobus.» Impie, Pirithoo disjungere Thesea posses, Quantum oblectamen populi, quæ vota bonorum 20 Verba loquebantur: jam nomina nostra parabant Cedebat Pylades: Phrygii quoque gloria Nisi 4 Jam minor, et promissa obiens vadimonia Damon. 25 Nos studiis animisque iisdem, miracula cunctis Te sinė, jam nullus gratâ vice provenit annus; Agnoscis-ne tuam, Ponti dulcissime, culpam? 6 30 35 Aut præter dominum vibrabilis ornus Achillei, Sit procul iste metus. Certa est fiducia nobis, 1 Accurre, ô nostrum decus, ô mea maxima cura ; II. Ausonius 4 Paulino. Proxima quæ nostræ fuerat querimonia chartæ, 5 Devotus teneas, perstas in lege tacendi. Non licet? Anne pudet, si quis tibi jure paterno Sit metus; et morem missæ acceptæque salutis 1 « Dum tu... senectus. C'était en 390 qu'Ausone écrivait cette lettre; il avait alors 81 ans, saint Paulin n'était àgé que de 46 ans. 2 « Tarbellica arva. >> Les champs de Tarbelles et Hébromagus sont situés dans le midi de la Gaule que saint Paulin devait nécessairement traverser pour se rendre du lieu de sa retraite à Bordeaux. 45 50 55 60 65 « Proditor. » Ausone suppose 3 «Fratris.» Saint Paulin ici que saint Paulin a auprès de lui 1 2 Aut quæsitoris gravior censura timetur, 5 III. Ausonius Paulino suo s. Quarta tibi hæc notos detexit epistola questus, 8 70 75 50 85 90 93 a Tanaquil. Tanaquil, femme de Tarquin le Superbe, exerçait un grand empire sur son époux : c'est pourquoi Ausone donne ce nom à Thérasie qu'il soupçonnait de lui aliéner l'esprit de saint Paulin. 6 Ausone écrivit en 392 à saint Paulin une troisième lettre qui ne nous est point parvenue. Il lui envoya en 393 une quatrième lettre dont nous donnons l'extrait suivant. 7 manières, 8 9 « Residem,» indifférent. Cessatio,» paresse, froideur. « Vocalis imago, l'écho. Littorei clamant scopuli, dant murmura rivi, Quumque suis loquitur tremulum coma pinea ventis. Quis prohibet Salve atque Vale brevitate paratâ · a OEbaliis, de Laconie. Ce pays était ainsi appelé du nom 'OEbalus, un de ses premiers Jois. 2 << Amyclis, Amyelès. Ville dans laquelle Pythagore prescrivit un silence de cinq ans à ses disciples. 3 «Sigaleon Ægyptius, l'Egyptien Sigaléon, nommé aussi Harpocrate, était le dieu du silence. 4. Obnixùm » est pris adverbialement. 100 105 110 115 120 mots de cinq syllabes. Ces fins de vers choqueront sans doute certaines oreilles délicates. Mais d'où provient cette délicatesse outrée, si ce n'est de ce que les poètes du siècle d'Auguste n'ont pas procédé ainsi? Ausone, qui avait aussi l'oreille très-délicate, et qui se préoccupait beaucoup de l'harmonie du style, aurait-il employé de pareilles terminaisons, si elles avaient été réellement choquantes ? C Sic... refert. Construisez : Fama refert Pythagoram renaB « Officiorum. » Les poètes tum docuisse sic, c'est-à-dire, chrétiens finissent quelquefois brevitatem comem esse. »> leurs vers hexamètres par des 7 Est vel Non, oui ou non |